
Alien Beats Records
Sébastien Charlier, Curt Bisquera, Alain Caron, Jean-Philippe Lajus, Nicolas Espinasse - Guest Benoit Sauvé
L'harmonica est un instrument rare dans le jazz. Quelques harmonicistes de jazz nous viennent à l'esprit comme celui de Alexandre Thollon, Olivier Ker Ourio et bien sûr Toots Thielemans. Tous jouent de l'harmonica chromatique. Sébastien Charlier est un as de l'harmonica diatonique. Un virtuose même. Écouter ce technicien revient à assister aux jeux olympiques de l'instrument. Le "ruine-babines" diatonique est un harmonica très exigeant et probablement le plus difficile à maitriser techniquement. Charlier demeure l'un des rares représentants de l'instrument dans le monde. Qui plus est, il joue du jazz, tous les jazz. Son pari: introduire l'harmonica diatonique comme instrument à part entière du jazz. En 2005, il avait porté le langage bebop sur son harmonica, ce qui est une performance. Auparavant, il s'était frotté au blues et à l'électro.
POUR ***:
Avec Precious Time, premier épisode de la trilogie « Harmonica Next Gen », l'harmoniciste dévoile son projet Fusion à la mode Uzeb. Il y a fait appel au bassiste de Uzeb, le terrifique Alain Caron, Curt Bisquera et Jean-Philippe Lajus, maîtres en la matière.
Vous l'aurez compris: la formation est top-niveau, le jeu est dense et parfaitement exécuté, la jouerie est, comme souvent avec la fusion, ahurissante. La musique est festive et jubilatoire et c'est là que le groupe de Sébastien Charlier puise sa meilleure splendeur: celle de prendre son pied et de le communiquer à son public. Le groupe reprend des titres des stars du genre comme Miles, le groupe britannique Human League, et les nippons de Casiopera et rend Hommage à Genesis. Amateurs de jazz-fusion, ce disque doit faire partie de votre cd-thèque.
CONTRE *:
Le style musicale « jazz-fusion » vieillit difficilement. A grands renforts de rythmique Jazz-rock, de basse clinquante, de claviers synthétiques et d'enrobages sonores excessifs, le jazz-fusion de Sébastien Charlier adopte une forme convenue qui ne renouvelle pas le genre - malgré la présence d'un harmonica comme instrument principal et de Benoit Sauvé à la flûte à bec – et tourne souvent à la caricature. Souvent noyé par les volutes de sonorités fusion trafiquées par des machines électro-informatique, l'harmonica trouve pourtant une place de choix dans la fusion de Charlier. Sur ce cd, on retrouve malhreuseument certains stigmates du genre: les repons entre instruments consistent en une série de note finissant un chorus, souvent un clin d'oeil à un standard (les thèmes de Miles), reprise par un autre instrument qui lui même va prolonger avec une autre phrase de quelques notes et ainsi de suite. Typique de la fusion, amusant mais c'est tout.
Jérôme Gransac