Pierrick Pédron (saxophone alto), Carl-Henri Morisset (piano),Thomas Bramerie (contrebasse), Élie Martin-Charrière (batterie), Laurent Courthaliac (arrangements), Daniel Yvinec (direction artistique)
Pompignan (Gard), 3-5 octobre 2020
Continuum Jazz / UVM Distribution
Un hommage, un vrai, ce qui nous change de certains supposés témoignages d’admiration qui, dans le pire des cas, ne sont que des entreprises opportunistes, et dans des cas plus bénins, des révélateurs de manque d’inspiration.
Un hommage assorti d’un pas de côté, en faisant de cette évocation quelque chose d’autre : ‘Something Else’ est le sous-titre, et c’est aussi l’intitulé du premier disque d’Ornette Coleman, enregistré un peu plus d’un an avant ‘The Shape Of Jazz To Come’, dont le présent opus reprend le répertoire. Un ‘Something Else’ qui commençait, en 1958, de tout changer, et même de tout chambouler.
Et ce que le présent disque de Pierrick Pédron chamboule, c’est d’abord l’instrumentation. Du quartette d’Ornette, avec cornet (Don Cherry), contrebasse (Charlie Haden), et batterie (Billy Higgins), nous passons à un groupe avec sax alto, piano, contrebasse et batterie. Avec, il faut le souligner, le concours extrêmement fécond de Laurent Courthaliac pour les arrangements, et l’oreille avisée de Daniel Yvinec (qui a eu l’idée de cette aventure) pour la direction artistique. Les titres sont donnés dans l’ordre du 33 tours désormais légendaire publié par Atlantic en octobre 1959 (ce qui n’était pas l’ordre de la séance d’enregistrement en mai 1959).
Dès la première plage, l’immarcescible Lonely Woman, on sait que ce sera quelque chose d’autre : les unissons désinvoltes entre trompette et cornet de la version originale deviennent dialogue entre le thème du sax et les harmonies du piano. Et pourtant c’est bien de cette même musique qu’il s’agit. Et la liberté est tout aussi présente, il suffit d’écouter comment cela tourne à l’émeute, en petit comité, du quartette de Pierrick Pédron. Dès l’abord la finesse du travail d’arrangement de Laurent Courthaliac s’impose comme une évidence. Dans le titre suivant, Eventually, un unisson vertigineux du sax et du piano va précéder une sorte d’interlude stride de Carl-Henri Morisset, lequel plus loin s’envolera pour une impro en trio digne des aventures les plus folles. La basse cursive et les explosions des tambours vont préparer un déboulé de folie chez Pierrick Pédron , avant une nouvelle bouffée de stride, frénétique.
Je ne vais pas détailler toutes les plages dans le registre comparatif : l’impression générale c’est la liberté, l’excellence, l’inspiration, avec des moments de lyrisme doux et serein : un TRÈS grand disque !
Xavier Prévost
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Le groupe est en concert les 5 & 6 décembre à Paris au Sunside, le 7 à Auvers-sur-Oise (Pavillon Van Gogh), le 14 à L’Osons Jazz Club de Lurs, et les 17-18 décembre à Saint Brieuc (La Passerelle)
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