Les films Don Pauvros de La Manche, Hôtel Innova, Les Mi-Grateurs, Tué Mon Amour, Catalogue à Bruxelles, Mateau Rouge & Joe McPhee, Vive Campus
Jean François Pauvros (guitare), avec Tony Hymas, Keiji Haino, Arto Lindsay, Charles Pennequin, François Causse, Jac Berrocal, Gilbert Artman, Makoto Sato, Jean-Marc Foussat, Thierry Madiot....
Coffret de 2 DVD EDV 1489, La Huit / http://www.lahuit.com/
Sept films, du court-métrage Hôtel Innova de 1984 au long-métrage Don Pauvros de La Manche de 2015 en passant par des moyens-métrages, captations de concerts et portrait en images du Studio Campus (dont Jean-François Pauvros fut l'un des artisans majeurs) alors menacé d'expulsion.
Lillois de 1967 à 1980, puis à temps partiel de 1993 à 1999, votre serviteur a croisé la longue silhouette de Pauvros, d'abord dans sa vie d'étudiant lillois habitué de différents cafés de la place Philippe Le Bon où se fomentait le gauchisme pré et post soixante-huitard, et du côté des scènes de jazz et de musiques improvisées qu'il fréquentait en amateur nordiste, puis à Paris, et ailleurs, en professionnel-de-la-profession avant de redevenir l'amateur qu'il n'avait jamais cessé d'être. Souvenirs musicaux d'un concert, vers 1970, où le duo de Jean-François Pauvros avec le batteur Gaby Bizien assurait la première partie du groupe Perception (Didier Levallet, Yochk'O Seffer, Siegfried Kessler & Jean-My Truong). Pas étonnant que, quelques années plus tard, on retrouve Pauvros en duo avec Siggy Kessler (album «Phenix 14», 1978). Pauvros évoque d'ailleurs ce concert dans le livret qui accompagne ce double DVD, au cours d'une conversation d'une vingtaine de pages avec Guy Girard, Jean-Marc Rouget et Bertrand Loutte. L'occasion aussi pour moi d'évoquer le groupe de rock progressif Moebius, qui associait Pauvros et Bizien à l'Ami Philippe Deschepper. Mais c'est une autre histoire. Revenons, sans céder au chant des sirènes de la nostalgie, au sujet qui nous occupe.
D'abord, sur le DVD 1, entièrement occupé par Don Pauvros de La Manche (66 minutes, 2015), une sorte de portrait-bilan qui scelle une connivence de plusieurs décennies entre le cinéaste et le guitariste. Éclats de guitare sur une plage déserte en début et fin de film (là où la guitare s'éteint, étouffée par le sable dont le guitariste la recouvre....), et au fil des séquences le blues, une mélodie (et une improvisation) avec Tony Hymas, une visite chez l'ami luthier médecin des vieilles guitares, une variation musicale avec Xavier Boussiron et sa bande autour des images du film Plan 9 From Outer Space d'Ed Wood (et de quelques autres films), une longue conversation près de la mer sur la genèse de la musique, et sur les mystères du welsh rarebit, spécialité culinaire nordiste (importée du Pays de Galles), et de son influence sur la musique. Et une séquence de work in progress avec le poète Charles Pennequin, une digression sur les vertus psychotropes de l'électrocution, un duo avec Arto Lindsay, bref quelques belles tranches de vie, vie d'un musicien toujours inclassable, et dont chaque rebond nous surprend, et nous captive.
Le DVD 2 commence avec le court métrage Hôtel Innova (5 minutes, 1984), une sorte de diptyque où se succèdent une mélodie folky-bluesy et un rock'n'roll qui vire au free punk. Puis viennent Les Mi-Grateurs (42 minutes, 2000), périple musical écorché avec Keiji Haino ; Tué Mon Amour (3 minutes & 20 secondes, 2008), conversation littéraro-guitaristique avec le poète Charles Pennequin. Retour aux concerts avec Catalogue à Bruxelles (2 minutes & 45 secondes, 2016, filmé le 28 novembre 2007), une bouffée décapante de ce trio explosif ; Marteau Rouge & Joe McPhee (22 minutes, 2000, festival Musique Action, Vandœuvre-lès-Nancy, 1999), une grande bouffée de liberté musicale ; et pour conclure Vive Campus (15 minutes, 2000), une ode en forme de manifeste pour le Studio Campus, lieu de répétition et d'enregistrement du 11ème arrondissement de Paris (structure présidée par J.F. Pauvros), qui a vu passer Luther Allison, Joan Baez, Jean-Louis Aubert, mais aussi Éric Le Lann, Didier Lockwood, les Négresses Vertes, et des dizaines d'artistes du rock, de la chanson, du jazz, célèbres ou confidentiels. Comme une métaphore, en somme, d'un parcours d'absolue singularité : celui de Jean-François Pauvros.
Xavier Prévost
Un avant-ouïr et avant voir sur Vimeo