Ramona Horvath (p), Nicolas Rageau (cb)
L'été c'est bien ! Il y a des albums que l'on reçoit durant l'année et que l'on met de côté en se disant qu'on les écoutera quand on aura le temps. Et l'été on a le temps.
C'est comme ça que j'ai découvert une petite pépite à laquelle je n'avais pas vraiment prêté attention : l'album de la pianiste Ramona Horvath en duo avec le contrebassite Nicolas Rageau.
Et finalement cet album, ben voyez-vous il ne m'a pas quitté de toutes les vacances !
Je le connais par coeur. J'en connais toutes les modulations et tous les renversements d'accord. Totalement sous le charme.
Ramona Horvath est une pianiste roumaine sortie du conservatoire de Bucarest il y a quelques années et qui, depuis 2010 a fait de Paris sa terre d’élection. Ramona n'est certes pas une révolutionnaire du jazz et son coeur penche du côté des classiques : Duke Ellington et Billy Strayhorn, Bill Evans, peut être aussi Chet Baker et tous les standards de Broadway. Je jurerai même qu'elle a dû écouter un jour le remarquable et ignoré Phineas Newborn.
Nicolas Rageau, on le connait mieux. Vieux briscard de la scène jazz nourri aux mêmes influences avec une petite touche de NHOP ( enfin, je crois), il fut un moment un pilier du Smalls, le petit club mythique de New-York.
Tous les deux se sont trouvés. Remarquablement trouvés.
Leur album on l'a dit ne révolutionne rien. Mais Dieu que c'est bon !
Avec une rare élégance, un phrasé aérien et léger, un sens de la réinvention des thèmes (avec fidélité toutefois), et un placement rythmique d'enfer, Ramona Horvath respire le jazz. Il faut l'entendre caresser le swing au fond du temps sur le Sucrier Velours (Duke), le faire légèrement rebondir sur la pulse profonde de Nicolas sur Drop me off in Harlem (Duke toujours dont Ella livra une bien belle version). Prenez cette version enjouée de Pennies From Heaven lancée sur une fausse piste avec l'intro de But not for me et sur laquelle Ramona fait preuve de la légèreté du swing. Ou encore ce beau thème de Bill Evans, My Romance réharmonisé à sa façon sans jamais trahir.
Ramona et Nicolas s'écoutent, s'attendent, se devancent avec une parfaire osmose.
Il faut écouter leur communion sur Esmeralda et cette musicalité de Ni comas Rageau qui fait chanter sa contrebasse.
Au final cet album est un pur moment de plaisir de bout en bout.
On vous l'a dit, il respire le jazz !
Jean-Marc Gelin