JJJJJ Yaron Herman Trio : « A time for everything »
Laborie 2007
Pourquoi ce nouvel album de Yaron Herman est-il si jubilatoire ? Qu’est-ce qui provoque ce sentiment de plénitude et oserais-je le dire de joie à l’audition de ce trio (Matt Brewer à la contrebasse, Gerald Cleaver à la batterie et Yaron Herman au piano)? A time for everything résume ce qu’il nous offre. De tout, depuis les standards de Björk (Army of me), jusqu’à Scriabine (Prélude n°2 opus 35) en passant par Sting (Message in a bottle) et les compositions de Yaron Herman lui-même. Le passé et le présent se côtoient sans tabou aucun. De tout, des lentes mélopées aux danses endiablées. Et tout cela dans une parfaite cohérence et sans impression de « patchwork » ou de liste à la Prévert : la mise en scène de l’album est parfaite, sans temps mort, sans baisse d’énergie, sans moment inutile ou fortuit : même l’interlude d’une minute est d’une intensité ravageuse. La liberté d’improvisation et l’énergie des musiciens sont communicatives et nous nous laissons happer par ce voyage insolite et réjouissant. Alors que nous pourrions être tentés de nous laisser bercer par le sublime duo lyrique de Brewer et d’Herman sur Neshima (le souffle, en hébreu) et peut-être de nous assoupir en paix, aucun répit ne nous est accordé puisque la composition d’Herman qui suit, Paluszki, est comme un coup au plexus. Quant aux amoureux de Cathy Dennis, ils seront heureux de retrouver son Toxic, beaucoup plus déjanté que ce qu’en avait fait Britney Spears. On l’aura compris, Yaron Herman, 26 ans à peine, est un prodige (il ne fait du piano que depuis dix ans) profondément ancré dans le présent et ouvert à toutes les sources d’inspiration : un jeune homme libre et donc incroyablement créatif, profondément inspiré (écouter cette élégante interprétation de In the wee, small hours of the morning). Avec lui, toutes les références ou presque sont possibles, dans son Monkey Paradise, ne reconnaîtrait-on pas Bill Evans ? Il y a également dans cet album beaucoup d’humour, grâce aux touches de post-production de Jean-Pierre Taïeb. C’est avec un à-propos certain que Yaron Herman conclut cet album avec Leonard Cohen, Hallelujah ! Soixante-cinq minutes jubilatoires à écouter de toute urgence. - Régine Coqueran