Klarthe 2018 ( www.klarthe.com)
Olivier Calmel (p, compos, dir), Johann Renard (vl), Frederic Eymard (alto), Xavier Phillips (cello), Clément Petit ( cello), Antoine Banville (dms)
Une merveille qui vous arrive comme ça, sans prévenir, un petit bijou qui vous est offert.
Olivier Calmel dont je suis travail depuis quelques années avait insisté pour que, dans la masse de disque que je reçois, j’écoute attentivement celui qu’il venait de m’envoyer. Je crois qu’il en était un peu fier, mais sans insistance. Avec classe. J’avoue, j’ai un peu traîné, perdu dans d’autres urgences, de celles qui font le buzz du moment. J’ai donc traîné mais pas au point de laisser filer le concert qu’il donnera le 25 mai au Triton. A ma décharge j’avoue que j’avais un peu perdu de vue Olivier qui était depuis quelques années focalisé sur la composition de musiques de films. J’avais pourtant de ses nouvelles parfois par d’autres musiciens orientés aux aussi sur cette forme d’écriture.
Mais un jour j’ai sorti cet album et je l’ai fait tourner sur ma platine.
Et là, comment vous dire, c’est un peu comme si je venais de frotter la lampe d’Alladin. Comme si un génie venu de terres lointaines mais me semblant si proches en même temps, envahissait mon salon.
Cet album qu’il dédie à Roger Calmel ( célèbre compositeur, son père peut-être je ne sais pas), est un moment de grâce absolu. Un ensemble de 15 pièces dédiées à 5 cordes ( piano, violon, alto et double violoncelle) auquel s’adjoint Antoine Banville à la batterie et pour qui l’exercice demande autant de finesse que de subtilité.
Il y a de la vie dans cet album et dans ces compositions. Une vie et une âme qui vibrent, qui dansent, qui gémissent et rient.
J’ai pensé tout de suite à John Zorn version The Dreamers. Mais c’est réducteur ( quoique). Parce que dans cet album qui évolue sans cesse on y trouve toutes les inspirations qui fondent ce qu’Olivier Calmel à 44 ans est devenu comme musicien et comme compositeur très reconnu. Il s’approprie à peu près tous les codes, de la musique classique au jazz au klezmer dans un heureux syncrétisime.
Les cordes ici s’enlacent et se tiennent ensemble franchissant des frontières ( Le hongrois qui déraille) des montagnes orientales, dominant des sommets, comme s’élevant au ciel ( Submergés). Ces cordes à qui Olivier Calmel fait tout faire qu’il s’agisse de dérouler des tapis volants, de ponctuer des lignes de basse, de faire chanter les mélodies ou de se donner des sinuosités de mélismes maîtrisés.
Il faut atteindre un vrai niveau de perfection pour composer ainsi, pour arranger de la sorte, pour diriger avec un tel sens de l’équilibre en lassant s’installer l’émotion et surtout l’imaginaire qu’il convie. Les plages de cet album s’effeuillent comme on lirait les chapitres d’un livre dont on ne s’arrache pas. Il y a , il est vrai de l’urgence dans cet album.
« Immateriel » n’est pas seulement hors du temps, il est aussi hors sol.
Jean-Marc Gelin