SuPerDoG
Fred Gardette (sax baryton), Guillame Nuss (trombone), Florent Briqué (trompette), Christophe Telbian (batterie)
Soulspazm
Premier album sorti sur le label Oreille en Friche/Inouïe distribution, en janvier 2017, après une tournée en Chine, ce Superdog ( ? ) dévoile un projet ambitieux : ce trio originel de cuivres auquel s’ajoute une batterie rend compte de l’effet King Crimson, groupe protéiforme déroutant, cross over de jazz, rock progressif et recherche contemporaine. Attention ! Les fans de K.C risquent de ne pas retrouver grand-chose du son, de l’atmosphère de leur groupe fétiche, avec cette instrumentation jazz qui n’a pas grand-chose à voir avec les guitares de Robert Fripp. Et puis, d’abord de quel K.C s’agit-il ? Puisque le groupe n’a cessé d’évoluer avec le temps, le tyrannique leader ne cessant d'en renouveler le personnel, l’ambiance, le style.
En 2012, Mederic Collignon s’était déjà attaqué au monument K.C avec son Jus de Bocse. A la recherche du roi frippé n’avait repris que le premier album culte, étrangement original de Robert Fripp aux riffs lyriques, exacerbés. Avec In the court of the Crimson King, un groupe royal était né, composé d’Ian Mc Donald aux anches et mellotron, de Michael Giles à la batterie, de Greg Lake à la basse et au chant, du poète Peter Sinfield.
Fort habilement, le quartet lyonnais propose une synthèse très personnelle, ne s’arrêtant pas à la première formule, « mixant » différents titres de In The Court of The Crimson king (1969) incluant « 21st Century Schizoid Man", « Moonchild », « I talk to the Wind », Islands (1971) avec « Indoor Games », Discipline (2001) avec « Elephant Talk », Thrak (2002) avec « Vroom Vroom », « Sex, Sleep, Eat Drink, Dream » et enfin le treizième album The power to believe en 2003 (« The power to believe », «Dangerous curves »).
Comme il est difficile de trouver des points communs entre tous les différents avatars, l’amateur du K.C des années 70 sera un peu désarçonné, si ce n’est désappointé. J'ai retrouvé des effluves émotionnels et mélodieux de cette période dans 4 titres sur 9 ; et aucune reprise de mes deux albums préférés de 1974 , Red et Starless and Bible Black. A la réflexion, ce n’est sans doute pas plus mal ( que faire du phénoménal "Fracture" par exemple?) car que l’on connaisse ou non le groupe, ce que le quartet en tire est fondamentalement différent : l’instrumentation est gravement cuivrée avec un bon gros son de brass band, les mélodies et le chant déconstruits, réorganisés autrement selon la science fine des arrangements essentiellement dus à Florent Briqué (tp, bugle). Avec une certaine fantaisie qui n’exclut pas la rigueur de l’écriture, le quartet s’empare de certains thèmes connus pour en faire une recherche raffinée sur les textures et la mise en espace sonore : demeurent une énergie violente, une certaine dramaturgie, de la démesure, un entrain de bon aloi. Et finalement ce goût de l’expérimentation qui restitue l’esprit de K.C avec une belle résonance actuelle. Et puis, voilà bien des musiciens singuliers qui n’oublient pas de jouer collectif !
Très prometteur!
NB : Dans la discothèque rock idéale, figure In the Court of the Crimson King paru en 69, une année des plus fastes (Hot rats (Zappa), Led Zep II, Pink Floyd (Ummagumma), Tommy (The Who) et tant d’autres pépites… On pouvait lire dans Rock & Folk, à propos de ce premier disque « un excellent nouveau groupe jamme un voyage dans l’espace et joue fort très, très fort » mêlant de drôles d’influences jazz, des comptines* enfantines et Bach !
*comme Genesis
Sophie Chambon