Cam Jazz 2009
Sylvain beuf (ts,ss), Julian Oliver Mazzariello (p, orgue, fder) , André Cecarrelli (dm)
Ce disque est à l’image de sa pochette : haut en couleurs. Aussi vives que fortes. Car lorsque Ceccarelli retrouve son saxophoniste préféré, on peut être sûr qu’ils amènent toujours avec eux, dans leurs bagages un groove fusionnel de derrière les fagots. En studio, dans un bœuf ou dans une jam ces gars là savent y faire pour mettre le feu. Et ce n’est pas d’un truc à l’arrache dont on parle. Pas un truc, à la « va-comme-je-te-pousse ». Non, un truc de sacrés musiciens qui excellent dans l’art du jouage. A tel point qu’à les entendre dans cet album on les croirait en club. Alors on écoute ça comme on serait scotchés au bar jusqu’à pas d’heure, la gueule ouverte, les mirettes écarquillées et les esgourdes ravies. Car ces enfants du bop et de cette musique que quelques ignorants croiraient réservée aux bas fonds de la grosse pomme savent balancer terrible. On a encore en tête le « live » enregistré récemment sous la voûte (céleste) du Sunside et publié l’an dernier. On s’en mord encore les oreilles de ne pas avoir été là ce soir-là. Dans ce genre de coup, les absents ont radicalement et définitivement toujours tort. À l’époque c’était Antonio Farao qui tenait le clavier. Ici on prend presque les mêmes, mais, à la place du pianiste c’est Julian Oliver Mazzariello qui prend la relève dans le trio. Relève de très haut niveau s’il en est. Car Mazzariello est dans une autre énergie que celle du pianiste. Lui est plus à son aise à l’orgue et au fender, genre Larry Golding si vous voyez ce que je veux dire. Accompagnateur mais aussi sideman de la mort qui tue. Il n’est que d’écoutez le son qu’il dégage, gras et un peu trash en contrepoint du soprano de Beuf sur Three-fiour, s’imposant comme son exact contraire pour apprécier chez lui son sens du contraste. Quand à sa façon d’accompagner le groove, elle est tout bonnement irrésistible.
Alors partant de cette ossature-là, ce trio peut varier les plaisirs toujours intenses, mette le feu au studio, faire flamber les énergies littéralement consumées sur place. Avec Cecarrelli c’est toujours la phrase juste. La relance exactement là où tu voudrais qu’elle soit. Une sorte de clone d’Art Blakey, de Tony Williams ou d’Elvin. Des leçons de batterie volubile. Tu crois que j’exagère. Écoutes un peu ce constellation au titre tout Coltranien. Et puis, Beuf évidemment. A entendre comment Beuf et Mazzariello partagent le drive de Cecarrelli sur Propose it dans la pure tradition des hard boppeurs. On se dit que cette musique là n’est pas faite pour s’éteindre de si tôt. Et ces trois là nous renvoient à nos classiques avec une maestria jubilatoire. Beuf c’est parfois Michael Brecker, parfois Rollins parfois Coltrane. Comment lui reprocher ce syncrétisme ? Aérien ! Batiste Trotignon est aussi à l’honneur dans cet album puisqu’il participe à la composition de 4 titres, Syvain Beuf en ayant écrit 5 autres. Finalement l’album se termine de la plus heureuse des façons sur un thème un peu bastringue composé par Julian Oliver Mazzariello ( Julian’s vision), histoire de maintenir la flamme. Avec eux c’est sûr, elle n’est franchement pas prête de s’éteindre. Jean-marc Gelin