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31 décembre 2017 7 31 /12 /décembre /2017 14:25

Alexandra Grimal (saxophone ténor, voix, appeaux, composition), Sylvain Daniel (guitare basse), Éric Échampard (batterie)

Orléans, 2017

ONJ Records JF005 /l'autre distribution


 

Cette suite d'environ 55 minutes est une sorte d'opéra de poche pour trois musicien(ne)s, issu(e)s de l'Orchestre National de Jazz dirigé par Olivier Benoit. Elle avait été créée en avril 2016 dans le cadre du festival 'Jazz Or Jazz' d'Orléans, et commandée par la scène Nationale d'Orléans, dans les locaux de laquelle elle a été enregistrée l'année suivante pour ce disque (publié avec le concours du label MFA-Musique Française d'Aujord'hui). La forme générale mêle des espaces écrits et des plages improvisées, entre lesquels le tuilage se fait en une sorte de fondu-enchaîné. La voix d'Alexandra Grimal paraît être à la fois le déclencheur du discours et de la forme, tandis que les appeaux, les effets électroniques, et surtout le saxophone en seraient la substance matérielle, l'horizon concret où l'abstraction prend corps. Le dialogue entre les trois instrumentistes est primordial, même si le projet d'ensemble et le matériau composé sont l'apport de la saxophoniste-vocaliste-compositrice. C'est une sorte de glissement progressif vers un horizon mobile, présumé insaisissable, et que pourtant rejoint la cohérence de la forme en mouvement. Le(s) langage(s) est (sont) celui du jazz contemporain envisagé comme une forme de la musique dite contemporaine. Il suffit de saisir le fil : plus que de narration, il est ici question d'élan(s), de dérive(s), d'aventure perceptive et émotionnelle. Le titre Kankū fait référence à une figure d'art martial qui signifie 'contempler le ciel'. C'est à la fois un geste, une action, et une sorte de chemin de vie dont cette musique pourrait être l'expression, si exprimer était le but. Mais l'enjeu paraît autre : simplement susciter une forme inédite de la beauté ; une beauté faite de sérénité et de tension mêlées. En progressant vers le terme, on rencontre la mémoire d'un jazz libre, ouvert, pétri d'urgence et de références, qui se résoudra en une mélopée chromatique et tendue, jusqu'à un silence brutal. Et après 3 minutes et 33 secondes de ce silence mystérieux surgira la voix d'Alexandra Grimal, décrivant ce qu'est une supernova : en l'occurrence ce qui n'est déjà plus à l'instant où les yeux le découvrent. Beauté fugitive en somme, presque le projet d'un art idéal....

Xavier Prévost

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