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23 mars 2019 6 23 /03 /mars /2019 16:41

YARON HERMAN : « Song of the degrees »
Yaron Herman (p), Sam Minaie (cb), Ziv Ravitz (dms)
Blue Note 2019

Il y a un supplément d'âme et un sacré power trio dans cet album. Peut être l’un des plus abouti de Yaron Herman.
 
Pourquoi un supplément d'âme ? Parce que Yaron Herman est l’un des rares qui sache faire chuchoter son piano comme l’on dirait des mots d'amour avant tout simplement d’enflammer le piano en jetant du fond de lui même une braise passionnée. Yaron Herman improvise avec le bout de ses doigts, avec son cerveau mais aussi avec l'expression d'un sentiment profond. Est ce de l'amour ou une envolée passagère de l'âme ? Seul, lui au fond connaît la réponse.
Profondément ancré dans le jazz comme sur cet ébouriffant Crazy Cat où Yaron fait la course en tête, Yaron, on le jurerait puise aussi son inspiration chez son groupe fétiche, Radiohead. Une influence mutuelle à tel point que l'on se prend à rêver qu’un jour,un duo entre lui et Tom Yorke…. tant ils semblent avoir été élevés sur la même planète.

Il y a chez Yaron Herman quelque chose qui mélange tout ce qu'il a appris des plus grands pianistes de jazz avec cette science de l'improvisation toujours intellectuelle mais jamais cérébrale parce que directement connectée à l'émotion et à la mélodie dont il se fait le maître. Une science de l’improvisation toujours intelligente parce qu’on ne la suit pas comme un exercice de style mais plutôt comme le cheminement d’une pensée intime. Parfois Yaron Herman sait imposer le silence autour de lui comme lorsqu'il s'empare du clavier pour toucher au coeur comme sur cette introduction de Our Love où en quelques notes il peut renverser le monde.
Nous parlions aussi de power trio, terme si souvent galvaudé. Mais si l’on y recours c’est qu’il faut mettre en évidence cette sublime complicité qu'il a su nouer au fil de ses derniers albums avec ce génie de la batterie, Ziv Ravitz qui de manière stupéfiante parvient à donner corps et âme à la musique, en osmose parfaite avec Yaron Herman. Et puis il y a dans cet album la découverte d’un jeune contrebassiste,  Sam Minaie, d’origine irano-américaine, ancien élève de Charlie Haden dont entend ici que le maître lui a enseigné la profondeur et la rondeur boisée du son.

Bien sûr Yaron Herman voue un culte à des pianistes comme Keith Jarret ou Brad Mehldau. Et comme ces maîtres il sait où se trouve le graal et sait où se trouve l’essence du jazz. Il suffit pour cela d’écouter les accords complexes de Kinship qui, derrière une structure un peu ardue, Yaron Herman parvient à rendre limpide.
Et puis il y a Still awake qui fait figure de masterpiece devant lequel se déverse tout l'amour du monde.
Parce que c’est cela au fond la musique de Yaron Herman. Cette façon d’embrasser le monde et tout l’univers. Alors forcément, qui que vous soyez, où que vous soyez, vous y retrouvez une part de vous même.
C’est ce qui rend la musique de Yaron Herman belle et portant en elle cette part d’universalité qui la rend, juste divine.
Jean-Marc Gelin

Yaron Herman sera
- Au Forum de Nice le 6 avril
- Au Trianon le 10 avril à Paris.
- A Nantes le 26 avril

A ne manquer sous aucun prétexte…..

 

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22 mars 2019 5 22 /03 /mars /2019 17:31

Doudou Gouirand (saxophone alto, voix), Michel Marre (trompette, bugle), Gérard Pansanel (guitare), Jacques Bernard (contrebasse), Denis Fournier (batterie, percussions)

Pompignan, 25-28 septembre 2018

Vent du Sud VDS 116 / www.lesallumesdujazz.com

 

Par un groupe qui porte le nom d'un fameux disque de Don Cherry («Art Deco»,1989), une évocation amicale autant qu'un hommage. Ce disque prolonge le programme qu'ils avaient donné en quartette au festival de Radio France & Montpellier Languedoc-Roussillon le 24 juillet 2014, et qui fut diffusé le 11 novembre de la même année sur France Musique.

Ces musiciens du Languedoc étaient proches de Don Cherry avec lequel ils ont joué, et dans cet album deux titres du disque d'où ils tirent leur nom ont été repris, entourés d'autres compositions de Don Cherry, et aussi de thèmes de Coltrane, d'Ornette Coleman et de Jim Pepper. Pas de dévotion stérile ni de mimétisme d'épigones dans cette entreprise, seulement une aventure joyeuse autant que recueillie. Plutôt que d'aller chercher l'une des plages jouées en duo par Coltrane et Don Cherry dans le disque «The Avant-Garde», le groupe a choisi, comme plage de bienvenue, Welcome, tirée du disque de Coltrane «Kulu Sé Mama» : manière de faire entendre dès l'abord que l'hommage n'était pas prisonnier du formalisme. Un court solo de batterie, et un chant qui rappelle Albert Ayler, là encore les hommages sont croisés, dans les parages des passions musicales des cinq membres du groupe.

Suivent cinq compositions de Don Cherry issues de périodes différentes : Dedication to Thomas Mapfumo, joué dans le vif d'un rythme entêtant avec une liberté irrépressible ; puis Orient [Tibet], avec des accents qui rappellent Complete Communion ; et après Art Deco, Ghana Song (co-signé Ed Blackwell), dialogue en tension ludique entre la batterie et le groupe. Augmented, encore de la plume de Don Cherry, époque «Old And New Dreams» (avec Dewey Redman, Charlie Haden et Ed Blackwell), sera suivi de deux compositions d'Ornette Coleman, bien dans l'esprit d'icelui, mais avec ce qu'il faut de cette liberté frondeuse qui seyait à Don Cherry, et que partagent les membres du groupe languedocien. Vient alors Roland Alphonso, souvenir d'un duo Don Cherry-Ed Blackwell pour le disque «El Corazón» en 1982. Une reprise de Mopti, thème extrait de la dernière mouture du groupe 'Old And New Dreams', précède le final Witchi Tai To du saxophoniste Jim Pepper, dans le groupe duquel Don Cherry avait enregistré ce titre. La boucle est bouclée, c'est une célébration amoureusement émue d'un lutin qui, à sa manière, inventa avant (presque) tout le monde le world jazz. Chapeau !

Xavier Prévost

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Le groupe Art Deco jouera le 24 mars 2019 à Clapiers, dans l'Hérault, à l'Espace Culturel Jean Penso

 

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17 mars 2019 7 17 /03 /mars /2019 15:21

MICHAEL FELBERBAUM «3Elements»

Michael Felberbaum (guitares électrique & acoustique), Frédéric Borey (saxophones soprano & ténor), Leonardo Montana (piano & piano électrique)

Pompignan, juillet 2017

Fres Sound New Talent FSNT 561 / Socadisc

 

On a pu lire, ou entendre, ici ou là à propos de ce disque, que l'instrumentation en était singulière. Certes, mais elle n'est pas inédite (se souvenir, parmi d'autres exemples, du trio de Wayne Shorter, Jim Hall et Michel Petrucciani en 1986). Mais l'essentiel est ailleurs, dans le projet nourri par le guitariste d'un tel alliage, et dans les rencontres qui lui ont fait choisir ces partenaires-ci plutôt que d'autres. Frédéric Borey, comme Leonardo Montana, est un esprit subtil, et leurs convergences musicales et esthétiques avec Michael Felberbaum sautent aux oreilles. Tous cela respire l'évidence, paraît naturel et spontané, même si manifestement cet objet est le fruit d'une culture partagée, culture du jazz bien sûr, mais aussi du contrepoint, de l'improvisation, et de ce goût du risque qui fait que l'on se jette dans des phrases interactives avec le sentiment que la réussite est au bout de la forme, même si l'on sait aussi que chacun peut être faillible. C'est la grandeur d'une conception collective de l'aventure musicale. Le disque commence par Italian Waltz : logique, le guitariste américain de Paris est né.... à Rome. «Valse mélancolique et langoureux vertige», on est au cœur du sujet. Les lignes se croisent, la tonalité s'aventure hors du cadre, les solistes sont en verve, le mélomane se régale. Puis la musique s'aventure vers des sonorités moins usitées, sur lesquelles la guitare, après avoir chanté dans la norme, s'aventure à son tour vers des sons mouvants, avant de reprendre le chemin coutumier ; puis l'aventure sonore reprend ses droits : belle leçon d'audace assumée. Après cette pièce qui donne à l'album son titre tout en dessinant l'horizon des possibles, une reprise du groupe Soundgarden tourne une autre page de douce nostalgie. Même climat ensuite, toujours très inspiré, avant un épisode plus rythmique où les accents des uns et des autres jouent un ballet qui oscille entre cache-cache et parfaite convergence. Vient alors une reprise très singulière de Mercedes Benz de Janis Joplin ; très folky, là où nous aurions attendu, par conformité avec nos souvenirs, une ironie désespérée : joli contrepied ! Puis c'est Lazy Man Blues, un thème sinueux que Michael Felberbaum avait enregistré dans un disque de Thomas Savy : là encore langueur et subtilité, un pur régal, comme d'ailleurs toutes les autres plages du CD : il y en a encore 5, courez les découvrir, la félicité est au bout du chemin.

Xavier Prévost

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Le groupe jouera à Paris au Sunside le 26 juin prochain

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Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=8XRWXAGnJOA

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13 mars 2019 3 13 /03 /mars /2019 18:33

Sébastien Texier (saxophone alto, clarinette), Fady Farah (piano), Guillaume Dommartin (batterie), Hubert Colau (voix et percussions), Philippe Laccarrière (contrebasse électrique, compositions),

Meudon, janvier 2019

Au Sud Du Nord LAC 003 / www.ausuddunord.fr

 

Voilà 40 ans que Philipppe Laccarrière a quitté Bordeaux pour la région parisienne, avant d'établir en Essonne rurale son fief, où essaime le festival Au Sud du Nord qu'il dirige. Sa musique a gardé l'accent d'origine, celui du jazz, qui se reconnaît dans l'instant pour qui l'a goûté vraiment. Sébastien Texier, même s'il est né à Paris comme son Breton de père, est -comme son père- essonnien de longtemps. Fady Farah a commencé le piano au Liban avant de d'intégrer le CRR de Paris. Guillaume Dommartin a éclos du côté de Nantes, et Hubert Colau, présent sur quatre titres, est né relativement plus au Nord, à Sarcelles, et il a promené ses percussions et sa voix du gospel à la variété en passant par les musiques du monde, mais le jazz reste près de son cœur. Bref le groupe est à l'exacte image de cette musique qui fédère les sources, les esprits et les sentiments (qui sont aussi des sensations). Ça commence très modal, accords de quartes et sax alto qui virevolte avec de forts accents : le tempo est vif, mais la mélancolie est tapie dans les replis du rythme. La basse s'envole, la batterie s'en donne à cœur joie, et le piano n'est pas de reste. Bref ça joue ! Dans la plage suivante la basse va chanter, avec un brin de nostalgie assumée. Le piano chante aussi, le groupe est lyrique, assurément, et l'alto vient encore renforcer cette sensation. On revient ensuite à un rythme plus marqué, pour une musique ouverte, où la percussion trouve sa place. Tout ça sent très fort le plaisir de jouer ensemble. Hubert Colau, voix et percussions, ouvre le titre suivant : un autre voyage, qui va prendre la direction d'une douce ballade où le sax distille son humeur crépusculaire. Et l'aventure continue, au gré de ces climats changeants, dont nous épousons tour à tour les méandres. Encore un épisode libertaire à résolution bebop, puis une complainte déchirante, et une dernière touche de mélancolie légère ; nous sommes à la fin de la dernière plage, tout surpris d'être déjà au terme : le disque est manifestement réussi.

Xavier Prévost

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Le groupe jouera le 15 mars à Breuillet (Essonne), dans l'auditorium du Moulin des Muses, puis le 21 mars à Paris (4ème), sur la Péniche Marcounet

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Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=cC2f7Dfj8Sk

 

 

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12 mars 2019 2 12 /03 /mars /2019 16:36

Laurent Dehors (saxophones, clarinettes, voix, guimbarde, machines), Gabriel Gosse (guitare électrique 7 cordes, banjo, guitare classique préparée), Franck Vaillant (batterie, batterie électronique, percussions)

Pernes-les-Fontaines, décembre 2017

Tous Dehors / l'autre distribution

 

C'est un iconoclaste joyeux, car l'iconoclasme n'est par forcément triste et dramatique. Avec une constance indéfectible, depuis plusieurs décennies, Laurent Dehors fracasse, triture, déconstruit et biaise toutes les composantes des musiques qu'il aime. Refusant les moutons bêlants qui s'évertuent à reproduire les codes esthétiques admis et dominants, il rue dans les brancards comme un cheval fougueux. Ce pourrait n'être qu'une déclaration d'intention, une posture ou un concept à livrer aux communicants : cela va bien au-delà. Servi par des partenaires totalement en phase avec son projet, il laboure avec entrain le limon de la bienséance, la glaise de l'habitude et l'argile du consensus. Et ça marche. Avec le batteur Franck Vaillant, qui avait participé avec lui à des aventures antérieures, et le guitariste Gabriel Gosse, jeune (et brillant !) musicien frais émoulu du Conservatoire (National Supérieur.... de Paris), le saxophoniste-clarinettiste (et plus si affinités) nous entraîne dans sa folle cavalcade. Ça jazze, ça funke, parfois ça fout le free au milieu d'un épisode rock'n'roll, avant de chavirer en mélancolie presque valsée, et de jeter une poignée d'ironie dans l'esprit de la (musique) contemporaine. Et au passage un coup de chapeau à Ellington avec Solitude. C'est vivant, souvent drôle, et toujours profondément musical, comme autant de petites formes autonomes lancées à l'oreille du monde, mais qui pourraient bien constituer une sorte de manifeste : hautement recommandable à ceux qui écoutent sans œillères !

Xavier Prévost

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Le trio jouera le jeudi 14 mars 2019 au Triton, près de la Mairie des Lilas (Seine-Saint-Denis) et du métro parisien du même nom.

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Un avant-ouïr sur Vimeo

https://vimeo.com/264392250#at=1

et sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=Z0VlP0ISNFw

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11 mars 2019 1 11 /03 /mars /2019 10:20

 

Philippe Soirat (batterie), David Prez (saxophone ténor), Vincent Bourgeyx (piano), Yoni Zelnik (contrebasse)

Villetaneuse, 6-7 février 2018

Paris Jazz Undergound-Absilone pju 018 / Socadisc

 

On ne change pas une équipe qui gagne, et on a bien raison ! Après « You Know I Care » (enregistré en 2014), et pour son second disque en leader, Philippe Soirat reste en compagnie de ses partenaires. Et on le comprend. Au delà de leurs éminentes qualités d'instrumentistes et de musiciens, on perçoit un degré d'implication dans la musique qui emporte l'adhésion. Compositions originales du saxophoniste et du pianiste, et reprises de thèmes de grands jazzmen, tout concourt à sorte d'unité et de cohérence qui ne sont pas les moindres qualités de ce disque. Le premier thème, Carte Blanche, composé par David Prez, est très shorterien : ça tombe bien, le suivant est de Wayne Shorter (Second Genesis, issu des sessions avec Art Blakey en 1960, et qui n'a rien à voir avec le Genesis de «The All Seing Eye» 5 ans plus tard). Suit une autre compo de David Prez, intitulée A Shorter One.... La boucle est bouclée : on est encore dans l'univers mélancolique et les tensions mélodiques chers à Shorter. Solo très inspiré de Vincent Bourgeyx, sur un drumming intense et tendu du leader. La basse de Yoni Zelnik joue pleinement son rôle d'aiguillon stimulant, puis le ténor revient, diaphane, mais avec toute sa force d'expression. Viennent ensuite des compositions de James Black (un blues dévoyé, comme les années Blue Note les appréciait), Joe Lovano (le thème qui donne à l'album son titre), Coltrane, Jeremy Pelt et Bob Hurst, et aussi une très belle composition de Vincent Bourgeyx, Dong, sombre et méditative. Sans détailler chaque plage, je puis vous dire le plaisir que j'ai eu à écouter ce disque riche de nuances, d'intensité et d'inspiration : une réussite. Bravo au leader qui sait mobiliser le talent de ses partenaires sans succomber à la tentation de donner à la batterie le premier rôle : collectif, c'est ce qu'on aime dans le jazz !

Xavier Prévost

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Le groupe joue le 12 mars à Paris au Sunside

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Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=0Cbf8hp4gqo

 

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8 mars 2019 5 08 /03 /mars /2019 00:16

Ils venaient de mondes totalement différents, Joachim Kühn - 1er concert de piano classique à 5 ans - et Ornette Coleman - saxophoniste texan ayant fait ses armes dans le rythm-and-blues. Le free les réunit en 1996 (Colors. Harmolodic), et ils se trouvèrent facilement sur scène une quinzaine de fois en duo. A chaque prestation, ils composaient de conserve une dizaine de morceaux qui n’étaient alors jamais plus joués.

Joachim Kühn & Ornette Coleman New York 1997 ©photo Austin Trevett


Ces 170 titres, Joachim Kühn les a conservés. En hommage à  son ami disparu en 2015, le pianiste allemand a sélectionné douze inédits (au sens littéral du terme, n’ayant jamais été publiés en disque), auxquels se joignent (passage obligé), le tube d’Ornette, 'Lonely Woman' (en deux versions, sur un rythme enlevé et traité comme une ballade), et en bonus une composition personnelle dédiée au saxophoniste, 'The End of The World', le plus long titre de l’album (plus de 7 minutes).

 

Dans le recueillement de son studio en son domicile d’Ibiza, Joachim Kühn a laissé parler son romantisme fougueux, celui qui s’était exprimé dans une de ses plus belles œuvres, ‘Thoughts about My Mother’. Sous ses doigts, le Steinway met en lumière le côté harmonieux de l’univers d’Ornette Coleman.


Un album hautement recommandable à deux titres : la découverte de compositions de l’auteur révolutionnaire de ‘The Shape of Jazz To Come’, et l’approche authentique, sensible, d’un artiste envoûtant qui porte haut l’étendard de la musique libre.


Joachim Kühn, (piano), ‘Melodic Ornette Coleman. Piano Works XIII’. Enregistré à Ibiza, janvier-mars 2018. ACT 9763-2.


Jean-Louis Lemarchand.

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4 mars 2019 1 04 /03 /mars /2019 14:33

 

Dominique Mandin, Olivier Zanot (saxophones altos), Boris Pokora, André Villéger, Pierre Bertrand (saxophones ténors), Jean-François Devèze (saxophone baryton),

Hervé Michelet, Nicolas Giraud, Tony Russo, Julien Ecrepont, Vincent Echard, Sylvain Gontard (trompettes), Daniel Zimmermann, Philippe Georges, Jerry Edwards (trombones), Didier Havet (trombone, tuba), Stéphane Peter (cor)
Jérémy Dufort (tuba), Maxime Fougères (guitare), Christophe Cravero (piano), Kevin Reveyrand (guitare basse), André Ceccarelli, Matthieu Chazarenc, Loïc Ponthieux (batterie), Gérard Carocci, Adriano Do, Marc Chantereau (percussions)
invités : David Linx (voix), Didier Lockwood (violon), Stéphane Belmondo (trompette)

Paris, 17 avril 2016 & 4-5 janvier 2017

Cimaises, sans référence commerciale

Disponible auprès de l'Association Cimaises, 13 Grande Rue, 28700 Oysonville

 

Enregistré dans le légendaire (et désormais détruit....) studio qui donne à l'album son titre, c'est l'hommage de ses amis musiciens, et de ses proches, à l'arrangeur-chef d'orchestre (aussi trompettiste) qui enchanta des générations d'amateurs de jazz et tissa de belles orchestrations pour une foule de grands talents de la chanson (de Claude Nougaro à Charles Trenet en passant par Henri Salvador et Nicole Croisille....). Ivan Jullien, mort en janvier 2015, était familier du lieu où il dirigea tant de séances, et enregistrer cet album souvenir en cet endroit rend l'entreprise plus légitime encore. Écouter ce disque est pour moi, à titre personnel, une émotion particulière : le 24 octobre 2009, pour les concerts 'Jazz sur le Vif' que j'organisais alors pour Radio France, j'avais accueilli le grand orchestre d'Ivan Jullien. Et en regardant la liste des 30 musiciens qui se sont relayés aux séances d'enregistrement, je consate que 15 d'entre eux étaient en octobre 2009, au studio Charles Trenet de la Maison de la Radio, aux côtés d'Ivan, pour ce concert diffusé le mois suivant sur France Musique dans mon émission 'Le Bleu, la nuit'. Et en fouillant dans mes archives je m'aperçois que, sur les 9 titres du CD, 6 avaient été joués ce jour-là, pour la plupart des compositions encore inédites au disque, et que les amis d'Ivan Jullien ont projeté d'enregister dès la fin de l'année 2015 en faisant appel à un financement participatif via la plateforme Proarti.

 

Parmi les anciennes compositions, Plastic à Gachiba, qui figurait sur le disque «L'Orchestre», publié en 1983 ; et Blues in the Night, du même 33 tours, alors avec la voix Lavelle. Cette fois c'est David Linx qui s'y colle, avec sa magnifique faculté de s'approprier un texte et une musique. Il fait aussi merveille sur une relecture de Don't Let Me Be Misunderstood (Nina Simone, The Animals, Joe Cocker....), sur un arrangement que je ne connaissais pas. Pas totalement inconnue à nos oreilles La Mazurka d'Eddy Louiss, que l'organiste avait enregistrée, sous le titre Mazurka Cacodou, sur un disque intitulé sobrement «Eddy Louiss», publié en 1968 chez Barclay : Didier Lockwood s'y livre avec fougue et lyrisme ; c'était lors de séances de janvier 2017, et 13 mois plus tard Didier disparaissait brutalement d'une crise cardiaque. Sa présence amicale compte pour beaucoup dans la réussite de ce disque, comme celle de Stéphane Belmondo sur Auntie Malibran, un des thèmes jusqu'alors inédits au disque. Pour les autres thèmes nouveaux venus au disque (mais entendus dans les dernières années de l'orchestre d'Ivan Julien), ce sont 1Léo 2 Loula, Pupet's Blues, Ballade pour Alain - dédié à l'Ami, regretté, Alain Guerrini- et L'Ancolie, courte mélodie pour les cuivres et les anches, sans section rythmique, qui met en évidence le talent d'orchestrateur d'Ivan Jullien. Au fil des plages Jerry Edwards, Daniel Zimmermann, Olivier Zanot, Boris Pokora, Maxime Fougères et Christophe Cravero se révèlent des solistes plus que convaincants dans ce très bel hommage collectif. Il fallait le faire, ils l'ont fait, et on les en remercie, du fond du cœur !

Xavier Prévost

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Sur Youtube, un avant-ouïr

https://www.youtube.com/watch?v=ZIQBOPk9Wok

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3 mars 2019 7 03 /03 /mars /2019 17:40

NAISSAM JALAL : «  « Quest of the invisible »
Les couleurs du son - L’autre Distribution - 2019
Naissam Jalal (fl, nay, vc); Leonardo Montana (p), Claude Tchamitchian (cb), Hamid Drake (dms)
 

Il ya des albums qui ont une âme. Des albums où la musique devient plus que de la musique. Devient une sorte d'expression mystique de l'univers avec ce qu’il porte d'intemporalité.
La flutiste Naissam Jalal, Syrienne née à Paris est ce des musicien(ne)s qui savent exprimer cela. Parce qu’elle est toujours restée liée à territoire musicale profondément ancré dans la spiritualité de l’Orient source de méditation et d’improvisation. Naissent Jalal a ainsi multiplié les collaborations avec de grands artistes comme le violoniste Abdu Dagher ou Fathi Salma. Mais aussi avec des musiciens reliés au jazz comme le génial batteur Hamid Drake (présent sur le disque), Méderic Collignon, Hervé Samb ou encore Nelson Veras. Tout ceux pour qui la musique ( et notamment le jazz) sont un moyen d’expression artistique de l’âme.
C’est à l’occasion d’une résidence à Banlieues Bleues que la flutiste a eu la possibilité de réunir Leonardo Montana (p) et Claude Tchamitchian (cb). Hamid Drake passant par là, l’occasion était trop belle.
L’occasion pour Naissam Jalal de signer un album absolument envôutant d'où émane une sorte de magie spirituelle. L'album de la tranquilité en quelque sorte. Et de l'espace. Et du temps donné au temps.
Il y a du souffle et du vent, du temps arrêté et de la contemplation. De la méditation aussi dans cette oeuvre qui se donne les moyens d'arrêter toute agitation juste pour écouter, voir et ressentir. C'est cela même . Un album à ressentir. Comme l’on ressent le vent sur la peau ou que l’on entend son bruissement dans les feuilles des arbres. Il s’agit d’un album aussi enraciné que volant.
Et c’est un album qui vit et qui vibre. Et c’est la sensibilité de la flutiste qui lui permet de passer dans un même mouvement des effluves du calme à la passion brûlante accompagnée par trois musiciens exceptionnels qui passent les vibrations et enracinent la musique.


Naissam Jalal est une immense artiste qui, loin du tumulte dit quelque chose de la vie.
C’est peut être à cela que l’on reconnaît les albums essentiels. Celui-là l’est assurément. Jean-Marc Gelin

Naissam Jalal era en concert

- Le 28 mars au café de la Danse (Paris)

- le 30/03 aux Plages Magnétiques à Brest

- 17/05 : Tourcoing Jazz festival

 

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2 mars 2019 6 02 /03 /mars /2019 17:02

 

Yonathan Avishai (piano), Yoni Zelnik (contrebasse), Donald Kontomanou (batterie)

Lugano, février 2018

ECM 2611 / Universal

 

Un disque sans fracas, et pourtant une entrée remarquée du pianiste sous l'étiquette ECM, où il avait déjà accompagné le trompettiste Avishai Cohen («Into The Silence» 2105 ; «Cross My Palm With Silver», 2016). Sur l'un des très beaux pianos de l'auditorium de la radio suisse de langue italienne, à Lugano, il livre un objet d'apparence minimaliste, mais d'une intensité rare. Cela commence, avec une sorte de révérence amoureuse, par le répertoire d'Ellington, et Mood Indigo. Plus que lentement, chaque instrument fait son entrée dans ce monument historique dont il caresse la charge patrimoniale nimbée d'émois anciens. Suivent des compositions originales où le recueillement et la retenue dominent. On retient son souffle, le bassiste et la batteur retiennent l'accès au temps, et l'on glisse sur un tapis de félicité. Le disque culmine peut-être avec When Things Fall Apart, inspiré de l'aveu même du pianiste par la composition qui donnait son titre au premier disque gravé avec Avishai Cohen. Et l'on conclut par un souvenir rythmique d'un voyage à Brazzaville, où le tempo s'anime, mais sans rompre le voile du mystère. Grandes émotions ; grand disque !

Xavier Prévost

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