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27 août 2016 6 27 /08 /août /2016 18:50
MARC DUCRET & JOURNAL INTIME « Paysage, avec bruits »

Marc Ducret (guitares, composition), Sylvain Bardiau (trompette), Matthias Mahler (trombone), Frédéric Gastard (saxophone basse)

Paris, 28-30 avril 2015

Abalone Productions AB 025 (L'Autre Distribution)

La rencontre de Marc Ducret avec les membres de Journal Intime, et avec le trio lui-même, est une déjà longue histoire, et même une série d'aventures partagées. Le saxophoniste et le tromboniste ont participé au projet « Tower » du guitariste, et Marc avait déjà rejoint le trio en diverses occasions (dont le CD « Extension des Feux », Neuklang, 2013) ; et il l'avait convié lors du concert de sortie du CD « Metatonal » au Studio Sextan. Le répertoire mêle des pièces déjà enregistrées et de nouvelles compositions, élaborées sur mesure pour cette rencontre fructueuse. Ce qui frappe, comme toujours chez Ducret, c'est un savant alliage de forme exigeante, et maîtrisée, avec des espaces d'improvisation qui conjuguent incitation à la liberté et pertinence dramaturgique dans la forme d'ensemble. Là où André Hodeir préconisait l'improvisation simulée, pour obtenir un discours spontané qui reste en phase avec la logique interne de l'œuvre, Ducret construit un chemin dont les balises sont autant de stimulations à la créativité des solistes. Le disque commence par une plage dont les accents rythmiques se souviennent de Stravinski et Bartók, mais sans servilité. Le parcours conjugue constamment des échappées rythmiques d'un soliste avec des harmonisations tendues, et souvent audacieuses. Et le guitariste, s'il est le compositeur, ne se privilégie nullement comme soliste au détriment de ses partenaires. Il « joue collectif », comme il sait si bien le faire, et la musique s'en trouve magnifiée. C'est très contemporain et très VIVANT, comme pour battre en brèche une idée tellement reçue, et hélas si souvent partagée par les oreilles distraites, selon laquelle la musique de création serait léthargique et anesthésiante.... Tous les quatre sont impeccables d'audace, d'intelligence de l'instant musical, et d'esprit de groupe. Bref c'est un régal, autant qu'une pièce maîtresse !

MARC DUCRET & JOURNAL INTIME « Paysage, avec bruits »

On retrouve également Marc Ducret sur le nouveau disque du compositeur, batteur, percussionniste et manipulateur de sons Michel Blanc. Autour de séquences sonores d'actualité qui couvrent de l'ère Pompidou jusqu'à la chute de mur de Berlin, la guitare de Ducret, l'orgue d'Antonin Rayon, la voix d'Anabelle Playe, le piano d'Anne Gimenez et les percussions de Michel Blanc offrent une foule de paysages sonores et musicaux avec bruits d'époque. Là encore l'inventivité et la cohérence donnent à l'ensemble une vitalité exceptionnelle : un idéal d'Art Vivant en quelque sorte (Michel Blanc, « Le Miroir des Ondes », Ayler Records AYLCD-151, Orkhêstra)

Xavier Prévost

Marc Ducret & Journal Intime joueront le 2 septembre à Paris, au Studio de l'Ermitage, dans une série de concerts, du 2 au 4 septembre, autour des publications récentes du label Abalone, avec notamment Boreal Bee, Marc Buronfosse, Régis Huby Quartet et le duo Stephan Oliva-François Raulin

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29 juillet 2016 5 29 /07 /juillet /2016 08:44
SEBASTIEN PAINDESTRE TRIO  : « Paris »


La Fabrica’son 2016
Sebastien Paindestre (p, fd), Jean-Claude Oleksiak (cb), Antoine Paganotti (dms)
http://www.sebastienpaindestre.com/discographie/


Avant de partir en vacances j’avais prévu de vous parler de Brad Mehldau et de son très bel album « Blues and Ballads" qu’il a signé chez Nonesuch en compagnie de Larry Grenadier et Jeff Ballard.
J’avais prévu et cela aurait été amplement justifié.
Seulement voilà, entre temps j’ai mis dans ma platine l’album d’un pianiste dont nous vous avons déjà parlé plusieurs fois ici, Sebastien Paindestre et finalement j’ai décidé de changer mes plans estivaux.
Car après tout Mehldau, on vous en parle à toutes les sauces alors que Paindestre, moins.

Sebastien Paindestre que l’on sait amoureux de Radiohead auquel avec son groupe Amnesiac il a déjà rendu plusieurs hommages (Sebastien a même chroniqué dans les DNJ http://www.lesdnj.com/2016/05/a-moon-shaped-pool-radiohead-une-chronique-de-sebastien-paindestre.html) quitte ici les chemins de la pop. Il l’avait d’ailleurs fait avec le très bel album « En rouge » (http://www.lesdnj.com/2016/01/atlantico-en-rouge.html).

Mais ici, si l’on devait trouver dans « Paris » une nouvelle filiation, elle serait justement à chercher du côté de Brad Mehldau. Dans cet album, le même soin apporté aux compositions et au son. Même façon de partir de mélodies parfois très simples pour en faire un véritable matériau où le pianiste passe allègrement du clavier du piano à celui du fender, n’hésitant pas à en salir le son à volonté. Il suffit d’écouter Gaza-Paris-Jerusalem pour se rendre compte qu’avec Sebastien Paindestre, tout est affaire de reliefs et de cartes postales. Ou plutôt, non. A l’image fixe nous préférons celle en mouvement, quasi cinématographique. Il y a des plans fixes, en mouvement, des zooms, des travellings, des plans serrés et des plans larges rendus possible par la belle cohésion du groupe, sorte de soft-power-trio. Sebastien Paindestre y joue avec une admirable libération de toutes tension, gardant au bout des doigts un rare sens du grosse. Souple comme un gros chat à pattes de velours. Derrière, Jean-Claude Oleksiak est énorme à la contrebasse. Quand à Paga’ comme toujours c’est l’assurance d’un drive de grande classe.
Paindestre nous ballades ainsi hors des sentiers battus, dégagé de tous clichés dans un univers finalement très personnel. Un envers jamais univoque mais qui respire le jazz. A l’exacte intersection de R
adiohead et de Brad Mehldau il y a Sebastien Paindestre qui en apporte ici une démonstration éclatante.

Bon vous pouvez bien sûr acheter l’album de Brad Meldhau mais franchement je vous verrai bien emmener dans vos bagages celui de sebastien Paindestre. Les deux font la paire.


Moi c’que j’en dis..
Jean-Marc Gelin

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22 juillet 2016 5 22 /07 /juillet /2016 07:52

Bill Evans (piano), Eddie Gomez (contrebasse), Jack DeJohnette (batterie)

Villingen (Allemagne), 20 juin 1968

Resonance Records HCD-2019 / Socadisc

Franchement..... C'est l'été, il fait beau et chaud et même si les soirées raccourcissent, je vous imagine bien là, buvant un dernier verre sur votre terrasse, un cigare à la main, la tête dans les étoiles, écoutant cet album de Bill Evans dont Xavier Prevost se faisait l'écho dans ces colonnes il y a quelques semaines .

Seul enregistrement en studio de ce trio qui a marqué l'histoire du jazz par le célèbre album de Montreux, "Some Other Time "tutoie les sommets dans l'art du pianiste. Bill Evans semble ici encore plus relâché que jamais, maître dans l'art de la phrase bondissante, rebondissante, maître dans l'expression du swing harmonique, de la conduite de la mélodie hors de ses sentiers battus. Bill Evans fait danser son piano. Et même si l'on peut regretter comme le souligne Xavier, que la prise de son éloigne ( voire efface) Jack De Johnette, reste que cette relecture de ces standards est une véritable montée au ciel.

Un double CD a prendre absolument pour enchanter vos nuits d'été et regonfler à bloc votre amour du jazz.

Voilà, c'est juste un soupir d'amour que je partage avec vous. Pour le reste, je vous renvoie à l'excellent article de Xavier et à l'écoute lascive de Bill Evans.

Bises et bel été !

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20 juillet 2016 3 20 /07 /juillet /2016 12:05
JAZZ FOR KIDS

Jazz For Kids

L’autre Distribution

Manu Hermia (saxophones et flûtes), Sam Gerstmans (contrebasse), Pascal Mohy ( piano) 1er CD d’une série qui paraîtra sous le nouveau label KIDS AVATAR

En précommande sur itunes dès le 1er juillet et sur toutes les plateformes via Believe à partir du 22 juillet

www.manuel-hermia.com

www.tetesdejazz.eu

Excellent saxophoniste et flûtiste, coltranien dans l’âme, qui délivre un jazz « free », engagé dans son époque comme le prouve son dernier opus avec le même trio Austerity and…What About Rage ? ( label Igloo), Manu Hermia n’est pas un inconnu pour moi. Je l’avais retrouvé au Belgian Jazz Meeting en 2011, en trio avec Manolo Cabras (cb) et Joao Lobo (dms) mais la première rencontre remonte au Flemish Jazz Meeting, toujours in Bruges en 2007, et à Avignon avec la formidable opération Le jazz perd le nord, montée conjointement par l’AJMI avec le Théâtre des Doms enclave belge au sein de la cité papale, dans un programme raga, libertaire et métissé, Rajazz en 2007.

Le projet au cœur de ce tout nouvel album, n’est pas moins libre : trois jazzmen s’adressent aux enfants et à tous ceux qui ont envie d’aimer le jazz. Des improvisations à partir de standards que connaissent petits et grands, les comptines. Que vous ayez ou non l’âge des kids, le résultat est étonnant et franchement convaincant, des premières notes de « Frère Jacques » jusqu’au final « Bonsoir tout va bien » tendrement mélancolique d’Yves Barbieux. Moi qui ai dépassé la limite depuis longtemps et que ce genre de rengaine ennuie en général, j’ai dû remballer mes préjugés : ces rengaines éculées ont une vie propre et sonnent jazz, si on sait en jouer. Après tout, Coltrane a repris jusqu’au vertige « My favorite things ». En jazz ce n’est pas tant ce que l’on joue mais comment on l’interprète qui fait la différence Ecoutez une petite suite de 3 pièces sur… « Une Souris Verte » dont les qualificatifs pourraient décrire cette musique «Speed», "triste", "libre".

Les arrangements de Manu Hermia nous aident à saisir mélodie et harmonie par tout un dispositif ingénieusement expliqué et dessiné dans la pochette : on reconnaît très vite la mélodie et on peut même la chanter mais les couleurs et les rythmes diffèrent, ce qui donne du goût et d’une saveur nouvelle à ces antiennes même pas viriles, comme aurait soufflé Brassens. Je songe au Sétois car figure en fin d’album une version revigorante d’ « A La Claire Fontaine ».

Lignes de saxophones légères, dessinées avec fluidité, flûte qui chante et danse (« Meunier, Tu dors » ou sur « Une Souris Verte et Triste »), piano élégant, romantiquement evansien, contrebasse soutien efficace et discret du trio, voilà les points forts, ce qui fait tout le charme de ce Jazz for Kids.

Ajoutons que le groupe vient d’animer pour le plus grand bonheur de tous, sur quelques jours les après midis des Têtes de Jazz de l’AJMI, pendant le off du festival d’Avignon. Chaque chanson était prétexte à raconter le jazz au travers d’une histoire ou d’une devinette, à décortiquer ce qu’est l’improvisation. En s’amusant et de façon interactive. Ce qui est essentiel avec les enfants. Réjouissant et ludidactique donc.

Sophie Chambon

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17 juillet 2016 7 17 /07 /juillet /2016 17:51
Bobby AVEY : «  Inhuman Wilderness »


Innervoice 2016
Bobby Avey (p), Thomson Kneeland (cb), Jordan Perlson (dms), John O'Gallagher (as)

Le label New-Yorkais Innervoice que vient de fonder le pianiste Marc Copland et sur lequel il a déjà publié son propre album ( « Zenith ») s’enrichit aujourd’hui d’une nouvelle signature avec le tout jeune pianiste Bobby Avey, inconnue ici mais figure montante de la scène de Big Apple.
Fort de son premier prix de composition au fameux concours Thelonious Monk il y a 5 ans, le jeune pianiste multiplie les collaborations avec les stars du jazz de la grande ville comme Miguel Zenon, Rudresh Mahanthappa ou encore Darcy Argue James dont il est l’un des membres du fabuleux big band.
La belle surprise qui nous vient de ce nouvel album est double.
Elle vient d’une part de la découverte de ce pianiste total, engagé, qui doit se situer quelque part entre Cedar Walton et Matthew Shipp dans une veine rythmique basée sur des structures impaires que ne dénierait pas Steve Coleman.
Les compositions qu’il présente sont toutes de très haute volée. Car l’essence même de la musique du pianiste est d’aller chercher au delà des structures mélodiques ou harmoniques , des structures à tiroirs et des atonalités pour tailler dans le vif des motifs rythmiques. Il y a dans sa musique quelque chose de réellement fascinant tant par sa propension à créer un univers hypnotique que par son engagement intégral dans ce qu’il joue. Engagement aussi dans sa force d’expression, entre colère et passion, martelant le groove comme on assène certaine vérités. Comme une forme d’affirmation de son parti pris. Car il y a de cal chez Bobby Avey, l’affirmation d’une ligne musicale à laquelle il se tient. Et ça , nous on aime.

La deuxième surprise de cet album est celle de la découverte du saxophoniste alto John O’Gallagher qui l’accompagne sur 4 titres. Ce saxophoniste est, à 52 ans un des piliers du Smalls, le petit club de New-York. Impérial dans son discours, il s’affiche comme un saxophoniste tranchant, puissant, à la souplesse féline et bourré d’idées musicales dans ses improvisations. De la veine des héros New-Yorkais de cette scène post-free comme Tim Berne dont il semble très proche musicalement. Comment avouons nous pu passer à côté d’un tel musicien !


Voilà quelques jours que cet album tourne en boucle dans mon casque et ne cesse de m’accrocher, comme prisonnier volontaire dans une sorte de toile. Il y a dedans la marque d’un futur grand compositeur qui porte en lui une rare maturité musicale.

A découvrir séance tenante.

Jean-Marc Gelin

PS : en vidéo, le teaser de son travail sur le vaudou et la révolution haïtienne qu’il avait mené avec Miguel Zenon dans l’album « Authority melt on me ».

Bobby Avey

Bobby Avey

Teaser du précédent album avec Miguel Zenon et Ben Monder

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16 juillet 2016 6 16 /07 /juillet /2016 16:00
CHRISTOPHER ZUAR ORCHESTRA « Musings »

Dave Pietro (saxophones alto & soprano, flûtes), Ben Kono (saxophones alto & soprano, flûte, hautbois, clarinette), Jason Rigby (saxophones ténor & soprano, flûte, clarinette), Lucas Pino (saxophone ténor, clarinette), Brian Landrus (saxophone baryton, clarinette basse), Tony Kadleck, Jon Owens, Mat Jodrell, Matt Hollman (trompettes & bugles), Tim Albright, Matt McDonald, Alan Ferber (trombones), Max Siegel (trombone basse), Pete McCann (guitares), Franck Carlberg (piano, piano électrique), John Hébert (contrebasse & guitare basse), Max Ferber (batterie), Rogiero Boccato (percussions), Jo Lawry (voix), Christopher Zuar (composition, arrangements, direction).

Brooklyn, New York, 4-5 septembre 2014

Sunnyside SSC 1434 / Naïve

Cet ancien trompettiste, qui a choisi la composition et l'orchestration, a été bien formé (New England Conservatory de Boston, Manhattan School of Music de New York) par des Maîtres avérés de l'arrangement de jazz (Bob Brookmeyer, Jim Mc Neely, et le pianiste qui l'accompagne dans cet orchestre, Franck Carlberg, très réputé lui aussi). En publiant le premier disque de son grand orchestre le jour de son 29ème anniversaire, en avril dernier, il signe assurément l'avènement d'un nouveau (grand) talent. Il déploie une science étonnante des couleurs, un grand savoir-faire dans les alliages de timbres, un indiscutable goût pour les surprises qui font surgir l'inouï là où l'on croyait deviner le fil conducteur. Sa maîtrise se préserve du défaut que connaissent parfois les grandes compétences, qui débouchent si l'on n'y prend garde sur le convenu. Rien de tout cela ici. Les thèmes sont longuement développés, métamorphosés, recomposés. Au fil des plages on pense à Gil Evans, Thad Jones-Mel Lewis, ou plus près de nous Maria Schneider. Mais ces analogies n'épuisent pas la réalité de ce que nous écoutons, qui va au-delà de ces souvenirs d'amateur. La première plage, assez classique en apparence, dévoile progressivement ses atouts d'orchestration, avec de courtes relances de solistes pour baliser l'itinéraire. Ensuite une bien nommée Chaconne emprunte plus à l'esprit romantique qu'à la danse baroque, nous entraînant loin de sa source. Dans Vulnerable States le dialogue entre la voix limpide de la chanteuse Jo Lawry et la masse de l'orchestre dévoile des trésors d'expressivité. Les méandres de So Close, Yes So Far Away, nous entraîne d'incertitude en suspens, nous rappelant que la bonne musique se doit de n'être pas prévisible. Les solistes sont de haut vol, dans cet orchestre où de nouveaux talents côtoient des musiciens rompus au métier et aux meilleurs big bands (Alan Ferber, Jon Owens, Tony Adleck....). La seule présence de John Hébert à la basse nous indique que l'on est dans un univers où l'exigence musicale ne se marchande pas. Bref ce compositeur, cet orchestre et ce disque sont à découvrir d'urgence !

Xavier Prévost

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14 juillet 2016 4 14 /07 /juillet /2016 10:37
Tony Hymas joue Léo Ferré

Tony Hymas (piano)
2016. Studio de Meudon. Nato/L’autre distribution

C’est une déjà ancienne histoire d’amour entre Tony Hymas et Léo Ferré. Le pianiste britannique a inscrit à son répertoire peut-être la plus forte des 480 compositions de l’anar-poète « Avec le temps » dès 1997 soit quatre ans après la disparition du chanteur en 1993, le 14 juillet. Il avait alors confié à un confrère : « C’est une magnifique pièce au piano comme la Sonate au clair de lune de Beethoven ». Il va mûrir son interprétation quelque temps avant de l’enregistrer en 2011 avec les Bates Brothers, pour le label fidèle Nato (Blue Door). Avec le producteur Jean Rochard, la collaboration, le compagnonnage serait plus exact, se manifeste depuis plus de trente ans. Aujourd’hui, c’est encore Ferré qui est à l’honneur. Chacun sait que jouer la musique de Léo le magnifique n’est pas sans risques. On se souvient de l’hommage donné par le chanteur Marcel Kanche (« Et vint un mec d’outre-saison ». Cristal 2012) avec un quartet qui respirait toute la force décapante du poète. Ici Tony Hymas est seul face à son piano. Il en joue avec générosité et tendresse pour extraire tout le suc de quinze compositions de Ferré qui sont presqu’autant de tubes inoxydables, C’est extra, Jolie Môme, Le pont Mirabeau (d’après Apollinaire), , Thank you Satan, Les anarchistes, L’amour fou... Impossible de choisir parmi ces titres, le plus simple (et le plus épanouissant) étant de faire confiance à Jean Rochard et de suivre l’ordre retenu d’entrée en scène, de La vie d’artiste (enregistré par Ferré dès 1953) à Est-ce ainsi que les hommes vivent ? (texte d’Aragon). Laissons-nous transporter par cet ouragan de passion.
Jean-Louis Lemarchand

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9 juillet 2016 6 09 /07 /juillet /2016 12:25
MOUTIN FACTORY REUNION  : «  Deep »

MOUTIN FACTORY REUNION : « Deep »
Jazz Family 2016 - Socadisq

François Moutin (cb),Louis Moutin (dms), Christophe Monniot (sax), Jean-Michel Pilc (p), Manu Codjia (g)

Pour une fois « compter les Moutins » ne porte pas à l’endormissement. C’est mêmee l’effet contraire.
Les frères Moutin sont de retour ( cela faisait pas mal de temps qu’on les attendait) avec un nouvel album aux accents très Metheniens en grande partie dû aux compositions signées des deux frères, mais aussi aux volutes réverbérées de Manu Codjia à la guitare.
Alors que Jean-Michel Pilc est un habitué des frères Moutin avec qui il a souvent tourné dans la période New-Yorkaise du pianiste, la présence dans cet univers très électrique de Christophe Monniot aux saxs semblait un peu plus inattendue. La connexion Humair ( Daniel) peut être.

Quelques privilégiés ont eu la chance d’entendre cette formidable formation comme par exemple les spectateurs de Jazz à Vienne (où Thomas Enhco tenait le piano).

Et ce que l’on peut vous dire mes amis c’est que ce quintet ne joue pas petits bras, petits niveaux, ras du sol. Ah ça non !
Un quintet aux couleurs d’un jazz très américain avec 5 fortes personnalités, dominé bien sûr par les frères Moutin.
dans l’équipe, côté défense, la fratrie représente pour moi ce qu’il y a de mieux en matière de rythmique. Deux frères en osmose totale. Lorsque l’un expose l’autre explose et lorsque l’un donne le tempo l’autre l’ornemente. Les frères Moutin c'est l’énergie atomique, la générosité faite musique. On les savait fusionnels on ne les distingue plus tant l’un est l’autre ! Sur ce magnifique Meddley en hommage à Fats Waller, Louis et François s’offrent un duo des familles étourdissant.
Christophe Monniot, dont on le voyait un peu comme la pièce incongrue dans le paysage. Il y tutoie les sommets. C’est en quelque sorte notre Rudresh Mahanthappa à nous. Langue de feu et feu sacré pour Monniot, en position d’avant-centre. Numéro 9 de luxe.
Quand au milieu de terrain, qui oriente le jeu et lui donne la direction, il se joue à deux , avec Jean-Michel Pilc et Manu Codjia qui allient l’acoustique et l’électrique dans une veine que ne renierait pas Metheny lui-même. Codjia c’est bien simple, il sait à peu près tout faire avec un manche et six cordes. Il libère les espaces et donne le ton.
Alors voilà, je vous le dis, l’album sort le 26 août dans les bacs.
Les chanceux pourront les voir au Havre le 23 juillet et à Marciac le 31. Quand aux parisiens ils devront attendre du 12 au 15 octobre au Sunside pour 3 soirées qui nous réservent certainement quelques surprises.
Réservez y en aura pas pour tout le monde !
Jean-Marc Gelin

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3 juillet 2016 7 03 /07 /juillet /2016 19:28
SYLVIE COURVOISIER / MARK FELDMAN / IKUE MORI / EVAN PARKER « Miller's Tale »

SYLVIE COURVOISIER/MARK FELDMAN/IKUE MORI/EVAN PARKER « Miller's Tale »

Sylvie Courvoisier (piano), Mark Feldman (violon), Evan Parker (saxophones ténor & soprano), Ikue Mori (électronique)

Yonkers, New York, 21 septembre 2015

Intakt CD 270 / Orkhêstra

En 2014, ces musiciens s'étaient rencontrés pour une résidence au Stone de New York en une série de duos, et un set en quartette. Un an plus tard, la veille d'un concert au Roulette de Brooklyn, les voici en studio à Yonkers, en quartette, et aussi pour une série de duos. Comme c'est dans cette ville que le personnage principal de Mort d'un commis voyageur , la pièce d'Arthur Miller, provoque volontairement l'accident qui lui sera fatal, les musiciens ont divisé leurs improvisations en autant de séquences dont les titres renvoient à cette pièce. Et le titre de l'album évoque ce « Conte de Miller ». Quatre plages en quartette précèdent sur le CD cinq duos. Les instruments entrent en scène les uns après les autres, dans la vigueur de l'échange, et la liberté de l'improvisation. L'attention mutuelle est palpable, l'engagement collectif total, et l'on se laisse porter de bout en bout par ce jeu parfois dangereux, toujours empathique (mais pas emphatique!). Dans les improvisations en quartette comme dans les duos la forme s'élabore, comme par magie, et l'on se prend en fin de plage à la percevoir par rétrospection, comme si tout cela s'était composé par un dessein collectif. Pour avoir beaucoup écouté, et depuis des lustres, de la musique (totalement) improvisée, idiomatique ou non, je me suis souvent fait la réflexion suivante : certaines de ces improvisations sont plus lisibles, plus accessibles, quand on les goûte au concert (ou en captation vidéo, quoique je ne sois pas friand des vidéos musicales). Mais ici on est dans l'un de ces cas, somme toute assez rares, où l'évidence musicale est telle qu'elle s'impose par la seule médiation de l'enregistrement sonore. Et je dois dire qu'avec ce disque, j'ai été embarqué dès l'abord, et transporté jusqu'à la fin de la plage conclusive. Je ne vois rien d'autre à dire que vous suggérer, vous aussi, de faire ce voyage, qui vaut vraiment d'être entrepris.

Xavier Prévost

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30 juin 2016 4 30 /06 /juin /2016 15:14
Pat Metheny : «  The unity sessions »

Nonesuch 2016
Pat Metheny ( g, g-synth, elec) , Chris Potter (ts, bs, clb, fl, g), Antonio Sanchez (dms, cajon), Ben Williams (b), Giulio Carmassi (p, flgh, vc),

Lorsque Pat Metheny s’est décidé à jouer avec Chris Potter en 2013, c’était la première fois qu’il rejouait avec un saxophoniste depuis Michael Brecker et Dewey Redman sur l’album 80/81.
C’est dire le chemin qu’il lui a fallu parcourir pour trouver celui qui pourrait enfin redevenir son âme soeur. Et lorsque l’on écoute ces sessions qui nous sont proposées par le label Nonesuch, on comprend que s’il a fallu du temps au guitariste c’est qu’il lui fallait trouver celui avec qui il pourrait être en parfaite osmose.
Et de fait Metheny/Potter est un affaire qui marche.
Qu’il soit au ténor, au soprano ou à la clarinette basse (et même, tiens, à la guitare), le saxophoniste de Chicago apporte une énergie incroyable au jeu de Metheny.
Les deux géants savent d’où ils viennent et ce qu’ils doivent au jazz des racines et c’est avec un grand plaisir qu’on les écoute improviser sur Cherokee, le standard de Ray Noble.
Si l’ensemble de l’album a parfois des airs un peu convenu, un peu académique au sens Methenien du terme, ronronnant parfois son jazz-rock, il faut bien avouer que lorsque le saxophoniste prend les choses en mains il en explose littéralement les lignes à l’image de ce One Day rendu incandescent par le souffle brûlant que Potter jette sur la marmite.
Metheny à l’électrique ou en acoustique ( guitare à laquelle il semble revenir de plus en plus) est une sorte de magicien de l’harmonie, science qui lui colle à peau et lui fait comme une autre respiration naturelle. Ainsi ce Meddley joué en solo et qui devrait être enseigné à toutes les écoles de jazz.
Derrière il faut absolument entendre le jeu littéralement époustouflant d’Antonio Sanchez, selon moi l’un des plus grands ( que dis-je, immense) batteur à l’heure actuelle. Dans sa revue, Downbeat le compare à Jack De Johnette. Exactement ce qui me vient à l’esprit en l’entendant. Mais je penche plus vers Elvin Jones dans le genre maître des forces, roi des artificiers.

Où l’on assiste à un moment d’anthologie sur Two folk songs totalement exacerbé par Potter et Sanchez au point que Metheny en est presque relégué au second plan. Mais plus loin, le génie de la six cordes reprend la main avec un lyrisme à couper le souffle sur Kin où les envolées de Metheny montent très très haut dans le ciel.
Et pour conclure l’album, les gaillards se lancent dans un rock échevelé et déjanté ( qui lequel Sanchez a dû se désintégrer tant il se transcende).

Double album, il fallait au moins cela tant Mettent et Potter ont des choses à se dire.
Quand ces deux-là mettent leur génie au service du partage et de la fusion des énergies, cela vole très très haut.
Unity Sessions fly high.

Jean-Marc Gelin

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