JJJJ ALFIO ORIGLIO: “Ascendances”
Cristal 2006

Voila un disque original, et qui ne renie pas ses origines latines… On est assez loin de la formule canonique piano-contrebasse-batterie, puisque l’on trouve une basse électrique, à la fois discrète et raffinée, celle de Laurent Vernerey, et Xavier Sanchez aux percussions, notamment au cajon.
Les percussions forment un écrin chaloupé aux compositions d’Alfio Origlio, dont la principale qualité est d’avoir un jeu romantique, au toucher remarquable, un phrasé subtil, non dénué de lyrisme et de punch si nécessaire. Alfio Origlio ne joue pas simplement du piano, il en joue, s’amuse avec, le fait briller, virevolter, ou au contraire l’étouffe parfois d’une main moqueuse sur les cordes (palm mute disent les guitaristes), bref il l’explore comme on partirait en voyage… On note surtout une réelle attention portée à la mélodie, à la respiration, la longueur des notes, qui donne à cet album une sorte de profondeur très appréciable. Et l’on comprend mieux dès lors le titre de l’album : « Ascendances »… Peut-être est-il question de nous élever un peu… La photo de la pochette incite il est vrai déjà à la rêverie…
Ainsi le titre « Alex la glisse » est-il une formidable ballade en duo, avec la contrebasse cette fois, et quelques nappes de synthé très discrètement ajoutées… on est ailleurs !
L’on retrouve juste après la chanteuse brésilienne Marcia Maria, dont on apprécie beaucoup la voix cristalline et caressante, donnant à ce « Bejo no final » un goût certain de nostalgie…
Il est toujours question de latinité – méditerranéenne cette fois - dans la reprise de « Tres Notas », composition enjouée du grand guitariste flamenco Vicente Amigo. Il me semble qu’on est dans un registre légèrement différent de celui du maître de Cordoba. Le ‘duende’ bien que présent n’est pas fougueux, l’on ressent ici comme dans tout l’album une sorte de secrète retenue… Après tout, au piano, il est bien normal d’obtenir d’autres climats… Toujours dans un registre flamenquiste, la superbe danseuse Sharon Sultan y va des ‘tacones’ sur « La blonde des rivoires ». Sorte de miniature légèrement inquiétante et sombre, cette plage semble vouloir nous questionner…
Alfio Origlio a un jeu et une approche bien personnels, il serait malvenu de le lui reprocher. Il aime semble-t-il promener son auditeur à travers maints paysages aux atmosphères contrastées, toujours sincères et élégantes. De part sa richesse émotionnelle, écouter ce disque donne envie de le passer en boucle et puis sûrement de voir son auteur en concert…
Jean-Denis Gil