Universal 2007 JJJJ JEF NEVE : « Nobody is illegal »
Après un premier morceau très court et très classique, Jef Neve nous laisse totalement abasourdis par un Nothing but a Casablanca turtle Sideshow for diner ( !) qui commence comme un prélude de Bach pour se poursuivre par un crescendo absolument é-pous-touf-flant ! La suite est à l’envie. Bien cadré sur le plan de la direction artistique, le petit génie de Universal instille de petits interludes intelligemment posés en cours d’album. Change les climats. Dans Abshied, Jef Neve nous montre qu’il a retenu les leçons d’une certaine forme de romantisme Meldhien même si on le souhaiterait parfois un peu plus caressant. Mais peu importe. Dans Second Love le pianiste se montre habile arrangeur. Là encore les cuivres surgissent pour souligner la mise en tension harmonique. Dans sa construction le morceau évoque le passage aux différents sentiments amoureux. Le crescendo est ainsi interrompu par un solo de contrebasse alors que l’arrivée des cuivres sonne comme la renaissance d’un second amour exalté. Dans le titre éponyme, Nobody is illegal on remarque aussi l’incroyable présence de son batteur Teun Verbruggen qui montre une réelle science du contre temps qui comme sur Nothing but… se cale admirablement sur la main gauche du pianiste. Il est étonnant de voir comment tout au long de cet album ce jeune pianiste parvient non seulement à assumer l’héritage (si on peut dire s’agissant d’un jeune quadra) de Meldhau qu’il perpétue avec respect (Until now, abshied) mais plus encore à le transcender à l’amener vers une voie nouvelle. Car Jef Neve, anti-thèse des pianistes minimaux, innove. Dans ces morceaux tant de revirements, d’accélérations, de ralentissements, de brusques virages, de piano préparé ou non, de jeux d’ombres et de lumières avec toutefois une ligne acoustique toujours fidèle. Alors que l’on pensait l’exercice du piano jazz un peu figé, Neve bouscule l’auditeur, le désarçonne et nous apporte la démonstration brillante qu’il se passe toujours quelque chose dans cette musique en perpétuel renouvellement. Une démonstration plus qu’enthousiasmante de la vitalité de cette musique. Une preuve magistrale ! La preuve par Neve !
Jean-Marc Gelin