20 septembre 2008
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Ronnie Lynn Patterson (p), Stéphane Kerecki (b), Louis Moutin (dms). HHHH
Zig Zag 2008

A ma droite, la mélodie, la musique classique européenne et la main droite du pianiste. A ma gauche, le rythme, le jazz afro-américain et la main gauche du pianiste. Au centre, Ronnie Lynn Patterson, pianiste afro-américain installé à Paris, passionné de musique classique et de jazz ! Un toucher de piano fin, délicat, élégant et sensible, rarement entendu depuis Bill Evans (Freedom Fighters en version adagio ou allegro). Un travail passionnant sur le rythme, un sens du swing évident (Santa Fe) et une certaine ferveur accentuée par des racines blues et gospel (Faith). Un bel hommage à la période free de Keith Jarrett (Mandala) et aux conceptions harmolodiques d’Ornette Coleman dans les délirants développements de For Ornette Coleman. Une vieille chanson traditionnelle My Wild Irish Rose (que Jarrett avait reprise dans Melody at Night with you), jouée dans une version totalement épurée, où les silences crées par les notes détachées du piano font partie intégrante de la mélodie. Un clin d’œil subtil à Rachmaninov à l’intérieur du très lyrique Leslevret. Vous l’aurez compris il s’agit d’un disque sublime d’un pianiste mature, au sommet de sa créativité artistique. Un pianiste remarquablement bien entouré par deux musiciens que l’on connait bien en France : le contrebassiste Stéphane Kerecki et le batteur Louis Moutin. A eux trois, ils forment un trio très organique et magique où l’alchimie musicale n’a d’équivalent que dans les célèbres trios de Bill Evans ou de Keith Jarrett.
Lionel Eskenazi
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20 septembre 2008
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ACT 2008
Esbjörn Svensson (p), Dan Berglund (cb), Magnus Öström (dm)
Cela commence par quelques notes amenées de la plus douce des manières. Un débit acoustique qui pourrait laisser croire à un album de jazz très honnête et très propre sur lui. Ce serait ignorer la conception artisitique très poussée de ce trio. Car très vite l’on s’aperçoit qu’il y a quelque chose derrière les choses. Quelque chose de caché là, un drame immanent, une tension qui pointe. Tension sourde mais toujours palpable.
Paradoxalement cet album là, le dernier enregistré avant la mort cet été de Esbjörn Svensson lors d’un accident de plongée est à notre sens le meilleur du trio. Peut être le plus abouti artistiquement. Paradoxalement en effet puisque que cet enregistrement réalisé en Australie est le résultat d’une longue scéance d’improvisation. Rien d’écrit. Tout au feeling dans le studio. Il faut arriver à un point extrême de fusion et d’intimité télépathique pour parvenir à vibrer à la même intention spontanéee comme ils le font ici. On appelle cela l’osmose. Dépassant les canons classiques du jazz, ces trois là vont puiser à d’autres sources leur inspiration. Elle vient de la pop pour beaucoup et de Radiohead certainement mais ne renie pas les apports de grands trio de jazz comme celui de Meldhau, référence reciproque jamais cachée. Dès le deuxième titre, c’est du E.S.T reconnaissable entre mille. Svensson prend son temps, utilise l’espace et s’affranchit de toute contrainte formelle tandis que la rythmique crée une mise en tension permanente. La musique exerce alors son pouvoir de fascination totale, suggère moins qu’elle ne dit nous laissant captivés, captés dans la toile qu’ils tissent autour de nous. Il y a un effet très visuel dans cette musique là qui évoque de longs travellings. Dan Berglund dans le rôle du bassiste-guitariste laissé libre à lui même porte littélaralement tout l’album inspirant autant de respiration régulière que de sauvagerie folle. Magnus Östrom utilise sa caisse claire comme les balles d’une mitraillette faisant succéder à ce no man’s land désert, des images de guerre et de chaos. Et aussi ce sublime morceau de 9’’, Still où derrière cet espace patiemment construit se dessine une mélodie comme une ligne d’horizon qui lentement se détache du paysage, se rapproche à pas comptés et s’installe enfin, nettement, dans un moment d’émotion rarement atteint chez E.S.T. Beau à pleurer.
Au début de Leucocyte, pièce conçue en 4 parties ( Ab initio ; Ad interim ; Ad Mortem, Ad Infinitum), c’est un univers de chaos et de fureur qui s’installe. Vient ensuite une plage entière de silence total, Ad Interim comme une césure obligée après avoir touché à une expression paroxystique irrésistible. Ad infinitum clôture de manière envoutante cet album sur une sorte de carillon d’église fantomatique dans une mise en scène angoissante que ne renierait pas un dramaturge comme Castelluci. Car c’est bien de cela dont il s’est agi durant tout cet album. D’un drame à l’antique où le paradis le plus pur côtoie l’enfer de Dante. Les dernières notes nous laissent, avec cette intérogation manichéenne où les frontières du paradis et de l’enfer semblent mêlées. Et ces dernières notes parce qu’il s’agit précisément des ultimes notes enregistrées par Svensson, sont poignantes. Et le silence qui suit est alors totalement assourdissant.
Jean-Marc Gelin
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17 septembre 2008
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MARJOLAINE REYMOnd : « Chronos in USA »
Cristal 2008

Quelle radicalité dans le travail de la chanteuse et compositrice Marjolaine Reymond ! Assumant complètement sa formation initiale de chanteuse lyrique, loin de toutes les modes et conventions, brassant avec énergie et intelligence les influences classiques, contemporaines, rock et jazz, elle nous offre un album de musique improvisée explosif. Aucune tiédeur ou tabou dans cet opéra en trois actes avec offertoire et épilogue tragique en forme de lamentation. Marjolaine Reymond ne cherche
pas à séduire ou à plaire. Son projet est à la fois plus intime et plus profond et donc incroyablement universel. Elle signe toutes les compositions à partir de magnifiques textes d’Emily Dickinson, de Robert Browing, Alfred Lord Tennyson et Thomas Lodge, à l’exception de Bitches Brew (Miles Davis) et entraîne dans une audacieuse chevauchée poétique d’excellents compagnons de jeu (Yvan Robillard au piano, Hubert Dupont à la contrebasse et Nicolas Larmignat à la batterie). L’entame de l’album (« Contrapunto sin Dino ») est très mélodique et mélancolique, avec un accompagnement tout en douceur de son trio de musiciens. Après cette introduction policée, l’Acte 1 avec le déjanté Metal Oxen, se grippe, sa voix se faisant menaçante, incantatoire, grinçante. Kurt Weill et Lotte Lenya ne sont pas bien loin. Mêlant voix parlée, voix naturelle, ports de voix et vocalises, la virtuose soprano se transforme en sorcière. Elle semble capable de maîtriser tous les éléments en faisant monter des profondeurs une incantation hors du temps (« Le balcon céleste »). L’utilisation de l’électronique lui permet de démultiplier à l’infini sa voix et de créer une atmosphère fantasmagorique (« La fin des Poseidons»). La conclusion de l’Acte 1 avec Bitches Brew est inquiétante. Un petit interlude à la flûte introduit l’Acte 2 plus énigmatique. Son « royaume des anges» n’a rien de paradisiaque et ressemble à un temple expressionniste allemand. Elle ouvre en permanence des brèches rythmiques, en réorganisant les hiérarchies entre instrumentistes et vocaliste, et elle utilise toutes les dimensions de l’harmonie pour ainsi enrichir la matière sonore, à la manière d’un John Cage. La musique de Marjolaine Reymond a ceci de passionnant qu’elle est dans l’expérimentation permanente, déstructurant les sons, triturant sa voix, crachant les mots. Alors que l’ensemble de l’opéra semble se dérouler dans une autre dimension temporelle, presque hors champ et hors limites, on croit entendre dans l’épilogue des sonorités familières qui nous ramènent en douceur vers une mélodie apaisée célébrant l’amour renaissant. Un album d’une originalité et d’une richesse incroyables. Attention OVNI (Objet vocal ne laissant pas indifférent) à écouter de toute urgence .Régine Coqueran
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17 septembre 2008
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Cristal 2008

Swing et volupté, précision et ingéniosité, beauté des timbres et des couleurs, ça pétarade, ça éclate de partout et ça nous éblouit. C’est à un véritable feu d’artifice que le pianiste et compositeur Hervé Sellin, entouré de son tentet, nous convie à travers Marciac New-York Express. Sellin, qui avait mis de côté sa carrière de leader au profit de l’enseignement (au CNSM de Paris) et de l’accompagnement (notamment sur le projet Piazzolla Forever de Richard Galliano) revient en force avec, ce que l’on peut déjà considérer comme l’un des disques de jazz les plus marquants de l’année. C’est en 2002 que l’idée de ce projet a commencé à germer, suite à une commande du festival de Marciac qui souhaitait une suite orchestrale célébrant leur 25ème anniversaire. Le tentet a été créé pour l’occasion et sept morceaux d’inspiration gersoise ont vu le jour pour la première fois à Marciac 2002, dont le très subtil Entre Boués, Laüs et Arros et le swinguant Bouncing with JIM (JIM étant les initiales de Jazz In Marciac). Wynton Marsalis, présent à ce concert et fort impressionné par la qualité de la musique, décide d’inviter Sellin et son groupe à New-York pour une série de concert l’année suivante au Jazz Lincoln Center, où trois morceaux supplémentaires (à l’ambiance urbaine et New-yorkaise) ont complété le programme. Il aura fallut attendre cinq ans pour reconstituer le tentet, affiner les arrangements et pouvoir enregistrer ces deux suites orchestrales. Le résultat est largement à la hauteur de l’attente suscitée et ce groupe nous émerveille à chaque instant par la beauté des compositions, l’alliage savant des arrangements et l’originalité de son fonctionnement. On est particulièrement séduit par les rôles tenus par la guitare (Michael Felberbaum) et le vibraphone (Stéphan Caracci), créant un espace de liberté passionnant entre les soufflants et la section rythmique. Ainsi que par les fonctions multi-instrumentistes des trois saxophonistes (Sylvain Beuf, Stéphane Chausse et Stéphane Guillaume), qui permettent à Sellin d’obtenir tout un éventail de couleurs et de timbres boisés et harmonieux (flûtes, clarinettes, saxophones sopranos, altos et ténors). N’oublions pas de citer l’incroyable et talentueuse énergie déployée par le trompettiste Claude Egéa et le tromboniste Gueorgui Kornazov (très en verve tous les deux sur le morceau phare qui célèbre les 25 ans de Marciac : Anniversary). Enfin, un mini big-band comme cela, mérite une section rythmique de grande envergure et l’on ne pouvait rêver mieux que le batteur Karl Jannuska (véritable locomotive de l’orchestre) et le contrebassiste Bruno Rousselet à l’évidente efficacité. Le festival Jazz à la Villette 2008 avait bien raison de nous le préciser : JAZZ IS NOT DEAD et avec le tentet d’Hervé Sellin, on peut même dire qu’il pète la forme !
Lionel Eskenazi
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17 septembre 2008
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Fresh Sound NT 2008
Ambrose Akinmusire (tp), Walter Smith III (ts), Logan Richardson (as), Aaron Parks (p, fder), Joe Sanders (cb), Chris Dingam (vb), Justin Brown (dm), Juno Watanabe (vc)
Vraie surprise dans le paysage actuelle, celle de l'apparition de ce jeune trompettiste récemment nommé lauréat au concours Thélonious Monk et repéré par les équipes de Jordi Pujol pour le compte de son label ouvert aux jeunes talents, Fresh Sound New talent. Mais demi-surprise néanmoins si l'on en juge par le fait qu’il a joué avec les pus grands et qu’il compte parmi ses camarades de jeu une génération dorée dont le pianiste Aaron Parks et surtout la nouvelle révélation du ténor, Walter Smith III, déjà signé sur le label et dont notre confrère, Jazzman faisait récemment l’éloge sous la plume de Vincent Bessières.
Alors que généralement le syndrome des jeunes trompettistes qui enregistrent leur premier album en leader (cela dit Ambrose a déjà participé à plusieurs enregistrements en tant que sideman) est de faire un peu étalage de leur art en jouant fort et haut, le jeune Ambrose Akinmusire joue sur un tout autre registre, celui qui donne à son jeu une incroyable palette d'expression et une très grande sensibilité. Proche dans l'idée d'un Freddy Hubbard sur le son mais avec des nuances étonnantes et surtout avec un vrai sens de la mise à la disposition de la musique. Moins d'ego et beaucoup plus d'écoute. Sans oublier un sens du groove où les rondeurs du fender de Aaron Parks trouvent leur contraste dans le son clair au vibrato maîtrisé du trompettiste. Son entente par ailleurs avec Walter Smith permet à ce dernier de livrer quelques morceaux de bravoure totalement décomplexés. Si l'on ajoute à cela l'intervention sur deux titres du jeune alto Logan Richardson (déjà chroniqué dans les DNJ) on obtient des moments sublimes de confrontation des timbres (Dingmandingo). On est en revanche bien moins séduits par son envie de marcher sur les traces de Steve Coleman (avec qui l a déjà joué par ailleurs) et d'ajouter sur quelques morceaux la voix vocalisante de Watanabe comme pour créer une atmosphère qui se voudrait fascinante mais qui tombe un peu à plat comme sur ce Ruby de toute beauté où la voix plombe un peu l'émotion de ce titre superbe. Il n'empêche, sur un titre comme M.I.S.T.A.G au thème assez sombre (le génocide Rwandais) c'est une plainte déchirante qui ne peut nous laisser indifférents. Ambrose Akinmusire fait partie d’une génération pour qui les portes du jazz s’ouvrent assurément en grand. Cette génération incroyablement douée a des choses à dire. Des phrases apaisées qui possèdent en elles la force d’une superbe musicalité. Jean-Marc Gelin
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16 septembre 2008
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DIXIEFROG 2008
Il va devenir compliqué de contrarier ceux qui avancent que Jean-Jacques Milteau est le plus grand harmoniciste de blues français, tant l'artiste nous fait frissonner sur ce disque. Les pièces (il en compose cinq) nous emmènent dans le train du blues. Le placement des soli, idéal dans la plupart des morceaux, nous assois aux meilleures places dans le wagon, pour les plus somptueux paysages; enfin les phrasés du Parisien offrent un contrepoint dense, plus posé encore que dans les deux CD précédents (FRAGILE et BLUE 3rd chez Universal Jazz) aux deux voix de son groupe, Ron Smyth et Michael Robinson. Cet équilibre tombe bien, car dans le blues, l'harmonica est le premier interlocuteur du vocaliste. Milteau avoue qu'il aurait voulu refaire les harmonicas après l'enregistrement des morceaux. Il le fait souvent, par souci de perfection. Finalement, il a conservé les parties d'origine. D'où la spontanéité de l'ensemble. Pourquoi cette impression de cohérence qui rend le contenu si consistant? Milteau, cette fois, s'est impliqué dans la conception du disque à côté de Sébastian Danchin. Cette position lui a permis de concevoir les morceaux avec davantage de recul. La patte du guitariste Manu Galvin, inventif à souhaits, est Également pour beaucoup dans la couleur du voyage. Le répertoire est basé sur les ballades du Sud profond, le long des rivages Folk/Soul très prisées du leader. Les premières musiques que Milteau, né en 1950, a écoutées chantaient l'espoir de lendemains meilleurs. Le rock, surtout. Disque rebelle d'un musicien éternellement en fugue? Pas vraiment. Les prises de conscience lui paraissent valoir toutes les réponses. Mieux vaut traîner avec ses interrogations qu'arriver à destination. Mieux vaut languir. Comme dans le suave "Is this the Way ?", une perle à passer en boucle, composé avec Ron Smyth et Manu Galvin. Démarche complémentaire dans "Down in Mississipi" de JB Lenoir. L'harmonica gicle comme une fontaine qui rêve de devenir fleuve, et de faire découvrir à l'auditeur du monde urbain des horizons perdus de vue. C'est la mort du Blues historique. Une fois sorti de son lit, n'existe plus, ne restent que des parcelles de ce langage né dans le monde rural et popularisé dans le monde. La ville et le monde (par l'internet) triomphent dans ce disque. Au milieu de ce grondement, Milteau persiste du début à la fin de "Soul Conversation", à revendiquer la fragilité qu’ont révélé les deux précédents albums. Celle-ci représente le point de départ de l'univers intime qu'il partage avec le public. Pétrie de finesse, de douceur, de talent et de générosité, sa dernière oeuvre ajoute une pierre supplémentaire au parcours
hors-classe d'un virtuose.
Bruno Pfeiffer
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10 septembre 2008
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Syntonie 2008
Bruno Angelini (p), Giovanni Falzone (tp)
Il est de ces albums qui sont remplis d’humanité. Qui disent la passion de la comédie humaine avec ses contrastes, ses sentiments, sa tendresse où le rire et la fantaisie presque burlesque côtoient les tempêtes tumultueuses mais jamais trop sérieuses. Si l’on ne craignait le cliché l’on parlerait de Comédia del arte tant il y a de la faconde dans le jeu de ces deux amis qui racontent des histoires qu’ils semblent entre eux, si bien connaître. Falzonne que l’on eu l’occasion d’entendre dans le remarquable album de Francesco Bearzatti ( Suite for Tina) est comme à son habitude pétulant et facétieux n’hésitant pas à jouer de tous les effets de son instruments, glissando, staccato, éruptif dans le surgissement ou dans l’ouverture ample d’un son gorgé de soleil. Angelini lui, s’inscrit plus dans le grave, inventif quand il passe devant autant que lorsqu’il accompagne. Son support rythmique ne se contente jamais du minimum et affiche sa présence légère et aérienne. Flirtant souvent avec une forme de gravité, il semble se retenir chaque fois et allège finalement sa phrase. Un peu comme un vent léger qui ferait danser le feu crépitant. Ceux qui avaient entendu Dave Douglas et Martial Solal trouveront dans cet album quelques similitudes. Certes ils ne renouvellent pas le genre et ce n’est d’ailleurs pas le propos. Il s’agit juste de deux musiciens dont la créativité s’inscrit dans le sillage de l’autre. Deux musiciens étonnamment complices comme deux amis de longue date. Volubiles certes mais jamais bavards. Un peu comme deux amis qui apportent son propre éclairage à la même histoire qu’ils connaissent par cœur et qu’ils nous racontent, comme en fin de repas lorsque le vin délie les langues et les esprits, sans se contredire mais au contraire mais en se complétant remarquablement. Jean-Marc Gelin
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7 septembre 2008
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Lorsque nous sommes venus au printemps écouter cette nouvelle version du Ciné Xtet de Bruno Regnier autour de la célèbre version de la Marque de Zorro, film de 1920 avec Douglas Fairbanks, on savait à peu près à quoi s’en tenir. D’autant que nous avions déjà suivi le travail de Bruno Regnier notamment lors du visionnage de « Steamboat Junior » au cinéma le Balzac à Paris où Bruno Regnier a ses entrées régulières. J’avais alors écrit dans d’autres colonnes combien cette approche musicale du cinéma muet qui s’inscrit dans une longue tradition du jazz depuis Claude Bolling à Bill Frisell en passant par Dave Douglas ( dont on ne saurait que trop vous recommander le dernier de Keystone) se dégustait sans modération, avec ou sans images d’ailleurs. Car c’est bien là la force de Bruno Regnier.Celle de se caler au plus près des images dans une volonté clairement affichée d’expressivité mais tout en permettant néanmoins de s’en détacher à loisir.
Alors que dans ses précédentes compositions, il s’attachait à l’œuvre de Buster Keaton, s’inscrivant dans le rythme que le génial comédien donne lui-même aux images, ce sont ici les facéties de Douglas Fairbanks aussi roublard que charmeur et drôle qui se trouvent éclairés par l’écriture de Bruno Regnier dans un de ces moments rare où la musique parvient avec grâce à faire corps avec l’oeuvre cinématographique. Dans cet art là, Bruno Régnier nous a montré qu’il excelle.
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Compte-rendus de concerts
25 juillet 2008
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On le savait fatigué et très malade. il ne s'en cachait pas. Ceux qui ont pu voir le film de Niels Lan Doky, Between a smile and a tear se souviennent des images de ce petit bonhome qui se trainait un peu mais qui semblait renaître dès lors qu'il soufflait dans son saxophone. Toujours le sourire aux lèvres et la mne gouailleuse.
Johny Griffin nous a quitté aujourd'hui. La dernière fois que l'on a pu l'entendre à Paris c'etait lors de l'inauguration du Duc des Lombards.
Il ne jouait pas comme avant, pas le même souffle, pas la même intensité mais toujours la même histoire du jazz à raconter.
Je me mets cet album qu'il avait réalisé en 1991, The Cat avec le tromboniste Curtis Fuller. Et je repense à cette fameuse session, cette" blowing session" qu'il avait enregistrée avec Coltrane, Lee Morgan, Wynton Kelly, Paul Chambers et Art Bakey. C'etait en 1957. Johny Griffin à l'istar d'un Ben Wbster maître du blues. Une de ces façon de mettre du velours dans des phrases qu'on ne dirait pas à l'oreille des jeunes filles, où alors pas à jeun.
Je me souviens aussi de ce dîner u soir dans un festival de jazz à Mntauban. A a droite Griffin et à ma gauche Toots Thielemans. L'esprit du jazz soufllait alors comme il souflle ce soir. Sans mélancolie. C'est juste un souffle que le petit géant nous fera désormais venir des étoiles.
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Editorial
20 juillet 2008
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David Sanchez (Ts)
Il y a des disques qui ne se donnent pas à la première écoute. De ceux qui vous feraient croire à quelque chose d’anodin. Epiphénoménal en quelque sorte. Mais il y a aussi ces disques qui ne se révèlent qu’après coup, à la nième écoute. Sur lesquels il faut revenir plusieurs fois afin d’en déceler les trésors. Qui révèlent leurs secrets ensuite. L’album de David Sanchez est de ceux là. Curieux, au même moment sortent l’album de deux saxophonistes Portoricains qui par ailleurs se connaissent, l’un (Zenon) ayant beaucoup joué dans le groupe de l’autre ( Sanchez). Et ce sont deux démarches tout à fait différentes mais non moins personnelles dont il s’agit. Alors que Zenon ( voir l’article de Lionel Eskenazi et notre ITW) se réclame de Steve Coleman, David Sachez au contraire est plutôt dans la suite d’un jazz post-fusion ici largement assumé et dépassé (on pense notamment à Metheny). Moins virtuose que lyrique, David Sanchez est un saxophoniste ténor de très très grande classe. Discours bouillonnant sans jamais se montrer explosif, rare de maîtrise, domptant les courbes et les droites sans aucun dérapage incontrôlé, sonorité ciselée. David Sanchez a l’élégance des très grands. Mais alors que la démarche de Zenon se veut plus intime, dépassant sa propre histoire, celle de Sanchez reste ancrée dans une tradition multiple. Celle, on l’a dit d’un jazz post-fusion (Adoracion) mais aussi de sa propre culture qu’il distille soit au travers d’une allusion soit lors d’un très long développement de 20mn qui clôture l’album et qui prend pour point de départ, la Plena, cette musique portoricaine qui tire sa source directement d’Afrique (La Leyenda Del Cañaveral). Ceux qui ont récemment entendu Jacques Schwartz Bart ne seront pas surpris par ce type de travail. Mais la tradition c’est aussi le respect dû aux grands maîtres du saxophone et David Sanchez livre ainsi une lecture somptueuse de Monk’s Mood, montrant ainsi combien il reste ancré dans la tradition du jazz. S’appuyant sur une belle formation qui tourne impeccablement et que l’on retrouve en partie chez Zenon (le bassiste et le batteur) et par un jeune guitariste totalement bluffant, la musique de Sanchez n’en est pas pour autant irrésistible et l’on conçoit que certains pourraient y voir une sorte d’esthétique un peu froide qui pourrait bien vous faire passer à côté. A force de discours fleuve et de lyrisme puissant, on en oublie presque les interventions d’un Danilo Perez qui deviennent anecdotiques. Mais il faut y revenir et y revenir pour découvrir enfin cet album. Car il s’agit réellement d’un album remarquable. Beaucoup plus fin et moins ambivalent qu’il n’y paraît à la première écoute. Jean-Marc Gelin
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