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27 septembre 2021 1 27 /09 /septembre /2021 10:14

Premier concert de la saison 'Jazz sur le Vif' à la Maison de la Radio (.... et de la Musique). Le samedi 25 septembre 2021, à trois jours du trentième anniversaire de la disparition de Miles Davis, Arnaud Merlin a choisi d'inviter au studio 104 le sextette «Urbex Electric» du batteur (et compositeur) belge Antoine Pierre. Avec lui Jean-Paul Estiévenart (trompette), Renier Baas (guitare électrique), Bram De Looze (piano), Félix Zurstrassen (guitare basse) & Frédéric Malempré (percussions).

Urbex désigne habituellement l'exploration de sites urbains délaissés. Ici c'est plutôt la visite fervente d'un monument historique. Le groupe avait publié en 2020 un disque très remarqué, intitulé «Dispended» (Out Note Records), et inspiré par la musique du «Bitches Brew» de Miles. Un hommage au trompettiste, sans servilité aucune, mais qui se nourrit des métamorphoses alors opérées par cette œuvre phare. Le concert, comme le disque, esquive l'imitation mais offre une très belle synthèse de l'esprit, artistique et musical, qui prévalait alors. L'instrumentation est un peu différente (pas de sax, et un piano acoustique).

Pendant la première partie, le groupe joue trois titres du disque «Suspended», puis deux compositions issues du disque précédent intitulé «Sketches of Nowhere» (l'ombre de Miles, décidément, n'est pas loin). Et il conclut le set en revenant au plus récent album, avec Obsession. La musique circule entre les musiciens. Certes la trompette de Jean-Paul Estiévenart occupe une place privilégiée, sans surjouer le modèle ; mais quantité d'événements surviennent, dialogues entre les instrumentistes, reprise au vol d'un fragment d'improvisation pour évoluer vers un unisson.... Le guitariste, qui nourrit la pulsation d'accords au son très mat, sort régulièrement de sa réserve avec éclat. Le percussionniste, entre dialogue et soulignement, alimente en permanence le caractère vivant de la musique. Le batteur, en parfait chef d'orchestre, conduit le débat, mais sans envahir l'espace musical. Et le pianiste participe constamment aux échanges, même s'il ne pratique pas l'ostentation. Il faudra attendre la fin du concert pour qu'une partie du public (la plus distraite) prenne conscience de l'importance de sa contribution. Les auditeurs ont hélas parfois besoin que l'on surligne le message pour le porter à leur pleine conscience....

Après l'entracte, retour en quintette, pour un thème sans le trompettiste, et qui nous vaudra un beau dialogue entre piano et percussion, ainsi qu' un solo de guitare étincelant. Puis le sextette se reforme. Si au fil du concert, fidèle à l'esprit de l'univers évoqué (le Miles de 1969) le solos étaient intégrés dans le flux permanent de tuilages et d'échanges, le groupe offrira vers la fin un déroulement plus conforme au rituel du jazz : solos successifs bien balisés. Une partie du public, qui tendait à applaudir à tout moment sur des propositions inachevées, se trouve soudain plus à son aise. Cela dit l'écoute fut fervente et l'enthousiasme très explicite. Et votre serviteur partagea l'euphorie du public.

En rappel le groupe quitta les compositions d'Antoine Pierre pour une reprise : une composition de Joe Zawinul que Miles avait enregistrée en 1968, et beaucoup jouée dans ses tournées de 1970-71, mais dont l'original ne fut publié qu'en 1981 avec une foule de séances étalées de 1960 à 1970. Il s'agit de Directions, thème issu de l'album éponyme. Très belle conclusion pour un concert vraiment épatant !

Xavier Prévost

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Ce concert sera diffusé en deux parties sur France Musique, dans le Jazz Club d'Yvan Amar à 19h, les samedis 2 octobre et 6 novembre

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