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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 07:59

Obliq Sound 2008


 

 

Il ne faut pas attendre la troisième note de musique pour se rendre compte de la qualité d’un tel projet. C’est le contrebassiste d’origine italo-suédoise Massimo Biolcati qui mène la barque. A priori, sur le papier, le défi à l’air d’être extrêmement relevé par la présence d’incontournables magiciens contemporains, en la personne de Lionel Loueke à la guitare, Jeff Ballard à la batterie et de Peter Rende au piano. Lizz Wright et Gretchen Parlato occupant la partie vocale sur deux morceaux différents, « Winterhouse » et « Clouds ». Ce merveilleux premier opus de dix compositions originales du leader est consacré en deux parties distinctes. Tout d’abord « Motion », incluant les pièces énergiques du répertoire, puis ensuite « Stillness », regroupant des balades intimes aux reflets nocturnes. Tout au long du disque est mise en évidence une énergie homogène. Un remarquable terrain de jeu pour chaque soliste offrant un pur régal à l’écoute de chaque mesure. Ce disque s’ouvre d’ailleurs par une composition au thème aussi déroutant que le premier chorus du guitariste d’origine béninoise qui, doit-on le rappeler, est un habituel sideman des projets d’Herbie Hancock. Ce thème s’articule de façon originale avec deux lignes mélodiques entrecroisées. L’une doublée par la contrebasse et la main gauche du pianiste, en opposition avec l’autre, interprétée par la main droite du pianiste doublée d’une guitare aux reflets électroniques, causés par un effet électronique. L’étrangeté de cet arrangement attise l’oreille pour la suite du voyage. Ici domine un esprit Jazz-Rock remémorant les belles heures du collectif Steps Ahead. Le synthétique laissant sa place à un coté plus africain apporté par le timbre boisé de la guitare, agrémenté aussi par le chant de l’instrumentiste doublant chacune de ses notes tel un Georges Benson inspiré. La poésie transpire dans tous les recoins du répertoire, transmettant une généreuse efficacité d’improvisation. Dans un des titres d’environ huit minutes, intitulé « Transference », se conte une fable en plusieurs parties, à chaque fois différentes dans leurs complexes constructions rythmiques. Avec cette approche simple et fantaisiste des sonorités africaines faite essentiellement de polyrythmies se remarque une touchante sensibilité, toujours au service d’une interaction musicale hors norme. Idéale transition à la deuxième approche du disque, « Stillness », beaucoup plus développée en sensualité par la présence de la voix de Lizz Wright. Le groupe se transforme alors en cocon, adoptant une remarquable attitude d’accompagnement tout en souplesse et sophistication sonore. Il est possible aussi d’observer le caractère percussif du choix de peaux du batteur Jeff Ballard qui est connu pour être relativement polyvalent dans tous les projets auquel il participe. Ce merveilleux opus se referme sur une complainte interprétée à l’accordéon par le claviériste Peter Rende, qui use lui aussi de sa voix pour orner celle de son instrument. Ainsi se termine le majestueux voyage au gré des vertueux accents de bonté, de lyrisme, accessibles à toutes oreilles qui se laisse embarquer sur les vagues magiques du rêve… Tristan Loriaut

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14 mai 2008 3 14 /05 /mai /2008 22:50

 Candid2008


 

Les bienheureux, vous là qui habitez sur la Côte d’Azur, vous auriez peut être pu nous prévenir qu’il y avait quelque part nichée du côté de Nice, une jeune pianiste totalement et injustement méconnue sous nos nordistes latitudes ! Et il faut bien rendre hommage à Sir Ali de venir aujourd’hui la propulser sur le label Candid tant on est heureux de découvrir cette jeune pianiste.

On passera rapidement sur une promo qui se hasarde à vouloir absolument créer un lien entre la musique de Ryoko et la musique française du début du XX° siècle, pour ne retenir que l’essentiel. Cette jeune pianiste japonaise qui vit en France frémit de grâce et d’énergie. Apporte une grande bouffée d’air frais et carrément printanier dans un exercice qui prend trop souvent des airs contrits d’introspection douloureuse. Rien de cela ici. Car Ryoko virevolte avec autant de grâce que de légèreté dans les haut de son piano. Aussi délicate que franche dans ses attaques du clavier. Rebelle à tous les formats préétablis du trio, la jeune pianiste se révèle d’une très grande inventivité dans le parcours de ses propres thèmes (elle y signe 8 compositions sur 11) marqués parfois par de véritables et astucieux revirements. S’appuyant aussi sur des mélodies simples (qui peuvent évoquer Ravel – à la limite) elle semble faire danser son piano avec l’insouciance d’une personnalité forte et libre (Bonsaï bop). Et ses clins d’œil à son Japon natal qui peuvent revêtir un brin de nostalgie ne s’y font jamais caricaturaux ni lourds de mélancolie. C’est au contraire avec une très grande sensibilité que Ryoko passe d’un jeu dense où virevoltent de mutines arpèges à l’inspiration de thèmes où la musique s’aère et se donne le temps de respirer (Ryoko@ravel ou ce très beau et très zen Sketches of Japan). L’insaisissable pianiste a déjà tout appris. A l’heure où beaucoup de jeunes trios hésitent entre la face Meldhau ou la voie Svensson, Ryoko affiche a contraire une vraie personnalité. Déjà son jeu raconte une expérience vécue entre la France et la Japon. Elle nous en livre ici quelques clefs bien captivantes. Avec la vraie fraîcheur d’un jeu totalement décomplexé                                             Jean-Marc Gelin

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5 mai 2008 1 05 /05 /mai /2008 23:32



Éclipse, un film de Jacques Goldstein

Fredon No Collection

LA HUIT - 2008

 

Poursuivant son chemin en direction de l’ancienne avant-garde New Yorkaise et des jazzmen qui continuent de faire les beaux jours du post-free jazz tel que l’on peut l’entendre au Vision Festival ou à la Knighting Factory, la Huit présente ici, après le travail remarquable de Anaïs Prosaïc sur Marc Ribot, un film de Jacques Goldstein sur le trompettiste New Yorkais Wadada Leo Smith filmé le 31 mars 2005 à l’occasion du festival Banlieues Bleues.

Il s’agit essentiellement d’un concert ( au demeurant magnifique) donné avec son groupe, le Golden Quartet composé de Vijay Iyer aux claviers électroniques, de John Lindberg à a basse et de Ronald Shannon Jackson à la batterie. Un concert filmé en noir et blanc, caméra sur l’épaule (un peu trop agitée à notre goût et évitant hélas les plans fixes trop longs) et qui ravira les partisans de cette prolongation par d’autres moyens du free jazz d’Ornette Coleman.

Une performance magnifique comme le est toute la prestation de ce trompettiste d’exception qui à 66 ans cultive le goût du quartet d’Ornette sans jamais pourtant singer le jeu de Don Cherry. Son goût de l’improvisation et du cheminement solitaire évoque parfois le travail de Antony Braxton, la dimension expérimentale en moins. Mais toujours chez Smith ce goût de la musique envoûtante, du mystère presque pictural et si proche d’autres formes artistiques que l’on y associerait volontiers les

Films de Cassavetes ou la peinture de Jackson Pollock.

 

Entre chaque morceau de ce concert, Jacques Goldstein recueille quelques courtes reflexions du musicien sur quelques points essentiels de sa musique que, dans le sillage de Ornette il qualifie de « creative music » au détriment de jazz qu’il ne retient pas comme définissant son propre travail. Puis suit une interview plus longue où Wadada Leo Smith poursuit sa réflexion autour de quelques questions captées vraisemblablement lors de sa venue en France à l’occasion de ce concert.

 

On ne saurait donc que rendre hommage à ce travail qui permettra à beaucoup de découvrir cet artiste absolument incomparable même si, comparativement au vrai travail de fond qui avait été fait sur Marc Ribot, on reste là beaucoup plus réservés, moins sur la qualité de ce concert passionantissime que sur la réalisation dont on ne comprend pas toujours les partis pris esthétisants : pourquoi le noir et blanc ? Pourquoi des images imposées à notre imaginaire comme celles un peu ridicules – excusez le cliché – d’une voiture roulant dans le nuit au milieu des néons de la ville ? ). Mais surtout ce travail se révèle particulièrement pauvre quand à sa documentation totalement inexistante sur le musicien que tout un chacun est censé connaître. Il est peu admissible en effet que la Huit ne se donne pas le temps de rédiger au minimum quelques liner notes à défaut d’un véritable livret pour présenter en quelques mots au moins la biographie de ce trompettiste essentiel qu’est Wadada Leo Smith.

 

Cependant, pas de quoi bouder notre plaisir et il faut rendre au moins justice au courage de la ligne éditoriale de la Huit qui n’hésite pas à s’investir dans cette musique exigeante au mépris des considérations commerciales qui animent aujourd’hui un grand nombre d’éditeurs de DVD. C’est assez rare pour être souligné et précieux pour être encouragé. Peut quand même mieux faire dans l’approche didactique.  Jean-Marc Gelin

 

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5 mai 2008 1 05 /05 /mai /2008 23:28


Dom Disques 2008


 
« Praxis », terme issu de la langue grecque signifiant « action », désignant l'ensemble des activités humaines susceptibles de transformer le milieu naturel ou de modifier les rapports sociaux. C’est sous ce nom que Laurent Stoutzer intitule son troisième album, tout comme le quartet qu’il constitue, il y a maintenant une poignée d’années. Après le remarqué « El Ojo De Tempestad » en 2003 aux cotés d’un certain pianiste Yaron Herman, incroyable prodige israélien, il revient accompagné par un autre grand talent des touches noires et blanches, le non moins célèbre Benjamin Moussay. À noter aussi, la présence à la contrebasse d’Arnaud Cuisinier et à la batterie de Luc Isenmann. Ce disque commence par un thème modal aux résonnances diverses (« Phantomatic »), au fil des solos du guitariste et du pianiste. Dans cette comptine se décline une sensibilité commune au sein d’un quartet dédié aux étirements harmoniques. C’est dans le second morceau, « Ishima Iwa », que la fusion explosive prend sa place, avec pour objet principal une incroyable envolée accomplie par l’archet de la contrebasse, doublée d’un effet de distorsion. Il en va sans dire qu’un certain esprit Pop-music se dégage d’une telle instrumentation. C’est ensuite par un troisième morceau, « Mayana », que la mélancolie fait son apparition, dans toute sa splendeur, Blues compris. On peut d’ailleurs subtilement y remarquer certains stop-chorus en duo batterie-soliste, offrant un régal rythmique. Remarquable dans chacune de ses exécutions, Benjamin Moussay égraine les mesures tel un habile mélodiste, éblouissant par son talent chaque prise de risque. Il n’en est pas moins des autres instrumentistes lorsqu’on écoute le reste du disque, d’une oreille nostalgique des célèbres opus du guitariste John Abercrombie chez ECM. Une ambiance proprement feutrée, un style épuré de la composition, un talent et un travail énorme de la spontanéité. Au cours de la cinquième composition, « Stygmates », se révèle enfin un récitatif coltranien diaboliquement conçu dans un désordre contrôlé. De romanesques effluves nappés de digressions sonores nous invitent à méditer sur la révolte qui sommeille en chacun de nous-mêmes. Un pur moment de folie, toujours dans un souci permanent de l’idéal. On y ressent d’ailleurs cette éternelle frustration que le clavier ressasse à travers sa caractéristique tempérée que cet instrument est obligé de proposer. Comme pour se rattraper, c’est un cri qui nous vient de ce même clavier, aux limites de l’inaudible, magistralement construit au fil de la montée du volume, tel un réveil de volcan. Désormais chamboulé par ce voyage de neuf minutes au pays du délire intense, il faut retrouver ensuite le coté serein et poétique de la Musique de ce quartet. La générosité de ces protagonistes est sans fin, sans failles. La question se pose lorsqu’il faut imaginer combien de jours de studio il a fallu pour réaliser un tel travail de prise de son, de mixage et de mastering. Malheureusement, impossible de connaître la date d’enregistrement ainsi que le nom des compositeurs, la pochette du disque ne stipule aucunes indications dans cette voie. Un oubli grossier dont on ne tiendra pas rigueur aux acteurs de ce road-movie sonore aux couleurs aussi étranges qu’épurées. Un dernier morceau referme l’album sous le nom de « Duo », cassant une nouvelle fois les esthétiques en proposant une autre approche sonore, en hommage aux riffs fracassants des guitaristes de Pop-Rock. Un album aux facettes aussi multiples que somptueuses. À quand les concerts ? Tristan Loriaut

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26 avril 2008 6 26 /04 /avril /2008 07:33

Yohimbe Brothers

Sylvie Courvoisier trio ABATON

Freedom Now Collection

LA HUIT - 2008

 

                                                                               

 

“Listen to the film and watch the music”, voilà le pari que s’est fixé La Huit Edition avec cette série de films musicaux captés à Banlieues Bleues. La série s’intitule « Free Form Now » et chaque réalisateur a l’entière liberté de filmer la musique à sa guise.

 

La dernière livraison donne de la production actuelle, un échantillon fort intéressant et contrasté dans les approches .Chaque film est confié à des cinéastes pour qui la musique est choisie comme un authentique sujet de travail. La carte blanche qui leur est confiée permet de dépoussiérer les codes plus ou moins figés de la représentation de la musique filmée, problème qui se pose également au théâtre. L’image est souvent privée de sens quand on regarde de la musique enregistrée en concert.

Jacques Goldstein s‘est attaché à suivre le Golden quartet de Wadada Leo Smith en 2005.

Filmé dans un beau noir et blanc, avec une grande précision et au plus près de chacun des musiciens qu’il met ainsi en valeur, le réalisateur ne donne pas souvent une image d’ensemble du quartet mais s’attache plutôt aux différentes phases de jeu.

 

Par contre, une expérience radicalement opposée a été tentée avec le spectacle des Yohimbe Brothers où des effets graphiques et visuels incessants viennent se superposer à la représentation du concert, masquant le caractère réel de la performance. C‘est un vrai film d’animation qui nous est montré autour de la musique du groupe.

Le VJ’ing de Mathieu Foldes impose par ses coups de palette, des kaleidoscopes chamarrés et psychédéliques. Ce travail audacieux, proprement vertigineux occupe en premier toute notre attention. La musique souligne les effets visuels du guitariste Vernon Reid, formidablement présent, affublé d’un drôle de chapeau péruvien.

Enregistré à Bobigny en 2005, ce concert avec la chanteuse Latasha Diggs, le turntablist DJ Logic nous entraîne dans ce qui est supposé être une vision moderne d’un spectacle musical. Chaque titre se transforme en un tableau vivant : l’effet est frappant mais quelque peu intoxicant. On en arrive à être parasité par ce déluge de couleurs et de formes. Cette réflexion autour des rapports entre l’image et la musique est néanmoins passionnante. Car que privilégie-t-on au juste ? Ne s’efforce-t-on pas de rendre la musique visuelle et de traiter à part égale les différentes disciplines artistiques ? C’est le par(t)i pris ici par Jérôme de Missolz et avouons-le cela correspond bien visuellement à l’engagement des Yohimbe brothers dans leur musique fusion, à la croisée du rap et du funk.

 

 

Le dernier DVD proposé d’Anais Prozaic serait la synthèse parfaite entre la représentation attendue d’un trio « classique » ( violon, violoncelle et piano ) filmé  souvent au moyen de zooms qui nous mettent tout près des musiciens. On ressent ainsi le premier titre de la même façon qu’au concert  quand on est bien assis dans les premiers rangs, visualisant  les gestes  tout en tensions et ruptures, le frémissement de la musique de Sylvie Courvoisier.

Puis, c’est la surprise : intervient une rupture brutale avec un duo de danse contemporaine dans un montage qui fait se correspondre les pieds et jambes des danseurs, les mains des instrumentistes. Juxtaposition rapide saccadée, haletante qui colle à la musique et à la danse. Voilà une tentative d’accompagnement plutôt réussi, symbiose de deux formes artistiques performantes.  On est évidemment un peu fasciné par les mouvements des danseurs et sans oublier la musique, la concentration est ainsi divisée. Risque de dilution ? En tous les cas, l’expérience est intéressante dans le rapprochement de diverses disciplines qui se marient bien.

A suivre.                                                                     Sophie Chambon

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26 avril 2008 6 26 /04 /avril /2008 07:31

WHITE BICYCLES

joe Boyd

Éditions Allia 2008

286 p ; 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Attention ! Contrairement à ce que pourrait penser ou croire ceux qui savent que Joe Boyd est un  producteur renommé de la musique pop des années 60, ce livre n’est pas un livre sur cette musique où les clichés sulfureux abonderaient pour alimenter notre imagerie d’Epinal. Tout le contraire. Car celui qui,  dans les années 60 n’avait guère plus que 20 ans et qui quitta les Etats-Unis pour s’installer à Londres dans le but d’y dénicher les nouveaux talents de la musique pop a, dans ce livre un tout autre propos. Et si son livre est effectivement bourré  d’anecdotes vous n’y trouverez pas les images tant rabattues lorsque l’on évoque la période hippie. Celles des excès de drogue et de sexe des pop stars du moment ne sont pas évoquées ou alors indirectement.

Ce livre dont le sous titres est «  making music in the 60’s » raconte l’expérience d’un jeune producteur, débordant d’amour pour la musique et pour les musiciens, candide et naïf dans un milieu qui était alors (époque oblige), un peu plus tendre et plus contestataire qu’aujourd’hui.

Joe Boyd croisa sur sa route Bob Dylan en 1965 lorsque celui-ci fit scandale au festival de Newport. Mais c’est surtout à Londres que sa carrière de producteur-manager prit un réel essors avec l’impulsion d’une scène plus ou moins underground (UFO) et surtout la production du premier album des Pink Floyd. Suivront ensuite quelques grands succès comme Fairport Convention ou l’Incredible String Band et enfin et surtout, le sublime chanteur Nick Drake que ce livre nous invite à réécouter aujourd’hui.

Dans ces coulisses de ce travail de producteur on apprend autant sur les usages de ce métier ( la version est cependant certainement très édulcorée)  que sur l’ambiance de cette époque beatnik que les moins de 20 ans ne peuvent pas avoir connu. Et ’on ne sait pas trop pourquoi ce livre remarquablement écrit nous captive du début jusqu’à la fin même si l’on se sens un peu étranger à son sujet. Peut être une pointe de nostalgie pour une conception un peu naïve du travail de ces producteurs amoureux de la musique et dont on ne retrouve plus la trace aujourd’hui chez les majors.                                       Jean-Marc Gmelin

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26 avril 2008 6 26 /04 /avril /2008 07:29

Foreign Media Jazz – 2007


Pourquoi le trio Rosenberg est il un groupe de jazz?

Déjà parce qu'ils jouent du jazz manouche et aussi parce qu'ils font un brillant hommage à Stéphane  Grapelli, dans la plus pure tradition manouche, en reprenant les titres de jazz (et autres) qui l'ont rendu célèbre ou qu'il a beaucoup joués pendant sa longue carrière. Des morceaux qui rendent le mieux hommage à Grappelli selon le trio, citons « R-vingt-Six » de Django et Grappelli, « You are the Sunshine of my Life » de Stevie Wonder et« What Am I Here For » d'Ellington ou « I Got Rhythm » des Gerschwin.

Rosenberg trio est un groupe gipsy hollandais, internationalement connu, composé du guitariste leader Stochelo Rosenberg, du guitariste rythmique Nous'che Rosenberg et du contrebassiste Nonnie Rosenberg, tous deux frères. Considérant qu'il est difficile de rendre hommage à Grappelli en trio, les Rosenberg ont fait appel au violoniste virtuose Tim Kliphuis, hollandais lui aussi. Reconnu comme le digne successeur de Grappelli, Kliphuis est spécialisé dans le swing et la musique gypsy et donne même des leçons de jazz dans le style de Grappelli !

Et voilà, la boucle est bouclée! Les plus grands jouent la musique de leurs ancêtres les plus grands. C'est vrai que le Rosenberg trio et Kliphuis s'accordent à la perfection. Tout semble fait pour que ces quatre là jouent ensemble. La musique est idéalement jouée, les guitaristes sont justes, Kliphuis donne toute la sensibilité nécessaire à son violon et possède un son manouche criant!

En dehors de ceux signés Reinhardt, les morceaux jazz sont parfaitement arrangés pour le jazz manouche et leur donne même un autre éclairage (« Ol' Man River »). Musicalité, swing, morceaux choisis, Grappelli... Que rêver de plus? Ah si, peut être. On aurait aimé un petit bonus: une composition du quartet qui rendrait hommage à Grappelli. Jerôme Gransac

 

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25 avril 2008 5 25 /04 /avril /2008 08:03

Mc Coy Tyner (p), Joe Lovano (ts), Christian Mc Bride (cb), Jeff Tain Watts (dm)

Half Note 2008



 « Mc Coy Tyner quartet » est juste le titre de l’album. Sans autre manière. Un peu comme l’affirmation de ce que vous allez entendre : un quartet époustouflant, une sorte de pierre philosophale, la résurrection d’un quartet déjà mythique bien qu’il n’ait jamais existé avant. Un quartet qui fait sonner le jazz, qui exhume le jazz de ses errances pour le rendre à sa vérité simple et brute. Ce jazz comme on l’aime depuis Rollins, Trane ou Dexter. A tel pont que si l’on se demande pourquoi depuis tant d’années nous n’avions pas entendu cela. La seule réponse qui s’impose c’est que ces quatre bonhommes ne s’étaient tout simplement pas rencontrés auparavant. Gloire est donc rendue à  Jeff Levenson qui a eu l’idée géniale de produire ce quartet enregistré ici en live au Yoshi’s club de Oakland. Autour de Mc Coy Tyner, trois autres géants : Joe Lovano comme l’un des derniers héritiers de la tradition du sax qui va de Rollins à Dexter. Matériau brut à la limite des sonorités âpres, à la géniale raucité du son comme peu savent la maîtriser aujourd’hui. Et puis Christian Mc Bride, l’un des bassistes les plus inspirés du moment, sorte de Ron Carter sur énergisé qui en plus du son apporte une sérieuse et furieuse envie de groover avec les autres ou tout seul lorsque les autres ont lâché l’affaire. C’est parfois à se demander si, quand les autres ont plié les gaules et que les lumières du club s’éteignent, lui n’est pas encore là  jouer seul sur scène toutes lumières éteintes. Jeff « Tain » Watts, on l’a déjà dit dans ces colonnes, c’est monsieur 10.000 watts. Le garçon insuffle la fougue et le feu. Rare sont les batteurs qui comme lui, en donnant le beat d’un simple coup de baguette sur la cymbale parviennent  imposer autant leur présence. Magistral ! Et puis le jeune Mc Coy Tyner que l’on excuse parfois de jouer comme Mc Coy Tyner, celui de 70 ans. C’est qu’il y a chez celui que nous entendons ici, une puissance phénoménale dans ses attaques, dans son jeu en block chords frappé durement, une sorte de plaisir malin à maltraiter son piano avec amour toujours. A porter seul l’incandescence au plus haut jusque dans une version solo de For All We Know qui clôture l’album et qui est, finalement une histoire de cajolerie entre lui et son clavier,  à laquelle nous assistons en fin de concert comme par effraction.

Pendant plus d’une heure, pas une seule baisse d’intensité. Les morceaux s’enchaînent les uns après les autres, tous confinant au moment d’extase ou au pur chef d’œuvre, c’est comme vous voulez. Le jazz est là. Jamais éloigné, toujours au cœur brûlant du propos. Au foyer d’un volcan d’où surgit le jaillissement d’une musique brute, brutale, primitive un peu. Sur des motifs simples et répétitifs qui font partie du répertoire du maître, on retourne parfois en Afrique (du Sud) en pensant aussi à la musique de Randy Weston : Walk spirit ou Samya Layuca, (enregistré pour la première fois en 74). Mellow Minor, Passion dance ou plus spirituellement Search For peace alignent des moments qui prennent aux tripes et surtout qui vous invitent à la danse. Impossible de résister au beat de l’album. Impossible de laisser le pied, la tête ou les mains inertes…… et puis le fameux Blues in the Corner, là encore au sommet. Toujours cette évidence que parmi les plus grands thèmes de jazz écrits ces trente dernières années, Mc Coy en a signé un nombre incalculable qui méritent toutes d’accéder au statut de standards intemporels.

Alors, en entendant cet album nous n’avons finalement que deux regrets. Le premier bien sûr c’est de ne pas avoir été là ce soir là. Mais on peut encore espérer que des programmateurs de festival auront entendu cette « tuerie » et programmerons rapidement ce quartet de génie quoiqu’il en coûte. Mais il y a autre chose, c’est qu’en entendant les sommets auxquels se hisse encore et toujours Mc Coy Tyner on ne peut aujourd’hui s’empêcher de penser à ce que, malheureusement un géant de la trempe de Sonny Rollins pourrait être aujourd’hui et qu’il se refuse pourtant de devenir. C’est que le jazz est une affaire autant individuelle que collective. Mc Coy Tyner n’a jamais perdu le sens de cette évidence. C’est la démonstration imparable à laquelle il se livrait ce soir là avec Joe Lovano, Christian Mc Bride et Jeff Tain Watts pour ce concert en tous points exceptionnel.                Jean-Marc Gelin

 

 

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25 avril 2008 5 25 /04 /avril /2008 08:00

Foreign Media Jazz – 2007

 




Il aura fallu deux ans et ce troisième album pour voir la saxophoniste hollandaise Tineke Postma se produire en ce début d'avril à Paris au Duc des Lombards, club refait à neuf aux conventions américaines actuelles. Élève de Dave Liebman et de Chris Potter à New York  et Prix de la Révélation de l'année 2006 alors inconnue du grand public, elle n'avait pas laissé indifférente lors de sa fulgurante prestation télévisée des Victoires du jazz. Côté inspirations, Tineke Postma rappelle Cannonball Adderley et aussi Art Pepper à qui elle emprunte quelques gimmicks de jeu. Nous lui trouvons aussi des inflexions et la même attaque douce que Pepper.

Comme l'indique l'accroche de son site web, Tineke Postma est une saxophoniste, compositrice et musicienne de jazz. Avec ?A Journey that Matters ?, elle ne fait pas mentir cette description accrocheuse. Elle a écrit huit pièces sur les onze du cd où elle joue des trois saxophones. Et pour l'occasion, elle s'est entourée de dix très bons musiciens dont la batteuse Terri Line Carrington (Herbie Hancock) pour cinq jours d'enregistrement studio. C'est donc une assez grosse production que lui offre le label Foreign Media Jazz. Avec ses avantages et généralement ses inconvénients. On l'aura deviné: une bonne production assure aux musiciens de travailler dans de bonnes conditions et au leader de s'attirer quelques sidemen de pointure. Les inconvénients peuvent être une musique trop calibrée et formatée. Les grosses productions étant destiné à un large public.

Et bien ce n'est pas le cas ici! Certes, les compositions sont jolies, harmoniquement simples et sont expressives mais sans esbroufe. Les chorus des musiciens sont concis, courts, très bien exécutés et ne dépareille pas de l'atmosphère d'un jazz mainstream convenu et propre mais qui n'est pas dépourvu de jolies cavalcades et envolées sur "A Journey that Matters "et "Short Conversations "où Postma et le pianiste Randal Corsen nous régalent de leur discours riche en réponse. Pour donner un joli relief aux pièces ("Fleurette Africaine), trois d'entre elles sont agréablement arrangées avec un quatuor à bois (clarinette, basson, flûtes, cor) qui évoque poésie et aventure.

Le jeu de Postma est classique, efficace et sans réelle surprise alors que celle-ci ne prend pas la place de la leader charismatique qu'on s'attend à écouter. Mais on lui trouve plutôt une aptitude particulière à se fondre dans ce type de production et à s'exprimer avec talent lors de ses interventions. Ses chorus sont construits autour de différentes scènes mélodiques qui colorent ses compositions de bonne facture. Au sax, ses inflexions sont expressives et rêveuses et les nuances de jeu sont nombreuses. Entouré d'excellents musiciens qui savent la mettre mettre en valeur,  la saxophoniste a su faire de "A Journey that Matters "un album de jazz agréable à écouter, romantique, harmonieux, équilibré et qui lui correspond très probablement.  Jerome Gransac

 

 

 

 

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22 avril 2008 2 22 /04 /avril /2008 07:24

Universal Réed. 2008





 De quoi est fait le monde expérimental de Michel Magne ? le Michel Magne que l’on connaît pour avoir aligné dans les années 50 et 60 un nombre incalculable de musique de film. Tout simplement d’une musique abordée avec l’esprit d’un chercheur complètement fou se lançant dans une musique plurielle et protéiforme où Stockhausen flirterait allègrement avec le jazz. Le jazz ai-je dit ?  Non-sens total puisque cette musique où l’on entend autant la symphonie classique que l’Opéra ou le jazz est un heureux mélange expérimental de musiques et de sons. Rien n’est suggéré et tout est dit ici. Dans Self service ce sont des bruits de couverts, plus loin un carillon explose, plongé dans l’eau bouillante ( Carillon plongé dans l’eau bouillante), des femmes simulent la douleur dans Pointes de feu amorties au dolossal, des rires fusent et des moines prient. Aucune logique si ce n’est une sorte de passion du génial collage. Du bousculement des lignes et des logiques harmoniques, rythmiques et surtout stylistiques. Un zapping permanent ob ;igeant les protagonistes à un véritable don d’ubiquité musical. Lorsque la « musique tachiste » fut créée en 1954 Salle Gaveau, la représentation tourna au fiasco. Pour Carillon plongé dans l’eau bouillante, le musicien chargé de la manip failli fiche le feu sur scène et l‘on dut appeler les pompiers. Dans Self Service «  les casseurs d’assiette s’en donnèrent tellement à cœur joie dès le début de la pièce qu’il ne resta vite plus rien à casser pour la fin du morceau ». De même « dans Pointes de feu, les chirurgiens devaient opérer une fille à poil dans un piano. Mais les musiciens décontenancés ne regardaient pas leurs partitions et firent n’importe quoi ». C’est donc finalement en studio que Michel Magne refit cette expérience et utilisa alors cette technique alors révolutionnaire et largement utilisée aujourd’hui, celle du re-recording..

Une deuxième partie de cet album repose sur des musiques de Magne arrangées par Jean Claude Vannier et jouées par Martial Solal. Là encore les frontières explosent et l’on passe sans cesse du classique au jazz avec un sens aiguisé de la poésie surréaliste où Breton finalement n’est jamais loin ( si ce n’est le poète Bernard Dimey). Cette partie là prend des allures de suite symphoniques où l’esprit structuré de Duke Ellington rejoindrait l’esprit déstructurant de Monk (pour la partie jazz).

Deux pièces des années 70 viennent compléter ce voyage musical inédit et totalement barré : Musique sensorielle et Mozart en Afrique qui là jettent les prémisses de ce que sera plus tard le jazz rock.

Et l’on doit alors rendre hommage à ce formidable travail de réédition de cet hommage à la pure folie musicale, à l’esprit d’incroyable liberté qui animait Michel Magne et ses colistiers. Sa musique demeure comme une expérience totalement inédite. Une sorte d’expérience esthétique à nulle autre pareille. Aussi folle que déraisonnable. Jean-Marc Gelin

 

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