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5 mai 2007 6 05 /05 /mai /2007 16:23
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JJJJ jerome SABBAGH: « Pogo »

Jérôme Sabbagh (ts, ss), Ben Monder (g), Joe Martin (cb), Ted Poor (dm)

 

 Fichu disque ! Non mais c’est pas permis des trucs comme ça ! Parce que moi figurez vous que depuis que je l’ai reçu et ben il tourne en boucle sur ma platine. Bon d’accord c’est bien joli tout ça mais pendant ce temps là, y a du monde qui attend, j’ai les albums qui s’accumulent….Et vas y que je me repasse Pogo et que je me redonne un petit coup de Stand Up, et que Middle Earth me donne des battements au bout du pied et que même si des trucs comme Hamra me gonflent un peu, là c’est Ben Monder qui me décoiffe. Non mais j’vous jure quand c’est pas l’un c’est l’autre. Un coup il y a Sabbagh qui t’assassine, un autre c’est ben Monder à la guitare. Quand à Joe Martin à la basse je te raconte pas ! T’as qu’à écouter cette profondeur (Moon/sun). Non mais franchement vous avez entendu ce truc, comme disent les p’tits gars dans le milieu «  ça joue monstrueux » ! Moi je vous l’dis le Jerôme il a pas intérêt à pointer le bout de son nez parce que là c’est sûr tous les saxophonistes du coin ont dû lancer un contrat sur sa tête. En plus voilà le gars qui vous arrive avec son petit air tout propret de gendre idéal. Le gars qui connaît son affaire et il souffle dans son biniou joliment, totale maîtrise et tu te dis, putain c’est classe ! Et puis avec son air de pas y toucher et sans se départir d’une superbe élégance, il te balance un vieux blues poisseux qui colle aux basques. Et le morceau d’après t’entends un truc genre un refrain que t’aurais pu entendre avec The Police dans les années 80, mais là, Monder et lui en complices ils te balancent un truc plus rock qui assure grave. Mais la connivence de ces quatre là est ailleurs. Elle est plutôt du registre de celle que se trouvent les mauvais garçons quand ils veulent jouer les aristos. A moins que ce ne soit des gars de la haute qui aillent s’encanailler dans les ruelles sombres et les boites mal famées. Avec des mélodies simples voire carrément chantantes, ces quatre là jouent autre chose que le son. C’est plus dans la façon de dire que dans le dire lui-même. Une façon d’installer le groove permanent, de jamais en démordre. Un truc que quand tu l’entend tu pex pas t’empêcher de lâcher un « yeah man ! ».  Et puis moi quand j’entend cet album je pense à des associations évidentes. Je pense à Scofield et je pense à Lovano (tiens Lovano c’est une des références de Jérôme, justement). Mais aussi (allez savoir pourquoi), moi j’avais Lester Young en tête. Parce que justement quand les ténors sont capables de jouer ave autant de classe une musique de voyous, ben moi je pense à Lester. Et pour ceux qui commençaient à désespérer du saxophone un peu trop formaté des scènes New Yorkaises, le jeune frenchy qui aligne toutes les compositions montre là qu’il y a bien d’autres choses que le post fun ou le revival.

Il y aura bien quelques grincheux pour vous dire que certaines parties (notamment au niveau de la rythmique) ont été parfois simplifiées à l’extrême. Il n’empêche qu’on en démordra pas, depuis North on savait que Sabbagh était un grand saxophoniste qui confirme ici sa lancée sans chercher à réinventer le monde. On sait désormais qu’avec cette formation il a réussi à trouver quelque chose de plus. Et quand on les entend on croirait qu’ils jouent ensemble depuis des milliards d’années. Et je sais pas ce que vous ferez de tout ça mais moi c’est sûr je me le mets dans mes favoris sur mon Ipod. Et je peux vous dire qu’il va pas me lâcher de sitôt. Yeah man !

Jean-Marc Gelin

 

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5 mai 2007 6 05 /05 /mai /2007 10:43

JJJJACQUES PELLEN : «  Lament for children »

Naïve 2007- Jacques Pellen (g), Gildas Boclé (cb), Marcello Pelliteri (dm)  Ici comme ailleurs Jacques Pellen reste un guitariste marqué par l’amour de la musique celtique. Mais alors qu’un musicien comme Didier Squiban affiche ses attaches bretonnes à grands coups de clichés et de caricatures, Jacques Pellen lui s’exprime comme un musicien en recherche dont le sujet est moins axé sur une musique folklorique que sur quelque chose qui se situe au-delà. Et c’est tout l’objet de Jacques Pellen de montrer combien la musique Celtique dépasse largement son cadre régional pour s’appliquer à d’autres sujets. Des thèmes comme Lament for children, un blues comme God bless the child ou encore un morceau de Duruflé comme Pie Jesus, prennent avec ce trio un tout autre accent. Car avec sa façon de jouer exclusivement acoustique comme on jouerait de la harpe celtique, Pellen se situe loin de la caricature. Sa guitare au jeu piqueté souvent dénué de tout legato, sans effets ajoutés s’entend parfois comme une gestuelle précise et presque méditative. Et il est vrai qu’il y a dans la musique de Jacques Pellen une très forte dimension Zen par le dénuement dans lequel il s’exprime. Pourtant sur deux titres cette musique peut aussi faire preuve de swing  (Bea’s house ou comme Shh) même si ce n’est pas le propos ici. Car on est plus là dans une sorte de road movie apaisé et inspiré. Jamais évanescent, Jacques Pellen parvient à ce prodige qui consiste à exprimer avec beaucoup de poésie une musique à l’énergie et la puissance intacte.  Et il n’y a pas loin finalement entre les explorations de ses sentiers et les improvisations de Keith Jarrett. Une musique qui au travers de son parcours tracé net peut être aussi sinueuse et se perdre sans s’égarer jamais. Jean-Marc Gelin

 

 

 

 

 

 

 

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5 mai 2007 6 05 /05 /mai /2007 07:19

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1 mai 2007 2 01 /05 /mai /2007 06:17

     Tableau de campagne pour la culture :

 

 

 

Nicolas Sarkozy

 

Ségolène Royal

 

Gratuité des musées nationaux

Soutien à la création et à l’emploi culturel

 

Augmentation du budget de la culture, suppression des freins au mécénat

 

 

Renforcement de l’enseignement artistique de la maternelle à l’université

Accroître les obligations des chaînes de télévision publiques en matière de diffusion culturelle

 

 

Financement d’équipements culturels nouveaux par le biais des régions

 

 

Soutien aux droits d’auteur et aux droits voisins, création d’une agence chargée de régler les litiges entre ayants droits et professionnels d’internet

Création d’une haute Autorité pour le Pluralisme, nommée par le Parlement.

 

 

Soutien au développement du logiciel libre

  

 

 

Renforcement des mesures anti-concentration dans la Presse.

 

Taxation des revenus publicitaires des chaînes privées au profit de l’audiovisuel public

 

 

 

 

 

Source : http://www.lemonde.fr/web/vi/0,47-0@2-823448,54-883898,0.html

 

 

 

 

 

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15 avril 2007 7 15 /04 /avril /2007 16:13

La tectonique des nuages,

 

Théâtre de la Ville – Paris le 14 avril 2007

 

Vivement la version mise en scène de «  La Tectonique des nuages » ! Nous n’avons eu hier soir au Théâtre de la Ville qu’un avant-goût version concert (sans scénographie et décors) de l’opéra-jazz tant attendu de Laurent Cugny. Cela fait déjà longtemps qu’il porte ce désir de créer un opéra. Il a d’abord fallu la rencontre d’un texte, « Cloud Tectonics » de l’auteur portoricain Jose Rivera, un récit cosmogonique mêlant l’humain et le surnaturel qui « charrie l’air de rien, poésie et drame, passion et déception, métaphysique et fantastique, telle une variation contemporaine des amours impossibles entre l’absolu et l’humain, l’éternité et la finitude » (F. Rancillac). Il a ensuite fallu le talent exceptionnel de mise en espace musical de Laurent Cugny : une écriture musicale exigeante  pour dire la nature cataclysmique de Los Angeles, la suspension du temps provoquée par l’énigmatique Celestina del Sol, l’irruption du fantastique et du merveilleux dans la vie d’Anibal de la Luna , la confusion des sentiments, la réconciliation des personnages avec leurs racines latino-américaines. Servie par d’excellents musiciens (citons notamment Airelle Besson à la trompette et Thomas Savy à la clarinette et au saxophone), la musique s’entremêle subtilement au texte. David Linx, l’épervier-chanteur que son chant semble emporter dans les airs, Laïka Fatien, à la voix si mélodieuse et si douce, et Yann-Gaël Poncet, tout de fougue et de passion, alternent parties parlées, scandées et chantées et sont des guides sûrs vers l’imaginaire et l’émotion. Toutefois, dans cette version concert qui exige la présence d’un choryphée-lecteur des didascalies, nous ne pouvons à certains moments du spectacle réprimer un sourire devant la platitude de certaines réparties. Pas si facile en effet de donner toute la fougue tectonique de ce texte ainsi assis côte à côte sur le devant de la scène.  On ne peut donc que souhaiter après une telle soirée qu’un programmateur courageux offrira très prochainement la possibilité de voir ce spectacle dans l’espace et le temps qui lui conviennent. Le spectacle se termine par un thème chanté en espagnol par David Linx : l’émotion est à son comble !

 

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12 avril 2007 4 12 /04 /avril /2007 22:45

JJJ ROSARIO GIULIANI : « Antything else »

 

 

Dreyfus

 

 

 

 

 Quelques mois après le magnifique album de Pierrick Pedron, l’album de Rosario Giuliani s’écoute sous le même soleil, exactement. Celui du profond respect des saxophonistes pour l’héritage des maîtres et partant, d’une certaine histoire du jazz sur laquelle on rencontre des saxophonistes comme Cannonball Adderley, Phil Woods ou le regretté Jackie Mc Lean. On jurerait même à entendre le saxophoniste italien, qu’il a dû mettre Sonny Stitt en bonne place dans sa discothèque. Ainsi, bourré d’énergie à craquer l’album de Giuliani revisite le bop sans copier, sans revival mais néanmoins bien ancré dans l’esprit. Le saxophoniste italien signe lui-même la plupart des compositions mais laisse néanmoins une place à celles de Ornette Coleman (Invisible) et à son merveilleux pianiste, Dado Moroni pas en reste une seconde dans le genre bopper. Giuliani impressionne, tranche, met le feu et s’envole sur une magnifique ballade (a winter day). Flavio Boltro quand à lui joue les équilibristes avec délectation, flirte border line du côté de l’out off tune et tel un équilibriste se rattrape à la volée. Rythmique bien rodée avec, comme toujours un Rémi Vignolo tout guilleret, dont les lignes de basses semblent presque mutines. Bref album 100% plaisir dans le genre.
Mais voilà, cet album va venir nourrir une polémique entendue ça et là : le sax est il en train de se ringardiser. Jadis instrument de prédilection du jazz, le saxophone a-t-il encore sa place aujourd’hui ? Je vous rassure ce n’est pas moi qui pose la question (rien que la poser me rappe les oreilles) mais j’entend ça et là le débat s’animer autour de cette question face à laquelle celle sur le sexe des anges ne vaut pas tripette. Car les saxophonistes aujourd’hui s’évertuent avant tout à être de bons saxophonistes et surtout de bons solistes. Entre le revival nostalgique et le formatage post funk à l’américaine se pose la question de savoir comment peut évoluer l’instrument ? Et surtout comment peut il contribuer aujourd’hui a réécrire les pages de demain ? On ne boudera donc pas notre plaisir mais malgré le pied absolu que l’on prend à l’écoute d’albums comme celui ci, la virtuosité des uns et des autres n’empêchera pas un néanmoins la question de se poser. Avec acuité

 

 

Le sax est il encore l’avenir du jazz ?

 

 

Jean-Marc Gelin

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10 avril 2007 2 10 /04 /avril /2007 20:30
Nous nous sommes tant aimés ! Agnès Jaoui nous vous avons aimé. Nous avons aimé cette façon que vous aviez de montrer que l’intelligence n’était pas l’apanage des intellectuels, que la pensée n’était pas sinistre et que le rire même le plus cynique était aussi porteur de sens. Nous avons tant aimé votre façon de porter sur le monde un regard aussi féroce qu’il est tendre, aussi cruel qu’il est justement exigeant sur la nature humaine. Et puis, puisque notre terrain de prédilection ici, c’est la musique, nous avons totalement craqué pour le disque que vous avez publié l’an dernier (Canta) où vous seule sembliez alors en mesure d’exprimer avec autant de force profonde et de chaleur suave cette saudade qui semble si bien vous aller.

 

Et maintenant que vous voilà adoubée et invitée à un festival de jazz (ce dont personnellement je me réjouis) vous déclarez dans un journal suisse  tout de go (allez comme disait Audiard, « il faut oser ») : «  Le jazz quand j’étais adolescente c’était les garçons qui lisaient Hesse et écoutais Wagner (sic !) Et ils ne voulaient pas parler aux filles, donc ils m’énervaient. Et je vais dire un truc énorme – je ne sais pas si je devrais – mais pour moi le jazz c’est l’expression de l’hystérie masculine ».

 

 

Mais oui Agnès vous pouvez tout dire, tout oser puisque vous bénéficiez de cette magistrature d’influence qui entoure les acteurs et leur permet de dire dans n’importe quelle tribune tout ce qui leur passe par la tête. Et puis  surtout ici, au sein d’un festival de jazz on peut tout dire. Le jazz après tout c’est bien ce pays de liberté où l’on peut jouer avec les non sens atonaux, les contresens et les contrepoints, la pensée de l’expression libre et l’improvisation absurde du verbe. Le jazz permettrait alors de dire n’importe quoi, de flirter avec les couacs, et vous en êtes la preuve.

 

 

Mais, Chère Agnès il faut qu’on cause tous les deux. Car je crois que si pour vous le jazz est représenté par les gens qui écoutent Wagner, permettez moi de me demander si depuis toutes ces années vous ne faîtes pas là un terrible contresens. Car, Chère Agnès je dois vous faire part d’une terrible vérité et j’ai peur en utilisant les mauvais mots de vous heurter violemment mais je dois vous révéler une chose terrible : ceux qui vous fait croire toutes ces années que Wagner était un joueur de jazz vous ont menti ! Oui je sais cela doit être dur à entendre mais maintenant que vous vous lancez dans la musique il est des choses que vous ne pouvez plus ignorer. Que vous devez savoir. Et il faut que vous sachiez enfin que le swing est à Wagner ce que Ella Fitzgerald est à Pavarotti. Il en va de votre éducation musicale, de celle de vos enfants et des enfants de vos enfants.

 

 

Quand à l’hystérie masculine dont vous parlez, elle n’a rien à voir avec les envolées légères de Paul Desmond (tiens justement lisez le livre d’Alain Gerber «  Paul Desmond et le côté féminin du monde »). Écoutez les frémissements délicats dans le dernier disque de Paul Motian avec la grâce toute féminine de Joe Lovano. Et surtout accordez nous un peu de votre temps précieux. On vous fera découvrir le jazz que l’on aime et que visiblement vous ne connaissez pas.

 

 

 

 

 

 

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3 avril 2007 2 03 /04 /avril /2007 23:08

JJJJ Pierre de Bethmann : « Oui »

 

Nocturne 2007

  

Pierre de Bethmann nous propose un opus à la structure d’interprétation intéressante, complexe voire intellectuelle. En fait, ce n’est pas si surprenant que cela quand on connait l’art du musicien.

Cet opus est consacré à un septet homogène et très cohésif qui joue des compositions elles aussi très homogènes. A l’instar du saxophoniste Donny McCaslin avec son très bel album « Soar » (SunnySide Records 2006) avec la chanteuse Luciana Souza, Pierre de Bethmann utilise la voix de Jeanne Added comme instrument à part entière. Selon un système de superpositions de couches instrumentales et sonores d’expressions différentes, mécanisme que l’on rencontre aussi chez McCaslin, Pierre de Bethmann construit son mille-feuille en y intégrant abondance de notes, goût du risque, diversités harmonique et rythmique aux métriques les plus équilibristes. Peut-on parler d’album concept ?

C’est possible. En tout cas, De Bethmann, très à l’aise dans cet/son univers, est la plaque tournante du groupe : il lance des assauts sonores de son fender qui prennent la forme d’atmosphères chargées de discours et de nappes montantes et descendantes qui sont attribués par musicien ou par petit groupe de musiciens.

Pour continuer à décrire ce groupe à la structure mouvante, on peut dire que le rôle de chacun évolue au fur et à mesure des pièces. Comme dans un réseau de Petri, De Bethmann passe un jeton que l’on se distribue ou que l’on partage par jeu d’associations pour créer des alliances déroutantes et orgasmiques au niveau technique mais plus rarement musicalement.

Les vocalises de Jeanne Added, au timbre de voix carillonnant, soulignent les thèmes à teinte dissonante et surplombent l’ensemble très cohésif  Stéphane Guillaume (as) / David El Malek (ts) / Michael Felberbaum (g) de sa voix juste à la texture claire et voilée à la fois.

Cette cohésion se dissout quand les saxophonistes se détachent de la guitare de Felderbaum si invraisemblablement inspiré (« Singulier ») pour s’associer à Jeanne Added et marquer ainsi le trait de la mélodie, parfois de manière excessive, ou dépeindre un thème à contre-courant.

A son tour, De Bethmann seconde la vocaliste (« Air courbe »), s’associe au guitariste pour nous sortir des sonorités jouissives et variées ou compose avec une rythmique (Vincent Artaud ,Franck Agulhon) que l’on aurait tort de ne pas écouter tant son apport (« Effet tatillon ») favorise les positions à risque du quintet. Aussi, il arrive que la rythmique se dissocie : la contrebasse ou la batterie crée une association éphémère avec un autre instrument pour soutenir son propos.

Entre ballades (« Air courbe », « Silnes »), compositions pêchues (« Schéma »), riffs funky et joyeux (« Oui ») et de très nombreuses montées en puissance des instruments, voix comprise, De Bethmann nous a concocté une musique riche en surprises et en abondances, en sonorités et en formes combinées qui rassasient notre goût de la musique d’aventures.

Jerome Gransac

 

 

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3 avril 2007 2 03 /04 /avril /2007 23:05

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Yoni, il semble qu’aujourd’hui tout le monde cherche à jouer avec toi. Quel recul as tu par rapport à ça et par rapport au fait que tout semble basculer très vite pour toi ?

 YZ : En fait c’est très dur à analyser comme ça. Tu sais, nous les musiciens on est très vite parano. Je ne suis jamais vraiment satisfait et j'angoisse assez vite. Alors même si on me dit que cela marche bien maintenant moi j’ai souvent l’impression du contraire. Mais j’imagine que c’est aussi le lot de tout artiste de se mettre toujours en cause.

 

 

 C’est inhérent à la création ?

 YZ : Surtout en jazz où quoi que tu fasses, tu racontes quand même une partie de toi même.

  

Justement parles nous de toi. Quel est ton parcours ?

 YZ : Tu veux savoir comment j’ai commencé la contrebasse ? En fait ce sont les copains qui m’ont fait découvrir la basse électrique et le rock. Mes parents n’étaient pas du tout portés sur la musique. Il n’y avait pas de chaîne hi fi. Ce sont surtout mes copains qui m’ont dit un jour qu’ils montaient un groupe et que ce serait bien si je tenais la basse. Alors on passait notre temps à écouter du rock d’ado, des trucs vraiment pourris. Mais pour moi ça a été vraiment le côté social de la musique qui a été un révélateur. Jusqu’à cette période j’étais vraiment très mal dans ma peau. Enfant j’ai écu en Angleterre et puis à 9 ans je suis allé vivre en Israël. Là ça a été très dur pour moi parce que je ne me suis pas du tout retrouvé dans ce pays. J’étais très isolé, je n’avais pas d’amis, les gamins se moquaient de moi. Grâce à la musique j’ai enfin pu avoir des vrais copains et d’un coup je me suis trouvé super bien avec eux. Et avant la musique je n’ai pas de souvenir d’avoir jamais été bien pendant mon enfance. Ça n’allait jamais. Vers 14/15 ans j’étais suicidaire et quelque part la musique m’a sauvé. Mais je n’étais pas le modèle du surdoué. Moi c’était plutôt pour me retrouver l’après midi avec mes copains. Au lieu d’aller taper le ballon au foot, aller dans les garages fumer des clopes et jouer de la musique avec les potes. Je n’ai découvert le jazz que deux ou trois ans plus tard et c’est là que cela m’a fait un vrai déclic.

 

 

 Quand as tu décidé d’en faire ton métier

 YZ : Au bout d’un moment j’ai voulu progresser et j’ai pris des cours de basse électrique. Je suis allé voir quelqu’un qui était prof de contrebasse et de basse électrique et qui m’a amené au jazz. Il m’a un peu prit pour son fils. Il m’emmenait à ses concerts et au début je comprenais rien à ce qu’il jouait. La nuit j’arrivais pas à dormir, je m’écoutais les K7 qu’il me passait, les quintet de Miles (Cookin’, Relaxin’) entre autres. Et franchement il  avait une ambiance dans ces vieux quintets, une sonorité et puis toute l’image qu’il y avait avec la trompette de Miles, la sourdine, le son du blues ! J’avais envie de rentrer dans cet univers. Avec Miles j’avais l’impression qu’il y avait quelque chose en plus que la musique. Ce type est véritablement un metteur en scène. Du coup je suis devenu un auditeur compulsif de tout ce qui se fait. Je n’ai pas compté mais aujourd’hui je dois avoir plus de 1000 disques de jazz chez moi.

 A 18 ans en Israël on sélectionne les jeunes pour voir ceux qui peuvent devenir des officiers dans l’armée. Moi j’étais dans la musique et du coup je me sentais assez cool. Alors j’ai opté pour Jeruslem où il y a une académie de musique. On s’est retrouvé à 10 dans une petite classe de jazz. Je débarquais avec ma basse électrique et je ne connaissais rien au jazz. Du genre à me pointer pour l’examen d’entrée avec ma walkin écrite sur une petit cahier parce que j’arrivais pas vraiment à improviser. Je me suis retrouvé le seul bassiste de la classe. Du coup je faisais tous les ateliers et j’ai travaillé comme un malade pendant un an. J’arrivai à 8h du matin et je repartais à 21h le soir, 6 jours par semaine. Je partageais ma piaule avec un batteur et tous les matins on s’entraînait tous les deux avec un métronome. En fait je suis passé de rien, du bidouillage à une vraie structure qui demandait beaucoup de travail. Plus de 14h par jour sur l’instrument ! Au bout de 6 mois la basse électrique m’a fait criser. T’imagine avec ma basse électrique à essayer de relever des solos de Paul Chambers…

  

Surtout quand il joue de l’archet !

 YZ : Non mais sérieusement je te jure que c’est vraiment dur à 18 ans comme ça d’un coup d’être plongé dans cette exigence de rigueur. J’en ai pleuré plus d’une fois. J’avais une pression énorme et mes parents n’étaient pas du tout derrière moi pour m’encourager. Ils estimaient qu’ils me laissaient une année de battement mais qu’après il faudrait que je reprenne les choses « sérieuses». Ensuite il y a eu un break avec les 7 mois d’armée que j’ai dû faire. Mais je ne pouvais pas travailler l’instrument. Du coup au bout de 7 mois j’ai réussi à me faire réformer et 3 mois après je suis parti en France.

 

 

 Tu t’es fait mal sur l’instrument

 YZ : Non jamais. J’ai toujours adoré ce travail même si des fois je reconnais que j’avais les doigts qui saignaient. Mais ce n’a jamais été une douleur. Mais à côté de cela il y a un rapport physique avec la contrebasse. Lorsque tu fais vibrer l’instrument ! Je n’avais pas ce rapport sensuel avec la basse électrique et du coup cela a été une révélation. Aujourd’hui j’ai totalement abandonné la basse électrique. En plus j’ai opté pour un jeu sans aucune amplification. Totalement acoustique !

  

Pourquoi avoir choisi  la France

 YZ : D’abord ma mère est française et puis j’avais mes grand parents ici. Surtout il fallait vraiment que je parte. Non seulement je faisais de la musique alors que mes parents attendaient que je suivent un autre parcours mais en plus je me faisais reformer ! Franchement je ne prenais pas le chemin que mes parents voulaient pour moi. Et puis je crois que secrètement ils pensaient qu’au bout d’un an passé en France j’aurai envie de rentrer en Israël reprendre des études normales.

 

 

 Tu arrives en France, tu n’avais pas de connexions particulières

 YZ : Non mais ma mère m’a inscrit au CIM. C’était en 1995. C’était l’année où Alain Guerini venait de disparaître. En fait c’est Texier qui lors d’un concert en Israël nous avait indiqué le CIM.

 

 

C’est là que tu as rencontré Youn Sun Nah ?

YZ : Oui et beaucoup d’autres. Comme David Georgelet par exemple et beaucoup d’autres. Au début c’est surtout David qui était moteur et qui organisait plein de gigs. Mais bon à l’époque même si je savais pas mal de chose sur le jazz cela m’a quand même pris pas mal de temps pour pouvoir me hisser. Cela fait 5 ans que je suis intermittent mais en fait c’est très récemment que je peux gagner ma vie en jouant. Maintenant ça va beaucoup mieux. Le seul truc c’est que tu sais pas combien de temps cela va durer. Avec tous les jeunes musiciens qui arrivent….. Aujourd’hui on est un peu une génération à la mode de gars trentenaires dont on parle un peu et qui commencent un peu à percer. La notoriété est aussi beaucoup liée à un phénomène de génération.

 

Comment ressens tu la difficulté pour un contrebassiste d’exister

YZ :C’est comme ça, on est un instrument qui reste derrière. Même si tu joues vite et fort, tu restes un contrebassiste et tu seras jamais uns star dans le jazz. Ca va avec l’instrument et moi cela ne me pose aucune problème au contraire. Il y a un côté frustrant de ne pas être leader mais cela va très bien avec mon caractère. On peut très bien imposer un style tout en restant derrière un soliste.

 

 

Et toi tu n’as pas envie des fois d’être comme Avishai ( Cohen), un véritable leader avec sa contrebasse ?

YZ : Attention moi je ne suis pas Avishai ! Moi je suis plutôt réservé et puis je  jouerai jamais comme lui. Tu te rends pas compte techniquement le niveau de ce gars, c’est incroyable ! Mais si je devais faire quelque chose sous mon nom, ce ne serait justement pas pour mettre l’instrument en avant mais plutôt la musique. Et là c’est vrai que j’ai envie de composer sans pour autant me transformer en soliste.

Quelqu’un comme Scott La Faro représente un idéal pour les contrebassiste comme toi, non ?

 YZ : C’est un génie et j’adore mais je ne me situe pas du tout dans cette école. Je suis beaucoup plus terrien.

 

 

Quand tu joues tu privilégies plutôt ta relation avec le soliste ou plutôt avec le batteur ?

YZ : Plutôt avec le batteur. Il y a quelque batteurs avec lesquels je m’éclate à jouer comme Karl Januska ou Dre Palleamaert, Tony Rabeson. Il y a bien sûr cette notion de cohérence rythmique qui est fondamentale. C’est lui que j’écoute le plus. En ce sens je ne suis justement pas dans l’école de La Faro qui jouait plus avec le soliste. Il faudrait que je travaille plus l’oreille pour cela.

Justement, tu composes ?

YZ : J’ai un peu composé pour Yun (Sun Nah) mais franchement je n’ai pas le temps et puis pas trop confiance en moi. Je ne ressens pas trop l’envie de cela.

 

Aujourd’hui tu es encensé et tout le monde te demande mais il y a encore 3 ans tu étais très critiqué ( la période où tu jouais avec jacques Schnek). Comment vis tu ces revirements ?

YZ : Si tu fais référence à la période où on a joué avec Artero, cela a été une parenthèse très rapide puisque l’on a été virés juste après le disque. Mais bon, c’est toujours comme ça et je crois que l’on se blinde beaucoup. Il y a des mauvaises critiques et des bonnes et il faut vivre avec ça. C’est pas grave et du moment que c’est argumenté je sais l’accepter.

 

 

A l’inverse il y a des moments où tu es encensé. Ainsi dans le disque de Yoann Loustalot, tu as été porté au pinacle

YZ : Mouai …. Tu veux que je te dises : en fait sur ce disque c’est un contrebassiste qui était ingénieur du son et du coup dans le mixage, la contrebasse est un peu plus forte. Du coup je suis plus présent et de ce fait on trouve que je joue bien. Tu vois à quoi ça tient ! Ca fait plaisir que les critiques sois bonnes mais franchement il faut savoir rester lucide. J’essaie surtout de savoir où je me situe dans la musique. Tu vois ce qui me fait plaisir c’est par exemple ce que je fais avec Géraldine Laurent où je joue vraiment la musique que j’adore. Là je sais où je suis et je sais où je veux aller. Ce qui me fait rêver c’est quand j’entend des gars comme Larry Grenadier, Drew Gress. Ils me font encore rêver.

 

 

Quelles sont tes connections avec la scène plus ou moins alternative comme Chief ou Yolk. On a le sentiment que vous êtes de la même génération mais que les connections ne se font pas forcément ?

YZ : Je les connais mais cela fait longtemps que l’on ne joue plus ensemble. Même si on tous joué les uns avec les autres, ensuite chacun a suivi des routes différentes et l’on ne se rencontre plus souvent. Bardaine, Geniez, de Pourquery sont tous des gars avec qui j’ai joué à un moment mais on est pas du tout dans la même  esthétique. D’ailleurs la contrebasse acoustique perd de son influence dans cette musique donc c’est normal que je les fréquente moins. De mon côté je suis très ouvert sur le plan musical mais je veux absolument me retrouver par rapport au son. Un projet comme Limousine me convient parce qu’il est très acoustique mais des trucs comme Collectif  Slang par exemple ne correspondent pas à l’univers dans lequel j’aime évoluer.

 

Avec qui tu joues en ce moment

YZ : Je vais pas tous les citer parce que cela peut être plus ou moins anecdotique. Dans les collaborations régulières il y a bien sûr Youn, Sophie Alour (on a enregistré avec Coq et Januska) et puis avec Géraldine avec qui on a enregistré ( je ne sais pas encore chez qui cela va sortir). C’est vraiment incroyable ce qui lui arrive. Elle a vraiment un truc sur scène. Elle a cette rythmique à la Rollins. Il y en a pas beaucoup qui joue comme ça tout en gardant un son un peu rauque. Pas les sons comme on entend aujourd’hui, très brillants. Ensuite il y a aussi Yoann Loustalot qui est un vraiment un super musicien. Yoann comme Sophie font vraiment partie de ces gens qui cherchent sans cesse. J'ai enregistré le disque de David Sauzay qui vient de sortir, et bientôt sortira le disque de David Prez et Romain Pilon chez Fresh Sound. Ils ne sont pas assez connus encore mais ils jouent vraiment grave. Tu verras c’est très dans l’esthétique du label.

 

 

C’est quoi la musique que tu aimes jouer ?

YZ : J'aime jouer un jazz interactif mais qui garde une certaine structure. Dans ce qu'on entend aujourd'hui, j'aime l'esprit de Mark Turner, Jason Moran,Chris Cheek... J’aime les gens qui jouent vraiment en groupe.

 

 

Tu as un rêve de musicien ?

YZ : Moi ce sont plutôt des cauchemars. Celui de me faire virer des groupes dans lesquels je joue.

 

 

 

 

 

 

Propos recueillis par Jean marc Gelin

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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3 avril 2007 2 03 /04 /avril /2007 23:01

JJJ ALAIN GERBER: “ Balades en Jazz”

 

Folio – Collection : Senso

 

Éditions Gallimard 2007 – 6€

 

 

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