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15 décembre 2008 1 15 /12 /décembre /2008 06:23



www.vijay-iyer.com

 Ceux qui, comme moi je le confesse, avaient de Vijay Iyer l’image d’un musicien virtuose des claviers électriques devront réviser leur jugement après l’écoute de cet album. Car réduire ce musicien américain d’origine indienne à ce rôle de side man cantonné dans une fonction plus ou moins expérimentale découvriront avec cet album que Vijay Iyer est avant tout, et surtout un pianiste exceptionnel et un superbe compositeur.

Ce qu’il dit ici dans un album où il joue entièrement acoustique est une sorte de musique de l’urgence d’où découle un flot à la fois cérébral et terriblement primal. Lorsqu’il intervient, son coreligionnaire, le saxophoniste alto Rudresh Mahanthappa (que pour ma part j’avais découvert cet été dans un jam session où sa prestation m’avait laissé dans un  état dont je ne me suis toujours pas remis) entre dans cette musique avec une force vitale totalement sidérante. C’est de la vie qui sort du pavillon de son instrument, une vie torrentielle qui mène au bord du gouffre, au bord du désastre avec une énergie aussi désespérée qu’un peu folle. Ceux qui ne connaissent pas ce prodige doivent absolument se ruer sur ses productions et découvriront ainsi une sorte de nouveau langage du saxophone qui, à coup sûr les bousculera et les emmènera ailleurs. Dans une sorte de langage où le jazz Colemanien se mêle très subtilement au phrasé des instruments indiens tiré du raga.

Mais la musique de Vijay Iyer ne se limite pas (si limite il y avait) à cette vision de la musique. Ses compositions réalisent avec audace une syntaxe entre la musique de Steve Coleman (par les métriques impaires et les structures atonales) tout en se dépouillant parfois de tous les superflus d’une part (Machine days) et d’autres musiques qui traversent l’histoire du jazz. Il est ainsi capable d’enchaîner avec un morceau très latin jazz ( Age of everything) avec un morceau plus modal dans le plus grand classicisme ( I’m all smile de Michael Leonhardt). Abordant le piano avec le même lyrisme que s’il s’agissait d’un clavier électronique ; Vijay Iyer est stupéfiant de technique montrant une indépendance rythmique et mélodique des deux mains assez incroyable, renversant les rôles de la gauche et de la droite avec une agilité un peu surnaturelle. Mais foin d’exhibition car là n’est pas le propos. Lorsqu’il se livre à un exercice en solo acoustique, il livre avec une sensibilité musicale rare un morceau bien loin des errances introspectives propre au genre mais au contraire ouvre sa musique à une forme de jazz rénové. Et lorsqu’il joue en trio, alors ses camarades de jeu  jouent les trouble fêtes à l’image de Marcus Gilmore en batteur totalement décalé capable de jouer hors tempo ou d’essayer des phrases totalement incongrues mais vivifiantes. La musique de Vijay Iyer par certain égard prolonge les derniers travaux de Coltrane mais loin, bien loin des clichés du genre. Il faut absolument aller voir Iyer et tenter l’expérience. Totalement innovante. Jean-Marc Gelin

 

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