Des retrouvailles (très attendues) avec un trio d'une vivacité presque effervescente. Un trio qui nous avait déjà tourneboulé avec un disque enregistré cinq ans plus tôt (chronique en suivant ce lien). La pulsation, irrépressible, ne produit nulle frénésie ostentatoire, aucun effet surjoué, aucune expressivité feinte : rien qu'un engagement musical, de corps et d'esprit, qui nous entraîne vers une folle énergie, une créativité débridée qui s'insère dans les lois de cette musique pour mieux les déjouer. Et ce mode de fonctionnement, musical et esthétique, vaut pour chacun des trois membres du trio. On part d'un thème de jazz, cursif comme un chorus sur un standard up tempo. Puis, d'une plage à l'autre, la transgression s'installe, la liberté tend à prévaloir sans qu'il s'agisse d'un déni de l'idiome originel, mais plutôt de la sublimation d'un langage. C'est chaud comme un concert de Sonny Rollins, libre comme une aventure de free jazz. Vient une ballade, à la clarinette alto, lyrique en diable, puis la liberté gagne à nouveau, jusqu'au solo de batterie conclusif. Un pur régal.
Retour au disque d'un duo qui se pratique de longtemps (un premier disque, enregistré en 2013, a paru en 2020 : chronique en suivant ce lien). Le répertoire est différent de ce précédent CD, mais on y retrouve des bribes de thèmes joués dans de récents concerts. Et toujours cette sensation d'évidence, de spontanéité, de connivence immédiate ; c'est un concentré d'intelligence musicale, indissociable d'un engagement de tout le corps dans la musique pour l'un comme pour l'autre. Parfois le thème surgit d'un unisson très précis, trace d'une composition soigneusement élaborée. Parfois au contraire c'est un son, un timbre, une impulsion, un accord, un trait ou un phrase chargée d'expressivité qui vont donner le signal d'une déambulation si fluide qu'elle paraît totalement concertée, alors qu'elle résulte d'une invention immédiate par une communication quasi télépathique entre les deux musiciens. Les lignes, qu'elles soient écrites ou improvisées, sont d'une liberté fascinante, échappant quand ça leur chante à l'univers tonal, et se promenant aussi parfois dans ces évidences mélodiques familières des musiques les plus populaires. Ce paysage sonore, qui est en même temps une œuvre musicale à part entière, semble surgir par magie. C'est frappant dès le premier thème, The Beekeeper, de la plume du tromboniste, amené en introduction par une escapade assez vertigineuse du guitariste. Le titre suivant, Des états lumineux, signé Marc Ducret, paraît procéder d'une autre démarche. En fait c'est le même processus qui est en jeu : écoute, action, interaction. Et ce jeu se poursuit, évolue, de plage en plage, procédant toujours, semble-t-il, de son alchimie fondatrice. Fascinant, de bout en bout.
On retrouve le contrebassiste Thomas FONNESBAEK cette fois en trio, celui du pianiste danois THOMAS CLAUSEN, un des musiciens les plus reconnus dans son pays; s’il n’est plus à présenter dans le royaume nordique, précisons pour le public français que ce pianiste qui a expérimenté tous les genres, vécu toutes les formules, du big band à la musique de chambre, sans oublier les choeurs et la comédie musicale, aime passionnément les trios (un premier remarquable avec Henning Orsted Petersen et Aage Tangaard dans les années 80). Il en est à son quatrième et ce, depuis 2006, quand il fit appel à Thomas Fonnesbaek et au batteur Karsten Bagge pour un premier album consacré aux standards, dont le titre suffisamment explicite est Back to Basis. Il revient à ce répertoire de valeurs sûres en 2021 avec Back to Basis 2, enregistré pendant le confinement, sans public dans les studios MillFactory, à Copenhagen, dans les conditions d’un concert sans public mais avec un soin particulier apporté au son. Si ce très bel album n’est en aucun cas révolutionnaire, le jazz “classique” que l’on entend est de la plus belle facture. Du jazz dont la spontanéité (chaque piste est une première prise ) est captée sur un grand piano Steinway D et l’on entend chaque note chanter.
Le résultat est éblouissant : plus d’une heure de musique élégante, qui revisite avec intelligence ces standards. Rien de plus difficile que de reprendre ces thèmes éternels, constitutifs de cette musique, avec humilité, en oubliant les versions majeures déjà enregistrées qui ont sculpté notre oreille et fait notre apprentissage?. Non seulement ça sonne avec ce trio mais ça swingue, les trois complices réalisant la synthèse de diverses influences. Le pianiste aime chanter et cela se sent : il a les paroles dans l’oreille et se sert de cette connaissance pour donner du sens à son interprétation. On entend aussi bien Debussy qu’Ellington sous ses doigts et bien évidemment Bill Evans. Quand on aime ce pianiste, comment ne pa être sensible aux versions délicates de Thomas Clausen qui a retenu la leçon du maître et sait en un ressassement travaillé et spontané, diriger l’improvisation du trio. Il laisse d’ailleurs à son contrebassiste toute liberté. Et si on avait apprécié les qualités de ses arrangements avec la chanteuse Sinne EEG dans Staying in touch, toujours sur le label classieux Stunt Records, on écoutera avec intérêt sa façon de faire sonner sa contrebasse.
Un trio équilibré et subtil qui laisse de l’espace dans l’interprétation de ces thèmes chéris qui débutent par l’impeccable “Just one of these things” du grand Irving Berlin. Comment ne pas être sensible aux notes de pochette qui détaillent les commentaires précis et inspirants du pianiste? Sa version de base est celle de Sinatra, la voix toujours en majesté, la façon de sculpter les mots et d’étirer le temps. Il semble que Thomas Clausen ait tout compris de l’art du trio en piano jazz et des standards. Et si on apprécie sa version “latine” de “Nature Boy”, on est attaché au merveilleux thème mélancolique de Bronislaw Kaper, grand compositeur de musiques de films hollywoodiens, créé pour ce mélo de George Cukor assez méconnu A life of her own, de 1950 avec Lana Turner et Ray Milland. Il en fait un blues, joue beaucoup de la main gauche et change les couleurs de la partie de contrebasse. Ou comment s’adapter merveilleusement à une musique quand on en a saisi le sens.
On retrouve avec plaisir le couple formé par la chanteuse danoise Sinne EEG et le contrebassiste Thomas FONNESBAEK depuis leur premier album en 2015 : cette configuration piano/contrebasse, plus originale que celle formée par piano/voix, réduite à l’essentiel, fonctionne très bien. On pense au duo italien de Musica Nuda (Petra Magoni et Ferruccio Spinetti) qui opérait plus dans le registre de la pop et de la variété, mais le répertoire des Danois est éclectique : ils reprennent avec goût des standards éternels de Cole Porter et Irving Berlin, le “Take Five” de Brubeck, “Round Midnight”, ils n’hésitent pas donner leur version épurée de “The long and Winding road” des Beatles ni “The Dry cleaner from Des Moines de Joni Mitchell et Mingus, sans oublier leurs propres compositions, des originaux du contrebassiste ou de la chanteuse “Spring Waltz” et “Streets of Berlin”. On sent bien que le plaisir de chanter de belles mélodies les anime tous deux; ils ne rechignent pas un certain luxe, en faisant appelà un quatuor à cordes pour étoffer trois des onze titres de l’album.
Leur entente est plus que cordiale, ce format exigeant un accord parfait, le résultat produit une grande liberté. La chanteuse danoise est devenue une star: la “sirène” de Copenhagen met dans son interprétation un naturel assez remarquable : elle chante sans forcer sa voix de velours, avec un bel ambitus, une aisance certaine pour distiller des effluves pop ou rester dans un jazz intimiste : un timbre chaud et rond, une énonciation parfaite, un swing qui ne trompe pas, une aisance dans le scat et un certain goût pour oser reprendre à sa façon sans imiter, même si elle a écouté les divas du jazz vocal, notamment Sarah Vaughan (“How deep is the ocean?”). Ainsi “Just one of these things” de Cole Porter est pris à un tempo ultra-rapide, s’écartant des versions sculptées, étirées de Sinatra ou Billie Holiday. Son complice, des plus fiables, lui sert un accompagnement précis etprécieux, il est pour beaucoup dans le charme de cet album aux nuances délicates. Staying in touch leur a réussi, qu’ils continuent leur collaboration est tout ce qu’on leur souhaite.
Rogue Art est décidément un label irremplaçable, en cela qu'il ouvre son catalogue à des propositions artistiques d'une radicale singularité, à l'écart des courants dominants, mais aussi de chapelles parfois recluses dans une exclusive un brin sectaire.
STÉPHANE PAYEN, INGRID LAUBROCK, CHRIS TORDINI, TOM RAINEY «All Set»
Stéphane Payen (saxophone alto droit), Ingrid Laubrock (saxophone ténor), Chris Tordini (contrebasse), Tom Rainey (batterie)
La publication de ce disque marque l'aboutissement d'une œuvre qui avait vu le jour en 2019, avec une série de concerts (Paris, Lille, Strasbourg, Avignon....), et fut enregistrée en fin de tournée. Une œuvre inspirée par All Set, composition de Milton Babbitt créée en 1957 au très innovant festival de Brandeis University (festival fondé par Leonard Bernstein en 1952) sous la houlette de George Russell et Günther Schuller, avec notamment Bill evans au piano. L'instrumentation est différente, ce n'est pas un arrangement de la musique de Milton Babbitt mais une interprétation de sa démarche, laquelle était empreinte d'une liberté tonale qui, en 1957, n'était pas encore le quotidien du jazz. Des compositions alternées de Stéphane Payen et Ingrid Laubrock, et une formidable liberté musicale dans un cadre balisé par un puissant désir d'ailleurs musical, font de cette œuvre, et de ce disque, une proposition esthétique tournée vers le futur, déjà advenu.
Plus de vingt après leur rencontre en trio avec Rob Brown («Magnetism», 1999), William Parker et Matthew Shipp se réunissent pour ce duo qui parcourt toutes les facettes du jazz, dans ses sources les plus ardentes, comme dans ses aventures les plus folles. Le décollage se fait en douceur, mais déjà dans des lignes tendues, mélodiquement comme rythmiquement se font jour. Le couleur est clairement annoncée, celle de l'aventure et de la liberté. La musique coule de source, comme un chemin qui serait à notre oreille presque naturel, cohérent jusque dans ses surprises et se détours. Plus que vivant, vital, animé de cette énergie qui serait le sel de notre humanité.
Cinq ans après un concert à la Judson Church de New York pour le Vision Festival, et le 33 tours «An Air of Unreality» (RogueArt-0073), le trio s'était retrouvé avant le premier confinement pour des concerts, à Montreuil aux Instants Chavirés, puis à Paris au 19 rue Paul Fort, et enfin pour une séance d'enregistrement au Studio Sextan. La musique est tendue par l'urgence, et progresse par élans successifs, jusqu'à ce que l'un ou l'une des protagonistes lance un trait, un son, presque un souffle bien qu'il n'y ait pas d'instrument à vent. C'est un peu comme Le jardin aux sentiers qui bifurquent de Borges, un labyrinthe infini où l'on se perd avec délices, mais en prenant chaque fois un nouveau cap aussi mystérieux qu'hypothétique. Tout le contraire d'une œuvre close : une œuvre ouverte sur l'infini de ses métamorphoses. Le miracle permanent de l'improvisation, quand elle est pratiquée par des orfèvres.
Thomas Curbillon (chant et guitare), Eric Legnini (piano, Fender Rhodes), Thomas Bramerie (contrebasse), Antoine Paganotti (batterie), Stéphane Belmondo (trompette, bugle), Pierre Bertrand (arrangements, saxophones, flûte), Stéphane Chausse (saxophone alto, clarinette), Michel Feugère (trompette), Philippe Georges (trombone), Daniel Yvinec (réalisation). Studios Libretto et Durango.
Jazz & People / Pias.
Paru le 24 septembre.
Le milieu de la musique -et tout spécialement du jazz- n’a guère de secrets pour Thomas Curbillon que ce soit les maisons de disques, la radio (programmateur à FIP), ou la scène. Mais le guitariste et chanteur ne s’était pas encore aventuré dans la création d’un album. Les choix opérés pour ce premier disque se révèlent audacieux, la langue française comme véhicule et pour la plupart des morceaux retenus des compositions personnelles.
La barre est mise à bonne hauteur. Pour cette ascension, Thomas Curbillon a mobilisé une équipe d’excellence chez les interprètes (Eric Legnini, Thomas Bramerie, Stéphane Belmondo entre autres) sous la houlette d’un maître de l’arrangement, Pierre Bertrand et d’un expert en réalisation, Daniel Yvinec. Du travail soigné, élégant, gorgé de swing et de sensibilité, propre à séduire fans de jazz et amoureux de la chanson française. Certains, parmi les « anciens », y trouveront une filiation avec deux « vedettes » qui mariaient avec bonheur jazz et chanson, Sacha Distel (pour la partie instrumentale) et Henri Salvador (pour l’exercice vocal), notamment dans une reprise de Petite Fleur, énorme tube de Sidney Bechet qui bénéficia des textes d’un orfèvre, Fernand Bonifay (1920-1993).
Pas question de regarder seulement dans le rétroviseur. On apprécie la petite musique personnelle signée par Thomas Curbillon et sa parolière Gaëlle Renard. Avec « Place Ste Opportune », référence au lieu central de la scène jazzistique des Halles, le guitariste-chanteur(de charme) nous offre un album des plus plaisants.
Jean-Louis Lemarchand.
Thomas Curbillon sera en concert de présentation de l’album le 28 octobre au Bal Blomet (75015).et le 8 décembre à Cenon (33) au Rocher de Palmer.
Stéphane Payen (saxophone alto sax, percussions, compositions), Olivier Laisney (trompette), Sylvain Debaisieux (saxophone ténor, Bo Van Der Werf (saxophone baryton), Tam De Villiers (guitare), Jim Hart (vibraphone), Guillaume Ruelland (guitare basse), Vincent Sauve (batterie) Malakoff (France), octobre 2020.
Stéphane Payen poursuit sa route avec cet atelier actif depuis 10 ans, et qui s'est étoffé au fil du temps. La densité musicale et la créativité ne se sont jamais démenties, et la musique se développe, entre vibrante pulsation (constamment animée de tensions rythmiques effervescentes) et inspiration des solistes-partenaires, toujours très bien choisis, et manifestement totalement impliqués dans l'esthétique en œuvre. L'un des petits miracles réside dans cette faculté de combiner la complexité et le lyrisme. Le contraste qui existe entre le flux obsédant de la plupart des plages du volume 4, et le solo de vibraphone conclusif, avec des sons épars et réverbérés qui peuplent progressivement l'espace sonore, dit assez l'étendue du champ esthétique abordé avec une pertinence à hauteur des ambitions affirmées.
Le volume 5, passée la première plage 'clin d'œil', ainsi titrée, replonge dans les vertiges rythmiques, en poussant plus loin le bouchon peut-être, sans se priver de libre déambulations dans l'espace improvisé et/ou expressif. Avec aussi une balade furtive du côté de la musique médiévale, bientôt métamorphosée en musique du 21ème siècle. Décidément Stéphane Payen n'en finira pas de nous étonner. Et de nous réjouir aussi.
Louis Moutin (batterie, composition), Jowee Omicil (saxophones alto, ténor & soprano, clarinette), François Moutin (contrebasse)
Malakoff, 1-4 septembre 2020
Laborie Jazz LJ 59 / Socadisc
Je dois l'avouer, la première fois que j'ai écouté Jowee Omocil sur scène, à l'EuropaJazz Festival du Mans, en 2018, j'ai trouvé que sa prestation comportait beaucoup d'ostentation et pas beaucoup de musique.... Ce disque m'a fait changer radicalement d'avis, et je crois pour longtemps. Leur musique procède d'une sorte de magie, d'un surgissement en apparence spontané qui porte, dès les premières notes, la musique à son plus haut degré. Cela tient sans doute à la personnalité musicale des trois protagonistes, qui aiment à se jeter dans le vide avant de mesurer la profondeur du gouffre. Leur histoire commence par une rencontre fortuite de François Moutin et Jowee Omicil sur un tournage pour une série de Netflix, où ils profitent des pauses pour improviser ensemble. Retrouvailles à Paris chez Louis, le frère de François, et sans préparation la découverte d'une cohésion immédiate. Le disque reflète ce mélange de spontanéité et d'expérience. Ces déjà vieux routiers possèdent au plus haut degré l'art d'avancer sur le fil, sans peur du gouffre qui n'est ici que l'aiguillon de la créativité collective. L'enfance de l'Art en somme, d'un Art que l'on continue d'appeler le jazz, au fil de ses infinies métamorphoses. Chaque titre paraît être le prolongement d'un chorus joué (hier, ou demain si j'en crois Julio Cortázar et son Homme à l'affût), c'est comme une entrée de plain pied dans l'ivresse à la seule vue du flacon, ou simplement de son évocation. Magnifique !!!
Xavier Prévost
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Sur Youtube le récit, par les intéressés, de la genèse de ce trio
Kenny Garrett (saxophone alto, piano, piano électrique, voix), Vernell Brown Jr (piano), Corcoran Holt (contrebasse), Ronald Bruner (batterie) Rudy Bird(percussions)
et aussi Maurice Brown (trompette), Lenny White (caisse claire), Johnny Mercier (claviers), Pedrito Martinez & Dreiser Durruthy (percussions & voix), Dwight Trible, Jean Baylor, Linny Smith, Chris Ashley Anthony & Sheherazade Holman (voix).
Mack Avenue MAC 1180 / Pias
Une sorte de retour aux sources pour ce saxophoniste que Miles Davis fit connaître à la terre entière. Un disque qui parcourt les multiples sources de la musique afro-américaine, sans effet de catalogue, mais avec un sens de l'appropriation et de la singularité qui force le respect. Très beau son d'alto, lignes virevoltantes, très bons arrangements de percussions, et nombreux invités, dont le trop rare Dwight Tribble. Et des hommages aux compagnons de route : Roy Hargrove, Art Blakey, Tony Allen.... Une rythmique d'une souplesse féline qui pousse les feux sur toutes les plages avec une grande finesse. L'esprit du jazz souffle dans ce disque, mais aussi l'atmosphère enfiévrée des églises baptistes, le son des caraïbes, les sortilèges de l'Afrique et, pour une plage, ce jazz d'ambiance qui fit naguère la popularité de Sonny Criss, Donald Byrd ou Ramsey Lewis avant d'envahir les radios du monde entier. Cette concession furtive au smooth jazz n'empêche évidemment pas le CD (aussi double LP) d'être hautement recommandable.
Xavier Prévost
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Kenny Garrett est en tournée française, en quintette : le 10 octobre 2021 à Reims, le 12 à Toulouse et le 22 à Clermont-Ferrand
Umlaut Records UMF R-CD 34-35 / l'autre distribution (double CD)
L'hommage du big band à la pionnière Mary Lou Williams. Mais pas un hommage compassé et formolé : un vrai travail de recherche, effectué par Pierre-Antoine Badaroux et Benjamin Dousteyssier dans les archives recueillies par l'Institute of Jazz Studies de Newark, sur des partitions autographes et parfois inachevées. Des inédits, de multiples versions de son légendaire Mary's Idea (dont un arrangement pour big band de la dernière version, 1947, baptisée Just An Idea), un thème inauguré par l'orchestre d'Andy Kirk (dont elle fut longtemps la pianiste) dans les années 30. Et ses arrangements pour Duke Ellington, qui ne les joua pas tous, et la paya avec parcimonie.... Et aussi des arrangements pour l'orchestre de Cootie Williams. Sans oublier des extraits de sa Zodiac Suite, et trois extraits de son History of Jazz for Wind Symphony, composée pour l'orchestre de Duke University et laissée inachevée. Bref une véritable somme, à inscrire dans les repères patrimoniaux du jazz (on devrait plutôt dire matrimoniaux, en référence au matrimoine, corpus des œuvres conçues par des femmes). Une fois de plus, ce grand orchestre, qui rassemble une encore jeune génération (qui pratique aussi le jazz contemporain et les musiques improvisées les plus hardies), fait preuve d'une insatiable curiosité, et d'un talent à la hauteur de l'enjeu. Bravo !
Xavier Prévost
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Le disque à été enregistré à la Philharmonie de Paris, coproductrice de ce formidable projet. Et l'Umlaut Big Band jouera ce programme à la Philharmonie le 9 octobre 2021 en première partie du Lincoln Center Jazz Orchestra. Et l'Umlaut Big Band jouera ensuite à Brest le 14 octobre pour l'Atlantique Jazz festival
A film by Léa Lanoë, shot in August 2021 at Théâtre de l'Aquarium (Paris) Music from "Mary's Ideas: Umlaut Big Band plays Mary Lou Williams" (Umlaut Records,...