Cristal 2008
Vincent Bourgeyx est un de ces jeunes pianistes français bourré de talent qui constitue avec d’autres comme Batiste Trotignon la jeune garde de ceux qui perpétuent une certaine conception du piano jazz toute empreinte de l’école classique. Fini le dilemme Jarrett/ Meldhau, fini aussi le piano minimal. On est ici plus dans une approche dont les sources sont plutôt à situer du côté de Ravel ou Debussy avec un penchant romantique qui évoque bien sûr Chopin voire Litz (qu’il faudra bien un jour penser à réhabiliter !). Il ne s’agit pas de constructions harmoniques complexes ou de métriques compliquées mais plutôt de la mise en valeur d’un discours plus mélodique. Et il s’agit moins de ce qui est dit que de la façon de l’exprimer. Car Bourgeyx s’impose avec allégresse et légèreté, survole son clavier en le caressant, lui imprime une marque très aérienne. Belle leçon de fluidité dans le jeu. Et puis surtout il y a sur 7 morceaux, une forme assez rarement utilisée, celle du duo Piano / Batterie ici totalement convaincante. Cette forme est assez exigeante pour ne s’accommoder que de batteurs de grande classe assez habile pour imposer leur jeu et assez fine pour ne pas écraser le piano. Karl Jannuska dont nous ne cessons de dire qu’il est actuellement l’un des plus grands batteur du circuit parvient à apporter ce surcroît de frémissement, cette nervosité frissonnante qui sied si bien au jeu du pianiste. A écouter dans Beaux Dommages ou sur For KJ (vraisemblablement écrit pour lui) où comme un train lancé à toute allure il déroule un paysage rectiligne. Tout pour plaire assurément. Cependant lorsque l’on entend la belle version que Bourgeyx livre de I’ll remember april, on se plaît parfois à espérer que le jeune pianiste quitte un peu les effluves romantiques certes jolies mais que l’on voudrait parfois un peu plus matinées de blues, juste un peu pus sauvages. Il ne manque pas grand-chose à ce pianiste qui pourrait alors nous convaincre alors sans réserves. Jean-Marc Gelin