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27 mars 2023 1 27 /03 /mars /2023 17:32

L'Intemporel 2023
Nicolas Parent (g, compos) + Pierre Durand (g), Yom (cl); Kentaro Suzuki (cb)


Bel album du guitariste autour de ses propres compositions qui semblent se balader dans quelques grands espaces de l'Ouest américain.
On y entend toute l'influence de Bill Frisell dans cette façon de faire sonner sa guitare mais pas que.  Car Nicoas Parent se promène dans une sorte de road trip au gré de ses états d'âmes parfois mélancoliques (Bambino), parfois plus roots mais toujours avec le sens de l'apaisement jusqu'à la plénitude. Un album totalement acoustique, très ouvert et d'une grande zenitude.
Nicolas Parent y apparaît comme un guitariste au lyrisme minimaliste, attaché à l'épure, débarrassé de tout superflu et concentré sur les résonances du son.

Seule petite note discordante, les 2 interventions  du clarinettiste YOM certes belles mais qui tombent un peu comme un cheveu sur la soupe dans cet album.
Mais l'on y prête guère attention car au final c'est un album aérien et léger qui vous élève au-delà des nuages.
Jean-Marc Gelin

Concert de sortie au Studio de l'Ermitage à Paris le 20 avril.

 

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26 mars 2023 7 26 /03 /mars /2023 16:27
KLM TRIO   PROVIDENCE

KLM TRIO            PROVIDENCE

Stéphane Kerecki (cb), Yoann Loustalot (tp, bugle), Philippe Macé (vib)

Parallel Records/Socadisc

Sortie le 24 Mars 2023 Concert 30 Mars au Sunset

 

Avec cet équipage, on voyage assez loin, affirme Philippe Macé le vibraphoniste concepteur du projet à l’origine du trio KLM (Kerecki /Loustalot /Macé). Sans être précisément aux commandes de la compagnie, il dévoile un arrière-pays attachant où l' enjeu est de favoriser le chant et le rythme avec deux compagnons ajustés. Voulant privilégier la complicité des timbres, les résonances, les sons tenus, Philippe Macé a façonné le son de l’album en pleine pandémie : le vibraphone n’ayant pas beaucoup de grave est complémentaire de la contrebasse, qui en l’absence de batterie, tient le rôle d’assise rythmique.

Si Stéphane Kerecki était un vieux complice de Philippe Macé, celui-ci connaissait le travail de Yoann Loustalot qui joue par ailleurs dans un trio avec Kerecki et Humair. Le trompettiste choisit ici de s’exprimer au bugle, au son plus doux et rond, plus adapté au vibra.

L’interplay joue à fond dans ce trio chambriste, d’une veine souvent élégiaque qui échappe aux rôles assignés en jazz à ce type de formation, sur un répertoire de neuf compositions dont  huit originaux. La seule reprise, excellent choix, est un thème baroque de Purcell “Ground on C minor” repris avec un vif élan, qui entraîne la danse, illustrant la force de la basse obstinée qui explore tous les styles et époques. 

 Cet album à l’élégance savante, tout en sonorités de cuivres et de bois se découvre lentement dans la traversée initiatique d’un univers exposé et pourtant d’une luminosité ténue, ce que confirmerait “Luminescent”, l'une des deux compositions du contrebassiste. On est frappé par une grande impression de cohérence : unité de ton, lyrisme de mélodies qui prennent le temps de se développer, sens de l’espace dans le halo chambriste de l’instrumentarium.

Ouvrant l’album, “Ecueil” est une composition de Yoann Loustalot planante, onirique, étrange que l’on survole en écho ou miroir avec “Mer d’huile” toujours du bugliste.“Are you ready for the next pandemic” embraie sur un thème interrogatif, nous rappelant que la naissance du trio et de l’album (enregistré il y a juste un an à Noirlac) survinrent dans une période peu propice aux tournées.

“The Booster” de Kerecki porte bien son nom, c’est un éveil qui euphorise en douceur, la basse et le vibra swinguant d’aise, le bugle ragaillardi lui aussi.

Groove impeccable du vibra, souffle profond et intime du bugle, fluidité d’une contrebasse très présente et pourtant discrète confèrent un caractère dépouillé à cette musique. Où courent des échanges permanents de l’un à l’autre des musiciens qui sont à la recherche d’un horizon commun. Tout glisse subtilement, avec un toucher juste, une énergie tranquille qui laissent ouvertes les marges de l’exploration. On ne peut rester insensible aux qualités de cette musique, à la lisibilité d’un ensemble tout en demi-teintes et finesse.

Sophie Chambon

 

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24 mars 2023 5 24 /03 /mars /2023 09:12

Malik Mezzadri (flûte, voix),

Pascal Mabit (saxophone alto), Maciek Lasserre (saxophone soprano), Johan Blanc (trombone), Olivier Laisney (trompette), Fanny Ménégoz (flûte), Alexandre Herer (piano électrique), Gilles Coronado (guitare), Daniel Moreau (synthétiseur), Maïlys Maronne (piano, mélodica), Nicolas Bauer (guitare basse), Vincent Sauve (batterie)

Onze Heures Onze ONZ 046 / l’autre distribution (parution le 31 mars)

 

Retour en fanfare de Magic Malik, avec la même équipe, sauf un changement du côté de la guitare. Au travers des compositions de presque tous les membres du groupe se tisse une toile de rythmes, de traits mélodiques et de jaillissements soudains qui nous rappellent que cette musique, même si elle est voulue par le leader dans un espace musical qu’il a imaginé, est éminemment collective. Procession en fanfare subtile vers un imaginaire qui nous sollicite autant qu’il nous déroute. Dialogue des flûtes, escapades de la trompette ou du trombone, envol de la guitare sur les sollicitations des autres instruments, tout concourt à nous emporter vers cet ailleurs que guette toute poésie. Et il y aura au fil du disque un espace pour chacune et chacun, toujours dans un geste unanime, comme s’il n’y avait de soliste que l’orchestre (Tous pour un, un pour tous….). Si l’on cherche dans cette musique des sources, il est évident que l’on en trouvera, réelles ou fantasmées. Mais l’essentiel est ailleurs : dans la singularité de ce projet collectif qui, étape après étape, nous entraîne dans un paysage que nous devinons, ou croyons deviner, car il se pourrait qu’une prochaine étape (XP4 ?) soit encore une surprise, un pas au-delà. Du Grand Art musical, en somme.

Xavier Prévost

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Le groupe est en concert le samedi 25 mars à Paris au New Morning, et le 1er avril à Bordeaux au festival Déluge

 

Un avant-ouïr sur Youtube 

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23 mars 2023 4 23 /03 /mars /2023 12:29
SNORRE KIRK   TOP DOG

SNORRE KIRK

TOP DOG

Label Stunt Records

Sortie le 24 MARS

 

On Late Nights - YouTube

 

Un album très agréable à découvrir concocté par un formidable musicien. Le batteur norvégien Snorre Kirke qui vit à Copenhague n’en est pas à son premier album de 2012 Blues modernism qui annonçait la couleur, celle d'un jazz classique revendiquant la tradition. Il sort sur le label danois Stunt, distribué par UVM ce Top Dog, son 7 ème album en leader d’un quintet de luxe, une rutilante machine. Une formation quelque peu renouvelée avec, grande innovation, un guitariste rythmique Mads Kjolby qui endosse le rôle de Freddie Green, l’un des atouts majeurs de la formation de Count BASIE qui demeura fidèle au pianiste cinquante ans! Les autres  complices restent le pianiste suédois Magnus Hjoerth depuis le début aux côtés du batteur et le bassiste Anders Fjeldsted depuis 2019. Snorre Kirk laisse, comme tous les grands quand ils sont aux commandes, ses partenaires suffisamment libres dans des échanges qui prennent leur sens en servant le propos assumé, son classique, swing élégant et intemporel. On croirait entendre des compositions de l’époque alors que l’écriture des dix titres est entièrement due à l’inspiration de ce maître des fûts qui n’écrit pas particulièrement pour son instrument. On pourrait presque dire que le son de la batterie est ce que l’on remarque le moins, tant la section rythmique est au service des souffleurs. On aurait tort de ne pas se laisser prendre par ces mélodies intemporelles qui paraphent avec panache une esthétique volontairement en retrait. Une fois encore les Scandinaves ont le chic de jouer le jazz sans tenter de le mêler à d’autres influences du monde. Ce sont peut-être eux les plus solides garants de la tradition et de la perpétuation de cette musique qui leur était pourtant étrangère au départ. Mais les Nordiques ont toujours su intégrer le jazz à leur culture d’origine.

Un All Jazz Band scandinave jusqu’à un certain point car la rythmique tourne autour autour du lumineux saxophoniste ténor américain Stephen Riley auquel se joint le deuxième saxophoniste danois ténor et alto Michael Blicher.

Riley a déjà enregistré avec Kirk, ce sont donc des retrouvailles qui débutent par un bon vieux blues, "Working The Night Shift" où s’expriment les deux soufflants, la rythmique accompagnant softly and gently,  façon décontractée! Suit “Top dog”, titre pour le moins mystérieux si ce n’est que le batteur pose imperturbable, avec son chien sur la pochette, très “dead pan humour”, une compo alerte, espiègle même où s’amusent les compères dans un rythme et un swing nettement plus intenses. Dans “On late nights”, l’une de ces ballades courtes mais ensorcelantes, le saxophone mène la danse, sur le souffle, chuchotant d’aise, très sensuel. Et ainsi coulent les mélodies dans une alternance de titres enlevés dans la tradition gospel “Bring me home” et de ballades tendres jamais sirupeuses ou mièvres cependant. Les sax s’envolent sur “Meditations in blue” sur un tempo medium, chaloupant, plus propice à la danse et aux rythmes brésiliens qu’à la réflexion. "Swing point" porte bien son nom, ça pulse et remue dans la plus pure tradition des Four Brothers de Woody Herman. Avec “Easy Roller”, on revient sur les terres du Count et la guitare rythmique est à son aise, entraînant cette pulse constante qui structure le morceau. L’un des titres les plus prenants est sans doute une ballade sur le versant mélancolique “Yesteryear” qui nous bluffe complètement : c’est bien une composition de Snorre Kirke qui a su saisir admirablement l’esprit de ces mélodies rétro où Billie aurait pu poser sa voix qu’auraient pu conduire Ben Webster ou Coleman Hawkins. L’album qui a du chien se termine par une pirouette comme il a commencé, un hommage au Count et au blues sur ce “Boogie Rider.”

Classique mais convaincant, ce Top Dog ! Alors, ne boudons pas notre plaisir.

 

Sophie Chambon

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23 mars 2023 4 23 /03 /mars /2023 11:22

ROLANDO LUNA : «  Rolando’s faces »

Esprit du piano/Inouie distribution 2023

Rolando Luna (p)

Dans l’innombrable production de pianos solos qui nous arrive ces derniers temps, notre oreille s’est trouvée captivée par ce double album du pianiste cubain, Rolando Luna qui présente avec ce « Rolando’s faces » deux versions de son art, l’une enregistrée en studio et l’autre en live lors d’un concert privé à Toulouse.

Rolando Luna est une vraie découverte pour nous et il faut rendre hommage à Paul-Arnaud Péjouan et Philippe Monsan (deux amoureux du piano) qui ont produit cette petite merveille. Le pianiste cubain n’est pourtant pas une révélation puisqu’il a longtemps tenu le piano au sein du Buena Vista Social Club et qu’il a connu une forme de consécration en remportant un double prix en 2007 au Concours du piano solo à Montreux, celui du jury mais aussi celui du public.

Et il faut bien dire que ce pianiste, adoubé par le grand maître Chucho Valdès a cette capacité de nous emballer dès les premières notes par son jeu fabuleux. Son lyrisme est d’une superbe inventivité. Son phrasé est à la fois tendre et percussif comme savent le faire les grands pianistes cubains dont la culture est toute à la fois empreinte de jazz, de rythmes latins mais aussi très fortement imprégné du piano classique du 19eme. Au fil de ce double album, Rolando Luna se ballade entre quelques standards de jazz ( My one and only love, La belle vie) , rend hommage à Michel Petruciani dont on sent à juste titre, le jeu si proche, revisite Debussy ( le bien nommé Clair de lune) ou les Stranglers ( Golden brown) et, bien sûr reprend à sa façon quelques standards cubains.

C’est dire que son univers et ses influences sont vastes et tout au long de ce double album on découvre un pianiste incroyablement libre, délié de tout carcan formel dans une forme de fluidité qui sonne comme une évidence. Une sorte de poésie virtuose. De cette virtusosité positive qui n’est pas le signe d’un étalage de richesse mais plutôt d’une grande générosité d’âme.

Luna est définitivement lunaire.

A découvrir d’urgence.

Jean-Marc Gelin

 

En concert en trio au Bal Blomet à Paris le 19 avril.

 

 

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20 mars 2023 1 20 /03 /mars /2023 20:06


LIVE AT THE VILLAGE VANGUARD
Label Edition 2023


CHRIS POTTER ( ts), Craig Taborn (p), Scott Colley (cb), Marcus Gilmore (dms)

Chris Potter et le sacre du flow !

On entend parfois certaines personnes désabusées (de tout) nous dire : «  mouai, un concert de Chris Potter, c’est toujours un peu la même chose ». Et bien je vais vous le dire franchement, laissons tous les pisse-froid à leur morosité et laissez vous embarquer dans ce nouvel enregistrement capté en live au célèbre Village Vanguard ( le 3eme dans sa discographie). Parce que comme toujours avec Chris Potter, c’est le flow sacré !


Et aussi parce qu’avec un concert de Chris Potter on entend pas seulement un concert de Chris Potter mais tout le flow d’un groupe qui, ensemble élève les exigences du jazz à des niveaux qui tutoient les sommets. Tous à l’unisson d’un jazz à très haute intensité.


Bien sûr à tout seigneur tout honneur, le saxophoniste au son purement et simplement gigantesque. On pourrait dire « saxophone colossus » si cela n’avait pas déjà été pris par celui dont il porte haut et fort l’héritage, Sonny Rollins et son son âpre et dense. Chris Potter ici s’exprime essentiellement au ténor et délaisse un peu le soprano, pour une prestation au lyrisme brut et sauvage.

Et que dire de ses camarade de jeu au premier plan desquels Craig Taborn au piano, absolument lumineux dans chacune de ses interventions. Quand à l’ssociation Scott Colley ( aussi phénoménal et pardon pour les superlatifs) avec Marcus Gilmore, là aussi c’est un vrai moteur que le quartet a sous le pied.

Et pour ceux qui penseraient encore ( si, si il y en a) que Chris Potter est tout en muscle, qu’ils écoutent cette version renversante de Blood count de Billy Strayhorn qui a tous les coups vous fera chavirer.

Et au final plus de 30ans de scène et Chris Potter accompagné de ses bandidos ne faiblit pas, de chancèle pas. Droit dans son jazz . Celui qui fait pousser les racines.

Jean-Marc Gelin

https://m.youtube.com/watch?v=aUgFXJxQIgs

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17 mars 2023 5 17 /03 /mars /2023 17:40
WILD TALES        GRAHAM NASH

WILD TALES GRAHAM NASH

LE MOT ET LE RESTE

Musiques (lemotetlereste.com)

DocHdl1OnPR001tmpTarget (flib.fr)

 

La disparition récente de David Crosby et la réapparition miraculeuse de Joni Mitchell m'ont fait redécouvrir le livre de mémoires de Graham Nash, le plus discret des trois musiciens du trio CSN. Cette chronique est un rattrapage puisque Wild Tales est sorti en 2013, publié par le Mot et le Reste, une référence.

Voilà une autobiographie passionnante qu’on ne lâche pas, qui se lit comme un roman découpé en 17 chapitres  : Graham Nash qui a aujourd’hui plus de 80 ans a eu une vie incroyable. Ce petit Anglais du Nord est passé du rock and roll avec Bill Haley aux harmonies vocales des Everly Brothers,  a créé The Hollies, un groupe majeur (juste derrière les Beatles et les Stones) avec Allan Clarke, son copain d’enfance dans cette Angleterre de l’après-guerre. Puis il a tout quitté pour vivre l’aventure californienne des années 60, participant à l’une des formations les plus extraordinaires de cette décennie.

Par l’intermédiaire de Mama Cass (The Mamas and The Papas), il découvre Laurel Canyon, haut lieu de l'avant-garde musicale de Los Angeles, rencontre en 1968 David Crosby des Byrds et Stephen Stills, séparé du Buffalo Springfield. Malgré le succès des Hollies, l’appel de la Californie sera le plus fort et sa voix se combine à merveille à celle des Américains créant une harmonie unique. Ainsi avec des styles différents se forme le trio CSN : virtuosité du perfectionniste Stills, le véritable leader, originalité de l’incontrôlable Crosby, talent d' auteur de pop songs de Nash...

Ce Wild Tales (un de ses albums solo de 1973) témoigne d’une vie de musicien-star, document sur une époque flamboyante, la décennie de tous les dangers et excès mais d’une créativité absolue dans tous les arts.

En 1969, c’est leur premier album dont nous découvrons en détail la genèse avec cette pochette épatante d’une bicoque abandonnée sur Santa Monica Bd avec un vieux divan  installé devant, sur lequel les trois musiciens sont assis, dans le désordre. Une maison volatilisée juste après en avoir pris la photo, alors qu’ils voulaient précisément refaire le cliché, le titre annonçant Crosby en tête. 

CROSBY STILLS AND NASH -FIRST ALBUM - YouTube

CSN est cependant conduit à s’adjoindre très rapidement un autre talent, une autre guitare, l’incontournable Neil Young, celui là même qui s’est toujours affronté à Stephen Stills. CSN deviendra CSN&Y. Neil Young n’est attaché à CSN que par une conjonction qui le singularise, car il a toujours été différent, The Loner dès le Buffalo Springfield où il rencontra Stephen Stills. Ses compositions se démarquent de celles du trio qui a pourtant fait ses preuves et signé un contrat solide et durable avec l'Atlantic d’Ahmed Ertegun. Car Stills est un musicien génial, un guitariste hors pair et le trio vocal surpasse l’entente vocale dejà exceptionnelle entre Nash et Crosby. 

Sens mélodique affirmé, acrobaties vocales, harmonies raffinées, guitares virtuoses dans “Our Home”,Carry On”, “Long Time Gone”, “Helplessly Hoping”, “Chicago”, “Déjà Vu”, “Teach your Children” jusqu’à ce vibrant "Ohio"  “protest song” emblématique de leur fort engagement politique. Déjà dans les Byrds, Crosby cherchait à joindre au contenu socio-politique d'un Dylan une certaine audace harmonique, en intégrant aussi des influences indiennes dues à Ravi Shankar. Mais il  écoutait aussi  du jazz, Coltrane, Miles, Charles Lloyd. Par un juste retour des choses, Miles reprendra au moment de Bitches Brew son “Guinnevere”, titre que l’on entend à Woodstock avec les  autres merveilles que sont “Suite Judy Blue eyes" ou “Wooden Ships”. L’anecdote raconte que Miles fut très désappointé quand Crosby lui fit savoir qu’il n’avait pas aimé du tout sa version!

Malgré un succès devenu très vite planétaire, le groupe va connaître bien des aléas, des "breaks" suivis de reformations éphémères, comme celle de mai 2013, où au Lincoln Center l'orchestre jazz  de Marsalis joua 12 des morceaux les plus connus du groupe que Wynton avait arrangés.

Leur “éloignement” n’est pas une séparation, d’après Nash, ils restent un groupe, même s’ils sont allés voir ailleurs, formant l’un des mariages libres les plus réussis qui soient. Quand Stephen Stills et Neil Young enchaînent les disques en solo, Graham Nash, fidèle en amitié, enregistre des albums avec un Crosby au plus bas et à chaque fois se recrée leur alchimie. Avec Eric Clapton, Keith Jarret, David Crosby -qui vient de mourir après une vie pour le moins cahotique, faisait partie de ces "survivants" alors que dans le jazz, tant ont payé le prix fort pour des conduites aussi addictives. Graham Nash a commencé à toucher aux diverses drogues en débarquant à Laurel Canyon. Pas sûr qu’il ait eu une conduite plus sage, il livre ses mémoires desinhibées sur ses années folles de sex, drugs and rock and roll. Mais l'addiction la plus tenace de Nash, il l’avoue, c’est la musique beaucoup plus importante que n’importe laquelle de nos existences individuelles

Ainsise poursuit la vie de Graham Nash, moins intéressante musicalement après cette période inoubliable, mais on apprécie sa manière sans détour, son recul et son humour tranquille quand il dépeint son enfance de fils d’ouvriers, le Swinging London et la formidable éclosion du rock anglais, la liberté de moeurs, sa relation aux femmes et son histoire avec la grande Joni Mitchell qui l’incita à peindre. C’est avec Croz sans doute l’une des attaches les plus fortes de Nash. C’est d’ailleurs lui qui donna des nouvelles de Joni Mitchell, lors d’un concert à l'Olympia alors qu'elle venait d'être victime d' un A.V.C et hospitalisée à Los Angeles.

Ajoutons que le livre est illustré de photos magnifiques, car à ses qualités musicales, Graham Nash ajoute un autre talent artistique, celui de la photographie. On appréciera  les gros plans de Judy Collins avec Stephen Stills, les portraits de Johnny Cash, de Joni Mitchell, de David Crosby sans sa veste frangée, du trio en train d’enregistrer “Marrakesh Express” en 1969, de Nash avec Jerry Garcia en 1971, Nash toujours avec sa Fender Stratocaster en 1974 pour un concert de CSN&Y, en train de sculpter son ami Croz…

On l'aura compris, ce livre est un coup de coeur qui m' a entraîné à faire un pas de côté en revenant sur une période où le jazz aussi était à l'honneur...   

 

NB : Jetez un oeil sur la longue liste de remerciements, synthèse qui restitue précisément le déroulé de la carrière et de la vie de Graham Nash. Il a tenu à n'oublier personne, en toute honnêteté.

 

Sophie Chambon

 

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15 mars 2023 3 15 /03 /mars /2023 13:49

Julien Soro (saxophones ténor & soprano, clavier, raquette), Stephan Caracci (vibraphone, percussions, clavier, raquette), Ariel Tessier (batterie, raquette)

Ludwigsburg (Allemagne), 12-13 avril 2022

Neuklang NCD 4265 / Big Wax

 

C’est comme une métaphore du ping-pong musical : la première plage (Dreaming Ping Drumming Pong) commence avec les raquettes et la balle…. Mais c’est bien le vif du sujet dans lequel nous venons d’entrer. On est assurément dans le collectif, l’interactif et le réactif. Ce qui n’exclut ni le lyrisme, ni le concerté, voire le concertant. Tout le spectre du jazz et de ses provinces est visité, à partir d’un motif, d’un rythme, d’une esquisse ou d’une impression diffuse. Bref, c’est comme un condensé de la vie de cette musique et de ses interprètes-improvisateurs. Des surprises, à la faveur d’une pulsation qui s’emballe, d’un instrument qui surgit. Comme un voyage dans l’imprévu, le mutin ou le grave, selon les instants. Et toujours ce condensé d’intelligence, de sensualité musicale et de jeu. Beau travail d’artistes !

Xavier Prévost

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Le groupe est en concert le samedi 18 mars à Paris au 360 Music Factory

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Des avant-ouïr sur Youtube 

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14 mars 2023 2 14 /03 /mars /2023 17:00

    Samara JOY, Leïla OLIVESI et Diunna GREENLEAF ont capté l’attention lors de la cérémonie le 12 mars au Pan Piper (75011) de remise des prix 2022 de l’Académie du Jazz, la dernière animée par François LACHARME qui transmet, après 18 ans, la présidence de l’association prestigieuse à Jean-Michel PROUST. Preuve que le jazz s’écrit et se pratique de plus en plus au féminin.

    Frôlant l’élection dès le premier tour dans le scrutin intervenu le 8 décembre dernier, la prodige américaine Samara JOY s’est vu remettre le trophée du Prix du JAZZ VOCAL, catégorie où s’était distinguée il y a peu Cecile McLorin Salvant. Souriante, la récente lauréate de deux Grammy Awards pour ‘Linger Awhile’ (Verve-Universal) s’est déclarée touchée par cet hommage français… tout en laissant sur leur faim ses fans qui eussent apprécié une courte prestation vocale (la jeune new-yorkaise de 23 ans venant de donner trois concerts en région parisienne voulait-elle ménager sa voix pour une émission télévisée le lendemain ?).

    Prix DJANGO REINHARDT du meilleur musicien français de l’année, la pianiste-compositrice Leïla OLIVESI ne s’est pas fait prier pour régaler le public des très nombreux professionnels du jazz présents avec deux compositions figurant sur son dernier album (‘ASTRAL’, Attention Fragile). Particulièrement appréciée fut ‘Missing CC Suite’, hommage aux accents ellingtoniens à Claude Carrière, un ami et ancien président de l’Académie disparu voici deux ans exactement. Leïla Olivesi devient ainsi la quatrième jazzwoman depuis 2014 à obtenir cette récompense suprême de l’Académie du Jazz (après Airelle Besson, Cecile McLorin Salvant, Sophie Alour).

 

    Diunna GREENLEAF, lauréate du Prix du BLUES (‘I Ain’t Playing’, Little Village), venue pour l’occasion de Houston, fit monter la tension par un mini-concert de trois chansons clôturant la soirée. Chanteuse généreuse, femme engagée, se passant désormais d’agent pour gérer sa carrière, la texane entonna ainsi avec conviction un tube d’une star du blues (Koko Taylor), ‘Never Trust A Man’.

 

    Il était déjà 22 heures, la cérémonie approchait les 3 heures. Le public avait eu droit à son lot de prestations instrumentales: le groupe de Dany DORIZ-Michel PASTRE (Prix du JAZZ CLASSIQUE), mettant l’ambiance sur des airs d’Illinois Jacquet et Lionel Hampton, le Quintet de Stéphane KERECKI (Prix du DISQUE FRANÇAIS) la grande classe, le tromboniste allemand Nils WOGRAM (Prix du JAZZ EUROPEEN) en duo avec le pianiste BOJAN Z (élégance et sobriété), la jeune formation, très mondiale, de Louis MATUTE (Prix EVIDENCE, nouvelle distinction pour les jeunes talents), un solo virtuose du pianiste espagnol Chano DOMINGUEZ et, délice pour les esthètes, en hommage à Jean-Louis Chautemps (1931-2022), le Quatuor de Saxophones version 2023 avec deux « historiques » de la formation de 1980 (Jacques di Donato et François Jeanneau) rejoints par Jean-Charles Richard et Richard Foy.


    Spécialement en verve pour cet ultime show, François LACHARME avait interviewé les lauréat(e)s présent(e)s, envoyé les vidéos des absents (dont Joshua Redman) et alterné souvenirs et anecdotes évoquant entre autres trois saxophonistes disparus, Marcel Zanini, Wayne Shorter et naturellement Jean-Louis Chautemps, prix Django Reinhardt 1965 (« s’il avait évolué dans les arts plastiques, il aurait été Marcel Duchamp »).

 

Les engagements du nouveau président

 

    L’heure était venue de tirer sa révérence et de présenter son successeur - élu par un bureau renouvelé de dix membres et féminisé (grâce à Nathalie PIOLE, France Musique, et Alice LECLERCQ, Jazz News) - Jean-Michel PROUST, saxophoniste et directeur artistique de festivals (Jazz au Phare à Ré, et Paris Guitar Festival à Montrouge).

 

    Après des remerciements appuyés à François LACHARME réélu à deux reprises, le cinquième président de l’histoire de l’Académie du Jazz fondée en 1955 (André Hodeir, Maurice Cullaz, Claude Carrière) s’est fixé trois objectifs pour les 5 ans à venir : la transmission, la vulgarisation et la glorification du jazz.

 

    « Le mot jazz, ne nous le cachons pas, a lancé le nouveau président, n’est plus très à la mode. Il n’exprime plus quelque chose de concret pour les nouvelles générations. L’Académie, forte de 60 membres, experts affûtés, va travailler sans relâche pour soutenir les musiciens de jazz de toutes générations, renforcer son engagement envers la diversité et l'inclusion dans notre genre musical, et à mettre en œuvre des stratégies visant à faire du jazz une partie encore plus importante de la vie culturelle de notre pays. »

 

Jean-Louis Lemarchand.
(Membre du bureau de l’Académie du Jazz)

 

 

 

 

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13 mars 2023 1 13 /03 /mars /2023 18:47

GREG WARD’s ROGUE PARADE : « Dion’s quest »
Sugah Hoof records



Greg Ward (as), Dave Miller, Matt Gold (g), Matt Ulery (b), Quin Kirchner (dms)

 

Voilà une belle surprise transatlantique d’un jeune groupe que nous ne connaissions pas et qui fait ce mois-ci les honneurs de Down Beat.

Par curiosité nous sommes allés jeter une oreille sur ce quintet original à deux guitares mené par le saxophoniste Greg Ward.

Le groupe avait déjà été repéré pour son précédent album " Stomping off from Greenwood'"  qui pour tout dire nous avait un peu échappé. Il confirme avec de deuxime opus sous la houlette de ce saxophoniste de Chicago déjà rompu à d’autres esthétique ( Tortoise, William Parler, Roscoe Mitchell etc…)

Et le résultat est franchement séduisant, naviguant entre les sonorités très rock (voire blues un peu gras) des deux guitaristes et l’énergie et le lyrisme de Greg Ward au sax alto, ce groupe possède un vrai son et une vraie cohérence qui l’emmène dans une direction certes très sage et pas du tout révolutionnaire mais carrément emballante. Le genre d’album plutôt feel good et plutôt pas mal écrit.

A suivre et à découvrir.
Jean-marc Gelin
https://youtu.be/R2yboQoTswk

 

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