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15 avril 2011 5 15 /04 /avril /2011 21:17

Bee Jazz Records / Abeille Musique Distribution - 2011

Majid Bekkas (guembri, oud, gt, vc), Ablaye Cissoko (kora, vc), Khalid Kouhen (perc, vc)

majid-bekkas-mabrouk.jpg

 

Pas si loin du Jazz et de sa consistance si particulière, « Mabrouk » est le dernier disque en date de l’artiste Majid Bekkas. Il est accompagné cette fois encore de belle manière par deux autres magiciens du son en la personne de Ablaye Cissoko à la kora, dit « le griot rouge », et de Khalid Kouhen aux percussions, l’ami de longue date. Le musicien marocain utilise son instrument de prédilection, le guembri, comme porte-voix pour transmettre toute la poésie qui l’habite. Cette poésie est d’ailleurs mélangée aux douces sonorités de la kora, parfois aux aquatiques résonnances de tablas, pas si musicalement étrangères (dansMabrouk), ainsi qu’au lyrisme gnawa de l’oud (dans Masmoudi). Dans son entièreté, l’album nous fait ressentir d’agréables sensations de voyage au-delà des frontières culturelles de chacun de ses participants. Le répertoire qui y figure est fondé sur une savante alternance entre compositions de Majid Bekkas et thèmes traditionnels. Il faut signaler aussi la présence d’un autre jeu de l’alternance avec à la fois des chansons interprétées par le compositeur lui-même, la réplique étant souvent donné par des chœurs, et à la fois une succession d’improvisations mettant en scène chaque instrument. Ce magnifique opus nous laisse imaginer une réunification musicale entre le nord et le sud du Sahara, en témoigne la volonté du griot sénégalais Ablaye Cissoko à faire sonner son instrument de façon maghrébine comme par exemple dans Bala Moussa. Il est possible aussi de succomber au plaisir d’entendre la gracieuseté d’une guitare acoustique au son clair et rayonnant, accompagnant la voix de Majid Bekkas sur les paroles de Touré Kounda de Salya. Ce voyage onirique africain touchant à sa fin, l’album se clôture par un Hommage aux ancêtres rempli d’émotion, où résonne par un talent immense la voix de la transmission des traditions de cet artiste marocain incontournable.

Tristan Loriaut

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15 avril 2011 5 15 /04 /avril /2011 21:10

Le Chant du Monde - 2011

Claude Tissendier (clar), Romain Brizemur (gt), Luc Desroy (gt), André Bonnin (cb)

tissendier.jpgUn hommage supplémentaire au plus grand des guitaristes de Jazz originaire de France, Django Reinhardt, sans qui la Musique du vingtième siècle serait orpheline. Mais cet hommage tient une position particulière puisque ses instigateurs, Claude Tissandier et Romain Brizemur, ont choisi de retrouver le timbre si particulier du quintet du Hot Club de France lors de l’association entre Django et un autre musicien remarquable, le clarinettiste Hubert Rostaing. Le renoncement du « tout cordes » ayant fait son chemin auparavant, c’est donc de 1940 à 1947 que ces deux monstres sacrés ont collaboré ensemble au sein d’un quintet remanié. L’héritage de cette période demeurant aujourd’hui intact, le quartet du clarinettiste Claude Tissandier nous offre un répertoire de compositions qui sont pour la plupart le fruit du travail de Django Reinhardt, certaines étant co-écrites par Stéphane Grapelli, le compagnon de toujours. On y trouve les thèmes les plus célèbres, de Djangologie à Minor Swing, en passant par Nuages ou Belleville, sans oublier l’éternelle Douce ambiance. Chaleur d’un lyrisme fluide et efficace, le jeu du clarinettiste Claude Tissendier est résolument généreux, offrant un agréable sentiment de bien-être sur chacune des apparitions de son vibrato. Romain Brizemur est quant à lui tout à fait à la hauteur de sa nouvelle réputation. Il nous donne une approche moderne et audacieuse de l’improvisation manouche à la guitare électrique, usant d’un phrasé clair et dégagé de toute imitation. Il faut aussi bien entendu citer la présence de rythmiciens hors-pairs en la personne de Luc Desroy à la guitare et André Bonnin à la contrebasse, qui connaissent tous deux leur moment de gloire sur Swingtime in Springtime. C’est d’ailleurs autour d’une « rêverie » de Claude Debussy arrangée par Django que les compères sont réunis sur ce disque par cette passion inépuisable pour la Musique de Jazz d’autrefois.

Tristan Loriaut

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15 avril 2011 5 15 /04 /avril /2011 07:44

 

Le Chant du Monde 2011 ( dist. Harmonia Mundi)

Remi Sciuto (sax, kyb, voc), Antonin Leymarie (dm), Antonin Rayon (kyb), Fred Pallem (g ; b), Nicolas Mathuriau (perc), Bioris Boulbil (synthés)

Wildmimi_album180.jpg

Certes on entre bien dans cet album un peu comme on entrerait dans un  opera-pop-rock un peu fantasque. Avec une couleur parfois 70's derrière laquelle on imagine que va débouler un Roger Daltrey. Il y a de l'humour là dedans à l'instar de ce titre ( " rêve et fantasme d'une chaussure ordinaire"), des évocations, des tableaux et des mouvements ( tant mieux s'agissant d'une chaussure). C'est baroque et parfois même un peu "pompier".  On déambule, on semble sortir d'un magasin clinquant, on effleure la peau.

L'empreinte de Zappa est forte et l’on imagine l'album mis en image par un Tim Burton ou porté sur les planches par  un chorégraphe déjanté tant la dimension scénique est évidente et demande plus que de la musique ( de la vidéo ! de l’éclairage d’une boule à facette ! des acteurs colorés !). Car si le soin extrême porté aux compositions et aux arrangements est évident et donne à penser la pièce dans sa globalité plutôt qu'au travers de chaque titre, il n'en reste pas moins que cela manque un peu de jeu. Chroniquer cet album sur un site dédié au jazz fait peu de sens. L’improvisation et le swing ne sont pas de la partie ( normal s’agissant d’un groupe dont le nom est Antigroove syndicate) et les musiciens servent l'oeuvre (ambitieuse) en oubliant un peu de se servir eux-mêmes.

Reste le plaisir de cet onirique voyage, cette déambulation fantasque que l’on suit avec amusement et dont le charme ne manque pas de séduire.

Jean-Marc Gelin

 

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14 avril 2011 4 14 /04 /avril /2011 22:08

Verve 2011

Stephane Belmondo (tp, fchn), Kirk Lightsey (p, fl), Sylvain Romano (cb), Billy Hart (dm), + Laurent Finckelson (p)

stephane-belmondo-the-same-as-it-never-was-before.jpg

Rien de moins pour le nouvel album de Stéphane Belmondo que les honneurs du prestigieux label Verve. Il faut admettre que rares (voire rarissimes) sont les frenchies qui sont allé signer sur le label de Norman Granz. Et pour ce tout nouvel album notre trompettiste toulonnais reste sur le terrain qu’il affectionne, celui des rencontres avec quelques pointures du jazz qui en ont écrit les plus belles histoires. On sait le travail fait avec son frère Lionel avec Yusef Lateef. On sait aussi le beau projet qu’ils développèrent ensemble avec Milton Nascimento. Ici c’est en quartet que Stéphane Belmondo accueille deux vraies légendes du jazz, le pianiste Kirk Lightsey et le batteur Billy Hart. L’un, le pianiste de Détroit ( la patrie de Hank Jones) a 74 ans et a traversé la scène du jazz américain avec tous les plus grands (Chet Baker, Dexter Gordon, Kenny Burrell, Anita O’day, Chico Freeman, Lester Bowie etc…). L’autre, Billy Hart de trois ans son benjamin n’est pas en reste, lui qui a joué avec Miles, Gil Evans, Lee Konitz et tant d’autres. Tous deux trouvent aux côtés de Stéphane Belmondo un terrain d’entente sur une musique post hard bop sur lequel tous les trois excellent. Qui plus est, Stephane qui a bien souvent joué avec Lightsey entretient une réelle complicité avec le pianiste. Restait à ajouter un super copain, Sylvain Romano à la pulse d’une précision métronomique et diabolique pour en faire un super combo.

Adepte des rencontres, Stéphane Belmondo,est à l’aise dans ce jardin-là dans une ambiance qui ressemble fort à celle d’un concert de club tant il y a de l’instantané là-dedans, du pas calculé, du plaisir de jouer et de se lâcher comme les affectionne Belmondo. On imagine bien que cet album pourrait se décliner en 30 titres et aller jusqu’au bout du petit matin.

Et pourtant on retrouve ici le trompettiste dans un registre bien plus apaisé qu’à l’accoutumée, un peu moins démonstratif mais dans la totale plénitude du chant de l’instrument. Traversé un peu corps et âme par le bugle à l’image de la pochette de l’album. Et c'est ici un Stéphane Belmondo tout nouveau, rayonnant presque printanier qui émerge ici. Un musicien bien dans ses baskets dont on se dit que la récente venue de la petite Rita (à qui Belmondo dédie un beau titre, light upon Rita) ne doit pas y être pour rien.

5 compositions de Belmondo, une de Stevie Wonder  (qui ne figurait pas dans « Wonderland » son hommage superbe à Stevie), une de Lightsey, un standard ( Eveything happens to mequi est aussi le titre éponyme d’un album du pianiste), un thème de Wayne Shorter ( aussi repris dans un album que le pianiste a dédié au saxophoniste) constituent l’essentiel du matériau. Et il ne s’agit rien de moins et rien de plus que de jouer cette musique qui ne révolutionne pas l’histoire du jazz mais qui en maintient les couleurs vives. S’il flirte toujours avec des horizons coltraniens, Belmondo touche aussi en plein cœur lorsqu’il s’en démarque parfois comme lorsqu’il entreprend en duo avec le pianiste un Everything Happens to me extrêmement touchant. Au point que l’on regrette presque que Belmondo n’ait pas choisi la formule du duo dont on perçoit là l’amorce d’un beau projet. Lightsey que l’on entend rire sur une prise fantôme (*) est visiblement heureux de se retrouver là. Entre jeu en block chords et chaloupements à la Wynton Kelly, l’homme dégage une énergie et une vigueur qui fait plaisir à entendre.

Si l’on est (cela est parfaitement subjectif et assumé comme tel) pas du tout convaincu par cette nouvelle affreuse manie de jouer des conques ( à laquelle depuis Steve Turre se rallient Llado ou Belmondo), on est pour le reste plutôt séduit par cet album de passage, cette courte parenthèse dans la carrière du trompettiste qui s’offre un double plaisir, celui de la paternité et celui de sa propre rencontre avec ses propres pères. Ceux dont il porte l’héritage musical. De flamboyante façon.

Jean-Marc Gelin

 

(*) Ne pas hésiter à visionner la video du makin off de l’album :

 

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13 avril 2011 3 13 /04 /avril /2011 16:00

ACT 2011

Nguyên Lê: guitars, computer, fretless electric guitar (3), prepared Vietnamese Cai Luong acoustic guitar (8), baby 12-string acoustic guitar (14); Illya Amar: vibraphone (1, 2, 4, 5, 7, 9, 10-13, 15), marimba (1, 2, 4, 5, 7, 9, 10, 12, 13, 15), electronics (1, 2, 4, 5, 7, 9, 10, 13, 15); Linley Marthe: electric bass (1, 2, 4, 5, 7, 9, 10, 12, 13, 15), vocals (12); Stéphane Galland: drums (1, 2, 4, 5, 7, 9, 10, 13, 15); Youn Sun Nah: lead vocal (1, 10); Ousman Danedjo: vocals (1, 2, 7, 15), lead vocals (5); Gou Gan: erhu (1); Stéphane Edouard: percussion (1, 4, 9, 12, 15); David Linx: lead vocal (2, 9), vocals (7, 15); Himiko Paganotti: vocals (2, 5, 15), lead vocal (7, 12); Prabhu Edouard: vocals (2), percussion (2), tablas (10), Indian vocals (10); Dhafer Youssef: vocals (3, 4); Karim Ziad: percussion (5), karkabus (10, 12), drums (12); Hamid El Kasri: gumbri (5); Keyvan Chemirani: zarb (7); David Binney: alto saxophone (9); Julia Sarr: vocals (7, 15), lead vocals (11).

 

 

 

Au départ c’est presque une vieille histoire d’adolescent. Des souvenirs de jeune ado qui écoutait jusqu’à plus soif les tubes de l’époque et faisait tourner sur sa platine (vynile !) ses standards à lui. Et sur cette platine tournait du Stevie Wonder, du Led Zep, du Janis Joplin, du Bob Marley. Des tubes « gros comme ça », des chansons que tout le monde a dans la tête. Des trucs qui sentent un peu le shit dans la piaule d'étudiant et des « délires graves » et ça a le relent de tout ce qui nous a fait préférer le rock aux cours de maths et je me rappelle et je m'en souviens. Au départ donc, ça part comme ça.

nguyen-le-songs-of-freedom.jpgÀ l’arrivée, cela donne un disque absolument énorme où le guitariste réinvente absolument tout. Se réapproprie sans trahir. Transforme sans travestir. Redonne une nouvelle vie à ces tubes interplanétaires que Nguyen Lê refaçonne avec génie. Tout prend une couleur nouvelle. Le I wish de Stevie Wonderpar exemple, est totalement réinventé par David Linx qui déjante et en porte quelque chose de profondément tripal. Tripal, c’est exactement le mot de cet album qui va chercher dans cette sauvagerie du rock et de la pop quelque chose de RADICAL.  Whole Lotta Love de Led Zep ( les paroles raffinèes en gros c’est « je vais te la mettre profond ») transcendé par Youn Sun Nah dans une totale acculturation de la chanson.. Et que dire de ce beau Mercedes Benz de Janis Joplin porté par la voix sublime de Himiko Paganotti ! 

Après s’être attaqué au répertoire de Jimi Hendrix ( « Purple »), Nguyen Lê ( en home studio, excusez !!) retrouve la bande de ses fidèles comparses (Stephane Galland à la batterie, Linley Marthe à la basse et Illya Amar au vibraphone et stephane Edoaurd aux percus) et remet tout dans un ordre ( ou plutôt un désordre) qui lui tient à cœur. Il y a bien sûr ces racines vietnamiennes que Nguyen Lê ne renie pas et que, au contraire il utilise avec une pointe de génie en recourant parfois à la guitare vietnamienne ( sur quelques petites heureuses incises en guise d’introductions). Mais, nous le disions, ces tubes sont interplanétaires et donc quelque part universels. Il y a donc aussi de l’Afrique dans cet album ( Pastime Paradisepar exemple avec Ousman Danedjo) et du blues qui se moque des frontières. Il y a parfois quelques sucreries sauf qu'après tout, il n'y a pas de mal à se faire du bien. Et surtout Il y a tout au long de l’album la guitare de Nguyen Lê, parfois guitare héro parfois au contraire nuançant les couleurs. On entend chez lui Hendrix (référence suprême) mais aussi Steve Vai ou parfois même Clapton. Nguyen Lê a cette capacité de transformer son instrument avec une science de l’improvisation exceptionnelle capable d’imprimer la marque de tous les thèmes entre Europe, Afrique, Orient et occident. Ecouter par exemple comment avec subtilité il s’empare de Mercedes Benz de Janis Joplin pour l’amener petit à petit à un rock qui racle, qui graille, qui transcende le tout. Sur Black Dogil ne cherche pas à dénaturer et reste au contraire au plus près du sujet d’origine en l’explosant littéralement en vol avec son complice de longue date Dhafer Youssef qui sort le thème d’une transe magique et là encore tripale. Deux saxophonistes américains s’invitent sur cet album et non des moindres : David Binney sur More Over et Chris Speed à la clarinette turque.

 

Et il y a au final ce prodigieux travail d'arrangement. Entendez par là cette écriture - réécriture dont Nguyen Lê fait montre tour au long de l'album avec en toile de fond une direction artistique de haute volée. Avec ces thèmes connus , reconnus et redécouvert, le résultat est purement et simplement jubilatoire.

Jean-marc Gelin

 

 

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4 avril 2011 1 04 /04 /avril /2011 08:24

Act 2011

Vijay Iyer (p), Prasanna (g, vc), Nitin Mitta (tablas)

 VijayIyerTirtha-1.jpg Comme il le dit lui même dans ses notes, le pianiste Vijay Iyer, en s'entourant de musiciens indiens vivant aux Etas-Unis n'a surtout pas voulu faire une musique "fusion" qui sonnerait " indienne". Une musique qu'il aurait été facile d'étiqueter " world musique". La tentation est pourtant bien grande, mais le propos est bien au-delà et il s'agit avant tout ici d'une rencontre inspirée entre trois musiciens qui ont composé leur propre matériau et qui trouvent là matière à l'expression de leur propre culture musicale et à leurs propres racines qu'il n'est bien sûr pas question de gommer. A trois ils inventent un langage syncrétique autour de ce thème titre : Tirtha qui " signifie passage ou gué et désigne un lieu de pèlerinage à proximité des eaux sacrées, suggère un espace liminal entre fluide et solide, un seuil entre deux mondes" (*).

On ne saurait mieux exprimer cette atmosphère mystérieuse et envoûtante, cette nébuleuse entre raga et jazz, cet espace mouvant d'improvisation qui donne cette tonalité fascinante. L'entame de l'album (Duality) c'est justement cela : l'entrée dans un "entre-deux mondes". Le guitariste, Prasana réinvente devant nous la guitare avec un jeu qui à lui seul incarne ce syncrétisme et qui transforme tous les sons de son instrument en ceux d'un Sitar. On entend clairement dans son jeu autant de Paco de Lucia que de Ravi Shankar. Un slide aux modulations envoûtantes nous plonge dans cet univers flottant que les harmoniques de Vijay Iyer ancrent dans un jazz plus occidental. Nitin Mitta l'un des plus prometteurs joueurs de tabla, fraîchement auréolé de plusieurs récompenses obtenues dans les meilleures écoles de Calcutta, fait vibrer cette musique en faisant circuler le fil d'une énergie jamais rompu. C'est la palpitation accélérée d'un corps en mouvement. Tout évoque dans cet album ce croisement des mondes comme dans Polytheism au titre bien choisi, où Vijay Iyer évoque plutôt un Andrew Hill et où Prasanna se débarrasse de ses idiomes traditionnels pour s'ancrer dans une modernité plus prche de nous ( écouter sur ce titre le jeu époustouflant de Nitin Mitta....)

Dans cette sorte de danse à trois, dans cette façon qu'ils ont aussi de discourir sur des terrains qui portent la trace d'une histoire partagée, on entre avec un mélange de fascination et d'élan presque mystique. Un peu à la manière parfois de ce que l'on ressent à l'écoute de la transe gnawa.

Une superbe réussite.

Jean-Marc Gelin

 vijayiyertirtha2.jpg

 

 

(*) tiré des liner notes de Vijay Iyer

 

Retrouvez l’intervie réalisée par Linel Eskenazi pour les DNJ sur

IYER par Ailleurs… Une rencontre avec Vijay Iyer

Le projet de Vijay Iyer sera présenté le 5 avril dans le cadre du festival de banlieues Bleues.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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3 avril 2011 7 03 /04 /avril /2011 14:58

 

reve_elephant_pourquoi_pas_un_scampi_225.jpgW.E.R.F 090

 

Collectif du lion


 

On peut vraiment faire confiance à nos amis belges pour les trouvailles d’humour loufoque et surréaliste. En voilà bien un nouvel exemple avec cet album superbe du Rêve d’ Eléphant Orchestra. Sur un « improbable territoire », nos amis d’outre quiévrain ont une manière originale d’aborder le quotidien dans toute son « étrangeté ». Une perception du réel troublante rejoint un sérieux difficile à maintenir, d’où ce sens affiché de l’auto-dérision qui se manifeste dès la pochette et le titre de ce dernier opus d’un groupe marrant et sérieux à la fois. Pourquoi pas un scampi ? en effet avec ce détective très « Herlock Sholmien » en couverture.

L’équipe est mixte et musicalement du moins, le lion flamand s’entend avec le coq gaulois, comme on le voit au dos de la pochette : ce groupe est donc co-produit par le Collectif du Lion de Liège, la structure de Werf basée à Bruges, vitrine du jazz flamand et la Communauté française de Belgique. Certains de nos musiciens français comme Sébastien Boisseau ou Laurent Dehors aiment à traverser la frontière.Les deux Français du groupe débordant d’énergie sont ici le guitariste Benoît Eils et le trompettiste Alain Vankenhove.

La musique, avec de telles formations mixtes, n’a que faire des divisions linguistiques et politiques. Et l’on aime ça. Vraiment !

Tous les styles existent dans ce petit pays, ouvert sur les métissages, l’apport des cultures exogènes.

Rêve d’Eléphant Orchestra en est un exemple signifiant avec un son singulier, un « archestra » qui marie toutes ces influences, à la frontière du jazz, du rock, du traditionnel : un vocabulaire et une grammaire communs avec cependant une expression poétique singulière, au delà même de l’improvisation. Une créativité débordante anime les auteurs de ces musiques, le tromboniste tubiste Michel Massot, le flûtiste Pierre Bernard.

Le rythme étant essentiel, deux autres batteurs percussionnistes rejoignent un des leaders d’origine Michel Debrulle, Etienne Plumer et Stephan Pougin (au bodhran, derbouka, congas).

 

Après Racines du Ciel en 2001 et Lobster Caravan en 2004, cet album nous entraîne sur le terrain d’une fanfare électrisée qui aimerait sons et rythmes exotiques. Un peu à la Kusturica, à la différence près qu’ils ne sont que sept. Tout cette petite bande se libère, et même s’il ne s’agit pas d’un big band -pas de section- en exploitant une formidable palette de couleurs et de timbres pour faire sonner la musique. Car la mélodie est une donnée essentielle: avec Rêve d’Elephant, ça chante tout le temps, et le son de la formation est toujours cohérent, souligné par un arrangement orchestral intelligent. Ainsi, la version du morceau de Jacopo da Bologneest proprement ébouriffée et séduisante.

Voilà aussi tout un répertoire de formes qui prennent sens, au sein de compositions où chacun sait faire entendre sa voix, unique au sein du collectif :  ostinatos au trombone, riffs nostalgiques de guitares (« Loxodonde»), motifs qui s’annoncent, prennent le temps de s’installer jusqu’à la douce transe (« Dromadaire », « Mon éléphant »), contrepoints aux connotations baroques parfois, unissons des soufflants en introduction aux envolées cuivrées ou flûtées...

On aime cette musique vigoureuse et tendre, non exempte d’exigence, qui sait aussi émouvoir avec une narration propice à la mélancolie, à l’expression douce amère d’un tempérament nordique.

 

Sophie Chambon
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3 avril 2011 7 03 /04 /avril /2011 14:52

Plande-Human-Nature.jpg2011 - Cristal Records / Harmonia Mundi

 

Eric Plandé (s, ss), Bob Degen (p)

 

Solide ténor, soprano subtil, Eric Plandé nous revient avec Human Nature, son huitième album. On se souvient de lui avec Abyss et de Between the lines, accompagné du formidable et devenu rare Jacques Mahieux à la batterie, tous deux animés par les forces du jazz.
Plandé joue ici en duo avec le pianiste américain Bob Degen, qui, comme lui, vit en Allemagne, depuis les années 80, et qui partagea la scène avec Heinz Sauer auparavant. Le saxophoniste signe le plus grand nombre des compositions, partage l’écriture avec Bob Degen qui signe aussi quatre plages. Le duo interprète aussi des compositions de Jean Paul Celea, de Joachim Kühn et Dave Liebman.
Fidèle à lui-même, le saxophoniste ténor et soprano ne soudoie pas et ne (se) fourvoie pas. L'énergie du souffleur, qui a hérité de la belle tradition free, est ponctuée par les délicates dissonances légèrement disloquées de l'instrumentiste et par sa profonde sensibilité. Plandé garde son authenticité alors que son discours court à l'essentiel.
En effet, Human Nature est un album différent: concis et substantiel. Si Bob Degen dessine le chemin à suivre, Plandé en est la lumière. Plus exactement, Plandé met en exergue les qualités des belles compositions et les interprète avec une grande émotion alors que le jeu neutralisé de Degen les apaise.

Caractérisé par un son qui lui est propre voire unique, Plandé gratifie ici son jeu d'une intense fragilité et avive son côté émotionnel: un saxophone qui vous fait trembler, comme un équilibriste dont on craint à tout moment la chute. Écoutez sa belle composition "Aphrodite's heart", déjà interprétée sur Abyss qui prend ici une dramaturgie compacte et dont la mélodie évidente nous touche immédiatement.
Plandé et Degen forme une paire hors norme et antinomique qui "fonctionne" bien et avec profondeur. Human Nature pourrait être un tournant musical pour Plandé, sans aucun doute l'une de ses meilleures réussites.

 

Jérôme Gransac

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1 avril 2011 5 01 /04 /avril /2011 11:32

One Heure Onze 2011

Antonin Hoang (as), Ben Wendel (ts), Laurent Coq (p), Tigran Hamsyan (p), Michel Valeanu (g), Matteo Bortone (cb), Simon Tailleu (cb), Guilhem Flouzat (dm)

 flouzat-copie-1.jpg

 Dans ce premier album signé par le jeune batteur exilé depuis 2009 à New-York on sent immédiatement la marque de ces batteurs-compositeurs dont Guilhem Flouzat revendique d'ailleurs les influences : celles notamment de Brian Blade et de John Hollenbeck.C'est avec l'appui du "grand frère", autre ex-exilè, Laurent Coq, ici maître dans la direction artistique du projet que Guilhem Flouzat, pour son premier album livre ses propres compositions. Et l'on est frappé par la très grande qualité de l'écriture à laquelle le jeune batteur a visiblement porté un soin extrême. 2 saxs ici pour jouer des  tramages subtils (comme Laurent Coq les affectionne) avec un superbe Ben Wendel au ténor et le jeune et remarquable Antonin Hoang, tout jeune alto et déjà pilier notable de l'ONJ de Daniel Yninek. L'entente entre ces deux saxophonistes est frappante dans la complémentarité de deux styles, dans deux sons assumés de manière radicalement différente mais aussi dans une science exacte de partage de l'espace. Et l'on entend distinctement ici un jazz très trendy d'Outre Atlantique, où il est avant tout question d'élégances harmoniques. On pense à d'autres écoles des clubs New-yorkais ou Berlinois (même combat) : celle de Rosenwinkell ou encore celle de Fly. C'est léger et très fin (ça pète aussi dans la soie un petit peu). Tigran Hamasyan vient rajouter sur 2 titres toute la percussivitè de son jeu et ses  propres tropismes un peu plus éloignés de Manhattan.

Au final, sur ces superbes compositions, l'osmose opère dans un esprit très peaceful, dans une sorte de communion des musiciens. Très zen en somme. Et l'on retiendra l'émergence d'un jeune musicien dont il va falloir retenir le nom. Son coup d'essai est en effet un coup de maître.

Jean-marc Gelin

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1 avril 2011 5 01 /04 /avril /2011 09:35

Juste une Trace - 2011

Laurent Mignard (tp de poche), Geoffrey Secco (sx ten/sop), Eric Jacot (cb), Luc Isenmann (dr)

MIGNARD-copie-2.jpg

Le Pocket Orchestra nous revient en pleine forme avec ce nouvel opus dédié aux bons gestes de l’espèce humaine pour sa pérennité. Il fallait que quelqu’un y pense ! C’est chose faite avec ce disque intitulé « Good News », toujours aux côtés des musiciens permanents de cette formation ravageuse : Luc Insenmann à la batterie, Geoffrey Secco aux saxophones, Eric Jacot à la contrebasse et bien entendu, Laurent Mignard le « trompinettiste » au cœur tendre. L’aventure commence par une courte et triste évocation de ce qui pourrait rester de notre vieille planète, à l’heure du changement, le vrai, le bon (Old World). Et c’est dès la seconde composition, Come On Right, que le débat part sur les chapeaux de roues, avec pour indicatif cette ligne de basse aussi simple qu’efficace. All aboard ? En parcourant chacune des œuvres de ce quartet délirant, il est impossible de résister à cette folle spontanéité dont font preuve ces fous du biniou. D’audacieuses envolées lyriques hors du commun ponctuent chaque solo, comme par exemple dans Frenetic City. Comment ne pas aimer être emporté dans ce délirium frénétique, dans lequel évolue cette furieuse envie de vous surprendre. Toutes les combinaisons sont bonnes, de l’improvisation collective aux bruitages intempestifs, en passant par des accessoires pas si étranger d’une telle esthétique choisie, comme le bowl du trompinettiste. Difficile aussi de résister à tous ces dialogues que les soufflants nous offrent, avec à chaque fois encore plus d’inventivité. Si j’ose dire, et vous m’en excuserez le terme, faisant état d’un bordel incommensurable. C’est d’ailleurs après un calme et serein détour (Contemplation) que ce désordre refait surface dans une improvisation encore une fois dénudée de toute grille harmonique. D’ailleurs, cela ne dépossède pas ce quartet de son talent de compositeur, en témoigne ces clins d’œil à Thelonious Monk dans la dissonance des thèmes (Playmobil City), à Duke Ellington dans l’organisation contrapuntique des mélodies et à Ornette Coleman pour la malicieuse créativité (Birds). Ajouter à cela une dose de funk ravageuse et quelques mesures composées, et vous trouverez un parfait éventail de ce que peut produire de mieux un groupe de Jazz d’aujourd’hui, même si cette appellation d’origine contrôlée a déjà vu son sens largement évoluer, et ce, grâce à de tels groupes. Et chose rare, comme un prolongement de ce disque, il vous est possible d’échanger, vous, chers auditeurs, de faire partager vos idées ou vos initiatives pour changer le monde à partir d’un blog créé par ce groupe, www.GoodNews-Pocket.com. En Musique, évidemment.

Tristan Loriaut

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