Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
31 mars 2019 7 31 /03 /mars /2019 18:06

Shauli Einav (saxophones ténor & soprano), Tim Collins (vibraphone), Andy Hunter (trombone), Yoni Zelnik (contrebasse) Guilhem Flouzat (batterie) ; invité Fayçal Salhi (oud)

Meudon, 25-26 août 2018

Berthold Records 4250647319027 / Differ-Ant

 

À propos de ce disque le texte du livret, signé Evan Haga (ancien rédacteur en chef du magazine états-unien JazzTimes) évoque judicieusement sa parenté avec un courant de la seconde moitié des années 60 au sein du label Blue Note : Eric Dolphy, Andrew Hill, Grachan Moncur III, Bobby Hutcherson.... On pourrait tout aussi légitimement y ajouter Sam Rivers, Tony Williams, certains des Wayne Shorter de la période, et pourquoi pas le tandem Don Cherry-Gato Barbieri, c'est à dire tout un courant qui fait faire un pas de côté (ou un bond en avant ?) au jazz moderne (déjà post-moderne) de l'époque, en un temps où le catalogue accueillait aussi Cecil Taylor et Ornette Coleman. Façon pour nous qui écoutons ce disque de reconnaître une démarche qui, tout en s'inscrivant dans le jazz de stricte obédience, va chercher dans les marges des émotions et des sensations qui rafraîchissaient nos oreilles de l'époque. Et le disque assurément procède de cette esthétique qui, entre consonances et tensions, fluidité mélodique et escarpements inattendus, réjouit l'écoute de ceux pour qui le jazz n'est pas qu'un long fleuve tranquille. Pas révolutionnaire, loin s'en faut, mais habité par une sorte d'urgence plus que sympathique, l'album nous entraîne, consentants, vers une subtile mélancolie où l'intelligence a son mot à dire. Les solistes du groupe ne sont pas pour peu dans la réussite du CD, et la présence sur une plage du joueur de oud algéro-franc-comtois Fayçal Salhi étend encore le champ des possibles. Le saxophoniste israélien de Paris, bien entouré, signe assurément une réussite artistique.

Xavier Prévost

.

Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=f5b5ymmu_UU

.

Shauli Einav jouera le 2 avril 2019 à Paris, au Duc des Lombards, avec Bastien Ballaz, Alexis Valet, Yoni Zelnik & Guilhem Flouzat.

 

Partager cet article
Repost0
25 mars 2019 1 25 /03 /mars /2019 15:37

Sylvain Daniel (guitare basse, effets), Grégoire Galichet (batterie), Matthieu Metzger (saxophone alto, électronique)

Kyoto, avril 2018

Ayler Records AYLCD-160 / http://www.ayler.com/killing-spree-boko-boko-tour.html

 

Enregistré en concert au Club Soto de Kyoto lors d'une tournée japonaise qui passait aussi par Osaka, Hamamatsu et Kishiwada, ce sera l'ultime référence d'Ayler Records qui ne produira plus de nouveautés après une valeureuse contribution aux musiques créatives (mais continuera à commercialiser son catalogue). Le formidable «Lady M» de Marc Ducret sera publié par un autre artisan de la musique vraiment indépendante : le non moins valeureux Philippe Ghielmetti d' [Illusions] (http://www.illusionsmusic.fr). Ce disque-ci est volontairement brut de décoffrage : ambiance soundcheck en courte première plage, et brouhaha d'après concert en plage conclusive. La musique est sans fard : énergique jusqu'à l'extrême, mais non exempte de subtilité, car ses artisans sont des orfèvres. Le site désigne le genre comme 'avant-jazz-metal', ce qui est plutôt bien vu. C'est le second opus du groupe et c'est une tuerie, comme son nom l'indique. Violent, turbulent, doux parfois, raffiné aussi. C'est une plongée dans une musique qui ne s'interdit rien pourvu que l'art musical soit au rendez-vous. Les idées fusent, n'évitent ni collision ni collusion, et c'est tant mieux ! Plongez tête première dans cette expérience de musique vraiment vivante, vous en ressortirez comme d'un bain de jouvence….

Xavier Prévost

Partager cet article
Repost0
24 mars 2019 7 24 /03 /mars /2019 17:30

Branford Marsalis (saxophones ténor & soprano), Joe Calderazzo (piano), Eric Revis (contrebasse), Justin Faulkner (batterie)

Clayton, Australie, 28-30 mai 2018

Marsalis Music 19075914032 / Okeh Sony Music

 

Enregistré dans le théâtre de Monash University, dans la banlieue sud de Melbourne, lors d'une pause après une longue tournée, le disque révèle les deux facettes de ce Janus Bifrons qu'est, de longtemps, le saxophoniste. Côté véhément l'introductif Dance of the Evil Toys, sur une ligne aventureuse qui nous fait goûter d'entrée la cohésion de ce groupe dont le dernier arrivant, la batteur, est quand même là depuis 10 ans, quand le pianiste et le bassiste sont dans le groupe depuis une décennie supplémentaire! Bref ça circule beaucoup entre ces quatre-là, pour nous rappeler qu'un groupe régulier constitue quand même une sorte d'idéal dans cette musique.... comme dans d'autres. Vient ensuite le plus détendu, mais subtil et tout aussi sinueux, Conversation Among the Ruins, qui laisse une longue respiration au piano avant de libérer un soprano rêveur. Il y aura aussi une valse qui va bientôt s'enflammer en escapade presque free, une ballade, Nilaste, qui va suivre le même sentier torride avant un épisode plus méditatif (au moins au début), et la conclusion de l'album se fera sur The Windup de Keith Jarrett, immortalisé avec Garbarek, et qui revêt ici un caractère primesautier. Belle brochette de titres qui confirment, s'il en était besoin, l'excellence de l'aîné des fils Marsalis. Le groupe était en tournée européenne en mars 2019, mais pas de date française. On annonce une tournée pour bientôt.

Xavier Prévost

Partager cet article
Repost0
24 mars 2019 7 24 /03 /mars /2019 08:46

Christian Escoudé (guitare, arrangements), Jean-Baptiste Laya (guitare), Antoine Hervier (orgue, piano), Guillaume Souriau (contrebasse) ; invitée sur 4 plages, Stephy Haik (voix, textes)

Rochefort, juin 2018

Cristal Records CR 277 / Sony Music

 

Des inédits, de Django, et aussi de Christian Escoudé, qui ouvre le disque avec l'une de ses compositions, Minor Phrasing, un blues (en sol, une des tonalités favorites de Jimmy Smith) que n'auraient pas désavoué les grandes heures des groupes avec orgue sous label Blue Note. On commence dans cet esprit là, mais la guitare chante, comme toujours avec Christian Escoudé, champion du phrasé souple et et du lyrisme, que ce soit dans un contexte de jazz fusion, comme naguère, ou vers la même époque dans l'orchestre de Martial Solal (signataire d'un commentaire élogieux sur le livret-se rappeler que la dernière séance de Django en 1953 fut la première de Martial) ; ou encore en trio de guitares avec les monstres sacrés de l'instrument. Le fidèle partenaire à la seconde guitare, Jean-Baptiste Laya, prolonge et dialogue dans le plus pur esprit de chaque morceau. Sitôt dit, sitôt fait dans la deuxième plage, Nisch, déjà enregistrée dans les années 60 par Schnuckenack Reinhardt, on est en plein esprit de Django, mais comme toujours singularisé par Escoudé qui sait en chaque thème apporter sa touche personnelle. L'orgue s'en mêle, et la basse aussi, sur la souple pulsation de la seconde guitare. Et la fête continue, avec la voix et le texte de Stephy Haik, chanteuse franco-américaine qui pose ses mots (Django Lullaby) en forme de berceuse sur l'Improvisation N° 2 de Django. La guitare chante dans le chorus, et l'aventure continue, avec un autre thème de Django, Improvisation Swing, inspiré par Bach, mais qui fait penser à John Lewis (avec lequel Christian a joué et enregistré). Puis c'est la Messe de Django, reconstituée à partir de fragments, avec un extrait arrangé pour la voix dans l'esprit d'une bande originale signée Michel Magne dans les années 60. Vient ensuite un thème de Christian Escoudé, Anagramme, autre style, mais toujours Grand Style. Retour de la voix de Stephy Haik, puis à nouveau Django, avec voix et un tuilage de deux thèmes, avant une dernière composition d'Escoudé, et un petit clin d'œil à Michel Legrand, car c'est enregistré dans le Rochefort des célèbres Demoiselles.... Un disque hautement recommandable : on se précipite !

Xavier Prévost

.

Le groupe jouera à Paris, au Studio de l'Ermitage, le 25 mars 2019

Partager cet article
Repost0
23 mars 2019 6 23 /03 /mars /2019 16:41

YARON HERMAN : « Song of the degrees »
Yaron Herman (p), Sam Minaie (cb), Ziv Ravitz (dms)
Blue Note 2019

Il y a un supplément d'âme et un sacré power trio dans cet album. Peut être l’un des plus abouti de Yaron Herman.
 
Pourquoi un supplément d'âme ? Parce que Yaron Herman est l’un des rares qui sache faire chuchoter son piano comme l’on dirait des mots d'amour avant tout simplement d’enflammer le piano en jetant du fond de lui même une braise passionnée. Yaron Herman improvise avec le bout de ses doigts, avec son cerveau mais aussi avec l'expression d'un sentiment profond. Est ce de l'amour ou une envolée passagère de l'âme ? Seul, lui au fond connaît la réponse.
Profondément ancré dans le jazz comme sur cet ébouriffant Crazy Cat où Yaron fait la course en tête, Yaron, on le jurerait puise aussi son inspiration chez son groupe fétiche, Radiohead. Une influence mutuelle à tel point que l'on se prend à rêver qu’un jour,un duo entre lui et Tom Yorke…. tant ils semblent avoir été élevés sur la même planète.

Il y a chez Yaron Herman quelque chose qui mélange tout ce qu'il a appris des plus grands pianistes de jazz avec cette science de l'improvisation toujours intellectuelle mais jamais cérébrale parce que directement connectée à l'émotion et à la mélodie dont il se fait le maître. Une science de l’improvisation toujours intelligente parce qu’on ne la suit pas comme un exercice de style mais plutôt comme le cheminement d’une pensée intime. Parfois Yaron Herman sait imposer le silence autour de lui comme lorsqu'il s'empare du clavier pour toucher au coeur comme sur cette introduction de Our Love où en quelques notes il peut renverser le monde.
Nous parlions aussi de power trio, terme si souvent galvaudé. Mais si l’on y recours c’est qu’il faut mettre en évidence cette sublime complicité qu'il a su nouer au fil de ses derniers albums avec ce génie de la batterie, Ziv Ravitz qui de manière stupéfiante parvient à donner corps et âme à la musique, en osmose parfaite avec Yaron Herman. Et puis il y a dans cet album la découverte d’un jeune contrebassiste,  Sam Minaie, d’origine irano-américaine, ancien élève de Charlie Haden dont entend ici que le maître lui a enseigné la profondeur et la rondeur boisée du son.

Bien sûr Yaron Herman voue un culte à des pianistes comme Keith Jarret ou Brad Mehldau. Et comme ces maîtres il sait où se trouve le graal et sait où se trouve l’essence du jazz. Il suffit pour cela d’écouter les accords complexes de Kinship qui, derrière une structure un peu ardue, Yaron Herman parvient à rendre limpide.
Et puis il y a Still awake qui fait figure de masterpiece devant lequel se déverse tout l'amour du monde.
Parce que c’est cela au fond la musique de Yaron Herman. Cette façon d’embrasser le monde et tout l’univers. Alors forcément, qui que vous soyez, où que vous soyez, vous y retrouvez une part de vous même.
C’est ce qui rend la musique de Yaron Herman belle et portant en elle cette part d’universalité qui la rend, juste divine.
Jean-Marc Gelin

Yaron Herman sera
- Au Forum de Nice le 6 avril
- Au Trianon le 10 avril à Paris.
- A Nantes le 26 avril

A ne manquer sous aucun prétexte…..

 

Partager cet article
Repost0
22 mars 2019 5 22 /03 /mars /2019 17:31

Doudou Gouirand (saxophone alto, voix), Michel Marre (trompette, bugle), Gérard Pansanel (guitare), Jacques Bernard (contrebasse), Denis Fournier (batterie, percussions)

Pompignan, 25-28 septembre 2018

Vent du Sud VDS 116 / www.lesallumesdujazz.com

 

Par un groupe qui porte le nom d'un fameux disque de Don Cherry («Art Deco»,1989), une évocation amicale autant qu'un hommage. Ce disque prolonge le programme qu'ils avaient donné en quartette au festival de Radio France & Montpellier Languedoc-Roussillon le 24 juillet 2014, et qui fut diffusé le 11 novembre de la même année sur France Musique.

Ces musiciens du Languedoc étaient proches de Don Cherry avec lequel ils ont joué, et dans cet album deux titres du disque d'où ils tirent leur nom ont été repris, entourés d'autres compositions de Don Cherry, et aussi de thèmes de Coltrane, d'Ornette Coleman et de Jim Pepper. Pas de dévotion stérile ni de mimétisme d'épigones dans cette entreprise, seulement une aventure joyeuse autant que recueillie. Plutôt que d'aller chercher l'une des plages jouées en duo par Coltrane et Don Cherry dans le disque «The Avant-Garde», le groupe a choisi, comme plage de bienvenue, Welcome, tirée du disque de Coltrane «Kulu Sé Mama» : manière de faire entendre dès l'abord que l'hommage n'était pas prisonnier du formalisme. Un court solo de batterie, et un chant qui rappelle Albert Ayler, là encore les hommages sont croisés, dans les parages des passions musicales des cinq membres du groupe.

Suivent cinq compositions de Don Cherry issues de périodes différentes : Dedication to Thomas Mapfumo, joué dans le vif d'un rythme entêtant avec une liberté irrépressible ; puis Orient [Tibet], avec des accents qui rappellent Complete Communion ; et après Art Deco, Ghana Song (co-signé Ed Blackwell), dialogue en tension ludique entre la batterie et le groupe. Augmented, encore de la plume de Don Cherry, époque «Old And New Dreams» (avec Dewey Redman, Charlie Haden et Ed Blackwell), sera suivi de deux compositions d'Ornette Coleman, bien dans l'esprit d'icelui, mais avec ce qu'il faut de cette liberté frondeuse qui seyait à Don Cherry, et que partagent les membres du groupe languedocien. Vient alors Roland Alphonso, souvenir d'un duo Don Cherry-Ed Blackwell pour le disque «El Corazón» en 1982. Une reprise de Mopti, thème extrait de la dernière mouture du groupe 'Old And New Dreams', précède le final Witchi Tai To du saxophoniste Jim Pepper, dans le groupe duquel Don Cherry avait enregistré ce titre. La boucle est bouclée, c'est une célébration amoureusement émue d'un lutin qui, à sa manière, inventa avant (presque) tout le monde le world jazz. Chapeau !

Xavier Prévost

.

Le groupe Art Deco jouera le 24 mars 2019 à Clapiers, dans l'Hérault, à l'Espace Culturel Jean Penso

 

Partager cet article
Repost0
17 mars 2019 7 17 /03 /mars /2019 15:21

MICHAEL FELBERBAUM «3Elements»

Michael Felberbaum (guitares électrique & acoustique), Frédéric Borey (saxophones soprano & ténor), Leonardo Montana (piano & piano électrique)

Pompignan, juillet 2017

Fres Sound New Talent FSNT 561 / Socadisc

 

On a pu lire, ou entendre, ici ou là à propos de ce disque, que l'instrumentation en était singulière. Certes, mais elle n'est pas inédite (se souvenir, parmi d'autres exemples, du trio de Wayne Shorter, Jim Hall et Michel Petrucciani en 1986). Mais l'essentiel est ailleurs, dans le projet nourri par le guitariste d'un tel alliage, et dans les rencontres qui lui ont fait choisir ces partenaires-ci plutôt que d'autres. Frédéric Borey, comme Leonardo Montana, est un esprit subtil, et leurs convergences musicales et esthétiques avec Michael Felberbaum sautent aux oreilles. Tous cela respire l'évidence, paraît naturel et spontané, même si manifestement cet objet est le fruit d'une culture partagée, culture du jazz bien sûr, mais aussi du contrepoint, de l'improvisation, et de ce goût du risque qui fait que l'on se jette dans des phrases interactives avec le sentiment que la réussite est au bout de la forme, même si l'on sait aussi que chacun peut être faillible. C'est la grandeur d'une conception collective de l'aventure musicale. Le disque commence par Italian Waltz : logique, le guitariste américain de Paris est né.... à Rome. «Valse mélancolique et langoureux vertige», on est au cœur du sujet. Les lignes se croisent, la tonalité s'aventure hors du cadre, les solistes sont en verve, le mélomane se régale. Puis la musique s'aventure vers des sonorités moins usitées, sur lesquelles la guitare, après avoir chanté dans la norme, s'aventure à son tour vers des sons mouvants, avant de reprendre le chemin coutumier ; puis l'aventure sonore reprend ses droits : belle leçon d'audace assumée. Après cette pièce qui donne à l'album son titre tout en dessinant l'horizon des possibles, une reprise du groupe Soundgarden tourne une autre page de douce nostalgie. Même climat ensuite, toujours très inspiré, avant un épisode plus rythmique où les accents des uns et des autres jouent un ballet qui oscille entre cache-cache et parfaite convergence. Vient alors une reprise très singulière de Mercedes Benz de Janis Joplin ; très folky, là où nous aurions attendu, par conformité avec nos souvenirs, une ironie désespérée : joli contrepied ! Puis c'est Lazy Man Blues, un thème sinueux que Michael Felberbaum avait enregistré dans un disque de Thomas Savy : là encore langueur et subtilité, un pur régal, comme d'ailleurs toutes les autres plages du CD : il y en a encore 5, courez les découvrir, la félicité est au bout du chemin.

Xavier Prévost

.

Le groupe jouera à Paris au Sunside le 26 juin prochain

.

Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=8XRWXAGnJOA

Partager cet article
Repost0
13 mars 2019 3 13 /03 /mars /2019 18:33

Sébastien Texier (saxophone alto, clarinette), Fady Farah (piano), Guillaume Dommartin (batterie), Hubert Colau (voix et percussions), Philippe Laccarrière (contrebasse électrique, compositions),

Meudon, janvier 2019

Au Sud Du Nord LAC 003 / www.ausuddunord.fr

 

Voilà 40 ans que Philipppe Laccarrière a quitté Bordeaux pour la région parisienne, avant d'établir en Essonne rurale son fief, où essaime le festival Au Sud du Nord qu'il dirige. Sa musique a gardé l'accent d'origine, celui du jazz, qui se reconnaît dans l'instant pour qui l'a goûté vraiment. Sébastien Texier, même s'il est né à Paris comme son Breton de père, est -comme son père- essonnien de longtemps. Fady Farah a commencé le piano au Liban avant de d'intégrer le CRR de Paris. Guillaume Dommartin a éclos du côté de Nantes, et Hubert Colau, présent sur quatre titres, est né relativement plus au Nord, à Sarcelles, et il a promené ses percussions et sa voix du gospel à la variété en passant par les musiques du monde, mais le jazz reste près de son cœur. Bref le groupe est à l'exacte image de cette musique qui fédère les sources, les esprits et les sentiments (qui sont aussi des sensations). Ça commence très modal, accords de quartes et sax alto qui virevolte avec de forts accents : le tempo est vif, mais la mélancolie est tapie dans les replis du rythme. La basse s'envole, la batterie s'en donne à cœur joie, et le piano n'est pas de reste. Bref ça joue ! Dans la plage suivante la basse va chanter, avec un brin de nostalgie assumée. Le piano chante aussi, le groupe est lyrique, assurément, et l'alto vient encore renforcer cette sensation. On revient ensuite à un rythme plus marqué, pour une musique ouverte, où la percussion trouve sa place. Tout ça sent très fort le plaisir de jouer ensemble. Hubert Colau, voix et percussions, ouvre le titre suivant : un autre voyage, qui va prendre la direction d'une douce ballade où le sax distille son humeur crépusculaire. Et l'aventure continue, au gré de ces climats changeants, dont nous épousons tour à tour les méandres. Encore un épisode libertaire à résolution bebop, puis une complainte déchirante, et une dernière touche de mélancolie légère ; nous sommes à la fin de la dernière plage, tout surpris d'être déjà au terme : le disque est manifestement réussi.

Xavier Prévost

.

Le groupe jouera le 15 mars à Breuillet (Essonne), dans l'auditorium du Moulin des Muses, puis le 21 mars à Paris (4ème), sur la Péniche Marcounet

.

Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=cC2f7Dfj8Sk

 

 

Partager cet article
Repost0
12 mars 2019 2 12 /03 /mars /2019 16:36

Laurent Dehors (saxophones, clarinettes, voix, guimbarde, machines), Gabriel Gosse (guitare électrique 7 cordes, banjo, guitare classique préparée), Franck Vaillant (batterie, batterie électronique, percussions)

Pernes-les-Fontaines, décembre 2017

Tous Dehors / l'autre distribution

 

C'est un iconoclaste joyeux, car l'iconoclasme n'est par forcément triste et dramatique. Avec une constance indéfectible, depuis plusieurs décennies, Laurent Dehors fracasse, triture, déconstruit et biaise toutes les composantes des musiques qu'il aime. Refusant les moutons bêlants qui s'évertuent à reproduire les codes esthétiques admis et dominants, il rue dans les brancards comme un cheval fougueux. Ce pourrait n'être qu'une déclaration d'intention, une posture ou un concept à livrer aux communicants : cela va bien au-delà. Servi par des partenaires totalement en phase avec son projet, il laboure avec entrain le limon de la bienséance, la glaise de l'habitude et l'argile du consensus. Et ça marche. Avec le batteur Franck Vaillant, qui avait participé avec lui à des aventures antérieures, et le guitariste Gabriel Gosse, jeune (et brillant !) musicien frais émoulu du Conservatoire (National Supérieur.... de Paris), le saxophoniste-clarinettiste (et plus si affinités) nous entraîne dans sa folle cavalcade. Ça jazze, ça funke, parfois ça fout le free au milieu d'un épisode rock'n'roll, avant de chavirer en mélancolie presque valsée, et de jeter une poignée d'ironie dans l'esprit de la (musique) contemporaine. Et au passage un coup de chapeau à Ellington avec Solitude. C'est vivant, souvent drôle, et toujours profondément musical, comme autant de petites formes autonomes lancées à l'oreille du monde, mais qui pourraient bien constituer une sorte de manifeste : hautement recommandable à ceux qui écoutent sans œillères !

Xavier Prévost

.

Le trio jouera le jeudi 14 mars 2019 au Triton, près de la Mairie des Lilas (Seine-Saint-Denis) et du métro parisien du même nom.

.

Un avant-ouïr sur Vimeo

https://vimeo.com/264392250#at=1

et sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=Z0VlP0ISNFw

Partager cet article
Repost0
11 mars 2019 1 11 /03 /mars /2019 10:20

 

Philippe Soirat (batterie), David Prez (saxophone ténor), Vincent Bourgeyx (piano), Yoni Zelnik (contrebasse)

Villetaneuse, 6-7 février 2018

Paris Jazz Undergound-Absilone pju 018 / Socadisc

 

On ne change pas une équipe qui gagne, et on a bien raison ! Après « You Know I Care » (enregistré en 2014), et pour son second disque en leader, Philippe Soirat reste en compagnie de ses partenaires. Et on le comprend. Au delà de leurs éminentes qualités d'instrumentistes et de musiciens, on perçoit un degré d'implication dans la musique qui emporte l'adhésion. Compositions originales du saxophoniste et du pianiste, et reprises de thèmes de grands jazzmen, tout concourt à sorte d'unité et de cohérence qui ne sont pas les moindres qualités de ce disque. Le premier thème, Carte Blanche, composé par David Prez, est très shorterien : ça tombe bien, le suivant est de Wayne Shorter (Second Genesis, issu des sessions avec Art Blakey en 1960, et qui n'a rien à voir avec le Genesis de «The All Seing Eye» 5 ans plus tard). Suit une autre compo de David Prez, intitulée A Shorter One.... La boucle est bouclée : on est encore dans l'univers mélancolique et les tensions mélodiques chers à Shorter. Solo très inspiré de Vincent Bourgeyx, sur un drumming intense et tendu du leader. La basse de Yoni Zelnik joue pleinement son rôle d'aiguillon stimulant, puis le ténor revient, diaphane, mais avec toute sa force d'expression. Viennent ensuite des compositions de James Black (un blues dévoyé, comme les années Blue Note les appréciait), Joe Lovano (le thème qui donne à l'album son titre), Coltrane, Jeremy Pelt et Bob Hurst, et aussi une très belle composition de Vincent Bourgeyx, Dong, sombre et méditative. Sans détailler chaque plage, je puis vous dire le plaisir que j'ai eu à écouter ce disque riche de nuances, d'intensité et d'inspiration : une réussite. Bravo au leader qui sait mobiliser le talent de ses partenaires sans succomber à la tentation de donner à la batterie le premier rôle : collectif, c'est ce qu'on aime dans le jazz !

Xavier Prévost

.

Le groupe joue le 12 mars à Paris au Sunside

.

Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=0Cbf8hp4gqo

 

Partager cet article
Repost0