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29 avril 2020 3 29 /04 /avril /2020 16:50

Gaëtan Nicot (piano, composition), Pierrick Menuau (saxophone ténor), Sébastien Boisseau (contrebasse), Arnaud Lechantre (batterie)

invité sur une plage : Geoffroy Tamisier (trompette)

Sarzeau (Morbihan), 9-11 janvier 2019

Tinker Label 0119001 / Socadisc

 

Le pianiste nantais, aux multiples facettes, signe avec ce quartette une musique qui annonce la couleur et porte sa marque. Entouré de quelques-unes des plus fines gâchettes du Grand Ouest, il nous offre un disque finement pensé, dans ses compositions originales, majoritaires, comme dans les deux reprises : Ma plus belle histoire d'amour, de Barbara, et le très rare Moon Dreams, composé par celui qui était le pianiste de Glenn Miller à la fin des années 30, mais surtout immortalisé par Gil Evans pour Miles Davis dans les séances que l'on désignera plus tard sous le titre de «Birth of the Cool». Le traitement de ce thème par le quartette dans la plage conclusive du CD mérite une attention toute particulière, car il éclaire l'approche globale de la musique par le groupe. Traiter le motif avec la liberté d'expression propre au jazz, sans se laisser déborder par l'emphase mélodique du thème, et en jouant à fond l'interaction, la réactivté, et aussi quand il le faut la mise en suspens. Approche tout aussi personnelle pour la chanson de Barbara, déconstruite avec amour, en duo dans l'intro, pour magnifier, si c'est possible, sa force d'expression. Et puis laisser le jazz s'emparer doucement de ce standard qui paraît soudain une terre inexplorée.

Aucune malice de ma part dans le fait d'aborder ainsi le disque dont l'essentiel réside dans les compositions du pianiste leader. Cela permet, tout au contraire, de situer tout à la fois l'enjeu en territoire jazzistique, et d'ouvrir l'espace à l'expression individuelle dans le collectif, ressort essentiel d'un tel groupe.

L'intro rhapsodique du thème titre annonce la couleur, mais en trompe-l'œil : on entre en fait, après quelques mesures, dans le vif de l'interaction en quartette. Il y a là autant de retenue que d'expressivité, comme une revendication esthétique. Dans la deuxième plage, Koo-Cool, en quintette avec Geoffroy Tamisier, la composition et l'arrangement me replongent dans le souvenir des années 50, lorsque Gigi Gryce mêlait avec grand talent la pulsation de la Côte Est et les nuances qui faisaient mouche à l'Ouest. J'ai éprouvé en écoutant cette plage un genre de frisson qui m'avait déserté de longtemps. Et tout le disque est à l'aune de ce savant dosage, délicatesse et flamme, parole singulière et sens collectif constamment rejoué. Ici va souffler une légère brise latine, ailleurs on laisse donner le goût des ruptures et des surprises, mais en somme, de bout en bout, c'est une vraie réussite, et un vraiment bon groupe.

Xavier Prévost

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Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?2&v=_JeVf_Bn0qo

https://www.youtube.com/watch?v=h5g8eo7r1rc

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