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21 avril 2021 3 21 /04 /avril /2021 13:34
 MY CAT IS AN ALIEN/ PHILIPPE ROBERT     FREE JAZZ MANIFESTO

 

 

MY CAT IS AN ALIEN/ PHILIPPE ROBERT

FREE JAZZ MANIFESTO

 

Editions Lenka Lente Home / Editions Lenka lente

 

Free Jazz Manifesto de My Cat Is An Alien & Philippe Robert / Editions Lenka lente

 

En couverture de ce tout petit livre qui se glissera partout, SUN RA est une figure idéale pour évoquer une liste de 169 disques de free jazz, établie à trois voix, en anglais et français, par des connaisseurs de ces musiques libres, engagées, expérimentales. Le Français Philippe Robert (Agitation frites chez Lenka lente), animateur entre autre du blog Merzbo-Derek, a déjà publié des anthologies essentielles sur la Great Black Music. Derrière le mystérieux My Cat Is An Alien, se cache un tandem italien, Maurizio et Roberto Opalo, deux frères musiciens, artistes visuels et expérimentateurs de “Spiritual Noise” Même si nos trois complices font reposer leur choix, forcément subjectifs, sur la sensibilité, leur expertise n’est pas à mettre en doute.

Sélectionner autant de titres était une mission acceptée, tout à fait possible pour nos auteurs, dont l’angle d’attaque dresse une fresque originale en empruntant des chemins de traverse, des voies plus marginales, plus “underground”. Une autre histoire, moins glorieuse et surtout moins récupérée par le business des labels.

L’intérêt de cette liste alphabétique et non chronologique est de définir en quelques phrases l’essence de la musique du groupe choisi. Exercice périlleux mais impeccablement réalisé, le texte en français étant complété par la version anglaise!

C’est que les “grands” disques ont souvent une histoire, quand la musique était au centre d’une aventure intense, souvent personnelle et surtout rebelle. Certaines décennies comptent plus que d’autres : sur les cent soixante neuf références, les années soixante et soixante-dix surtout sont prédominantes, «parenthèse enchantée» sur le plan artistique, époque brûlante, très dure socialement et politiquement. L’un des plaisirs de ce livre est donc de réveiller une nostalgie latente. La réalité et les préoccupations de l’époque envahissent le décor : lutte pour les droits civiques, sexe, drogues mais par dessus tout, créativité intense.

Les auteurs replacent les pièces souvent manquantes, voire oubliées, explorant le spectre de la musique Free. Un parcours atypique pour une musique qui ne l’est pas moins. Une fois ce postulat de départ admis, on se laisse conduire, même si on est loin de connaître tous les musiciens cités. Se détachent des "bizarres" qui firent  parler d’eux depuis les lisières où ils s’étaient réfugiés. Des pistes nouvelles sont ainsi ouvertes à notre curiosité : Hartmut Geerken Amanita,  William Hooker Sextet, Stephen Horenstein, Griot Galaxy, G.L. Unit du free jazz suédois, Orangutang, Kaoru Abe Trio.

Il n’y a tout de même pas que des inconnus, puisque l'on retrouve  l'Art Ensemble, Albert Ayler (Holy Ghost ), Amiri Baraka, Gato Barbieri/Dollar Brand, Anthony Braxton,, Willem Breuker, Han Bennink, Marion Brown, Dave Burrell…Il y a même des évidences comme Carla Bley/Paul Haines ( le pharaonique Escalator over the Hill, évidemment, 1971) et des attendus, mais pas forcément avec le disque le plus connu : Coltrane figure avec Interstellar Space, ABC Impulse, enregistré cinq mois avant sa mort en 1967. Pour Sonny Rollins, c’est le Complete live at the Village Gate, de 1962, réédité en 2015, essentiel pour marquer la naissance du free jazz. Un jeune Joe Mc Phee autoproduit Trinity en 1972, alors qu’un autre de ses disques a été refusé par Blue Note! D’Ornette Coleman, nos amis retiennent Body Meta, en 1978, invention du free funk. Pour Archie Shepp/Philly Jo Jones, ils choisissent America, 1970, avec ce commentaire très juste “Aussi free soit-il, Archie Shepp n’oublie jamais blues et spiritual, seule manière d’honorer, entier, le chant originel afro-américain”. Michel Portal n’est pas oublié, pas pour le Châteauvallon 1972,  mais pour Our Meanings and Our Feelings, Pathé, 1969.

Quelques femmes tout de même sont dans la liste : Annette Peacock, Linda Sharrock (avec son mari!), Alice Coltrane with strings et la seule Française, Colette Magny (Répression au Chant du Monde, 1972) . Deux curiosités, les disques de François Tusques Alors Nosferatu combina un plan ingénieux et Occupé de Michel Potage, enregistrés respectivement en 1969 et en 1977, referont surface (tout arrive) en 2019 et 2011!

Ce petit guide éclaire ainsi assez précisément l’un des formidables mouvements musicaux du XXème siècle. Et les marges finissent par rejoindre leur centre, puisque dans cette musique free, on finira par relier  paritairement les électrons libres aux groupes plus connus qui ont marqué l’histoire de cette musique.

 

Sophie Chambon

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