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27 octobre 2007 6 27 /10 /octobre /2007 07:35

JJJJ lEiLA OLIVESI : « L’étrange fleur »

Nocturne 2007

Leïla Olivesi (p), Boris Pokora (ts), Manu Codjia (g), Elisabeth Kontomanou (vc), Chris Jennings (cb), Donald Kontomanou (dm)

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Cette fois c’est sûr Leïla Olivesi a trouvé la bonne formule autour de laquelle elle semblait tourner depuis un bon moment. Depuis l’époque en fait de son premier groupe, le Brahma Sextet. On entendait à l’époque Leïla Olivesi dans les clubs parisiens comme à la recherche de sa formation idéale, essayant un tel ou une telle. Chaque fois des musiciens de grand talent (Jeanne Added, Magic Malik pour ne citer qu’eux) mais chaque fois aussi des musiciens qui s’envolaient vers d’autres sphères. Leïla Olivesi semblait alors peiner à trouver ceux et celles avec lesquelles elles s’engagerait dans le projet qui lui tenait le plus à cœur. Ce projet auquel son rapport très intime exigeait de la compositrice qu’elle en bâtisse l’ossature idéale.

La part de l’intime

Mais cette fois, avec cet album là, c’est sûr, Leïla Olivesi a trouvé sa pierre philosophale. Il y a déjà quelques années, elle nous confiait son désir de composer une sorte de suite dont le fil conducteur seraient les poèmes écrit par sa mère. Ces textes à l’étrange force d’envoûtement qui racontent l’histoire de Aïcha Kandicha, ce personnage mythique qui, au-delà de l’image de la sorcière telle qu’on la raconte aux enfants, se révèle au fil de ces poèmes comme la représentation de la femme universelle. Un divinité faite femme, à la sensualité farouche, libre et donc insaisissable. Une femme détentrice des secrets de l’univers qui pourrait libérer ses forces de vie si seulement les hommes atteignaient à cette sagesse à laquelle seul le vieillard rencontré au cours de ces pages semble avoir accédé. Par les temps inquiétants qui se révèlent aujourd’hui, et qui en Orient comme en Occident semblent plus que jamais emprisonner la femme derrière toute forme de prisons, du voile lourd jusqu’aux pages glacées de quelque magazine glamour, ces beaux poèmes pourraient alors avoir valeur de message fort. Et qui d’autre mieux que Elisabteh Kontomanou pour chanter ainsi libre sagesse de Aïcha Kandicha !

Il y a donc dans le travail de Leïla Olivesi, fille et femme à la fois quelque chose de très intime. Il y a cette sincérité émouvante dans l’hommage qu’elle rend à sa mère qui rend elle-même hommage aux femmes. Mais plus qu’un hommage c’est la continuation du travail de la mère par la fille qui lui donne une force certaine.

Mais à partir de là, Leïla Olivesi fait preuve d’une très grande maturité dans ses compositions. Par rapport à ce que nous avions entendu dans le Brahma Sextet, la pianiste a en effet fait un chemin impressionnant jusqu’à se hisser au rang d’une compositrice de très grand talent. Des  compositions qui évoquent parfois Wayne Shorter ou parfois Pat Metheny si on état obligé de se raccrocher  quelques sublimes références.

Formule gagnante

Leïla Olivesi a trouvé la formule gagnante en associant le saxophoniste Boris Pokora (primé l’an dernier aux trophées du Sunside) au guitariste Manu Codjia toujours aussi impressionnant dans cette puissance tout en détachement qui émane de son jeu. Derrière rien à dire. Chris Jennings et Donald Kontomanou se connaissent bien et tournent admirablement. Le jeune batteur que l’on a l’habitude d’entendre, toujours très réservé lorsqu’il joue derrière sa chanteuse de mère, se libère littéralement lorsqu’il se met au service du quintet. On l’a déjà dit ailleurs, ce batteur c’est sûr deviendra assurément un très grand.

En réussissant dans cet album à conjuguer la mise en voix des poèmes de sa mère, en alternant ceux-ci avec des compositions instrumentales très riches au groove sous jacent, Leïla Olivesi réalise une réelle performance dont on imagine bien tout le travail préalable que cela a dû lui demander. Et l’on reste alors totalement acquis à la cause de cet album dans lequel les résonances réverbérées de la guitare de Manu Codjia répondent aux sinuosités puissantes et assurées du saxophoniste et contribuent ainsi à la mise en espace d’un univers mouvant à la poésie étrangement fantomatique et aux contours sensuellement mystérieux. Jean-Marc Gelin

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