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13 juin 2011 1 13 /06 /juin /2011 21:55

1 DVD Gravity/Socadisc

Anthony Braxton (as), Lee Konitz (as), Pat Metheny (g), Chick Corea (p), Miroslav Vitous (b), Jack Dejohnette (d) + Dewey Redman (ts), Julius Hemphill (ts), Howard Johnson (bars), Baikida Carroll (tp), Marilyn Crispell (p), Attilo Zanchi (b) , Ed Blackwell (dm), Karl Berger (perc), Nana Vasconcelos (perc), Colin Walcott (perc), Aiyb Dieng (perc). Le 19 septembre 1981.

 

Il ne faudrait pas associer systématiquement les mots « festival » et « Woodstock » aux trois jours « peace & love » d’août 1969, car il y a eu sur les mêmes lieux, d’autres projets musicaux comme ce festival de jazz de septembre 1981 organisé par le Creative Music Studio. Cette organisation culturelle dédiée aux musiques improvisées et expérimentales a été créé en 1971 par le percussionniste et musicologue allemand Karl Berger sous le parrainage d’Ornette Coleman. Le Creative Music Studio basé justement à Woodstock a eu une influence musicale importante en inventant en particulier le concept « world-jazz »  avec des personnalités comme Don Cherry ou Nana Vasconcelos. L’idée de ce festival était de fêter les dix ans du Creative Music Studio dans leur fief d Woodstock et d’y inviter des figures majeurs d’un jazz à la fois avant-gardiste (Anthony Braxton) et grand public (Chick Corea, Pat Metheny)  afin de proposer un  large éventail qui mêlent musiques improvisées (« Left Jab »), musiques du monde (« We Are »), un hommage à Ornette Coleman (« Broadway Blues ») et  des relectures inspirées de standards (« Stella By Starlight », « All Blues » ou « Impressions »). C’est un quartette inédit et follement énergique (composé de Dewey Redman, Pat Metheny, Miroslav Vitous et Jack DeJohnette) qui reprend avec bonheur le fameux « Broadway Blues » d’Ornette Coleman dans une version de près de dix minutes à couper le souffle ! La séquence « world » est elle aussi passionnante avec le « patron » Karl Berger au balafon entouré de deux tambours, d’Ed Blackwell à la batterie et de Colin Walcott aux tablas pour une belle orgie percussive suivie par un magnifique solo de bérimbau de Nana Vasconcelos. Mais c’est la présence d’Anthony Braxton (si rare en DVD !) qui rend inoubliable ce superbe document. Il ne joue que sur deux titres, mais nous époustoufle par sa passion frénétique et son audace formelle. En effet, sur « Impressions » il part dans une improvisation, créant une tension furieuse et paroxystique, propulsant la section rythmique dans un vertigineux malstrom. La réalisation vidéo du concert manque un peu d’imagination, mais restitue assez bien l’ambiance de ce festival, en privilégiant la proximité et la complicité des musiciens. En bouquet final, un surprenant « All Blues » où les six têtes d’affiche jouent ensemble et où l’on perçoit l’admiration réciproque d’Anthony Braxton et de Lee Konitz,  enchaînant brillamment leur chorus.

 Lionel Eskenazi

 

 

 

 

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5 juin 2011 7 05 /06 /juin /2011 16:52

ECM 2011

Craig Taborn (p)

craig-taborn-avenging-angel.jpg

C'est toujours l'exercice le plus compliqué pour un pianiste que celui de l'exposition en solo pour celui qui est aujourd'hui l'un des plus recherché pour ses talents de sideman. Mais là, Taborn est tout seul, totalement exposé dans sa musique et ses talents d'improvisateurs. Et dans cet exercice-là, il doit avant tout composer avec ce studio de Lugano et ce son ECM. Son ample avec un effet cathédrale où les résonances et le tournoiement des harmonies est important dans la construction même des espaces improvisés.

L'exercice est comme souvent chez le label ( lorsqu'il ne s'agit pas Jarrett.... quoi que....) terriblement introspectif et crépusculaire. La marque ECM, l'esthétique à laquelle le label de Manfred Eicher nous a habitué. On sent la direction artistique de l’allemand. Le pianiste alterne les pièces très espacées comme sur the Voice says so où les intervalles laissent penser à des musiques expérimentales comme celles de Brian Eno, avec des pièces très serrées et denses ( comme sur le titre éponyme Avenging Angel).

Mais cet exercice aussi brillant soit il ne convainc pas toujours. Très concertant (il est curieux d'ailleurs de voir que Craig Taborn a été programmé à Paris dans une salle comme le Sunside alors qu'un tel programme aurait pu justifier Pleyel p.ex), l'ensemble n'embarque jamais réellement son auditeur. Trop introspectif et parfois trop cérébral, il renvoie une image, non pas glacée mais néanmoins parfois une peu figeante. Mais, parfois, Craig Taborn dessine comme des poèmes furtifs, des sortes de haïku minimalistes qui ont la légèreté du vent (True Life near). Parfois au contraire c'est le flot d'une improvisation (à la Jarrett justement) qui s'exprime dans une liberté sauvage ( Gift horse/over the water ou encore Spirit hard Knock) sur des ostinatos de la main gauche dont il explique dans le dernier numéro de Jazzmagazine sa conception. Craig Taborn utilise alors tout le registre du grave du piano dans ses moindres recoins.  Au détour de cette déambulation surgissent parfois des paysages magnifiques, à fleur de peau comme de simples cartes postales tirées d'un mémorial intime (Forgetful).  Il y a  dans cet exercice solitaire la recherche d'une véritable esthétique.

L'exercice a déjà été entendu du côté de chez Manfred Eicher. On peut tout aussi bien s'y ennuyer avec élégance et retenue. S'assoupir un peu mais avec beaucoup de chic. Le jazz joué ainsi en piano solo à tout pour plaire aux thuriféraire de ce jazz aristocratique que côtoierait avec tenue un Alexandre Tharaud au théâtre des Champs Elysées. Car ce jazz-là doit moins à Monk qu'à une certaine école classique. Mais avec cet album Craig Taborn semble surtout accomplir le rite initiatique destiné à le faire entrer dans la loge des grands pianistes sérieux, de ceux qui comme le "maître" de Pensylvanie ou comme François Couturier peuvent s'offrir le luxe de pénétrer dans le studio d'enregistrement de Lugano et accéder ainsi  à 41 ans au statut supposé d'immortel du label.  Espérons juste que cela ne soit pas digne d'un enterrement de première classe et que le pianiste continuera sa voie aux côtés de Chris Potter ou de Dave Binney. Avec cette façon si clase qu’il a de poser le swing.

Jean-Marc Gelin   

 

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3 juin 2011 5 03 /06 /juin /2011 19:23
Textes réunis par Vincent Cotro

Actes du Colloque international 

« John Coltrane  (1926-1967)» : l’œuvre et son empreinte. »

(Université François RABELAIS, TOURS, 26-27 novembre 2007)

Collection Contrepoints

Editions Outre Mesure, 2011.

 coltranecoltro-copie-2.jpg

 

John Coltrane n’a pas fini de faire parler de lui, plus de quarante ans après sa mort. Son influence ne se limite pas au premier cercle de musiciens qui l’ont accompagné, ou qui ont eu la chance de l’entendre (Dave Liebman), ni à tous ceux qui ont gravité dans la galaxie de ce soleil noir, tentant d’assimiler, de continuer la musique après lui.

L’intérêt de cette nouvelle publication des très sérieuses éditions OUTRE MESURE dirigées par le rigoureux Claude Fabre (1), est indéniable : pour être d’une irréprochable précision, cette étude n’écarte pas pour autant les dimensions émotionnelles, esthétiques, poétiques, voire politiques de l’œuvre/vie de cet immense artiste.

Maître de conférences à l’Université de Tours, où il dirige le laboratoire de Recherches transversales en musicologie, ses travaux portant sur l’histoire et l’esthétique du jazz (2), Vincent Cotro n’a eu de cesse de réunir musiciens et chercheurs de différentes disciplines pour se pencher une fois encore sur le Cas Coltrane et apporter un éclairage actuel sur la création en plein devenir, tant comme saxophoniste que comme leader et compositeur, dans une période restreinte de 1955 à 1967. Dans le développement coltranien, se rejoignent alors le blues originel et les influences africaines, la musique savante (Coltrane était un « lettré de la musique »),  les projections fantasmatiques de certains pays comme l’Espagne  (Miles Davis aura aussi cette tentation avec son Sketches of Spain) sans oublier l’influence de l’Inde du nord  de Ravi Shankar emblématique de l’époque. Il ne s’intéresse à ces cultures que pour les transcender et renouveler sa créativité. Il ne se coule pas dans le moule, mais puise dans ces autres imaginaires pour atteindre un idéal fusionnel, cosmique, au cœur de la musique modale. 

Quatre thématiques distinctes regroupent les diverses contributions du colloque de Tours :

Evolution et unité- Coltrane compositeur- Imaginaire et environnement- Body and Soul… (3), soit une forme de cheminement, imaginé pour nous saisir de l’œuvre, la musique de Coltrane, considérée comme point de départ, tourner autour de cet objet miroitant en examinant différents champs investis par l’œuvre, avant d’opérer un ultime retour sur l’humain, vers l’intime.  (Vincent Cotro, prologue).

Evidemment, il ne s’agit pas d’une œuvre de vulgarisation à proprement parler, mais cette lecture éclairera tout amateur de jazz, même ceux qui pensaient connaître John Coltrane. Car le sujet d’étude est inépuisable. Preuve en est le témoignage oral lors du colloque, informel,  particulièrement émouvant de Dave Liebman (4) qui a vécu dans la lumière de Coltrane toute sa vie et n’a cessé d’en réfléchir les implications.

La diversité des angles d’approche des divers auteurs pourra satisfaire la curiosité d’un public, même non lecteur de musique, toujours avide de  saisir le mystère Coltrane, qui en un temps record, a non seulement transformé l’approche de son instrument, bouleversé toute la musique  mais encore offert un immense corpus de compositions.

Au début de sa carrière, John Coltrane a payé son dû aux figures du passé, se mesurant à Lester Young, et même à Charlie Parker, archétype du jazzman de l’époque ; il va ensuite choisir le soprano, à la tessiture plus aiguë que le ténor, pour obtenir une nouvelle sonorité de l’instrument, inspirée des instruments orientaux, à anche double.

Pressentant que le temps lui est compté, il s’abandonne  à une quête spirituelle obsessionnelle qui se double d’une violence extrême et déstructurée (catharsis ?). La musique, à la fin de sa courte vie, est  proche du cri, de la mélodie pure et infinie, du rythme essentiel. Jusque dans cette composition « My favorite things » qu’il a faite sienne, maintes fois ressassée, triturée, depuis la bluette de Rodgers/Hammerstein, jusqu’à sa version finale (encore inaudible pour certains). Le free jazz, il l’a initié, en s’approchant d’une forme épurée, qui va à l’essentiel.

Certains critiques sont allés encore plus loin, considérant Coltrane comme un « théosophe du jazz »…Il faudrait aussi évoquer l’extrême douceur, paradoxale, dans le genre de la ballade qu’il porte au plus haut (4). Coltrane nous parle, et dans le long poème chanté « A Love Supreme », on a le sentiment qu’il joue les paroles dans sa musique.

En prenant de judicieux exemples qui seront analysés, décortiqués jusqu’à en extraire tout le suc, on comprend  avec « Olé » ou « Blue Trane », comment Coltrane s’est confronté à toutes sortes de contraintes dont il a réussi à s’échapper brillamment. Philippe Michel fait l’autopsie de Giant Steps, à la fois composition et album de 1959, œuvre charnière, dernier morceau issu du be bop avec beaucoup d’accords, où déjà Coltrane pense composition, structure et pas seulement grille d’accords. En analysant de façon comparative toutes les prises, le chercheur fait parler la musique, dans sa contribution La liberté gagnée sur / par la contrainte. Car Coltrane s’échappe en permanence de tous les cadres, même du contexte terrible de l’époque, et joue ce qu’il est. Citoyen du monde par sa musique qui accueille toutes les musiques du monde, il les transforme en les faisant siennes. Un autre exemple probant est donné avec « India » : au-delà de l’évocation d’autres influences musicales, très en vogue à l’époque, Coltrane installe le climat (le mode) puis le thème (soubassement fondé sur deux notes) mais il ne peut s’empêcher là encore de s’évader hors de ce cadre fixé.

 L’édition toujours très soignée, d’une grande clarté, comporte une mise en page impeccable et un index précis. Grâces soient rendues une fois encore à l’excellent Claude Fabre qui accomplit depuis la création d’Outre Mesure, l’un des plus remarquables travail d’édition et de mise en forme sur le jazz, son histoire et son esthétique, en rendant nombre de publications universitaires ou d’amateurs passionnés et exigeants, possibles et lisibles.

 

Sophie Chambon

 

1.    Outre mesure a déjà publié la biographie de référence  de John Coltrane  par Lewis Porter : John Coltrane, sa vie, sa musique qui obtint le prix du livre de jazz en 2007 (Traduction de Vincent COTRO.)

2.    Vincent Cotro est l’auteur dans la même collection Contrepoints de l’important Chants libres : le free jazz en France. 1960-1975.  Il a egalement traduit l’ouvrage de Ekkehard Jost, Free Jazz.

3.    Liste des articles du colloque repris dans l’ouvrage :

1.    John Coltrane compositeur (Christa Bruckner Haring)

2.    La structuration intervallique dans les compositions de John Coltrane  (Ludovic Florin)

3.    Parvenir à l’unité : l’autoréférence dans la musique de John Coltrane (Marc Medwin)

4.    « Giant Steps » : la liberté gagnée sur/par/la contrainte ( Philippe Michel)

5.    John Coltrane et l’intégration des concepts indiens dans le jazz improvisé (Carl Clements)

6.    Les Dilemmes de l’orientalisme afro américain : Coltrane et l’imaginaire hispanique dans « Olé » (Emmanuel Parent et Grégoire Tosser)

7.    Four for Trane : le jazz et la voix désincarnée (Tony Whyton)

8.    Quelques poèmes pour Coltrane (Claudine Raynaud)

9.    John Coltrane : un deuil impossible  Bertrand Lauer

4.    « Le témoignage de Dave Liebman devait combler l’aspiration au mythe venant de la salle. Le mythe vrai. » Laurent Cugny (Postface).

 

 

 

 

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2 juin 2011 4 02 /06 /juin /2011 19:06

Archieball - Harmonia Mundi

Archie Shepp – saxophones ; Joachim Kühn – piano

 shepp-kuhn-copie-1.jpg

 

 

C’est de la rencontre de ces deux géants du jazz au festival « Jazz à Porquerolles » que naîtra le disque Wo ! Man.

En 2008, le festival Jazz à Porquerolles invite le trio Kühn/Bekhas/Lopez. Pendant la balance, Kühn troque son piano contre son sax ténor et se lance dans un chorus déchainé et surprenant. C’est à ce moment là que Samuel Thiebault, directeur du festival, imagine non seulement une rencontre musicale entre Archie Shepp (fidèle du festival) et le pianiste germanique mais aussi un échange d’instruments entre les deux.

Ces deux monstres sacrés ont respectivement un parcours riche de rencontres et d’expériences musicales qui les a portés aujourd’hui au rang de légendes. L’un comme l’autre a déjà pratiqué des duos sax/piano durant leurs longues carrières, lesquels ont donné des albums réussis (Shepp/Adullah Ibrahim ; Joachim Kühn/Ornette Colman…).

Enregistré à la mi-Novembre 2010 au Studio de Meudon, Wo ! Man rassemble des compositions du saxophoniste, du pianiste ainsi que trois standards.

Complices artistiquement, leur dialogue intimiste occupe pleinement l’espace. Le saxophone d’Archie Shepp aux sonorités reconnaissables, improvise sans compromis sur les morceaux de Kühn. De fait, seul avec le pianiste, Shepp n’a d’autre choix que de puiser au meilleur de lui-même. Le pianiste quant à lui improvise avec la virtuosité qu’on lui connaît sur la musique de Shepp. Même sur un morceau de blues, les deux musiciens parviennent à faire oublier l’absence de base rythmique : leurs seuls instruments suffisent à offrir une musique pleine de lyrisme et d’émotion, partagés entre passé et présent tant sur leurs compositions respectives que sur les standards qu’ils interprètent.

 

Lors du concert donné le 12 Mai dernier à la Fondation Cartier à l’occasion de la sortie de leur disque, les deux artistes nous ont fait partager la même émotion. Le public est venu nombreux ce soir-là écouter deux étoiles encore bien vivantes sous le ciel de Paris. Si les deux artistes n’ont pas échangé leurs instruments comme le souhaitait Samuel et bien qu’Archie Shepp ait mis du temps à se donner, le concert fut un moment de magie où les musiciens nous ont transportés avec générosité dans l’intimité de leur rencontre.

 

Julie-Anna DALLAY SCHWARTZENBERG

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1 juin 2011 3 01 /06 /juin /2011 07:57

Amina Alaoui : « Arco Iris » ***

ECM – 2011

Amina Alaoui (vc, daf), Saïfallah Ben Abderrazak (vl), Sofiane Negra (oud), José Luis Montón (gt flamenca), Eduardo Miranda (mandoline), Idriss Agnel (perc, gt élec)

 

Amina-Alaoui-Arco-Iris.jpg

 

Pour un cinquième disque sous son nom, la chanteuse d’origine marocaine Amina Alaoui nous revient avec « Arco Iris », entourée ici majoritairement par des instruments à cordes. Avec aussi le daf et quelques percussions orientales, ce divin enrobage instrumental nous transporte tout au long du disque au-delà des frontières musicales. La suavité de cette voix aux mille émotions voyage entre Andalousie, Portugal, Maghreb et Orient, au gré d’improvisations libres autour de thèmes traditionnels. Les langues et les cultures se mêlent entre elles au fil des œuvres, allant de l’arabe au portugais, en passant par l’espagnol. Il est possible aussi d’y trouver un certain parfum occidental de cadences harmoniques qui à l’écoute ne nous est pas inconnu, en témoigne l’introduction de Flor de nieve. L’équilibre entre toutes ces origines s’approche de la perfection par ce savant mélange entre les effluves sonores improvisés d’une guitare flamenca et le lyrisme d’un violon sauvage du désert. Que dire encore de l’ambiance d’un Fado venu de nulle part emplissant nos cœurs de mélancolie par le biais d’une mandoline aux cordes sensibles, dans Fado menor. Paradoxe de la lenteur du discours et de la chaleur intense de l’émotion. Quelques années après cette formidable collaboration avec Jon Balke et Jon Hassell dans « Siwan », enregistré sur ce même label ECM en 2008, Amina Alaoui nous offre à nouveau de belle manière l’occasion de voyager par la Musique.

Tristan Loriaut 

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1 juin 2011 3 01 /06 /juin /2011 07:53

Black & Blue – 2011

Laurent Marode (pno), Karim Gherbi (cb), Abdesslem Gherbi (dms)

 

Le-Trio-Invite-Grits-and-Groceries.jpg

 

Après l’expérience très convaincante du sextet, le pianiste Laurent Marode nous offre ici un disque en trio accompagné par une rythmique de choc en la personne de Karim et Abdesslem Gherbi, respectivement contrebassiste et batteur. Le concept de ce trio est simple, il s’agit d’un socle prêt à accueillir tout soliste désireux d’évoluer en harmonie avec un groupe solide. Dans « Grits & Groceries », Le Trio Invite a enregistré d’audacieuses compositions, parfois sous forme romanesque avec Three Robberies at Grits and Groceries, ainsi que quelques standards aussi fameux que légendaires commeTaking a Chance With Love, Recorda Me, I’ll Remember You, Easy Living, Old Devil Moon ou bien encore On Green Dolphin Street. En ressort un groove incommensurable, arrangement après arrangement, toujours au sein d’une mécanique bien huilée, d’un son de groupe relativement homogène. Ce trio rend hommage de fort belle manière à la tradition du Jazz et plus précisément à celle du trio piano. En témoigne d’ailleurs les collaborations passées avec certains ayatollahs français de ce style inépuisable de Musique, comme David Sauzay ou encore Fabien Mary, pour ne citer qu’eux. On attendait dans ce disque peut être un peu plus de folie, de surprise, de nouveauté dans l’improvisation ainsi que dans l’arrangement des thèmes. Mais l’originalité des compositions nourrira quand même de sincères félicitations, celles-ci étant particulièrement dédiées aussi bien aux interprètes qu’aux compositeurs évoluant sur ce disque. Force est de constater que la puissante alchimie qui anime la collaboration entre ces trois musiciens remarquables est promise à un futur prolifique.

Tristan Loriaut 

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1 juin 2011 3 01 /06 /juin /2011 07:50

ECM – 2011

Mathias Eick (tp), Audun Erlien (bass), Andreas Ulvo (pno), Torstein Lofthus (dms), Tore Brunborg (sx ten), Gard Nilssen (dms), Morten Qvenild (key), Sidsel Walstad (harpe)

 eick.jpg

  Musicien reconnu de la décennie passée, artiste devenu incontournable sur le mythique label ECM, le trompettiste norvégien Mathias Eick nous offre un second disque sous le nom de « Skala ». En plus de son savoir-faire de trompettiste arrangeur et compositeur, on lui découvre ici des talents de guitariste, vibraphoniste ou encore contrebassiste. Teinté d’émotions aussi intenses que diverses, ce nouvel opus est habité par le côté Pop du Jazz actuel. Fraicheur et inventivité des compositions, science de l’économie dans l’improvisation, le son général de ce projet musical est maîtrisé à l’extrême, de façon à transmettre avec le plus de justesse possible un message clair et distinct. Mélancolies passagères (Skala), lyrisme des harmonies (Edinburgh), démesure de l’écho (Oslo)… tels sont quelques uns des ingrédients utilisés par le créateur d’origine nordique. A noter aussi le groove incommensurable d’une rythmique évoluant parfois sur une thématique Electro. L’ensemble du disque offre une ambiance langoureusement homogène, le timbre des instruments étant pour beaucoup dans cette succession de morceaux à ambiances quasi-identiques, pour ne pas dire monotone. Ce qui ne dénaturera pas la qualité et la quantité du travail accompli. Signalons au passage la robuste participation en tant que sideman du saxophoniste ténor Tore Brunborg qui distille magistralement ses phrases pendant le solo de Day After. Avec audace, nous pourrions entrevoir chez ce trompettiste une certaine filiation avec la carrière de musiciens comme Erik Truffaz ou bien encore Dave Douglas. Ce disque est fait de blanc, de gris et de pourpre, en accord parfait avec la nature. C’est dans Epilogue que prend fin ce voyage à travers des effluves sonores enchanteurs.

Tristan Loriaut 

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1 juin 2011 3 01 /06 /juin /2011 07:46

Cam Jazz – 2011

Kenny Wheeler (bugle), John Taylor (pno), Steve Swallow (elec. bass)

 

kenny-wheeler-one-of-many.jpg

 

Trois amis. On imagine bien la scène. Trois monstres sacrés de l’improvisation se retrouvant en studio pour le bonheur de nos oreilles, réunis pour l’occasion d’enregistrer ensemble ce qui deviendra, pour sûr, un disque de plus dans le rayon chef-d’œuvre de nos discothèques personnelles. Cent ans d’histoire du Jazz sont résumées le temps de ces quelques compositions, interprétées par les maîtres de Musique que sont le bugliste Kenny Wheeler, le pianiste John Taylor et le bassiste Steve Swallow. Chaque mesure offre la possibilité d’être transporté à chaque fois dans un monde différent, aux travers des modes harmoniques se succédant avec élégance, comme dans Phrase 3, le thème ouvrant l’album. Elégance aussi dans le touché magistral du britannique John Taylor qui séduit toujours un peu plus à chaque album où lui est donné l’opportunité d’évoluer. Steve Swallow quand à lui arbore toujours aussi fièrement le timbre si caractéristique de sa basse électrique, lui qui est en recherche perpétuelle autour du son de instrument de prédilection. Soulignons aussi, et surtout, la ferveur incommensurable de Kenny Wheeler qui habite chacune de ses improvisations avec sobriété et lyrisme, comme au bon vieux temps de « Gnu High », tel un peintre insatiable déclinant les formes et les couleurs à l’infini. L’intéraction entre ces trois artistes est elle aussi infinie. La formule risquée du trio sans batterie est évidemment une réussite en la présence du talent de ce genre d’oiseaux rares. Et puis combien de musicien voudrait avoir à 81 ans autant de ferveur que ce bugliste légendaire !

Tristan Loriaut 

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31 mai 2011 2 31 /05 /mai /2011 22:36

Dreyfus 2011

Marcus Miller (b), Christian Scott (tp), Alex Han (as), Frederico Gonzales Pena (clav), Ronald Brun Jr (dm)

 marcus-miller-tutu-revisited-feat-christian-scott-live-live.jpg On serait bien tenté de se dire que Miles Davis constitue aujourd’hui un filon inépuisable que d’aucuns auraient tendance à exploiter jusqu’à la corde en se gavant de rééditions multiples et variées et de commémoration en hommage divers. Sauf qu’il ne s’agit pas ici du nième album de Ron carter rendant hommage au trompettiste mais de la captation live d’un concert donné en décembre 2009 à Lyon pour revisiter « Tutu » l’œuvre majeure de Miles de 1986, par son principal protagoniste, Marcus Miller qui en fut à la fois le compositeur, l’arrangeur, le bassiste et le producteur. Et là, forcément on se dit que le garçon a bien le droit de se faire plaisir et de faire revivre ce répertoire en l’animant d’une autre flamme. En plus des compositions de l’album de 86, Marcus Miller y adjoint d’autres thèmes de Miles, plus un sentimental mood un peu plus incongru dans le contexte.

Et si on sent quand même l’affaire commerciale à plein nez, on ne peut pas s’empêcher de prendre un panard monstrueux à l’écoute de ce live au cours duquel tous les acteurs sans exception ont largement mouillé la chemise pour donner ce soir-là le meilleur d’eux mêmes. Marcus Miller était accompagné pour l’occasion d’une jeune garde et notamment de deux jeunes pousses remarquables. Christian Scott aussi frimeur que Miles, flamboyant, balançant des grooves terribles (Ecouter sa version de Tutu) fait un très honorable Miles alors que le saxophoniste Alex Han fait lui aussi très très bonne figure, propulsant une dynamique extrême et un sacré son qui l’impose certainement comme l’un des talents de demain à suivre.

Marcus Miller avec son côté « bass-hèro » que l'on retrouve constamment chez lui aligne des chorus de folie, funky en diable mais parfois un peu lassants, comme autant de moments de prouesses à la manière d'un chien savant. Mais on lui pardonne cette manie bien communicative de se faire plaisir et de se la donner à fond. Car dans cet exercice, Marcus Miller fait exploser le groove comme personne. Ce qu'il fait sur Tomaas ( entre autre) montre qu'il est bien aujourd'hui la référence absolue de la basse moderne, dont le lyrisme dispute au beat infernal. Insurpassable. N'en reste pas moins que certains de ses interminables chorus, qui se conçoivent en concert lorsque Marcus fait le show, auraient peut être gagné à être ici raccourcis au montage.

Aux claviers, signaler absolument un extraordinaire Fredrico Gonzalez Pena qui irradie la scène de ses nappes sonores.

Marcus Miller n’avait jamais donné Tutu en live avant ce concert Lyonnais. Il y met l’âme et la braise.Ne donne jamais dans l'économie. Dans cet écho au concert de Miles de 1991, Marcus Miller fait revivre cette flamme de manière intense et totalement probante. Le public lyonnais (le veinard) que l’on peut voir dans le DVD qui accompagne le CD, exulte et s'emballe, chaud bouillant à l’unisson.

Jean-Marc Gelin

 

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31 mai 2011 2 31 /05 /mai /2011 07:12

Cam jazz 2011

John taylor (p), Julian Argüelles (ts, ss), Palle Danielsson (cb), Martin France (dm)

John-Taylor-Martin-France-Requiem-for-a-dreamer.jpg Avec son  trio de base auquel il rajoute le saxophoniste anglais Julian Argüelles, John Taylor signe un petit album très court consacré à l’écrivain Kurt Vonnegut (1922-2007) dont l’une des œuvres ( non éditée mais publiée dans le magazine In These Times) avait justement pour titre Requiem for a dreamer.

Et c’est sur cette base que John Taylor livre un matériau d’une belle finesse, tout empreint de cette belle rencontre entre le pianiste et le saxophoniste. Musique raffinée s’il en est, qui se donne le temps de déambuler, sans rêverie excessive mais avec légèreté. Le saxophoniste, très suave répond aux couleurs harmoniques données par le pianiste. Car s’il est des batteurs qui par leurs riffs parviennent à relancer les solistes, c’est pour John Taylor par son accompagnement que Julian Arguelles voit toujours ses discours relancés. Car , il ne faut pas s’y tromper, le maître de cérémonie est bien ici le pianiste dont la ligne esthéttique, le parti pris artistique est toujours bien cadré, remarquablement défini dans son écriture. John Taylor en a défini un cadre d’une superbe richesse musicale. Note particulière pour le saxophoniste, malheureusement trop absent de ce côté-ci de l’Atlantique.

Le format court est assez plaisant. Aucune lourdeur de style. Tout est en grâce sans toutefois jouer l’épure.

On aimerait cependant que les 4 protagonistes sortent parfois un peu de cette musique très intime, impose un point d’accroche. A défaut on aura pas trop de mal à se laisser séduire par ces quelques minutes de grâce.

Jean-Marc Gelin

 

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