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9 mars 2011 3 09 /03 /mars /2011 09:29

Autoprod 2011

Jean-Michel Couchet (as, ss), Andrew Crocker (tp), Marc Abrams (cb), Peter Perfido (dm)

 couchet.jpg

 

Il aura attendu de souffler ses 50 printemps avant de se lancer direct, du haut de la falaise et de sortir son premier album. Jean-Michel Couchet est comme ça, il prend son temps avant d'y aller ( quand on pense que l’album a été enregistré en 2004 puis mixé en 2006). Et pourtant, nous étions quelques-uns à l'avoir découvert (ou redécouvert pour d'autres) avec ce formidable big band, Ping machine dont il est l'une des pierres angulaires, une  des superbes fondations dont les envolées nous ont toujours cloué le bec. Je sais même que nous l'avions écrit dans ces colonnes. Mais je dois reconnaître qu'on l'avait un peu catalogué dans la catégorie des sidemen géniaux mais trop rares, restant dans l'ombre et prenant leurs heures de gloire à l'heure de s'avancer pour prendre leur chorus avant de regagner leur siège là bas derrière.

Autant dire que je me suis littéralement rué sur son album lorsqu'il me l'a envoyé, curieux de découvrir de quoi cette première galette serait faite, et surtout de découvrir ses propres inspirations. Et l'on a de quoi vous confirmer aujourd'hui ce que l'on savait hier : Jean Michel Couchet fait bel et bien partie de la classe des très très grands altistes. Dans cet album en effet où il puise  dans la tradition ici sublimée, rappropriée, Jean-Michel Couchet va chercher, au-delà de ses propres compositions, vers celles notamment de Ornette Coleman dont on sent bien que les premiers quartet avec Don Cherry sont une source inépuisable d'inspiration pour lui. A l'instar de son aîné légendaire, notre saxophoniste fait la brillante démonstration que le jazz, au-delà de la science de l'improvisation, est affaire de puissance contrôlée et d'énergie, d'urgence à dire, d'urgence à exprimer cette palette large de sentiments qui va de la passion forte à la passion douce. Ainsi Happy House d'Ornette ( justement) laisse place à la pétillance du jeu partagé avec le trompettiste americano-parisien, Andrew Crocker dans le pur esprit d'un quintet libéré comme l'on en fait plus beaucoup. Au-delà du cadre formel il y a la place laissée à l'émergence de la phrase, l'émergence du swing, les questions et les réponses qu'ils se lancent tous les quatre comme des défis, comme si c'était pas prévu, comme si ça venait du spontané, du pas calculé, du qu'il faut se dire absolument là tout de suite, parce que c'est le moment, parce que le tempo est bon et qu'ils sont là tous les 4 embarqués dans la même histoire et qu'on ne sait pas trop où tout cela va les mener. Mais aussi ce jeu en trio dans cet In another Life où tout est affaire de sensibilité ( ce que j'imagine on appelle le feeling), ce soft beat où excelle l'art de faire surgir la note bleue, où le trio s'enroule, lascif dans un pur plaisir du jouer et de se laisser porter par la vague de l'alto de notre serviteur.

Jean-michel Couchet excelle, porte la vague à lui tout seul, semble porter toute une histoire du jazz dont il fait là l'admirable  synthèse. Car Jean-michel Couchet a compris que dans le jazz tout est dans la colonne d'air. Celle qui va de la plante des pieds au cerveau. Celle qui lui donne l'aisance, la fluidité, le son, le lyrisme au phrasé qui swingue, l'art de se promener dans les espaces de l'harmonie et enfin la puissance du geste qui dynamite tout. C'est ça Jean-michel Couchet + ce syncrétisme du jazz moderne qui regarde devant.

Jean-marc Gelin

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4 mars 2011 5 04 /03 /mars /2011 08:06

Harmonia Mundi  2011

 

Alain Debiossat – saxophones, flûte, guitare rythmique

Diego Imbert – contrebasse

Stéphane Edouard – percussions

Invités : Claude Egea – trompette ; Paco Sery – congas ; Didier Ithursarry – accordéon ; Jean-Pierre Como – synthétiseur ; Louis Winsberg – guitare ; Jean-Charles Kely – kabôsy, chant ; Olivier Temime – saxophone ; Lionel Suarez – accordéon ; Matthis Pascaud – guitare ; Jean-Marc Périssat – batterie ; Michel Alibo – basse ; René Lacaille - accordéon

debiossat.jpg

Valse et Attrape, est le dernier album d’Alain Debiossat, musicien connu pour être un des membres fondateur et saxophoniste de Sixun. La base rythmique repose sur le duo composé de Diego Humbert à la basse et Stéphane Edouard à la batterie. De nombreux musiciens, des compagnons de longue date, un chanteur malgache et Sixun au grand complet participent également à l’aventure.

Valse et Attrape, est un album de compositions entièrement signées par Alain Debiossat, qui propose un disque mélangeant différents genres musicaux. Comme le titre de l’album le précise, on y entend des valses à trois temps comme Vignane ou Valseria dans lesquels il laisse s’envoler sa flûte ou son soprano. L’opus se termine par une dernière valse La Joliette avec un des ses fidèles compagnon de route à la batterie, Jean-Marc Périssat.

Il ne s’enferme cependant pas uniquement dans la musique de salon et explore d’autres univers, avec des morceaux plus jazz funk comme Troubadour Blues, où le duo saxophone/trompette fonctionne plutôt bien. On y perçois toutes les influences musicales qui ont marquées sa carrière : l’influence africaine dans Terres Bleues où il invite le chanteur malgache Jean-Charles Kely ; les musiques caribéennes ou Sud américaines que l’on perçoit dans Sommeil de l’ange ou encore des couleurs musicales issues de ses neuf années passées au sein de l’Orchestre National de Barbès.

Enfin, Alain Debiossat offre de belles envolées à l’alto sur Gala de Prestige, morceau au rythme dance-flore qui vient rompre avec l’esprit valse et world musique.

A l’écoute de ce disque, on perçoit qu’il est un musicien de la terre, d’ici et d’ailleurs et de ce projet (tout comme l’illustre parfaitement la jaquette) il en résulte un album folklorique aux compositions gaies et colorées.

Julie-Anna DALLAY SCHWARTZENBERG

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4 mars 2011 5 04 /03 /mars /2011 07:56

Vinicius Cantuára & Bill Frisell : ”Lágrimas Mexicanas”

NAIVE  2011

Vinicius Cantuára – vocal, guitare, percussions, Bill Frisell – guitare

 lagrimas.jpg

 

Onze ans après leur collaboration sur The Intercontinentals de Bill Frisell, Vinicius Cantuára et ce dernier se retrouvent sur album qui sort sur leurs deux noms Lágrimas Mexicanas.

Vinicius Cantuára, chanteur guitariste brésilien émigré à New York depuis plusieurs dizaines d’années a notamment travaillé avec David Byrne, Brian Eno, Marc Ribot … Bill Frisell, guitariste de l’avant-garde New Yorkaise dont les sonorités et les harmonies sont reconnaissables dès la première note, à de son côté joué avec MacCoy Tyner, Paul Bley, John Zorn, ou encore Jim Hall.

Lorsque deux musiciens de talent se rencontrent, cela fait souvent des merveilles. L’ensemble des morceaux nous plongent tout droit dans un exotisme brésilien au mélange folk. Sur les morceaux chantés,la voix suave de Vinicius Cantuára nous rappelle celle de Caetano Veloso qu’il a par ailleurs accompagné comme percussionniste et on est alors plongé dans le saudade, cette inexplicable nostalgie ou « manque habité ». Ici, il chante, joue de la guitare acoustique et des percussions. Et lorsqu’à cette déferlante de Brésil s’ajoute la guitare de Bill Frisell, la musique prend du volume et la magie opère.

Ils réussissent à combiner lyrisme, intimité, identité sonore et élégance. Alors que les titres sont tous plus ou moins en rapport avec les sentiments, les émotions et l’amour, les musiciens racontent tout de même les Lágrimas Mexicanas au rythme d’une samba. Les compositions sont intelligentes, inventives et créatives. Et si cet album laisse une large place à la musique latine, grâce au génie de Frisell, on y entend du jazz, de la country, de la folk et une pointe de blues .... Les deux musiciens savent tirer partie de cette collaboration artistique et le disque est marqué de leurs empreintes musicales respectives.

Le résultat de leur retrouvailles donne une musique pleine de douceur, de finesse, entre bossa et country, avec un groove phénoménal !

Làgrimas Mexicanas est un album qui réchauffe l’âme et le corps. A écouter et à réécouter encore et encore.

 

 

Julie-Anna Dallay Schwartzenberg

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3 mars 2011 4 03 /03 /mars /2011 04:27

  A l'occasion de la distribution numérique de ce cd, nous avons choisi de publier à nouveau cette recension de Jean-Marc Gelin.

 

Pochette_CD.jpgLes Disques de Lily 2010 

Sébastien Llado (tb), Leila Olivesi (p), Bruno Shorp (cb), Julie Saury (dm)

Dans une figure de style commode, un peu fourre-tout, on parle souvent de « l’album de la maturité » lorsque l’on croit pouvoir déceler un truc un peu sérieux qu’il faut bien reconnaître, on avait pas saisit auparavant. L’album de Sébastien Llado ne devrait pas échapper à ce genre de cliché pourtant bien réel en l’occurrence. Car il s’agit bien ici de la révélation d’un musicien que l’on croyait connaître et qui nous prend ici totalement à contre-pied. C’est normal, Sébastien est insaisissable. Touche à tout. Il va vite, parfois trop vite pour nous. On le croise souvent, sur les scènes, dans les clubs, dans toutes les instances représentatives du jazz. Impossible de ne pas succomber à son sourire charmeur, à son humour décapant (les chiens ne font pas des chats….) Jusqu’au point de l‘avoir rangé sans discernement dans la catégorie des sidemen sympas, des touche-à-tout à tendance trublionne affirmée.

Fort heureusement la publication de ce concert « live » au Sunside, premier exemplaire du nouveau label «  Les Disques de Lily » ( label nouveau-né de Jérôme Gransac que les lecteurs des DNJ connaissent bien), cette publication disais-je, devrait remettre les choses à leur place : Sébastien LLado est sérieusement un musicien pas sérieux doublé d’un tromboniste exceptionnel et triplé d’un compositeur de grand talent. On le situe d’emblée dans la lignée d’un Steve Turre ( dont il affirme d’ailleurs la paternité), dans le feeling d’un JJ Johnson ou dans le funk d’un Fred Wesley. Sans se la raconter le moins du monde, Sébastien Llado affirme pourtant toute l’étendue de sa sensibilité musicale. Un peu comme s’il était tombé dedans tout petit. Il joue avec un naturel déconcertant du growl, des glissandos, ou des feeling funky ( un Billie Jean de Michael Jackson en ouverture pour faire chauffer la salle !). S’assume en grand ordonnateur d’un fort beau quartet, distribue les rôles, et offre au passage à Leila Olivesi ( alors enceinte de 8 mois) l’une de ses plus belles prestations empreinte d’une étrange sérénité dont elle imprime la marque. Le tromboniste que l’on savait entouré hier de filles de grand talent peut compter sur le drive sans faille de Julie Saury ( complice de longue date) et, dérogeant pour l’occasion à son gynécée, sur un Bruno Schorp remarquable de gravité et de précision métronomique dans l’assurance du swing. Les compositions de Llado se suivent, ne se ressemblent pas, éveillent les sens et ouvrent des horizons très personnels. Ces horizons sont parfois poétiques comme ces bien nommés Elans vers la luneaux contours harmoniques très riches. Ces horizons sont aussi des lignes de feu comme sur ces Dernières Danses, morceau porté par une belle intro piano- contrebasse rejoint ensuite par Julie Saury et enfin par Sébastien LLado en maître saucier qui fait monter la mayonnaise du groove porté à son tour par une rythmique en eaux vives, poussant à l’extrême extrême limite de ce qui va devenir free mais reste pourtant dans le cadre. On pense à Albert Mangesldorff. L’horizon de Llado est aussi déjanté, transfiguré (Tranz Tanz), arrangé avec soin ou dérangé avec autant d’application. On adhère un peu moins, dans une approche «  CD » à l’intermède Coquillage et Crustacésà la conque ouvrant sur une Magrade( Madraguedéconstruite) qui se prête surtout à la facétie du live mais tombe un peu à plat lorsque l’on est dans son salon. On se vautre en revanche avec une de « caillera » dans un blues un peu sale où sur In a Mean Timele tromboniste mute en feulement de gros chat de gouttière ronronnant et narquois.

Et c’est bien d’une découverte qu’il s’agit au travers de ce premier album de Sébastien Llado paru chez les Disques de Lily. La découverte d’un musicien complet et rare dont l’écriture et le jeu recèlent cette part d’évidence du jazz qui groove de source, cette évidence de l’énergie et de la sensualité torride, lascive qui réunissait ce soir-là les acteurs totalement impliqués dans l’instant présents et qui font de ces clubs de jazz des champs du possible et de l’impossible où de grands musiciens se révèlent plus grands qu’eux mêmes. Et portent haut les couleurs du jazz. Encore fallait t-il l’audace de saisir cet instant.

Jean-Marc Gelin

En écoute

 

Site du musicien

Site du label

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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 22:17

MEDERIC COLLIGNON EST CASH…… (MiRE)    

  Mederic Collignon 2009par Jean-Marc Gelin

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 


    Clotilde RULLAUD - Interview in extremis In-Extremis-Portrait-C-Rullaud1-BD©Cécil-Mathieu

par Lionel Eskenazi

Une rencontre avec Guilhem Flouzat

Guilhem Flouzat


 

par Tristan Loriaut

 

 

 

 

 

 

 

  Bobby Mc Ferrin, chanteur corps et âme

 

Bobby-McFerrin

par Jean-Marc Gelin

 

  "LE MONDE DE SOPHIE", une interview de Sophie Alour 

 

ALOUR.jpg 

par Lionel Eskenazi

 

 

 

 

 

 

 

 

Stéphane Kerecki, la construction de soi  

   kerecki2

par Jean-Marc Gelin

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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 18:41

 

miconissim.jpgSortie le 17 mars 2011 / Concert le 22 mars au Sunside à Paris.

Label Cristal Records/ Harmoni Mundi

 

 

 

Le pianiste Mico Nissim qui a déjà publié huit enregistrements sous son nom, s’attaque cette fois à deux figures emblématiques d’un jazz qu’il estime « dyonisien », tant cette musique novatrice, fragile et immédiate, dérangeait. Il rend ainsi hommage à Eric Dolphy et Ornette Coleman mais envisage avec ce projet  préparé avec soin, les « conséquences » actuelles sur le jazz, réfléchit à l’avenir de cette musique entre écriture et improvisation. Il fallait donc aller plus loin que ce double tribut, au répertoire très connu, ( trois pièces de Dolphy et cinq de Coleman), enregistré live lors d’un concert unique, au Studio de l’Ermitage, à Paris, le 30 mars 2009.

L’objectif est atteint, la musique libre, authentique, sonne juste aujourd’hui encore, reste accessible : c’est un jazz vif, plaisant sans être facile, audacieux dans la forme. Le pianiste a « potassé » la question auprès de spécialistes et a vraiment réfléchi à quels thèmes choisir, comment les réinvestir sans oublier de rendre compte de leur histoire, de l’essence même de leur interprétation.

La reprise la plus frappante est celle du tube d’Ornette Coleman Lonely Woman que tous les Jazzmen tentent de s’approprier un jour ! Ce thème sublime, véritable passage obligé, est revisité avec habileté et audace, l’exposition du thème shuntée.

D’une façon plus générale, ces arrangements introduisent contrepoints, impros collectives ou solistes, harmoniques, modales, harmolodiques ou ouvertes. Mico Nissim, l’instigateur de ce projet sensible et légitime, a retravaillé les écritures de Dolphy et de Coleman, traduisant sans trahir pour soumettre le résultat à cinq individualités fougueuses.

Ainsi l’intensité de cette musique spontanée, généreuse se vit au sein d’une création continue, effervescente qui semble couler en dépit d’une structure rigoureuse.

Le choix des musiciens du sextet était essentiel : l’altiste Géraldine Laurent est superbe, Stéphane Guillaume, chaudement recommandé par  Laurent Cugny, depuis son big band Lumière, s’avère indispensable à la flûte et clarinette basse, les instruments de Dolphy. La rythmique est de rêve : Mourad Benhammou a un drive saisissant et Jean Luc Ponthieux assure en fidèle contrebassiste. Enfin Laurent Mignard à la trompette de poche, vibre à chaque intervention jusqu’au Jump street  final!

Les compositions de Dolphy, fringantes, subtiles, lyriques sont arrangées finement et on s’amuse à voir ce qu’en fait le sextet comme dans ce G.W, hommage au trompettiste chef d’orchestre et arrangeur Gérard Wilson, ou dans Serene époustouflant à chaque chorus  

Le lien est naturellement établi avec Ornette Coleman puisque Dolphy participa à l’enregistrement du mythique  Free jazz en 1960, improvisation collective historique.

La continuité est évidente, on sent que la musique non seulement crée de nouvelles atmosphères, mais se démultiplie, souffle et apaise, construit et déconstruit.

Voilà un disque formidable qui garde certaines résonances aujourd’hui, toujours porteur de sens et de vertus formelles. Inutile d’insister, vous aurez compris qu’il est vivement recommandé en live ! Programmateurs, à vos commandes !

 

Sophie Chambon

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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 17:51

  Label Durance/ Orkhêstra International

Atelier Musiques Improvisées

 Studio Ecs

APPDM Studio


Pour les vingt ans d’existence de cet Atelier de Musiques Improvisées -à ne pas confondre avec l’A.J.M.I, même si ces deux associations sudistes oeuvrent pour le jazz et les musiques improvisées- fut donné le 15 janvier 2010 au théâtre Durance à Château-Arnoux(Alpes de Haute Provence) ce concert anniversaire intitulé « Cet Inexprimable vingt ans ».Titre un peu mystérieux qui s’éclaire avec les notes précises du chef de projet, la cheville ouvrière, le batteur Alain Soler, compositeur et arrangeur qui indique que, chez les Mayas, le nombre «vingt» signifiait plénitude, autant que l’inexprimable de la condition humaine.
C’est donc, sans plus parler, que cette belle assemblée musicale, en une suite d’une heure exprimera les convictions et objectifs de l’A.M.I  : travailler les musiques improvisées,sans jamais se déconnecter de l’héritage de cette musique, du blues au free jazz, construire une identité forte avec les « gens d’ici » , créer un lien social, pluri-générationnel.

Suivant une ouverture tellurique du collectif des percussionnistes, un quatuor effervescent, incandescent, des solos remarqués des membres de la rythmique (Sébastien Lalisseau piano, Lionel D’Hauenens à la basse électrique, Alain Soleraux drums).

Quel régal d’entendre tous ces musiciens, on attribuera une mention spéciale à chacune des interventions du guitariste Fred Garniermais l’acmevient de la réunion des quatre saxophonistes -AndréJaume à l’alto, Raphaël Imbert etEric Barret au ténor,LarrySchneider au soprano -dans deux titres particulièrement longs où chacun peut exprimer son talent : Louise(Hommage à Louise Michel) et  Le Blues des Communards , « à mettre en résonance avec le mur des Fédérés au Cimetière du Père-Lachaise » précise le compositeur de ces merveilles, Alain Soler.

Voilà pour nous la quintessence du saxophone, instrument du jazz s’il en est, dans tous ses éclats.

Le dernier titre qui swingue avec bonheur n’est qu’un « Au revoir », tant on espère que continue longtemps cette association d’enthousiastes et d’amoureux du jazz.

 

 

Sophie Chambon
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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 15:41

Naive 2011

Tigran Hamasyan (p), Ari Hoenig (dm), Gilad Hekselman (g), Orlando Le Fleming (cb), Chris Tordini (cb)

 

 

 hoenig.jpg

La cause est définitivement entendue et sans appel : le batteur américain fait bel et bien partie des batteurs les plus doués de sa génération. Je me souvient de ce travailleur acharné vu il y a quelques temps, après les balances répéter seul et sans relâche jusqu'à l'heure du concert. Des heures durant devant sa batterie à essayer des formules, des riffs, des choses entendues nulle part ailleurs. Tenter de faire sonner sa batterie comme s'il s'agissait d'un clavier ou d'une instrument vocaliste. Jamais satisfait. Autiste à tout ce qui n'est pas musique.

La sortie de ce nouvel album, dans un format inédit qui le voit associé au pianiste Tigran Hamasyan ne fait que confirmer le génial batteur dans son rôle de tout premier de la classe. Et pour l'occasion au lieu de dire "Lines of Oppression" comme le suggère le titre de l'album on serait plutôt tenté de dire " Lines of liberation" s'il l'on écoute comment ce quartet, s'entend à libérer un groove en "fusion". Car c'est bien de cela dont il s'agit ici, une affaire de rythmique, de pulses, d'enchainement des métriques et d'un son basé justement sur la maîtrise du "beat". D'un univers un peu methenien qui ouvre l'album ( l'occasion de découvrir un formidable guitariste, Gilda Hekselman) on arrive vite à la griffe  fougueuse d'un Tigran Hamasyan décidément omniprésent sur la scène du jazz en ce début d'année. Il n'est que d'entendre sur Arrows and Loops sa verve et sa puissance de jeu, soutenue par une rythmique qui emporte tout. Mais si ce volume orchestral mis en espace par Hoenig revèle une composition intéressante sur la forme (par le jeu complexe des métriques) elle est un peu décevante sur le fond et peine à captiver. C'est d'ailleurs le problème de l'album : brillant mais sans réelle émotion. On a du mal à se convaincre aussi sur Wedding Song vocalisé de façon un peu mielleuse et censé apporter là, un contraste doux. Monk vient redynamiser l'ensemble avec ce Rythm a ning entamé sur le mode course poursuite éperdue. Sur Moanin Ari Hoenig fait chanter sa science de l'instrument qu'il transforme en vocalise du thème. Impressionnant techniquement mais toujours à côté de la plaque s'il s'agit d'émotions. Pas passionnant en soi. Car le fond de la question n'est pas de savoir comment Ari Hoenig dit les choses, mais plutôt ce qu'elles sont, intrinsèquement.

Mais quand la musique s'aère comme sur Love's feathered nails ( composé par le batteur), le drumming de Ari Hoenig profite d'un Tigran Hamasyan un peu moins envahissant pour laisser parler sa créativité en perpétuel mouvement. Un rêve : entendre Hoenig associé un jour à Metheny. Ephemeral Eyes est un occasion de voir un autre visage de Tigran hamsyan totalement à l'aise avec des fondamentaux plus traditionnels dans ce morceau plus bop composé par Hoenig. La percussivité du jeu du pianiste en réponse à celle du batteur. Brillante démonstration du savoir faire d'un pianiste décidément caméléon. Sur How high the moon totalement réinventé sur le plan harmonique, on entend clairement la fusion de ce trio. Ari Hoenig encore une fois, c'est le relief, les dorures et les bigoudis, les entrelacs et les coups de pinceaux, les petites touches impressionnistes et les roulements subtils. Ari Hoenig invente à chaque pattern, surprend à chaque riff. C'est Shiva ! Hoenig ne tient pas le tempo, il en tient 10 !

Au final l'album se conclut sur un morceau composé par la pianiste et empreint de ses propres racines. Toute la personnalité du pianiste dans cette composition.

Et l'on reste sur le sentiment d'avoir assisté à un très beau moment de musique, d'improvisation et de jazz. Une leçon de polyrythmie à laquelle on pourra adhérer ou qui pourra lasser.

On sort de cet album avec à la fois, dans les oreilles quatre voix distinctes mais aussi la certitude d'avoir assisté à la naissance d'un quartet totalement fusionnel. La musique se crée. Les improvisateurs sont tous brillantissimes. Mais s'ils brillent trop, ils éblouissent.

Jean-Marc Gelin

 

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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 12:00

cedric-hanriot---french-stories.jpgPlus Loin Music/ Harmonia mundi

2010

Sortie le 17 février 2011

Site de Cédric Hanriot

Myspace Cédric Hanriot


 

Cedric Hanriot French stories , tel est le nom du projet, sur le label Plus loin, du pianiste-compositeur, arrangeur français.

La perspective se renouvelle à chaque plage, conçue comme une petite narration, reflétant couleurs et ambiances qui traversent l’horizon musical du moment, l’unité se construisant autour d’un bon son collectif, équilibré, où le piano ne domine pas les autres instruments. Au contraire, la rythmique puissante etaméricaine deTerri Lyne Carrington à la batterie et de John Patitucci à la contrebasse ou à la basse électrique, confère à l’ensemble cette couleur jazz, incomparable.

Joyeuse, efficace, stimulante, la batteuse impulse un drive reconnaissable, soutenue par des solos délicatement lyriques du contrebassiste, qui, à la basse électrique fait preuve d’une précision insurpassable.

C’est le pianiste Cedric Hanriot qui joue des nuances, et confère sa qualité éclectique au disque.

S’il est arrivé tard dans le monde de la musique, ayant commencé par un masters en électronique et traitement du Signal audio (assez peu explicite pour le béotien), on comprend vite qu’il maîtrise tout ce qui touche le son, du grain à la couleur, qu’il est un adepte du travail sur la sculpture et la mise en espace sonores. Ajoutons que son « background » l’a poussé à voyager et vivre aux Etats Unis où il a vite accompagné des musiciens américains. Il est donc enclin à se frotter à tous les styles, genres et techniques : les dix plages explorent de façon ouverte et volubile le jazz et les autres musiques actuelles, pop, électro, R&B, blues, hip hop que Cedric Hanriot a su s’approprier en les pliant et dépliant, tentant ouvertures, passages, frontières abolies.

Ce n’est donc pas un disque de pianiste, même s’il nous offre plus qu’un aperçu de tout ce qu’il sait faire avec un clavier, excellent «ambianceur» : il passe d’un Prélude tendrement romantique au fender, avec violon (Benjamin Powell) et violoncelle(Patrick Owen) à un Mambo électrique et électrisant qui évoque la fusion . Le beau Tribal poem conduit à une transe, un crescendo tout à fait hypnotique. Tels sont quelques exemples des formidables possiblités de ce musicien « touche-à-tout », véritable « homme orchestre », musicien habile qui sait aussi casser les « codes » de la musique.

Le titre pourrait prêter à confusion après ce que nous venons de dire si, dans le répertoire de Cedric Hanriot, il n’avait réservé une place de choix à la chanson française, quatre titres sur dix, de Brel à Nougaro sans oublier Piaf. Et même plus surprenant, le pinaiste choisit Michel Delpech, aujourd’hui fringant sexagénaire, un temps l’idole des minettes dans la pop sucrée des seventies. Ainsi avec goût, Cedric Hanriot reprend le gentillet Que Marianne était jolie, grand succès de Delpech sur des paroles de Pierre Papadiamandis, le parolier de Mr Eddy, en l’arrangeant avec cordes et autres effets sonores bienvenus : la petite mélodie simple et fraîche en est ainsi toute retournée. Cedric Hanriot revendique son identité de « Frenchie » en revisitant certaines chansons de la mémoire collective. Le chef d’oeuvre de Brel, La chanson des vieux amants, conserve, par le grain mélancolique du violoncelle, de sa force émotionnelle, avec la voix de 2TH traitée en instrument, s’intégrant à la musique plus que la supportant. Il est judicieux en effet de traiter différemment des chansons de notre « patrimoine » aussi marquées.

L’hymne à l’amour est retravaillé en un duo piano cristallin et voix étirée, chuchotée, sur un rythme ralenti, une version pour le moins originale, pas toujours convaincante, mais qui change au moins du classique immémorial de la môme Oiseau. On aura cependant une préférence, dans cet arrangement de chansons françaises, pour la reprise du tube génial de Nougaro Le Jazz et la Java : avec d’incessantes ruptures de rythme , brisures, ça swingue même !

Voilà donc un disque d’éclats, une petite architecture sonore qui tient à un rien qui est tout, le temps : on voyage dans le temps de la musique, des saisons et années…

 

Sophie Chambon

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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 11:07

  Original Sound DeLuxe Jazz calendar

Cristal Records / Harmonia mundi

Sortie le 3 mars 2011

 

 

 Ce Cd unique en son genre donc précieux, rassemble toutes les musiques après coup, éclats de toutes les saisons, le jazz par ses dates, mois et jours.

Une fois encore, la collection Original Sound Deluxe  chez Cristal records, a frappé fort avec une thématique originale, spécifique au jazz, qui sculpte le temps.Quand on sait que les jazzmen et leurs amateurs sont selon la belle formule de Pascal Quignard, les « chevaliers de l’éphémère », il est essentiel de garder une trace, de fixer les choses.

Avouons le, ce calendrier du jazz permet une fois encore à l’éminent Claude Carrière de sélectionner de pures merveilles !

Ainsi, du June in January qui commence l’album avec les frères Montgomery à New York, automne 1960  avec Wes, en guitariste soliste. Claude Carrière nous précise que certains mois ont fait le délice des jazzmen en particulier les beaux mois du printemps « April » et « May ». Ilexiste plus de 700 versions de I’ll remember April, vrai casse-tête, aussi préfère-t-il  proposer April in Paris dans une  version des plus célèbres, celle d’Ella Fitzgerald avec le Count Basie Orchestra, le 26 juin 1956. Une référence, avec la répétition du final,  annoncée par un sémillant « One more time » qui a fait ses preuves depuis… 

Avec Julie London, Claude Carrière trahit une de ses préférences puisqu’elle revient deux fois dans la sélection, ce qui rachète certaines erreurs commises à son encontre. Philippe Méziat nous apprend dans le Jazz Magazine de décembre 2010 consacrées aux chanteuses, qu’elle n’a pas eu les honneurs du Dictionnaire référence de Carles,Clergeat et Comolli. Nous sommes quand même allés vérifier tant cela paraissait impossible. Oui la belle est oubliée, peut-être ne lui pardonnait-on pas sa couleur, son charme ou d’avoir trop flirté avec le cinéma dans des westerns remarquables comme L’aventurier du Rio grande de Robert Parrish ou L’homme de l’Ouest d’Anthony Mann ou   comme Dean Martin qui d’ailleurs ne figure pas davantage…

Merci donc pour ses deux compositions plutôt rares, enregistrées en novembre 1956 avec Peter King et son orchestre :  February brings the rain composée par Bobby Troupe dont elle était la femme, (l’auteur du fameux Highway 66) et  November Twilight.

Nous apprécions de retrouver une des chansons les plus connues de Kurt Weill dans sa  période américaine, l’immortel September dans la version de Django qui date de mars 1953, son avant-dernier enregistrement.

Nous n’allons pas passer en revue tous les mois de l’année, Claude Carrière le fait avec érudition et humour dans ses excellentes « liner notes », autre bon point de la collection avec les illustrations de Christian Caillaux. La discographie est impeccable avec le « line up » précis et détaillé.

 

Quant à la semaine, elle commence en beauté avec le formidable A Monday Date du pianiste Earl Hines pour les Hot Five de Louis Armstrong dans sa version princeps du 27 juin 1928.

A chaque fois, en proie à un émerveillement et une émotion que rien ne saurait remplacer, on choisit d’arrêter le temps des jours afin de s’immiscer dans le temps de la musique, à jamais fixée par sa durée et sa date d’enregistrement. Est-ce en cela que cette musique est si attachante, voire troublante pour certain(e)s d’entre nous, sensibles à cette déclinaison, à ce partage renouvellé ? 

Pour clore cette sélection en 19 titres, on aurait pu s’attendre à un Gloomy Sunday de circonstance mais non, Claude Carrière ne veut pas nous laisser sur une note  triste, c’est Ben Webster et son ténor velouté qui s’y colle, le 6 novembre 1959, avec Ray Brown, Oscar Peterson et Ed Thigpen  sur le Sunday de Jule Styne créé en 1926. La classe pour finir cette compilation qui égrène le calendrier de la vie!

 

 

 

Avec cet autre numéro plus classique, Claude Carrière devrait en ravir plus d’un, car il annonce le retour attendu d’un instrument de choix, la guitare. Et même dans cet Electric Guitar Masters, sont célébrés les pionniers de l’amplification, qui dès la fin des années trente, purent rivaliser avec les « vrais » instrumentistes du jazz, saxophonistes, trombonistes, trompettistes…

A tout seigneur…commençons avec ce feu d’artifice, concerto pour guitare, le Solo flight du prodigieux Charlie Christian dans le grand orchestre de Benny Goodman le 4 mars 1941, sur des arrangements de Jimmy Mundy, testés la veille dans une émission de radio, sous le titre Chonk, Charlie Chonk . Voilà un titre phare de la discographie goodmanienne, de l’histoire de la guitare…et du jazz accessoirement !

Sur cette anthologie soignée, on retrouvera évidemment le Nuages de Django dans sa dernière version enregistrée deux mois avant sa mort, avec une guitare munie d’un haut parleur.

Après suivent d’autres grandes figures de la guitare « moderne » influencées par le bebop comme Tal Farlow, plus proche du blues comme Les Paul ; Wes Montgomery donne son Round midnight du 5 octobre 1959 (avec le pouce et sans mediator). Tous sont formidables, virtuoses, porteurs d’avancées stylistiques, accompagnateurs attentifs comme Barney Kessel, qui rend hommage à Charlie Christian (évidemment) ou Jim Hall dans un Skylark qui mérite qu’on dresse l’oreille, dans le John Lewis quartet, en 1956 avec le batteur Chico Hamilton.

 

Nous finirons avec certaines pépites plus modestes, terriblement émouvantes comme le solo de Johnny Smith  sur The Boy Next Door,  ballade des plus  « cool » ;  après Pennies from heaven de Jimmy Raney, le formidable René Thomas  dans son  René Thomas Modern Group, en 1956  avec  Benoît Quersin  à la contrebasse nous donne un Someone to watch over me qui aurait plu à Gershwin, son auteur.

Comment résister au charme de l’Américain Jimmy Gourley (à Paris depuis 1951) qui, avec les agitateurs Henri Renaud, Pierre Michelot et Jean Louis Viale (il ne faudrait pas oublier ces noms là), trio maison du Tabou, cave à jazz de la rue Dauphine, revisitent Cole Porter.

La sélection s’arrête forcément aux années 60 (droits de réédition oblige ) avec deux raretés, deux  « curios », le totalement méconnu Billy Bean dans un extraordinaire Surf of two avec le quartet de l’altiste Bud Shank, le 18 avril 1959 avec Gary Peacock à la contrebasse. Le dernier titre est le solo incroyable sur le thème d’Ellington  Prelude to a Kiss de  Jimmy Wyble « guitariste pour guitaristes ». Merci de nous faire découvrir ces quelques minutes de grâce. Si jamais vous avez dans votre entourage quelqu’un qui se pique de comprendre quelque chose à la guitare ou qui en joue tout simplement, faites lui écouter cet album ... il sera votre éternel débiteur !   

 

Sophie CHAMBON

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