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14 avril 2020 2 14 /04 /avril /2020 21:25

SHABAKA HUTCHING AND THE ANCESTORS : «  We are sent here by history »
Impulse 2020-04-13
Shabaka Hutchings (ts, cl), Mthunzi Mvubu (as), Ariel Zamonsky (b), Tumi Mogorosi (dms), Siyabonga Mthembu (vc), Gontse Makhene (percus), Nduduzo Makhatani, Thandi Ntuli (kybds), Mandla Mlangeni (tp),

On avait laissé Shabaka Hutchings sur un superbe album réalisé avec  son groupe Sons of Kemet ( « Your queen is a reptile) qui portait déjà en lui un engagement fort autour de portraits de femmes célèbres.
Ici le saxophoniste de 35 ans, figure de proue du jazz britannique, entouré pour l’occasion d’un groupe de musiciens de Johannesburg (The Ancestors) délivre un autre message sous forme d’incantation combattante. Sous forme d’exhortation à refuser l’inéluctable : engagé pour la préservation de notre humanité et contre le patriarcat. Entre préservation de la terre et lutte contre la domination masculine du monde. A propos de son album, le saxophoniste déclarait au Gardian: “For there to be a change, there needs to be the end of what we want changed ” ( prémonitoire) et ,”We’re at a crisis point, and the only way we can continue is to have more discussions and to learn the perspectives of others,” he says. “People think that history is finite, but it is something that needs to be explored constantly; it needs to be challenged and sometimes set alight, so we don’t continue to make the same mistakes.”

Pour faire passer ce message Shabaka Hutchings déploie des armes de sorcier d’Afrique et l’assène jusqu’à la transe, à force de danses et de rythmes scandés jusqu'au bout de l'épuisement ( The coming of the strange ones). Une Afrique faite de chair, de sueurs, de peaux et de feu. Musique d’une rare richesse à forte densité avec notamment Thandi Ntuli qui, aux claviers nappe ce son acoustique énorme de brumes électriques dans une sorte de jungle jazz mystique.

On entre alors dans sa musique comme on entre dans une jungle chaude et moite, dangereuse, faite d'une myriade de sons acoustiques et électriques. Envoûtant (They who must die) ! Sabaka Hutchings se transforme en panthère, en prédateur enragé, engagé. S’appuyant sur des poèmes de Siyabonga Mthembu, sa musique et ces textes prennent la forme d’imprécations entre xhosa et anglais. Prennent aux tripes et appellent à la conscientisation de l’humanité.
L'énorme son de Shabaka caresse la note puis la râpe puis lui extirpe ses râles. Intense. Toujours intense
A la limite du (trop) spectaculaire.

Shabaka incarne, plus encore que sur ses précédents albums cette notion d’ARTISTE TOTAL, fils spirituel de Fela, de Pharoah sanders et bien sûr de Coltrane et d’Eric Dolphy.
Toujours dans le Guardian, Shabaka déclarait “I feel really positive about the future, because there is always a fraught tension before things change – things really do have to get worse before they get better.”. On ne saurait que trop l’entendre aujourd’hui.

Il faudra dès que les cieux seront plus cléments se ruer a la première occasion pour les voir sur scène. Expérience forte assurée. Physique. Tripale. Forte. Intensément épuisante.
Jean-marc Gelin

A ne pas louper demain mercredi 15 mars un Open Jazz d’ALEX DUTILH qui nous emmènera en Afrique.

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13 avril 2020 1 13 /04 /avril /2020 16:22

Mirtha Pozzi (percussions mutiples : tambours, métaux, objets sonores, mots, bruits vocaux...)

Alfortville, sans date

NowLands TAC 017

 

En prélude, une partie des mots du percussionniste Pablo Cueco, compagnon de route de Mirtha Pozzi, dont quelques sons électro-acoustiques ont alimenté 4 des 16 plages du disque, et qui signe le texte du livret : «Il faut savoir choisir ! 'On n'est pas obligé de tout dire, partout, à chaque fois' comme dit Mirtha Pozzi... Le musicien n'est ni omniscient, ni omnipotent et ne peut être partout à la fois. On ne peut pas jouer tout, partout tout le temps. Il doit parfois aussi laisser ses oripeaux et bagages sur la rive et se plonger dans les eaux turbulentes d'une musique inconnue. Inouïe jusqu'alors. 'Toute licence en art !' dit-on...»

On ne saurait rêver meilleure propédeutique pour l'écoute de cette musique, afin d'en respecter l'absolue singularité. Quatre séquences de quatre plages où s'entremêlent des objets sonores, conçus selon des modalités différentes, et issus de quatre pièces distinctes en quatre parties : Musique mixte, Claviers de sons indéterminés, Poèmes sonores et enfin CUIK-PLAK-TRI-GÜAMIK. Au-delà de ce projet structurant, le cheminement d'une liberté où le préconçu croise l'improvisé, avec une sensation de constante liberté, et ce qu'il faut d'audace. En prime, l'insertion de quelques fragments de poésie sonore signés Bernard Réquichot et Hugo Ball. Voyage sonore, aventure perceptive, émois inédits, tout y est, sous le signe d'une pulsation tantôt tendue, tantôt ténue, toujours intense jusque dans la retenue. Et la prise de son, signée Christophe Hauser, est remarquable. Que dire de plus : un voyage, pour exister, doit être accompli, même un voyage onirique ; alors : ATTENTION AU DÉPART !

Xavier Prévost

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Quelques avant-ouïr

https://www.youtube.com/watch?v=nRWAIzXSflE Tzimx »

https://www.youtube.com/watch?v=z_3ycDPhk3s

https://www.nowlands.fr/tzimx-mirtha-pozzi/

 

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13 avril 2020 1 13 /04 /avril /2020 11:31
MUSIC FROM THE EARLY 21st CENTURY  PREVITE/ SAFT/ CLINE

MUSIC FROM THE EARLY 21ST CENTURY

 

BOBBY PREVITE/ JAMIE SAFT/ NELS CLINE

RARE NOISE RECORDS

www.rarenoiserecords.com

 

https://www.rarenoiserecords.com/releases/music-from-the-early-21st-century/

 

 

 

 

J’aime les albums de Bobby Previte, de Jamie Saft… A chaque nouvelle production sur le très singulier label Rarenoise records, j’écoute et ne suis jamais déçue, me demandant s’ils vont se renouveller ou si dès l’intro, on retrouvera leur marque? Un peu de ces deux sensations me parcourent en ces temps étranges et leur dernière production, enregistrée l’an dernier, colle à l’ambiance surréelle de ces temps de confinement.

Le titre fait immédiatement écho à la pochette du 21st century schizoïd man de King Crimson (1969), cette musique rock progressive qui a laissé une empreinte forte dans ma mémoire. A bien y réfléchir, jusqu’à la fin de l’écoute, je me dis que c’était une fausse piste. Et pourtant…

La photo de la pochette cette fois induit une autre image, celle du film, FIRST MAN de Damien Chazelle sur l’aventure spatiale avec une B.O étrange au theremin, éminemment mystérieux. Jusqu’ à ce que j’apprenne que c’est la photo du téléscope spatial HUBBLE qui révèle des galaxies en train de naître, les plus proches étant bien résolues, les autres presque des points. On les voit telles qu’elles étaient alors, plus jeunes, plus actives, un miroir magique!

Qu’en est il de la musique de ce jazz trio avec orgue, ainsi étiqueté pour faire vite, où trois sorciers d’un son planant font un va et vient stylistique sur une bande étroite cependant! Les titres très énigmatiques, voire "nonsensiques" s’enchaînent : “Paywall” plus dub qu’hard rock, “Parkhour” avec la guitare à fleur de cordes, fulgurante et énergique de Nels Cline, le mini moog de Jamie Saft et une belle ligne de basse. “The Extreme Present”, plus familier, tisse une trame obsédante aux motifs répétitifs. “Totes” a une langueur rêveuse, jamais inconsistante.

Ces trois musiciens expérimentateurs, maîtres du son et de la technique vont ainsi improviser sur dix pièces assez longues, pensant à une éventuelle postérité? Comme une bouteille à la mer, ils jettent leur musique dans la galaxie. Pour l’instant, nous n’en sortons pas indemne de ce son sourd, mat, une musique hors sol et hors âge. Universelle? Le fredon du futur que nous ne connaîtrons pas?

Une matière travaillée, affinée, organique aussi qui peut  être caressante et mélancolique, ouatée dans cet “occession” déroutant; les bougres, ils arrivent à nous communiquer leurs sentiments. La forme fait sens. On aimera aussi “The New Weird” comme en demi teinte, où la guitare pose la mélodie, mène la danse, avant que l’orgue Hammond ne la rejoigne. Le trio sort de la brume en un fin crescendo, plus de dix minutes avant que la musique ne se perde en un murmure, dans les limbes? Comme en live. Un live où le dernier larron, Bobby Previte, que l'on ne présente plus, qui s'était intéressé dans un album de 2001 aux 23 Constellations de Joan Miro  est merveilleux dans ce groove un peu différent, apocalyptique de “Machine learning”.

Y-a t-il un effet du hasard? Cette musique d’un formidable power trio ne pouvait tomber mieux en ce moment….. Strange days….

Sophie CHAMBON

 

 

 

 

 

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12 avril 2020 7 12 /04 /avril /2020 17:13

Nulle intention, malgré l'accroche visuelle, de faire référence au célèbre film de JLG. Rien que le clin d'œil générationnel d'un désormais vieux cinéphile qui, juste avant 1968, s'enthousiasmait autant pour Godard que pour Albert Ayler, Coltrane, Pharoah Sanders, Ornette Coleman, André Hodeir ou le disque «En Liberté» de Martial Solal.... Bref déjà un indécrottable guetteur de nouveaux émois esthétiques et d'émotions fortes. Alors, en ce premier semestre, le chroniqueur a tendu l'oreille vers quelques nouveautés états-uniennes glanées dans une production aussi pléthorique là-bas que dans notre vieille Europe.

WILL VINSON «Four Forty One»

Whirlwind Recordings

 

Le premier coupable est un saxophoniste alto (et soprano), le Londonien de New York Will Vinson, avec un projet singulier mais très pluriel : des rencontres avec cinq pianistes parmi les plus prestigieux : Sullivan Fortner, Tigran Hamasyan, Gerald Clayton, Fred Hersch & Gonzalo Rubacaba. Et presque autant de sections rythmiques différentes, avec la crème des bassistes et des batteurs. Au final un beau catalogue d'excellence, auquel manque ce soupçon de flamme qui nous consumerait. Deux exceptions peut-être : les rencontres avec Sullivan Fortner, où l'on sent percer le goût du risque, et celles avec Fred Hersch, où s'installe un vrai lyrisme. Un peu décevant donc, au regard de l'ambition d'un tel échantillon.

 

DELFEAYO MARSALIS & Uptown Jazz Orchestra «Jazz Party»

Troubadour Jass Records

 

Le quatrième rejeton de la dynastie Marsalis (dont le patriarche, Ellis Marsalis Jr., est mort le 1er avril 2020) est un tromboniste plein de verve. Avec un copieux big band, et une brochette de vocalistes du meilleur aloi, il fait une belle plongée dans un jazz assez classique, avec ce qu'il faut de résurgences néo-orléanaises, une constante effervescence, et même une excursion funky ; avec aussi, en prime, une plage torride qui fait revivre les folies mingusiennes. Un régal sans œillères !

Un avant ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=OjjXg1KuZaI

et sur AllMusic

https://www.allmusic.com/album/jazz-party-mw0003339021

 

GORDON GRDINA SEPTET «Resist»

Iragabast Records

 

Un pas de côté jusqu'au Canada anglophone, avec un disque enregistré à Vancouver, et publié sous le label de l'États-Unien Jon Irabagon. Un septette qui combine le East Van Strings qui associe Gordon Grdina (guitare) à un trio à cordes, et un trio contrebasse, batterie, avec les saxophones de Jon Irabagon. Une musique très singulière, qui combine jazz très ouvert, musique savante façon début du vingtième siècle, et aussi plus contemporaine : très dense, plutôt neuf et audacieux, et assez passionnant.

 

JASON PALMER «12 Musings for Isabella»

Giant Step Arts

 

Avec Mark Turner, Joel Ross, Edward Perez & Kendrick Scott, le trompettiste nous propose 12 rêveries inspirées par des peintures dérobées en 1990 au musée Isabelle Stewart Gardner de Boston : Degas, Rembrandt, Manet, Vermeer.... et aussi la tradition graphique chinoise. Une porte ouverte vers un monde multiforme où le souci de la forme demeure constant. Une incontestable réussite esthétique et musicale, servie par des solistes improvisateurs de haut-vol. Bravo !

Xavier Prévost

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à paraître le 1er Mai

KARUNA TRIO :Adam Rudolph, Ralph M. Jones, Hamid Drake «Imaginay Archipelago»

Meta Records

https://www.youtube.com/watch?v=6nBT2-OY1y0

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(prévu le 8 mai ) SORTIE REPORTÉE au 5 JUIN

MARIA SCHNEIDER «Data Lords»

ArtistShare

disponible exclusivement sur https://www.mariaschneider.com

https://www.artistshare.com/Projects/Experience/1/510

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à paraître le 15 mai

WALTER SMITH III & NATHAN STEVENS «In Common 2»

Whirlwind Recordings

https://www.youtube.com/watch?v=CMsNaIe8JZE&feature=youtu.be

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à paraître le 19 juin

RUDRESH MAHANTAPPA «Hero Trio»

Whirlwind Recordings

https://www.youtube.com/watch?v=c9PMsGLYNgk

 

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8 avril 2020 3 08 /04 /avril /2020 20:54

SOPHIE ALOUR : «  JOY »
Music From Source 2020


Sophie Alour ( ts, fl, comps, arr), Mohamed Abozekry (oud, vc), Damien Argentieri (p, accd), Dinald Kontomanou (dms), Philippe Aerts (cb), + Wassim Halal (derbouka)

Au-delà des standards auxquels la saxophoniste nous avait habitué et sur lequel elle excellait, Sophie Alour jette des ponts entre jazz et orient à l’occasion d’une création réalisée en Mai 21019 dans le cadre du festival Jazz sous les Pommiers.
Jeter les ponts entre des cultures musicales différentes, rien de nouveau sous le soleil du jazz mais encore faut il avoir cette capacité de le faire. De s'adapter. De savoir dia-lo-guer !
Dans cette forme-là, dans ce métissage-là se trouve la base de l'échange qui est fait d’écoute et de compréhension de l'autre. Là où personne ne renie sa propre personnalité musicale mais où chacun avance vers l'autre. Et au milieu, point d'union irréductible, la musique vécue passionnément et le groove aimanté qui attire et réunit ( Exil).
Dans cet exercice à géométrie variable, entre deux rives, on est stupéfaits par la densité du jeu de la saxophoniste. Quel son ! Mais quel son ! Qui survole et surpasse tout.
Qu'elle s'envole sur des mélismes orientaux ( Fleurette  Egyptienne comme une charmeuse
de serpents) ou sur une forme jazzistique plus classique ( Joy, véritable démonstration de lyrisme et de placement rythmique avec encore une fois cette maîtrise absolue du son - on pense d’ailleurs au regretté Joe Henderson) ou qu’elle jette des ponts, s'appropriant une autre  culture, la saxophoniste nous bluffe ( Sophie Alour se fait aussi conteuse des mille et une nuits à la flûte sur un charmant  Songe en forme de fougère).
Là où la saxophoniste épatait par sa maîtrise technique mais finalement ne faisait qu’épater elle ajoute aujourd'hui un supplément d'âme. Touche en plein dans le mille.
Et sur un autre songe c'est l'incandescence orientale proche de la transe portée par l'incroyable Wassim Halal a la derbouka et par le moins flamboyant Mohamed Abozekry qui met le feu à la fête ( Songe en forme de palmiers), les deux autres héros de l’aventure métissée.
Oui il y a de la joie dans cet album !
La joie de la communion retrouvée et d'une amitié partagée... par delà les frontières.
Jean-Marc Gelin

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7 avril 2020 2 07 /04 /avril /2020 21:57

ALEXIS TCHOLAKIAN : «  Inner voice 2 »
2020
Alexis Tcholakian (p), Lilian Bencini (cb), Cédrick Bec (dms)

https://alexistcholakian.wixsite.com/alexis-music/news
http://alexistcholakian.wixsite.com/alexis-music/news

Alexis Tcholakian est une sorte d'artiste maudit. Hors des grands circuits de promo habituels il est presque devenu invisible aux yeux des grands diffuseurs.
Quelle injustice !
Car Tcholakian est ces pianistes intègre qui garde la cap. Fidèle à lui-même. À ses choix. Ceux qui lui viennent de son amour pour Bill Evans et Petrucianni duquel il sait se détacher pour y mettre aujourd'hui sa propre âme et sur lequel s'exprime une sensibilité à fleur de peau. Tcholakian a dépassé ses propres tropismes et s'ouvre désormais en quelque sorte à d'autres horizons harmoniques et rythmiques (écoutez par exemple ce très joli Cosi va la mia vita  magnifiquement écrit). Où la maturité du pianiste s'exprime avec une belle sérénité.
Chez Tcholakian, au delà de ses sublimes compositions (Fragile, absolument renversant) l'improvisation, la richesse de cette improvisation, coule de source avec une très rare élegance.  Il faut écouter justement la noirceur de ce morceau et son intemporalité pour se rendre compte que ce pianiste a de l'or sous les doigts.
Il n'y a pas chez lui de grandes impros introspectives. Chez Tcholakian au contraire elles sont toujours ouvertes et toujours au bord du coeur. Parfois à la manière des grands cubains. Parfois aussi il s'aventure sur des terres "petrucianiennes" (E&Y) ou monkiennes (Balo-baloos, baloos are). C'est qu'Alexis Tcholakian maîtrise l'histoire du piano jazz. Et aussi du trio, formant autour de lui une section totalement fusionelle.

Que l'on ne vienne pas nous dire qu'Alexis Tcholakian serait un pianiste classique sous prétexte qu'il ne se jette pas à corps perdu dans cette forme de jazz dilué dans de la pop éthérée. Tcholakian a trop de respect pour ses grands maîtres pour en suivre les traces sans besoin de les effacer. Sans besoin de les singer non plus.
Alexis Tcholakian respire le jazz.
Son album est aussi beau qu'inspiré.
Jean-Marc Gelin

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6 avril 2020 1 06 /04 /avril /2020 22:56

« BIRTH OF THE COOL » le film documentaire sur MILES DAVIS actuellement sur NETFLIX

Jq’imagine que comme beaucoup, en cette période de confinement, vous musardez et faites vos emplettes sur Netflix.
On ne saurait trop vous conseiller de vous ruer sur le film documentaire que la chaîne consacre à Miles Davis.
Disons-le carrément, c’est un petit bijou !
J’imagine que les experts en « milosologie » y trouveront à redire. Les parisiens ont eu eux la chance d’avoir l’eau à la bouche pour ceux en tout cas qui avaient vue cette magnifique exposition que la Cité de la Musique lui avait consacré sous la houlette de Vincent Bessière. Et d’ailleurs beaucoup de matériau qui avait servi à cette exposition s’y retrouve.

Il n’empêche, plaisir intact.

Car ce film est exceptionnel à plus d’un titre. Outre le travail biographique qui, sans prétendre à l’exhaustivité parvient néanmoins à retracer fidèlement la vie et la carrière du trompettiste, les supports documentaires sont remarquables et d’une rare beauté. Qu’il s’agisse des archives filmées ou photographiques, l’esthétique est mise en scène d’une admirable manière par  Stanley Nelson, documentariste New-yorkais déjà multi « awardisé ». Un montage qui colle à la musique et au personnage de son héros.
Nelson ne fait pas que du collage d’archives mais ballade aussi son micro auprès de quelques survivants (Herbie Hancock, Ashley Khan, Frances Taylor, Carlos Santana,  Jimmy Cobb etc….). Pour certains leur témoignage pourra apparaître un peu (trop) laudatif. Mais rien n’occulte non plus la face sombre de Miles ( voir celui de Frances Taylor qui fut certainement le plus grand amour de la vie de Miles).

J’avoue pour ma part avoir été particulièrement ému à voir les images et les films de l’enregistrement de Kind of Blue, comme le témoignage de la naissance du chef d’œuvre. Mais aussi  (re)découvrir les clichés de Miles avec Gil Evans dans ces rares moments où l’on sent chez le trompettiste un profond sentiment de respect et de complicité.

Ce film possède une vraie force. Celle de Miles y transparaît pour ce qu’elle est. Celle d’un génie sans cesse en recherche de création.

Les derniers mots de Carlos Santana apprenant la mort de Miles sont déchirants.

Une plongée sublime dans la vie et l’œuvre de l’un des plus grands jazzmen de tous les temps.

Indispensable.

Jean-Marc Gelin

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6 avril 2020 1 06 /04 /avril /2020 14:36

Avishai Cohen (trompette, synthétiseur, effets), Uzi Ramirez (guitare), Yonatan Albalak (guitare, guitare basse), Aviv Cohen (batterie), Ziv Ravitz (batterie, échantillonnage)

Pernes-les-Fontaines, août 2019

ECM 2680 / Universal

 

Je l'avoue, et je le confesserais même volontiers, si un relent de religiosité dans telle expression ne m'en dissuadait, j'aime la musique d'Avishai Cohen, sa façon d'incarner la musique tout en la nimbant d'un atour exquisément abstrait. Je l'écoute sur disque, j'ai eu le bonheur de le voir (et de l'entendre !) en concert et, pour céder à une familiarité non exempte de vulgarité, 'je suis client'. J'étais donc curieux de découvrir ce nouveau groupe et cette nouvelle escapade esthétique. Le terrain, étendu autant qu'escarpé, balaie l'univers pop-rock, ses descendances et ses écarts. Belle production, netteté sonore, on navigue dans un univers dont le flou est absent. Les compositions du trompettiste, dont deux sont aussi travaillées par l'influence du producteur chez qui le groupe a répété en Israël, révèlent un souci mélodique constant, avec ce qu'il faut d'échappées où l'improvisation se libère. Une synthèse en somme entre ce qui semble être le projet spécifique du groupe et sa prestation.

Dans Teardrop de Massive Attack, je ne retrouve pas le côté organique et lyrique tout à la fois qui m'avait un peu séduit dans la version d'origine, même si ce n'est pas la musique qui me captive. En revanche, au fil de l'impro d'Avishai Cohen, un renfort d'expressivité exacerbée parvient à me transporter. J'aurais trouvé la reprise de la quatorzième Sonate, dite Clair de Lune, de Beethoven, un peu niaiseuse, malgré ses légères inflexions mélodiques, si elle n'était sauvée dans l'improvisation par quelques hardiesses surexpressives. Et l'onirisme sonore de certaines plages m'a charmé. Donc, malgré ces quelques réserves et frustrations, je serai heureux d'écouter ce groupe en concert dès que possible. Hélas pas de date française dans la salve annocée du 30 avril au 8 mai (si le virus l'autorise), mais peut-être une escapade à Tournai/Doornik, en Flandre belge, pas loin de Roubaix et du Pévèle chers à mon cœur, le 2 mai. L'espoir fait (re)vivre.

Xavier Prévost

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Un avant-ouïr sur Youtube  

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6 avril 2020 1 06 /04 /avril /2020 01:07

Kurt Elling (voix), Danilo Perez (piano et fender Rhodes), Clark Sommers (contrebasse), Chico Pinheiro (guitare), Miguel Zenon (saxophone alto), Jonathan Blake (batterie), Rogero Boccato et Roman Diaz (percussions). Studio Sear Sound. New York. Edition Records/UVM.

 

Nous avions quitté Kurt Elling avec un album engagé, ‘The Questions’ (Okeh-Sony Music), qui lui valut le Prix du jazz vocal de l’Académie du Jazz 2018 et le Prix du chanteur de l’année au referendum 2019 des lecteurs de Downbeat ... Un cri d’alarme : « Nous devons dans cette époque effrayante et perplexe relever un défi politique, idéologique », nous avait-il alors confié.

 

Aujourd’hui, le baryton de Chicago revient -pour un label anglais indépendant, Edition Records- avec une œuvre pleine de sérénité, toujours marquée du sceau de la poésie, ne serait-ce que par des hommages à des poètes et écrivains états-uniens, Franz Wright, Robert Bly, Toni Morrison.

 


Kurt Elling s’est alloué la complicité du pianiste Danilo Perez, coproducteur du disque et présent sur chacun des onze titres, formant un tandem tout en harmonie. Le chanteur nous fait apprécier un phrasé délicat, élégant, maîtrisé. L’entente entre Kurt et Danilo atteint un sommet dans ‘Stays’, une pièce de Wayne Shorter que le pianiste connaît bien, membre permanent du combo du saxophoniste. Le saxophoniste portoricain invité Miguel Zenon amène une touche latino bienvenue (Beloved) dans un album qui respire la classe de bout en bout.

 


Jean-Louis Lemarchand.

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5 avril 2020 7 05 /04 /avril /2020 18:29

SEBASTIEN LOVATO : « For Virginia »
ACEL Quart de Lune 2020

Sebastien Lovato ( p, fder, compos), Antoine berjaut (tp, fchn), Yves Torchinsky (cb), Luc Isenmann (dms) + Manu Codjia (g), Brunehilde Yvrande (vc)
 

Coup de cœur pour ce nouvel album de Sebastien Lovato lancé sur la traces de son héroïne littéraire, Virginia Woolf considérée comme l’une des maître de la littérature anglaise.
Sebastien Lovato en est à son troisième album au travers Music Boox et toujours des inspirations très littéraires qui alimentent aussi bien ses compositions que son jeu. Sur sa bibliothèque trônent Faulkner, Boulgakov, Flaubert et Cartventes.
Mais ici ce sont à la fois les romans et les poésies de l’auteure anglaise qui aliment cet opus.
Et pour se faire le pianiste s’entoure de musiciens de haut vol avec Antoine Berjaut flamboyant ( Blue Seven) et une rythmique précise et bien ancrée dans le tempo avec Yves Torchinsky à la contrebasse et Luc Isenmann à la batterie.
Pour rendre hommage à Virginia Woolf il fallait de belles compositions inspirées. Et c’est exactement celles que livre Sebastien Lovato sur 9 des 11 titres ( les deux autres étant le traditionnel Amazing Grace et Pavane de Fauré).
Deux invités viennent apporter d’autres couleurs au quartet avec le slam chaud de Brunehilde Yrvande et les fluides magiques de Manu Codjia.
Cet album, disons-le tout net ne vous lâche pas ( je dois en être à ma 10ème écoute). Tout simplement parce que Sebastien Lovato a trouvé le langage qui vous happe au travers de compositions aussi diverses qu’inspirées, alternant entre les grandes lignes mélodiques, les espaces propices à de belles improvisations ( Lovato décolle sur Monpazier/New-York),
les passages électriques sublimés par le fender et la guitare de Codjia, les moments de grâce comme ce Pavane et la poésie toujours présente et rappelée par la voix onirique de Brunehilde Yvrande ( Bleu waves, Green Waves ou au  inquiétant sur Sirènes). Et même des moments presque New orleans comme cet Amazing Grace aux airs de Brass band. Le jazz est toujours là mais le rock aussi porté par la guitare de l‘inévitable et superlatif Manu Codjia qui apporte un feu apaisé à chacune de ses interventions ( comme sur le lunaire Là où la main de l’homme n’a jamais mis le pied)
Tout dans cet album passe par les émotions. Elles sont ici plurielles et magnifiées. 
On se laisse emporter comme par les flots, les mots et la poésie de l’auteure anglaise. Cet album regorge de vie ( très rock Vidéo games) , de souffle et d’élan. On se laisse porter. Et dans le flot du mouvement on s’arrête parfois touché par la beauté de l’Instant comme la poétesse qui savait tant y rendre grâce.
Jean-Marc Gelin

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