Cristal 2008
Swing et volupté, précision et ingéniosité, beauté des timbres et des couleurs, ça pétarade, ça éclate de partout et ça nous éblouit. C’est à un véritable feu d’artifice que le pianiste et compositeur Hervé Sellin, entouré de son tentet, nous convie à travers Marciac New-York Express. Sellin, qui avait mis de côté sa carrière de leader au profit de l’enseignement (au CNSM de Paris) et de l’accompagnement (notamment sur le projet Piazzolla Forever de Richard Galliano) revient en force avec, ce que l’on peut déjà considérer comme l’un des disques de jazz les plus marquants de l’année. C’est en 2002 que l’idée de ce projet a commencé à germer, suite à une commande du festival de Marciac qui souhaitait une suite orchestrale célébrant leur 25ème anniversaire. Le tentet a été créé pour l’occasion et sept morceaux d’inspiration gersoise ont vu le jour pour la première fois à Marciac 2002, dont le très subtil Entre Boués, Laüs et Arros et le swinguant Bouncing with JIM (JIM étant les initiales de Jazz In Marciac). Wynton Marsalis, présent à ce concert et fort impressionné par la qualité de la musique, décide d’inviter Sellin et son groupe à New-York pour une série de concert l’année suivante au Jazz Lincoln Center, où trois morceaux supplémentaires (à l’ambiance urbaine et New-yorkaise) ont complété le programme. Il aura fallut attendre cinq ans pour reconstituer le tentet, affiner les arrangements et pouvoir enregistrer ces deux suites orchestrales. Le résultat est largement à la hauteur de l’attente suscitée et ce groupe nous émerveille à chaque instant par la beauté des compositions, l’alliage savant des arrangements et l’originalité de son fonctionnement. On est particulièrement séduit par les rôles tenus par la guitare (Michael Felberbaum) et le vibraphone (Stéphan Caracci), créant un espace de liberté passionnant entre les soufflants et la section rythmique. Ainsi que par les fonctions multi-instrumentistes des trois saxophonistes (Sylvain Beuf, Stéphane Chausse et Stéphane Guillaume), qui permettent à Sellin d’obtenir tout un éventail de couleurs et de timbres boisés et harmonieux (flûtes, clarinettes, saxophones sopranos, altos et ténors). N’oublions pas de citer l’incroyable et talentueuse énergie déployée par le trompettiste Claude Egéa et le tromboniste Gueorgui Kornazov (très en verve tous les deux sur le morceau phare qui célèbre les 25 ans de Marciac : Anniversary). Enfin, un mini big-band comme cela, mérite une section rythmique de grande envergure et l’on ne pouvait rêver mieux que le batteur Karl Jannuska (véritable locomotive de l’orchestre) et le contrebassiste Bruno Rousselet à l’évidente efficacité. Le festival Jazz à la Villette 2008 avait bien raison de nous le préciser : JAZZ IS NOT DEAD et avec le tentet d’Hervé Sellin, on peut même dire qu’il pète la forme !
Lionel Eskenazi