Bis repetita… dit l’adage. Pour les fêtes de fin d’année, Jazz Magazine-Jazzman et son partenaire Wagram reprennent la recette à succès (tirage épuisé) de l’an passé : réunir en un seul coffret de 5 CD et cent titres une sélection propre à plaire au grand public sans faire rire (ou grimacer, c’est selon) les « spécialistes ». Ce défi fut relevé en 2012 avec une vision panoramique du jazz sous cinq angles (les grands interprètes, les grands compositeurs, le grand métissage, Made in Europe, les années 2000). Toujours au gouvernail pour ce périple, Lionel Eskenazi a élargi son champ pour 2013 en proposant une plongée dans les musiques noires chantées, ajoutant au jazz deux compagnons de route voisins, le blues et la soul. Chacune des trois « familles » dispose d’un espace d’expression de même importance (nous n’avons quand même pas pris notre chronomètre suisse pour vérifier !). Le cheminement se veut aléatoire et se côtoient ainsi Sonny Boy Williamson (dans Help Me), Johnny Hartman (avec Lush Life et … le quartet de Coltrane de 63) et Marvin Gaye (avec Night Life). Attention, « l’ordre » n’est pas entièrement bafoué ; notre encyclopédiste présente sa sélection en respectant la chronologie : années 20 à fin des années 40, années 50, années 60, années 70 et enfin de 80 à nos jours. Ouvert par Bessie Smith en 1925 (Ain’t Got Nobody en 3’11), le coffret se referme en beauté et générosité avec Gregory Porter en 2010 (1960 What ? en 12’23). Ils et Elles sont tous là, les vocalistes qui comptent (dans l’histoire des musiques noires) et ne comptent pas (leur ardeur), Billie, Ella, Sarah, Rosetta, Aretha, Carmen, Abbey, Shirley, Betty, Fontella, les Pointer …. Et chez les mâles, Luther, Aaron (par deux fois), Gil, Eric, Eddie, Oscar, Albert, Leon, Satchmo, Slim, Robert, Sam, Jon … Les absent(e)s à l’appel le sont souvent pour des questions n’ayant rien à voir avec l’artistique mais pour un simple refus des droits accordés par les maisons de disques. Et le maître de cérémonie devait limiter à cent titres son encyclopédie… Notre journaliste revendique ainsi son choix : des chanteuses et chanteurs qui « nous ont touchés par leurs chansons, droit au cœur, donnant un bon coup de fouet à nos âmes sensibles et distillant dans nos veines un plaisir qu’aucun breuvage ou aucune drogue ne pourra égaler ». Il n’est pas interdit pour autant de goûter aux élans langoureux, furieux, mélancoliques, séducteurs ( j’arrête la liste pour ne pas fatiguer le lecteur, comme l’aurait dit Alphonse Allais) de ces vocalistes d’exception avec un cocktail ou toute autre boisson festive en mains… La sélection musicale proposée (à un prix toujours modeste) est, quant à elle, à consommer sans modération !
Jean-Louis Lemarchand