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30 avril 2020 4 30 /04 /avril /2020 07:54

GARY BRUNTON : «  Night bus »
Juste une trace 2020
Bojan Z (p), Gary Brunton (cb), Simon Goubert (dms)
 

Mes amis !
Cela faisait longtemps que nous n’avions pas entendu un power trio de cette trempe-là !
Celui que nous propose le contrebassiste anglais Gary Brunton est en effet de très très haute facture.
Pour ses retrouvailles avec ses deux anciens compères avec lesquels il a beaucoup travaillé en France, Gary Brunton a choisi de mettre a barre très haute.

A 52 ans, Gary Brunton est devenu un des grands de la contrebasse en jazz. Celui qui a fait ses classes avec Pierre Michelot, Henri Texier ou encore Dave Holland en a visiblement retenu toutes les leçons et s’inscrit clairement sur leurs traces.
Avec Bojan Z c’est une longue histoire qui les menés au CIM ( l’école de jazz parisienne fondée par le regretté Alain Guerini) et qui a conduit les deux camarades à découvrir il y a longtemps le batteur Simon Goubert. Mais c’est en 2017 que le chemin de Gary Brunton et de Bojan se croise à nouveau et qu’ils décident alors de se lancer dans un projet en trio avec …Simon, évidemment.
C’est qu’entre ces trois-là il y a la même passion du jazz et la même complicité. La même exigence aussi pourrait t-on ajouter.
Que dire de ce trio sinon qu’il est absolument magistral ? Son leader s’y montre phénoménal. Il faut écouter la puissance et la précision de ses attaques, la profondeur du son de sa contrebasse. Comme sur ce solo tout en nuance sur Crw. Il y a du Dave Holland là-dedans. Ça surgit de profondeurs "aériennes". Comme dans cet hommage lent et émouvant à Michel Grailler où sa pulse en est le coeur battant( Ballad for Mickey Grailler) ou sa présence ahurissante sur One Afternoon ou encore sur Dastardly où il semble porter le trio sur ses épaules.
Bojan lui, c’est l’inspiration à tous les étages, sur tous les registres, dans le grave ou les aigus du piano avec un sens du placement et de la phrase juste hors du commun. Où va t-il chercher ses renversements (p.ex : le très bop Nobody’s perfect bourré d’inventivité où d’ailleurs Simon Goubert fait des étincelles) ? Et ce sens de la mélodie et de l’intention mélodique comme sur ce très beau Hasta la victoria sempre.
Quant à Simon Goubert, il vibrionne et tourne volte visiblement heureux d’être là et d’apporter sa très haute science du drumming et du groove avec un jeu incroyablement vivant ( Ready for Riga)
Il faudrait passer tous les morceaux en revue, mais ce serait fastidieux. Car chaque pièce de cet album fait entendre un trio exceptionnel qui va bien au-delà de la simple addition de ses talents. Un trio intense qui parle la même langue. Qui respire pareil.
La réunion de ces trois musiciens en fait un trio rare comme on n’en avait pas entendu depuis longtemps. Et qui mériterait de rentrer dans la légende des trios mythiques.
Il reste plus qu' à espérer que ce « Night Bus » ne soit que le volume 1 et qu’il nous soit permis de poursuivre ce choc bien au delà. 
Jean-Marc Gelin

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29 avril 2020 3 29 /04 /avril /2020 16:50

Gaëtan Nicot (piano, composition), Pierrick Menuau (saxophone ténor), Sébastien Boisseau (contrebasse), Arnaud Lechantre (batterie)

invité sur une plage : Geoffroy Tamisier (trompette)

Sarzeau (Morbihan), 9-11 janvier 2019

Tinker Label 0119001 / Socadisc

 

Le pianiste nantais, aux multiples facettes, signe avec ce quartette une musique qui annonce la couleur et porte sa marque. Entouré de quelques-unes des plus fines gâchettes du Grand Ouest, il nous offre un disque finement pensé, dans ses compositions originales, majoritaires, comme dans les deux reprises : Ma plus belle histoire d'amour, de Barbara, et le très rare Moon Dreams, composé par celui qui était le pianiste de Glenn Miller à la fin des années 30, mais surtout immortalisé par Gil Evans pour Miles Davis dans les séances que l'on désignera plus tard sous le titre de «Birth of the Cool». Le traitement de ce thème par le quartette dans la plage conclusive du CD mérite une attention toute particulière, car il éclaire l'approche globale de la musique par le groupe. Traiter le motif avec la liberté d'expression propre au jazz, sans se laisser déborder par l'emphase mélodique du thème, et en jouant à fond l'interaction, la réactivté, et aussi quand il le faut la mise en suspens. Approche tout aussi personnelle pour la chanson de Barbara, déconstruite avec amour, en duo dans l'intro, pour magnifier, si c'est possible, sa force d'expression. Et puis laisser le jazz s'emparer doucement de ce standard qui paraît soudain une terre inexplorée.

Aucune malice de ma part dans le fait d'aborder ainsi le disque dont l'essentiel réside dans les compositions du pianiste leader. Cela permet, tout au contraire, de situer tout à la fois l'enjeu en territoire jazzistique, et d'ouvrir l'espace à l'expression individuelle dans le collectif, ressort essentiel d'un tel groupe.

L'intro rhapsodique du thème titre annonce la couleur, mais en trompe-l'œil : on entre en fait, après quelques mesures, dans le vif de l'interaction en quartette. Il y a là autant de retenue que d'expressivité, comme une revendication esthétique. Dans la deuxième plage, Koo-Cool, en quintette avec Geoffroy Tamisier, la composition et l'arrangement me replongent dans le souvenir des années 50, lorsque Gigi Gryce mêlait avec grand talent la pulsation de la Côte Est et les nuances qui faisaient mouche à l'Ouest. J'ai éprouvé en écoutant cette plage un genre de frisson qui m'avait déserté de longtemps. Et tout le disque est à l'aune de ce savant dosage, délicatesse et flamme, parole singulière et sens collectif constamment rejoué. Ici va souffler une légère brise latine, ailleurs on laisse donner le goût des ruptures et des surprises, mais en somme, de bout en bout, c'est une vraie réussite, et un vraiment bon groupe.

Xavier Prévost

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Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?2&v=_JeVf_Bn0qo

https://www.youtube.com/watch?v=h5g8eo7r1rc

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28 avril 2020 2 28 /04 /avril /2020 11:54

Philip Catherine (guitare), Paulo Morello (guitare), Sven Faller (basse). Studio Seven. Juillet 2018. Enja.

 

Quand il se présente, Philip Catherine manque rarement de préciser, Philip, à l’anglaise, et Catherine avec un C. Histoire d’éviter la confusion avec le chanteur fantasque (et fantastique) Philippe Katerine. Le tout dans un sourire.

 

Il est comme cela, le guitariste belge né à Londres pendant la seconde guerre mondiale. Toujours l’air de prendre la vie du bon côté, de plaisanter. Mais quand il joue, finie la plaisanterie. C’est du sérieux, et du léger tout à la fois. Il a beau avoir partagé la scène avec Chet Baker, compter des dizaines de disques à son actif, Philip Catherine conserve cet allant juvénile qui n’en finit pas de séduire.  Il n’a pas besoin de faire ses preuves et d’épater la galerie. Il joue facilement quelque soit le répertoire.

Retrouvé à l’occasion d’un rangement dans ma pile de disques en cette période de retraite forcée, ‘Manoir de mes rêves’, en constitue une (plus que) parfaite illustration.  En trio à cordes, avec les jazzmen allemands Paulo Morello (guitare) et Sven Faller (basse), Philip Catherine se plaît à dérouler le fil de ses passions musicales dans un élégant désordre.

 


Après Django, l’une de ses idoles, honoré par l’une de ses compositions fétiches reprise comme titre de l’album, voici ‘Jardin d’hiver’ d’Eddy Louiss, ‘Recado’, air brésilien découvert lors de son travail avec Barney Wilen, et plusieurs chansons du patrimoine français signées Brassens (Bancs Publics), Michel Berger (Les Uns contre les autres), Henri Salvador (L’ombrelle et le parapluie, Pas encore). Un voyage musical qui donne à rêver et vient rappeler, si besoin en était, la force tranquille de Philip Catherine.

 

Jean-Louis Lemarchand.

 

©photo Jacky Lepage (www.jackylepage.com)
 

 

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28 avril 2020 2 28 /04 /avril /2020 10:56
Very cool Lee?

VERY COOL LEE? 

 

Disparu à 92 ans du covid 19 le 15 avril dernier, le saxophoniste alto Lee KONITZ était un vagabond de l’improvisation qui ne s’est jamais fixé sur un style, et a fini par créer le sien; et on sait bien que le style c’est l’homme. Il a traversé pourtant les périodes les plus fécondes du jazz, les plus enthousiasmantes, a joué avec les plus grands musiciens, tous singuliers. Il semblait ailleurs, décalé, toujours en avance d’un pas.

Une notice nécrologique serait par trop fastidieuse avec un étalage de noms illustres, car une si longue carrière ne mérite aucun oubli, des sessions mythiques avec Miles, des disques Verve avec Jimmy Giuffre, des sessions avec le ténor Warne Marsh, ou de ses derniers duos avec le jeune pianiste Dan Tepfer...

Remonter dans ma mémoire, nous vivons actuellement de souvenirs, et l'actualité m'ennuie! Comment dans sa transparence voulue, a-t-il pu m’ échapper?

Il adopte, adapte et améliore, fait évoluer la musique. Tout en réussissant à inventer un discours nouveau et identifiable! S’il n’est pas un génie décisif comme Charlie Parker dont il descend en droite ligne (période et instrument oblige), ni un chef de file comme le pianiste Lennie Tristano, décisif dans son apprentissage, n’a-t-il rien bâti, construisant sur du sable, “lame d’eau fraîche et de fumée” comme le soulignait Réda, fantasque, insaisissable?

Sa langue n’était faite que de standards, son matériau de base, dont il voulait se démarquer par une syntaxe originale. Loin de la mélodie originelle, il ne posait jamais le thème et partait bille en tête. De mes premières écoutes de Lee Konitz à la radio, rien ne demeura vraiment, puisque je ne pouvais en répéter le chant. Son chant, car je n' avais pas compris alors qu’il était chanteur avec son sax! Les variations m’importaient moins alors que la pureté d’une ligne mélodique, immédiatement saisissable. Il attaquait autrement, de côté, déconcertant de par sa fantaisie inimaginable, alors que j’étais avide d’un plaisir immédiat donné par l’écoute attentive d’un jazz classique, depuis ma découverte fortuite sur France musique, de la série Tout Duke de Claude Carrière.

Alors qu’il avait été élevé au son même de ceux que j’écoutais passionnément, Harry James, Benny Goodman, Artie Shaw. Ses études avaient consisté à se faire siennes les leçons des grands, en se repassant les solos d’Armstrong, de Roy Eldridge, de Lester Young!

Lee Konitz me devint accessible, avec la période dite “ cool”où ce Lesterien dans l’âme, saxo post bop, sortit de l’influence écrasante du Bird! Il est vrai que cette période m’a semblé “parfaite”...

C’est la raison pour laquelle, encouragée par cette affection nouvelle, intrépide, je me rendis un soir au Dreher, un club de jazz, aujourd’hui disparu, en sous sol, près du Châtelet, pour entendre un duo improbable, celui de Martial Solal et Lee Konitz : nous étions en 1980 et je vivais alors d’heureux temps d’étudiante à Paris, pas vraiment la vie de bohême mais libre avec comme disent les Anglais “Time on my hands”. Konitz a toujours aimé jouer en duo et il trouva très vite en Solal, le compagnon parfait qui, tout en étant complémentaire, partageait sa règle du jeu: ne jamais se répéter, prendre à contre pied le public et son partenaire qui le lui rendait bien, avec cet humour vif, lucide dans le processus de déconstruction! Un concert assez exceptionnel dont je ne compris pas tout de suite la valeur, par cette libre improvisation, où chacun, apparemment, jouait sa partition, tout à son aise, dans un renouvellement joyeux des thèmes abordés. Ils ne reproduisaient pas, ils inventaient!J’ai mis du temps avant de comprendre sa traversée expérimentale du be bop ou du cool vers une certaine abstraction qui lui appartenait.

Mon dernier souvenir de lui remonte à l’édition 2003 du festival jazz d’Avignon. Il avait répété à la balance, imperturbable, attentif à la beauté du cloître des Carmes, inaccessible.

 

PHOTO DE CLAUDE DINHUT ( 6 août 2003)

 

Le concert avec le sextet de François Théberge, sur le programme de Soliloque, titre paradoxal de ce CD, sorti chez Cristal, fut un exemple réussi de ce “jazz vif” que l’on aime! A l’époque, nous dînions après le concert, non loin des Carmes. Et j’ai toujours aimé ces temps partagés, où la rencontre pouvait aussi s’improviser! Par un hasard étrange, je suis assise à table, tout à côté de lui, peut-être me suis-je installée rapidement pour garder contenance. Il est là, assis, maussade; nous attendons longtemps, un peu trop longtemps et visiblement, il s’ennuie, fatigué, affamé aussi! Très sage, comme tétanisée, je ne dis mot ! Qu’aurais je pu lui dire? Une photo qui me fait encore sourire nous montre tous deux, étrangers à l’autre et au monde!

Je ne sais si ce portrait brossé à grands traits de mon Lee en saxophoniste lui rend justice mais une vidéo de 1972 montre un autre aspect tout à fait épatant: un Lee binoclard, sans ses verres pour la scène, très à l’aise, goguenard même, tenant son public en haleine pour se livrer à un exercice de style un rien périlleux, avec sûrement la petite satisfaction de celui qui a confiance. Loin de vouloir se laisser écraser par le fantôme de Charlie Parker, il provoque un duo hilarant, décalé, de deux altistes sur le même thème de Tadd Dameron “Hot House”! Comment ne pas être séduite par cette brillante façon, décomplexée d’affirmer sa liberté, sa maîtrise de l’instrument et son indépendance!

Tel était Lee, really...

Deep Lee, Frank Lee, Lone Lee, peut être pas humb Lee mais Tender Lee… aussi.

Sophie Chambon

 

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26 avril 2020 7 26 /04 /avril /2020 22:10

Alain Blesing (guitare), Bruno Tocanne (batterie)

Montpellier, 5-6 novembre 2019

Le Petit Label PL 059/ http://www.instantmusics.com/impermanence.html

 

Ce qui frappe, dès la première plage, c'est que l'on a affaire à des Artisans des musiques libres. Des Artisans d'Art, évidemment. Nul souci d'entrer par le fracas avec une bannière bien identifiable qui racolerait les esprits distraits dotés d'oreilles qui ne le seraient pas moins (distraites!). Alors on s'immerge, en confiance, et je dois dire que le voyage vaut le détour. Montée progressive des timbres et des sensations qu'ils provoquent ; curiosité croissante de l'auditeur qui cherche ses marques mais sent que déjà il va aimer ce qu'il n'a pas encore réussi à décoder (et c'est tant mieux!). Puis c'est un dialogue virulent entre guitare et batterie, comme la liberté des musiques du siècle (le siècle passé....) en engendra quelques-uns. Virulence du dialogue, mais force de l'expression, car c'est de cela aussi qu'il s'agit. Vient ensuite une sorte de cérémonie secrète, où les sons graves des tambours défient les éclats de guitare dans l'aigu. Puis l'on plonge à nouveau dans le mystère des sons d'outre-monde. Soudain l'on s'échappe en mélodie folky vers un ailleurs qui n'aurait pas dit son dernier mot, juste avant une brève énigme sonore qui nous dit que les étiquettes ne sont pas de mise. Et le voyage continue, bien au-delà de ce que ma pauvre tentative descriptive peut suggérer. Il a là du feu, de la passion, de la densité, de la pensée et du ressenti partagé, échangé, bref une forme d'humanité foncièrement musicale. Alors il ne vous reste plus qu'à plonger dans cet univers de sons riches de sens.

Xavier Prévost

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Un extrait sur Bandcamp

https://brunotocanne.bandcamp.com/track/limpermanence-du-doute

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25 avril 2020 6 25 /04 /avril /2020 18:18

AQUARELA – OBOMAN : «  A bela vida »
Buda Music 2020

Jean-Luc Oboman ( hautbois, Cor anglais), Edu Moranda ( mandoline), Tuniko Goulart (g), Zé Luis Nascimento (percus, vc)

Dans le Brésil cauchemardesque qui fait l’actualité, voilà un voyage en pays d’Amazonie qui fait du bien ! Un album qui rend tout simplement…. heureux et joyeux.
Il est de ces albums qui vous donnent la pêche le matin et que moi, pour ma part j’écoute en boucle tous les matins histoire d’aborder ma journée avec une légère insouciance qui me donne des ailes. En ces temps incertains et anxiogènes, cela ne fait pas de mal.
Et pourquoi donc ?  Parce que l’on y chante et parce que l’on y danse. Parce que si la musique est admirablement jouée, maniant avec grâce l’art du contrepoint, elle évoque pourtant des plaisirs primaires. Un peu de ceux que l’on éprouve en regardant un film deVarda ou de Rohmer. Le plaisir de l’offrande, reçue ou donnée.
Jean-Luc Fillon, alias Oboman s’est fait, depuis de nombreuses années une sorte de devoir de sortir le hautbois des placards un peu poussiéreux de la musique de chambre où il se trouvait  pour l’emmener sur d’autres territoires. On se souvient de ses incursions en paysages ellingtoniens pour une lecture inédite et totalement emballante. Depuis plusieurs années, c’est sur d’autres rivages (musicaux) qu’Oboman poursuit sa route en compagnie de deux musiciens de haute (très haute) volée avec qui il a formé le groupe Aquarela autour d’un répertoire Brésilien bien loin des clichés de la samba et de la bossa et au plus près de la Choro, cette musique jouée sur places publiques et les bars aux heures joyeuses. Un répertoire qui évoque plutôt les fêtes de village, les danses printanières et les jupes des filles qui volent au vent. Qui évoque les rires, têtes en arrière et l’alcool doux à boire. Ce répertoire est aussi celui du grand Hermeto Pascoal (Frevo em maceio), de Guinga (Baiao de Lacan), de Gismonti ( 7 aneis) ou de Tom Jobim (choro) pour les plus connus d’entre eux.
Alors que Jean-Luc Fillon virevolte en virtuose de l’instrument auquel il donne des ailes, Edu Miranda, grand maître brésilien de la mandoline fait chanter l’instrument épaulé par son compère de longue date, le moins immense Tuniko Goulart qui donne à sa guitare des airs de manouche brésilien. Quand à Zé Luis Nascimento, c’est un peu le cœur battant.

Porté par ces mélodies fraîches et parfois très émouvantes ( comme ce 7 aneis de Egberto Gismonti) et ce duo mandoline/guitare qui inspire to sauf la mélancolie, « Bela vida » va vous rendre la vie belle. Et heureuse. Et joyeuse. Et indispensable en ce moment.
Jean-marc Gelin

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23 avril 2020 4 23 /04 /avril /2020 21:10

9KURT ROSENWINKEL trio : «  Angels around »
Heartcore records 2020

Sortie le 8 mai 2020

Kurt Rosenwinkel ( g), Dariuo Deidda (cb,b), Gregory Hitchinson (dms)

Kurt Rosenwinkel ou la mécanique des fluides

Après le succès du «Kurt Rosenwinkel Standards Trio - Reflections» de 2009, Kurt Rosenwinkel publie aujourd’hui un nouvel album sur son propre label, Heartcore Records.
Kurt Rosenwinkel, on le sait est devenu l'égérie de toute une génération de guitaristes et une source d'inspiration pour un grand nombre de musiciens. À 50 ans il s'impose aujourd'hui comme le maître absolu de la guitare cool, sur les traces de son illustre prédécesseur, Jim Hall.
Kurt Rosenwinkel c'est la mécanique des fluides. Là où tout coule de source dans un mélange de groove, d'harmonies douces et complexes (angels around). Rosenwinkel c'est la guitare-velours.
Il rend, où qu'il passe sa guitare aérienne, nimbée de mystères évanescents (Ugly beauty).
Pour réaliser cet album, le guitariste est accompagné du bassiste italien Dario Deidda et de l’immense batteur Gregory «Hutch» Hutchinson au drumming si fin et que le guitariste a longtemps côtoyé sur la scène new-yorkaise dans les années 90.
Sur des compositions et des harmonies superbes cette rythmique qui l'accompagne lui déroule un tapis doux sur lequel ses accords s'allongent en toute volupté ( Self portrait in three colors)
Un album plus ouvert que les précédents et plus lumineux aussi. Où le guitariste va chercher des accords impossibles et un son moelleux à souhait.
ici tout n’est que luxe, calme et volupté.
La musicalité cotonneuse de Rosenwinkel est belle. Juste belle. Sans qu'il soit utile d’ajouter plus de mots. Comme s’il était utile d’ajouter plus de mots que « belle » lorsque l’on évoque la musique de Jim Hall ou de Paul Motian dont on sent ici la musique si proche. Et si ….belle.
Jean-Marc Gelin

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19 avril 2020 7 19 /04 /avril /2020 20:50

SHANG ZIMING QUARTET : « Bridge of soul »
2020
Christophe Monniot (saxs), Dezsö Olàh (p), Peter Olàh (cb), Shang Ziming (dms)

https://backl.ink/140221633

C’est une sorte de hasard qui fait bien les choses. Magnifiquement bien.
Juste un petit message sur Messenger de Christophe Monniot (mon idole de saxophoniste !) m’informant de l’album qu’il vient de publier sous le nom du batteur chinois Shang Ziming qui, je l’avoue humblement m’était jusqu’alors totalement inconnu.
Ne résistant pas à ma passion pour ce saxophoniste je me suis donc empressé d’ouvrir le lien qu’il m’avait envoyé et là ….. le choc mes amis ! Non, je vous jure, le choc !
Depuis quand n’avais-je pas entendu une formation de cette intensité, de cette force ? De ce genre de formation où tout semble aussi naturel qu’exceptionnel. Où ça joue comme jamais.
Quand tout, absolument tout se retrouve pour porter le jazz vers ses sommets !

Shang Ziming et les deux Olàh formaient déjà un trio ensemble, qui a tourné plusieurs fois en Chine. Ils se sont intéressés à Monniot après que ce dernier a enregistré « Density of Standards » sur le label hongrois BMC, sous le lead du père des musiciens tziganes hongrois actuels, Bela Szakcsi Lakatos. Une première rencontre s’est faite sur un répertoire écrit par Dezso Olah début février 2020 au festival de jazz de Budapest. Ces morceaux existant déjà sur le 1er album de Dezso. Dans la foulée le quartet enregistre à Budapest les 26 et 27 février 2020.

C’est un quartet de rêve dont il s’agit ici, mené par l’absolument incroyable batteur chinois, Shang Ziming (qui enseigne par ailleurs dans une grande université du nord de la Chine) et qui regroupe outre notre Monniot national, un pianiste hongrois absolument fabuleux (Dezsö Olah) et un non moins superlatif contre-bassiste Peter Oláh ( de la même nationalité mais sans lien de parenté).
À eux quatre, ils forment un véritable power quartet de très très haute volée digne des plus grandes formations de jazz. Où chacun pris individuellement y excelle tout en donnant force à un collectif hors du commun.
Il faut écouter sur ce bien mal nommé -30° la ligne de basse de Peter Olàh et le drive brûlant de Shang Ziming ( à écouter aussi, surnaturel sur Invisible door – mais d’où sort cet énergumène ? de l’espace assurément !).  Il faut entendre  l'intelligence du jeu du pianiste  Dezso Olàh sur Night in Budapest et encore les enluminures du batteur.
Ecouter aussi cette intelligence collective sur Dream theater emporté par la fougue de Monniot suivi l'apaisement lorsque le rideau tombe ( et toujours et encore ce drumming de folie  de très haute volée )
Et Monniot ! Vous dire encore et encore qu’il s’agit certainement, et selon moi du plus grand saxophoniste de la scène hexagonale. Capable de mettre le feu sur toutes les hanches.
Ecouter où il emmène son soprano sur - 30°. Avec une telle intensité cela devrait fondre vite !
Monniot exprime tout, toute la palette de ce qu'il peut exprimer. On l'entend chanter, s'échapper libre, rugir, caresser, pointer et piquer. Il y a de la fougue et du lyrisme maîtrisé. Grand saxophoniste !
Entre écriture et libres improvisations cet album témoigne avant tout d'une vraie rencontre entre des musiciens qui ont la musique en partage avec un sens du jazz en commun. Hors du commun. Grâce à Monniot nous découvrons ici des jazzmen que nous n'aurions certainement pas écouté sinon.  Non, le monde du jazz ne tourne pas autour des américains et de la France. Il franchit toutes les frontières. Merci de ce rappel.

A tous les programmateurs : quand le déconfinnement sera une réalité,  ne passez pas à côté de cette véritable révélation d’un immense groupe qui devrait mettre le feu sur toutes les scènes où il passera.
Choc absolu !
Jean-marc Gelin

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19 avril 2020 7 19 /04 /avril /2020 17:26

Guillaume Orti, Stéphane Payen (saxophones altos)

Quincerot (Yonne), juin 2006 & octobre 2019

Diatribe Records DIACD 029 / https://shop.diatribe.ie/album/volume-i

 

L'aboutissement de 25 années de collaboration musicale dans de multiples contextes (le collectif Hask, le groupe Thôt....), et l'expression éloquente d'un goût vivace pour l'engagement musical, la quête de l'inouï et le goût du risque. Le résultat est éloquent. Il balaie l'ensemble des champs musicaux d'ici et d'ailleurs, d'un fragment de L'Offrande Musicale de Bach revisité comme terrain de jeu jusqu'aux rêves harmolodiques d'Ornette en passant par tous les jeux de rythmes, de timbres, de formes établies et de formes conquises sur le vertige de l'instant. Un duo suscité par une pièce composée pour eux par le guitariste David Lacroix (la dernière plage du disque), et qui s'est nourri au fil des compositions et des improvisations de ce goût de «faire musique ensemble», pour aboutir, 15 ans plus tard, à ce disque publié par le label Diatribe Records de Dublin. Il y a là tout ce qui fait le prix d'une musique, entre le goût du jeu, la passion de communiquer et de vibrer, et le désir ardent de faire chaque fois, si c'est possible, un bond vers l'inconnu et l'avenir. Passionnant, de bout en bout.

Xavier Prévost

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Un avant-ouïr ici

https://shop.diatribe.ie/album/volume-i

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16 avril 2020 4 16 /04 /avril /2020 12:45

Lee Konitz est mort des suites du covid-19, hier 15 avril 2020, à New York

 

Réveillé à 7h55 par un SMS du camarade Lemarchand «Tristesse avec le décès de Lee Konitz(...) Tu fais un portrait ?» Pas envie de faire un portrait, et je n'en prépare pas pour ce genre de pénible circonstance. Refus systématique du réflexe supposément professionnel : d'ailleurs je suis redevenu un amateur (que je n'avais jamais cessé d'être....). Réveil difficile : depuis une heure j'essayais de me rendormir, et mon subconscient vagabondait dans la campagne de la Flandre française, quelque part au pied du Mont Cassel. À pied, en voiture, en vélo ou à cheval ? Je ne m'en souviens plus, et d'ailleurs j'ai parcouru cette contrée par ces divers moyens.

 

Lost Lee

Ce qui me revient, ce sont des souvenirs, par vagues successives. Un déjeuner, voici quelques mois, avec Dan Tepfer, qui fut son ultime partenaire en duo à la Jazz Gallery de New York. Et une conversation avec Henri Renaud, alors que nous nous succédions à l'antenne de France Musique, dans les années 80. Lors de la séance du 17 septembre 1953, pour les disques Vogue (en quintette ou quartette, avec alternativement Henri au piano et Jimmy Gourley à la guitare), une des nombreuses versions de I'll Remember April fut intitulée, dans la première édition, Lost Henri. Sans piano mais avec guitare. Pourquoi ? Henri n'a pas pu, ou pas voulu, me dire exactement pour quelle raison il était absent du studio pour cette prise : une cigarette ? Un besoin naturel ? Un mouvement d'humeur ? Qui sait....

 

Far away from, and around.... standards

Ce souvenir d'auditeur ravive ma perception majeure de l'Art de Lee : autour des standards, toujours, et aussi loin que possible de la ligne mélodique originelle. D'ailleurs, sur la version originale du disque ci-avant évoqué, très peu des titres originaux étaient crédités, car souvent Lee entrait directement dans la paraphrase, la digression, le commentaire, la déambulation rêveuse. Un Art qu'il partageait avec Lennie Tristano, qui l'avait initié à cette pratique intransigeante de la liberté. Mais les éditions ultérieures de ce disque alignaient servilement les titres des standards, quand bien même le thème n'était pas joué.... Mystère de la frilosité de l'édition phonographique face à la liberté du créateur.

 

Liberté, le Maître mot

En parcourant ma discothèque, vinyles et CD confondus, je m'aperçois que j'ai autant de disques de Konitz sous son nom que de disques de Miles Davis, Thelonious Monk ou Charlie Parker. Et un peu plus que d'Armstrong ou du Duke : aveu de sectarisme ? Non, simple tropisme d'amateur. J'ai souvent écouté Konitz en concert, parfois dans des contextes inattendus, comme au sein du Big Band de George Gruntz au studio 105 de Radio France en 1987, où il côtoyait, dans la section de sax, Joe Henderson. Mais les grands souvenirs restent les duos avec Martial Solal. Vers la fin de l'année 1980, au défunt Dreher, à Paris, près de la Place du Châtelet, j'ai assisté à un concert de ce duo. Comme toujours, pas de programme préétabli. L'un commence, en toute liberté, l'autre identifie la grille, et le dialogue commence. Mais à un moment du concert, ils crurent l'un et l'autre identifier un thème : il était différent, et chacun suivit son idée, sur des grilles proches et presque compatibles, en se jouant des tensions et frottements harmoniques. Un grand moment de musique et de liberté. Après le concert, je dînais avec Martial et Lee, car je devais enregistrer un entretien avec Martial pour une émission prévue, début 1981, sur Radio K, radio francophone installée à San Remo (le monopole de radiodiffusion existait encore à l'ère Giscard), où j'ai débuté professionnellement après des expériences d'amateur dans les radios pirates du Nord de la France. L'entretien nourrirait quelques semaines plus tard l'une de mes première émissions, destinée à annoncer un concert du duo dans la MJC Picaud de Cannes. Et après ce concert cannois je réalisais une interview de Lee Konitz pour une émission consacrée à son considérable parcours. Ce que je retiens des deux compères, Martial et Lee, c'est l'humour. Chez Martial il ponctue souvent des réponses d'une grande clarté. Chez Lee au contraire, l'humour parasite constamment le message, comme si le saxophoniste l'utilisait pour tenir à distance le vif du sujet.

   Lee Konitz et Martial Solal, collection personnelle de Martial Solal

 

À Martial, le mot de la fin

Je laisserai à celui qui fut son ami, et aussi son partenaire musical de 1968 jusqu'aux années 2000, le dernier mot. Dans l'entretien qu'il m'avait accordé fin 2003 pour un document patrimonial en vidéo, commandé et produit par l'INA, Martial décrivait ainsi sa complicité avec Lee Konitz : «Lee Konitz a été ma collaboration la plus longue et la plus intéressante. Avant lui comme collaboration de longue durée, il y avait eu Lucky Thompson, avec qui j'ai enregistré quantité de disques. Mais avec Lee la collaboration a été plus longue et plus proche, dans la façon d'aborder la musique de jazz, encore que Lee Konitz et moi-même ayons des univers différents ; mais je les estime complémentaires. Tandis qu'avec des gens comme Lucky Thompson ou d'autres, nous étions un peu en parallèle, si vous voulez. Avec Lee Konitz il existe une complémentarité des styles. Il a un don mélodique extraordinaire. Moi, de mon côté, je le soutiens par un espèce de background fait d'excitation, de stimulation, qui peut le faire sortir justement de ses gonds. Et lui a tendance à retenir mes excès. Donc c'est très complémentaire. On joue très souvent ensemble, aussi souvent que possible. La dernière fois, c'était cette année-même, à l'Iridium de New-York, on a joué pendant une semaine. Nous avons, durant toutes ces années, donné des centaines de concerts : des tournées sur la West Coast des Etats-Unis, en Europe, en France, dans les endroits les plus modestes comme dans les plus prestigieux.»

Xavier Prévost

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Cet entretien a été publié, dans un livre-DVD (Martial Solal, Compositeur de l'instant, INA/Michel de Maule, 2005). On peut aussi accéder à l'entretien en vidéo sur le site de l'INA par ce lien

http://www.ina.fr/grands-entretiens/video/Musique/Solal 

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Lee Konitz, Warne Marsh, Bill Evans, Jimmy Garrison & Paul Motian, «Live at the Half Note», 1959

https://www.youtube.com/watch?v=K4sT4okQImM&list=PLSS3g4JHfKxlTqvPY3IZfruQc-_Ty3Uei&index=24

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