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23 mai 2020 6 23 /05 /mai /2020 22:41

Enzo Carniel (piano, piano préparé, piano électrique, synthétiseur, électronique, enregistrements de terrain, conception sonore), Marc Antoine Perrio (guitare, électronique, conception sonore), Simon Talleu (contrebasse), Ariel Tessier (batterie)

Meudon, 19-20 septembre 2019

Jazz and People 820001/ Pias

 

Plaisir de retrouver un pianiste-compositeur que j'écoute avec un vif intérêt depuis maintenant 5 ans. Disque étonnant, qualifié ici ou là de concept-album, pour signifier qu'un univers imaginaire trame le projet musical. C'est que le musicien aime à faire émerger la musique dans une sorte de dramaturgie où le souci de la forme va faire advenir la musique. C'était déjà le cas lorsque j'assistais, en 2015, à son récital de fin d'année au Conservatoire National (CNSMD de Paris) chroniqué ici. C'était encore le cas quand, deux ans plus tard, j'écoutais le groupe 'House of Echo' sur la scène du studio 104 de Radio France (compte rendu en suivant ce lien), quelque temps avant la sortie de son disque «Echoïde». Chaque fois un parcours s'installe, un déroulement s'impose, un récit se déploie, mais c'est toujours la musique qui parle. Le récit musical émerge d'un paysage sonore, fait de sons concrets et de traitements électroniques, d'où va sourdre par vagues successives de la «musique de musicien, entièrement faite à la main», comme aimait à le dire l'Ami Jacques Mahieux. C'est à la fois prospectif, avec une tendance à l'abstraction lyrique, et simultanément totalement sensoriel, et d'une certaine manière sensuel. Le recours à la technologie n'empêche nullement cette musique, et son architecture générale, de révéler un caractère profondément organique. Bref c'est intrigant, passionnant, et pour tout dire totalement abouti.

Xavier Prévost

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Un avant-ouïr sur Youtube

 

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20 mai 2020 3 20 /05 /mai /2020 17:53

Robin Finker (saxophone ténor, clarinette), Benoît Delbecq (piano, synthétiseur basse, boîte à rythmes), Sylvain Darrifourcq (batterie, cithare électrique)

Budapest, 30 juillet-1er août 2018

BMC Records CD 272 / Socadisc

 

Un projet -une musique- d'une totale singularité. Ce qui frappe, c'est la forte identité de chacun des membres du groupe. Ils opèrent habituellement dans des univers assez différents, et jouent ici «sans que leur identité initiale respective se trouve dissoute, l'autonomie de chacun étant de la sorte préservée, aucune hiérarchie ne s'instaurant au cours de leur relation» comme l'écrit très justement Ludovic Florin dans le livret du CD. J'entends dans ce disque comme une déconstruction / reconstruction permanente. La métaphore du 'gué profond' (deep ford), et le consentement qui nous est donné par le titre de l'album pour traverser à cet endroit précis, tout cela nous inviterait à suivre un chemin, en (très) bonne compagnie. Lecture légitime, pertinente, efficiente. Mais mon imagination vagabonde m'entraîne ailleurs, à l'écoute du labeur de cette édification. L'Art est aussi un Artisanat, l'artiste doit se colleter avec la matière sonore. Je pense à Monk en solo, au combat que se livrent à chaque mesure la pensée et le geste, matière et mémoire.... Mon imagination m'entraîne encore ailleurs, et me rappelle que le latin classique appelait transgressio  le franchissement, la traversée, que le latin ecclésial (Saint Ambroise, évêque du quatrième siècle) s'empressa de transformer en lui donnant le sens de faute morale.... Heureusement pour nous l'Art et les Artistes font du franchissement des lignes une magie prospective, et aussi une éthique, qui fonde une esthétique. Les règles sont ici transgressées, avec une créativité plus que féconde : tension des rythmes, jeux de sons et d'intervalles, élaboration de formes aussitôt remises en jeu par l'interaction du groupe. Car c'est ici un artisanat collectif, chaque son, chaque note, chaque nuance apporte sa cohérence à ce tout fragmenté, en déséquilibre permanent vers un horizon où la certitude et le doute seraient un seul mot. Le résultat nous remue, nous remet en question. L'ordre esthétique, rythmique, harmonique, est certes source de plaisir. Mais dans la tension, dans le saut de l'ange -surtout quand cet ange est un peu démon-, réside la jouissance esthétique. Et oui, ce disque est intensément jouissif, et c'est une pure merveille....

Xavier Prévost

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Six mois environ avant d'enregistrer le disque, le trio jouait à l'Opus Jazz Club de Budapest. Un extrait dans la vidéo ci-dessous

https://www.youtube.com/watch?v=DRm2Skhijkk 

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18 mai 2020 1 18 /05 /mai /2020 17:28

Stefan Orins (piano)

Attiches (Nord), 12-14 mars 2019

Circum-Disc microcidi 016 / https://www.circum-disc.com/stefan-orins-summers-hopes/ & Les Allumés du Jazz

 

Grand plaisir de retrouver le pianiste Stefan Orins, cet homme doublement du Nord (la Suède, dont sa famille est originaire ; le département du Nord, où il est né, et où il vit, dans les plaines du Pévèle). Il est cette fois en solo, dans une œuvre d'intériorité sinueuse qui nous entraîne loin de notre quotidien et de nos références esthétiques dominantes. Douze improvisations, inspirées par une peinture de Patricia Jeanne Delmotte, un artiste avec laquelle il entretient un dialogue musique/peinture depuis plus de dix ans. La toile est reproduite sur la jaquette du CD. Le disque est une libre déambulation du pianiste, conduite par les impressions ressenties à la contemplation du tableau. Tous les langages musicaux et pianistiques sont convoqués (de Paul Bley à Cecil Taylor en passant par Debussy ou Scriabine, et bien des musiques d'ailleurs, si l'on veut hasarder des références forcément inadéquates....), dans une absolue liberté, débridée et cependant attentive à chaque allusion, à chaque rebond. Une très belle expérience de musique libre, ou plutôt de musique élaborée en toute liberté. C'est un véritable expérience musicale et sensorielle dans laquelle il faut s'immerger : le voyage vaut le détour, les émotions et plaisirs esthétiques sont au fil du chemin.

Xavier Prévost

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https://stefanorins.jimdofree.com/

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16 mai 2020 6 16 /05 /mai /2020 10:42
REMI GAUDILLAT SEXTET                 ELECTRIC EXTENSION

REMI GAUDILLAT SEXTET

 

ELECTRIC EXTENSION

Premier Double Album

Label Z PRODUCTION www.zproduction.org

INOUÏE DISTRIBUTION

www.remigaudillat.com

https://www.remigaudillat.com/sextet

https://youtu.be/iuqf-XBNFMU

 

 

Une séduction immédiate, envoûtante et durable dès le premier thème qui ouvre justement l’album “Envol”. A mesure qu’enfle le volume sonore, on entre dans les terres d’ un jazz électrifié, proche du rock, d’un rock progressif même ( la pochette magnifique évoque ces paysages lunaires, irréels des maquettes de Roger Dean qui illustra les albums de YES). Rien de très surprenant puisque le trompettiste/bugliste leader Rémi Gaudillat s’est interessé à Syd Barret dans I-overdrive trio et sur une commande de Daniel Yvinek s’est attaqué aux chansons de la popstar David Bowie avec Possible(s) quartet.

Ils sont six dont 4 soufflants aux couleurs orchestrales et timbres précieux qui pratiquent un jazz chambré à l’alambic en“improfreesateurs”, rompus à la pratique de l’écriture contrapuntique et à l’improvisation. Le souhait de ce quartet de souffleurs atypique (sans saxophone) (deux trompette/bugle, une clarinette basse et un trombone ) est de sonner comme un orchestre de chambre, non à cordes mais à vent. Une fanfare de chambre poétique... en somme! Une magnifique alliance de souffles croisés qui survolent l’ensemble soutenu par une solide et puissante rythmique de guitares enflammées ( superbe solo sur “electric extension”, titre éponyme de l’album ).

Le jeu du sextet ainsi formé est bluffant, réunissant émotion, intensité et fluidité.Une inaltérable énergie, vite communicative, court sur les 8 titres amplement développés pour nous embarquer dans le voyage intérieur du leader Rémi Gaudillat qui a composé et écrit les arrangements avec chorus, soli foisonnants sans oublier des impros travaillées.

Ça déménage en de furieuses montées dansantes, mais propose aussi un répit tout provisoire quand survient  une clarinette basse qui exhale un souffle mystique sur “du clair au sombre” ( encore des couleurs et des nuances comme sur la palette d’un peintre), d’ une force insolite à un chant mélancolique.

S’ils font toujours preuve de la même virtuosité formelle, l’énergie créatrice de cette musique se laisse transformer en une voluptueuse dynamique qui ouvre tout un champ de possibles. Le temps est comme suspendu dans certaines formes vives, ouvertes, avec des ambiances qui évoquent même le chant des baleines, comme si la musique était en connexion avec la nature et l’environnement!

Vers le derniers tiers de l’album, interviennent fort habilement des invités, les clarinettes élégantes et virevoltantes de Louis Sclavis sur “les illusions" magnifiques” et sur le final “derrière la buée” des cordes, celles du quatuor Seigle qui déposent leur plainte, une élégie douce que bercerait la mer qui se retire.

Voilà bien un album magnifique, une musique fervente assez idéale pour ces temps sombres et agités du (dé)confinement!

Sophie CHAMBON

 

 

 

 

 

 

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9 mai 2020 6 09 /05 /mai /2020 19:33

VISTA CHINESA. Baptiste HERBIN (saxophones alto et ténor), Eduardo FARIAS (piano), Jefferson LESCOWICH (contrebasse), Xande FIGUEIREDO (batterie).
Invités : Ed MOTTA et Thais MOTTA (chant), Idriss BOUDRIOUA (saxophone alto), Ademir JUNIOR (saxophone ténor), Rafael ROCHA (trombone), Aquiles MORAES (trompette, Bugle), Emile SAUBOLE (batterie).
Studio Companhia dos Tecnicos, Rio, Juin 2019. Space Time Records/Socadisc, 2020.

 

 

Le Brésil est devenu la seconde patrie de Baptiste Herbin. Le saxophoniste prévoyait -c’était avant la crise sanitaire- d’y effectuer une tournée estivale. La présentation de son dernier album dans l’état-continent devrait attendre.

Vista Chinesa, sorti le 7 mai, est en effet tout entier dédié au Brésil que le lauréat 2018 du Prix Django Reinhardt de l’Académie du Jazz a découvert en 2015 et qu’il fréquente régulièrement depuis.
Venu à Brasilia pour un festival de saxophonistes, le jeune trentenaire aura été frappé par la diversité de la musique brésilienne. Même si la couverture de Vista Chinesa présente la célébrissime baie de Rio, le répertoire proposé ne constitue pas une nouvelle évocation de la bossa nova qui fit le succès planétaire d’un autre saxophoniste, Stan Getz. Baptiste offre un panorama des musiques du Brésil, bossa bien sûr mais aussi samba, frevo, choro.

 

Passionné de ce Brésil pluriel, dont il parle la langue, le saxophoniste a d’ailleurs signé la quasi-totalité des titres qui ont été enregistrés avec des musiciens brésiliens -instrumentistes et vocalistes- dans un studio de Rio en juin dernier.
 Compositeur dès avant son passage au Conservatoire, Baptiste Herbin entend ainsi dans ce quatrième disque sous son nom faire découvrir la diversité de la musique brésilienne sans pour autant abandonner sa personnalité. « Il faut  rester soi-même », confie l’altiste qui voue grande admiration à Julian « Cannonball » Adderley.

 

C’est donc un album singulier qui nous est proposé avec ses accents cuivrés (deux saxophonistes, un tromboniste et un trompettiste viennent prêter main forte au leader) et ses envolées chaleureuses, au carrefour du hard-bop et des musiques  brésiliennes. Le cocktail pourra surprendre certains puristes mais les amoureux de métissage seront aux anges. Baptiste s’y montre à son aise comme jamais, secondé magistralement par le pianiste brésilien Eduardo Ferias déjà apprécié dans son précédent album* Il lui tarde maintenant de présenter ce dernier album au public parisien à la rentrée (les 9 et 10 Octobre au Sunside).

 

Jean-Louis Lemarchand.

 


*Dreams and Connections. Space Time Records.2017.

 

©photo Anne Bied.
 

 

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3 mai 2020 7 03 /05 /mai /2020 21:59

David Patrois (vibraphone, balafon), Pierre Marcault (percussions), Boris Blanchet (saxophones ténor & soprano), Blaise Chevallier (contrebasse, guitare basse), Philippe Gleizes (batterie)

Les Lilas (Seine-Saint-Denis), 25-27 septembre 2019

Arts et Spectacles ASCD 190902 / Socadisc

 

Les retrouvailles de David Patrois et Pierre Marcault, presque 30 ans après la création, au festival Présences de Radio France en 1998, de Sur le Fil, une pièce pour vibraphone et percussions incluse dans un concert intitulé 'Lames en Transit', diffusé en direct sur France Musique, où les autres vibraphonistes-compositeurs invités étaient Philippe Macé et Franck Tortiller. David Patrois et Pierre Marcault se retrouvèrent ensuite en trio avec Jean-Jacques Avenel (disque «Another Trio»). Les voici à nouveau réunis pour un quintette, avec les incendiaires notoires que sont Boris Blanchet et Philippe Gleizes, soutenus par les basses de Blaise Chevallier, qui succède à Géraud Portal, bassiste des premiers moments du groupe. Le disque a été enregistré au Triton, où avait déjà joué le groupe dans sa configuration originelle. La musique procède des sources qui ont nourri ces musiciens, entre l'Afrique de toujours et les énergies nouvelles du jazz des années 60-70. Dans la vidéo de présentation du quintette, David Patrois revendique comme vibration inspirante le Miles des années 70, Coltrane, et aussi les début de Weather Report. En contrepoint Pierre Marcault insiste à juste raison sur le fait que l'identité du groupe réside aussi dans ses membres. Il en résulte une sorte de tension poétique entre ces sources multiples, tension attisée par la personnalité incandescente de Boris Blanchet et le tandem batterie-percussions où le rôle de Philippe Gleizes est essentiel. Entre un balafon chromatique, qui combine le son des sources avec le confort moderne de la musique occidentale, et un vibraphone dont David Patrois est l'un des Maîtres sous nos latitudes, la combinaison est idéale pour dialoguer avec le couple percussif. Quant à Blaise Chevallier, que ce soit à la contrebasse ou à la guitare basse, il est un tison de l'effervescence autant que l'arbitre des élégances. La première plage commence en impressions d'Afrique, entre balafon et percussions, pour s'engager bien vite dans les harmonies du jazz. Mais le son percussif reprend ses droits, et le dialogue va se poursuivre entre les deux pôles qui inspirent cette musique. Sur tempo lent ensuite, le saxophone va nous dire les sortilèges sonores du Continent Noir, en dialogue avec les tambours. Et là encore la musique va prendre son essor vers d'autres cieux. Le ballet va se poursuivre au fil des plages entre ces deux mondes. David Patrois signe 9 des 12 tites, et Pierre Marcault a composé les trois autres, dont le thème conclusif, Famoudou, comme un clin d'œil à Don Moye, percussionniste de l'Art Ensemble of Chicago (en fait une évocation de Famoudou Konaté, Maître percussionniste Guinéen auquel Don Moye rendait hommage en reprenant son nom). L'écoute et la connivence musicale sont au rendez-vous, et le trop rare Boris Blanchet nous fait regretter, une fois de plus, de ne pas l'entendre plus souvent. Cette occasion est trop belle, et ce disque est en tout point une réussite, sur le plan du projet comme sur celui de sa réalisation ; sur le plan de la conception musicale comme sur celui des solistes.

Xavier Prévost

 

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29 avril 2020 3 29 /04 /avril /2020 16:50

Gaëtan Nicot (piano, composition), Pierrick Menuau (saxophone ténor), Sébastien Boisseau (contrebasse), Arnaud Lechantre (batterie)

invité sur une plage : Geoffroy Tamisier (trompette)

Sarzeau (Morbihan), 9-11 janvier 2019

Tinker Label 0119001 / Socadisc

 

Le pianiste nantais, aux multiples facettes, signe avec ce quartette une musique qui annonce la couleur et porte sa marque. Entouré de quelques-unes des plus fines gâchettes du Grand Ouest, il nous offre un disque finement pensé, dans ses compositions originales, majoritaires, comme dans les deux reprises : Ma plus belle histoire d'amour, de Barbara, et le très rare Moon Dreams, composé par celui qui était le pianiste de Glenn Miller à la fin des années 30, mais surtout immortalisé par Gil Evans pour Miles Davis dans les séances que l'on désignera plus tard sous le titre de «Birth of the Cool». Le traitement de ce thème par le quartette dans la plage conclusive du CD mérite une attention toute particulière, car il éclaire l'approche globale de la musique par le groupe. Traiter le motif avec la liberté d'expression propre au jazz, sans se laisser déborder par l'emphase mélodique du thème, et en jouant à fond l'interaction, la réactivté, et aussi quand il le faut la mise en suspens. Approche tout aussi personnelle pour la chanson de Barbara, déconstruite avec amour, en duo dans l'intro, pour magnifier, si c'est possible, sa force d'expression. Et puis laisser le jazz s'emparer doucement de ce standard qui paraît soudain une terre inexplorée.

Aucune malice de ma part dans le fait d'aborder ainsi le disque dont l'essentiel réside dans les compositions du pianiste leader. Cela permet, tout au contraire, de situer tout à la fois l'enjeu en territoire jazzistique, et d'ouvrir l'espace à l'expression individuelle dans le collectif, ressort essentiel d'un tel groupe.

L'intro rhapsodique du thème titre annonce la couleur, mais en trompe-l'œil : on entre en fait, après quelques mesures, dans le vif de l'interaction en quartette. Il y a là autant de retenue que d'expressivité, comme une revendication esthétique. Dans la deuxième plage, Koo-Cool, en quintette avec Geoffroy Tamisier, la composition et l'arrangement me replongent dans le souvenir des années 50, lorsque Gigi Gryce mêlait avec grand talent la pulsation de la Côte Est et les nuances qui faisaient mouche à l'Ouest. J'ai éprouvé en écoutant cette plage un genre de frisson qui m'avait déserté de longtemps. Et tout le disque est à l'aune de ce savant dosage, délicatesse et flamme, parole singulière et sens collectif constamment rejoué. Ici va souffler une légère brise latine, ailleurs on laisse donner le goût des ruptures et des surprises, mais en somme, de bout en bout, c'est une vraie réussite, et un vraiment bon groupe.

Xavier Prévost

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Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?2&v=_JeVf_Bn0qo

https://www.youtube.com/watch?v=h5g8eo7r1rc

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28 avril 2020 2 28 /04 /avril /2020 11:54

Philip Catherine (guitare), Paulo Morello (guitare), Sven Faller (basse). Studio Seven. Juillet 2018. Enja.

 

Quand il se présente, Philip Catherine manque rarement de préciser, Philip, à l’anglaise, et Catherine avec un C. Histoire d’éviter la confusion avec le chanteur fantasque (et fantastique) Philippe Katerine. Le tout dans un sourire.

 

Il est comme cela, le guitariste belge né à Londres pendant la seconde guerre mondiale. Toujours l’air de prendre la vie du bon côté, de plaisanter. Mais quand il joue, finie la plaisanterie. C’est du sérieux, et du léger tout à la fois. Il a beau avoir partagé la scène avec Chet Baker, compter des dizaines de disques à son actif, Philip Catherine conserve cet allant juvénile qui n’en finit pas de séduire.  Il n’a pas besoin de faire ses preuves et d’épater la galerie. Il joue facilement quelque soit le répertoire.

Retrouvé à l’occasion d’un rangement dans ma pile de disques en cette période de retraite forcée, ‘Manoir de mes rêves’, en constitue une (plus que) parfaite illustration.  En trio à cordes, avec les jazzmen allemands Paulo Morello (guitare) et Sven Faller (basse), Philip Catherine se plaît à dérouler le fil de ses passions musicales dans un élégant désordre.

 


Après Django, l’une de ses idoles, honoré par l’une de ses compositions fétiches reprise comme titre de l’album, voici ‘Jardin d’hiver’ d’Eddy Louiss, ‘Recado’, air brésilien découvert lors de son travail avec Barney Wilen, et plusieurs chansons du patrimoine français signées Brassens (Bancs Publics), Michel Berger (Les Uns contre les autres), Henri Salvador (L’ombrelle et le parapluie, Pas encore). Un voyage musical qui donne à rêver et vient rappeler, si besoin en était, la force tranquille de Philip Catherine.

 

Jean-Louis Lemarchand.

 

©photo Jacky Lepage (www.jackylepage.com)
 

 

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26 avril 2020 7 26 /04 /avril /2020 22:10

Alain Blesing (guitare), Bruno Tocanne (batterie)

Montpellier, 5-6 novembre 2019

Le Petit Label PL 059/ http://www.instantmusics.com/impermanence.html

 

Ce qui frappe, dès la première plage, c'est que l'on a affaire à des Artisans des musiques libres. Des Artisans d'Art, évidemment. Nul souci d'entrer par le fracas avec une bannière bien identifiable qui racolerait les esprits distraits dotés d'oreilles qui ne le seraient pas moins (distraites!). Alors on s'immerge, en confiance, et je dois dire que le voyage vaut le détour. Montée progressive des timbres et des sensations qu'ils provoquent ; curiosité croissante de l'auditeur qui cherche ses marques mais sent que déjà il va aimer ce qu'il n'a pas encore réussi à décoder (et c'est tant mieux!). Puis c'est un dialogue virulent entre guitare et batterie, comme la liberté des musiques du siècle (le siècle passé....) en engendra quelques-uns. Virulence du dialogue, mais force de l'expression, car c'est de cela aussi qu'il s'agit. Vient ensuite une sorte de cérémonie secrète, où les sons graves des tambours défient les éclats de guitare dans l'aigu. Puis l'on plonge à nouveau dans le mystère des sons d'outre-monde. Soudain l'on s'échappe en mélodie folky vers un ailleurs qui n'aurait pas dit son dernier mot, juste avant une brève énigme sonore qui nous dit que les étiquettes ne sont pas de mise. Et le voyage continue, bien au-delà de ce que ma pauvre tentative descriptive peut suggérer. Il a là du feu, de la passion, de la densité, de la pensée et du ressenti partagé, échangé, bref une forme d'humanité foncièrement musicale. Alors il ne vous reste plus qu'à plonger dans cet univers de sons riches de sens.

Xavier Prévost

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Un extrait sur Bandcamp

https://brunotocanne.bandcamp.com/track/limpermanence-du-doute

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19 avril 2020 7 19 /04 /avril /2020 20:50

SHANG ZIMING QUARTET : « Bridge of soul »
2020
Christophe Monniot (saxs), Dezsö Olàh (p), Peter Olàh (cb), Shang Ziming (dms)

https://backl.ink/140221633

C’est une sorte de hasard qui fait bien les choses. Magnifiquement bien.
Juste un petit message sur Messenger de Christophe Monniot (mon idole de saxophoniste !) m’informant de l’album qu’il vient de publier sous le nom du batteur chinois Shang Ziming qui, je l’avoue humblement m’était jusqu’alors totalement inconnu.
Ne résistant pas à ma passion pour ce saxophoniste je me suis donc empressé d’ouvrir le lien qu’il m’avait envoyé et là ….. le choc mes amis ! Non, je vous jure, le choc !
Depuis quand n’avais-je pas entendu une formation de cette intensité, de cette force ? De ce genre de formation où tout semble aussi naturel qu’exceptionnel. Où ça joue comme jamais.
Quand tout, absolument tout se retrouve pour porter le jazz vers ses sommets !

Shang Ziming et les deux Olàh formaient déjà un trio ensemble, qui a tourné plusieurs fois en Chine. Ils se sont intéressés à Monniot après que ce dernier a enregistré « Density of Standards » sur le label hongrois BMC, sous le lead du père des musiciens tziganes hongrois actuels, Bela Szakcsi Lakatos. Une première rencontre s’est faite sur un répertoire écrit par Dezso Olah début février 2020 au festival de jazz de Budapest. Ces morceaux existant déjà sur le 1er album de Dezso. Dans la foulée le quartet enregistre à Budapest les 26 et 27 février 2020.

C’est un quartet de rêve dont il s’agit ici, mené par l’absolument incroyable batteur chinois, Shang Ziming (qui enseigne par ailleurs dans une grande université du nord de la Chine) et qui regroupe outre notre Monniot national, un pianiste hongrois absolument fabuleux (Dezsö Olah) et un non moins superlatif contre-bassiste Peter Oláh ( de la même nationalité mais sans lien de parenté).
À eux quatre, ils forment un véritable power quartet de très très haute volée digne des plus grandes formations de jazz. Où chacun pris individuellement y excelle tout en donnant force à un collectif hors du commun.
Il faut écouter sur ce bien mal nommé -30° la ligne de basse de Peter Olàh et le drive brûlant de Shang Ziming ( à écouter aussi, surnaturel sur Invisible door – mais d’où sort cet énergumène ? de l’espace assurément !).  Il faut entendre  l'intelligence du jeu du pianiste  Dezso Olàh sur Night in Budapest et encore les enluminures du batteur.
Ecouter aussi cette intelligence collective sur Dream theater emporté par la fougue de Monniot suivi l'apaisement lorsque le rideau tombe ( et toujours et encore ce drumming de folie  de très haute volée )
Et Monniot ! Vous dire encore et encore qu’il s’agit certainement, et selon moi du plus grand saxophoniste de la scène hexagonale. Capable de mettre le feu sur toutes les hanches.
Ecouter où il emmène son soprano sur - 30°. Avec une telle intensité cela devrait fondre vite !
Monniot exprime tout, toute la palette de ce qu'il peut exprimer. On l'entend chanter, s'échapper libre, rugir, caresser, pointer et piquer. Il y a de la fougue et du lyrisme maîtrisé. Grand saxophoniste !
Entre écriture et libres improvisations cet album témoigne avant tout d'une vraie rencontre entre des musiciens qui ont la musique en partage avec un sens du jazz en commun. Hors du commun. Grâce à Monniot nous découvrons ici des jazzmen que nous n'aurions certainement pas écouté sinon.  Non, le monde du jazz ne tourne pas autour des américains et de la France. Il franchit toutes les frontières. Merci de ce rappel.

A tous les programmateurs : quand le déconfinnement sera une réalité,  ne passez pas à côté de cette véritable révélation d’un immense groupe qui devrait mettre le feu sur toutes les scènes où il passera.
Choc absolu !
Jean-marc Gelin

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