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31 mars 2009 2 31 /03 /mars /2009 07:22

Radio France 2008


Le batteur Gérard Siracusa s’est lancé dans le solo, cet exercice que franchissent en général plus allègrement les pianistes. C’est une entreprise courageuse, extrême que de livrer ainsi un combat à peaux et mains nues ; une grande solitude, certes assumée, désirée, recherchée même mais dont on sent bien ce qu’elle peut avoir de périlleux.

 

 «Drums immersion», «une lumineuse suite de solos dédiés à la batterie», est un bel objet produit avec goût par Radio France, enregistré parfaitement aux studios 104 et 10 de la maison ronde sans re-recording en février et mars 2008. De ce point de vue, peut-être le découpage en pièces séparées peut sembler arbitraire, puisque l’album est une architecture sonore de sept pièces de longueur très diverses « Monologue «  par exemple fait plus d’un quart d’heure :

Improvisation totale de ces pièces dont la forme résulte bien de fluctuations naturelles, avec l’appréhension d’un certain vide, l’intégration audacieuse de silences, de ruptures, un vrai moment poétique.

Gérard Siracusa a saisi ainsi la chance de se portraiturer,dans ce travail un peu ingrat de l’auto portrait derrière lequel cependant il semble s’effacer tant il joue des climats et des atmosphères, variant les nuances, faisant se croiser mystères, instantanés et aussi exigences d’une vraie personnalité musicale : voilà bien sept pièces qui n’écrivent pas un traité de la batterie mais explorent les possibilités de l’instrument, affirmant une dimension narrative et même émotionnelle:un formidable sens de l’initiative, de l’espace et d’une certaine dramaturgie.

 

Inutile de préciser qu’il est impossible de décrire un tel projet, d’autant que les « liner notes » lumineuses, authentiques de la plume de Christian Tarting dont on connaît la pertinence et le rapport passionné à la littérature, l’édition , la musique le cinéma, surpassent la meilleure chronique…

Drums immersion nous semble cependant  abouti et révélateur d’une démarche qu’entretient depuis longtemps le batteur avec la recherche sonore ( énergie, résonance), une réflexion constante sur la place de cet instrument-accompagnateur dont on attend toujours une virtuosité spectaculaire.Le chant n’est jamais très loin et Siracusa explore toutes les ressources mélodiques que l’instrument peut offrir.

Cet album mérite d’être glissé dans le lecteur et écouté jusqu’au bout de cette presqu’heure de musique, au long de la « chiara selva » à laquelle renvoie aussi la belle photo de couverture. Il faut se frayer l’écoute dans cette silve douce et accueillante ni trop dépouillée ni lourdement tropicale. Chroniquer revient donc à faire vivre et respirer une seconde fois cette musique, à créer de petits infinis, prétextes à ces états/ éclats, à faire percevoir ce qui bat avec une évidente et mystérieuse simplicité.

Sophie Chambon

 

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