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1 décembre 2019 7 01 /12 /décembre /2019 09:18
PIERRICK HARDY ACOUSTIC QUARTET      L’OGRE INTACT

 

 

PIERRICK HARDY

ACOUSTIC QUARTET

L’OGRE INTACT

EMOUVANCE 2019, emv 1041.

Absilone

 

Un titre mystérieux pour un quartet acoustique singulier réuni par le guitariste breton Pierrick Hardy avec ses compagnons de jeu, la clarinettiste intrépide Catherine Delaunay, qui joue aussi du cor de basset, le leader d’Abalone (le violoniste Régis Huby) ou d’Emouvance (le contrebassiste Claude Tchamitchian).

Une musique de chambre actuelle, décloisonnée, ouverte à l’improvisation qui s’inspire autant de littérature que de peinture ou de tout autre discipline artistique, en six titres qui prennent le temps d’exprimer toute leur éloquence. Vaste terrain d’expérimentations puisque les compositions se réfèrent implicitement par le titre du moins- il ne s’agit jamais d’illustrations sonores- à des champs artistiques qui balaient large, du théâtre kabuki au buste hiératique d’Eléonore d’Aragon sculpté par Francesco Laurana ou aux fresques du XVème d’une inexorable danse macabre, fréquente source d' inspiration de la fin du Moyen Age. C’est un musée imaginaire que Pierrick Hardy recrée avec son quartet, mû sans doute par des découvertes, des chocs esthétiques assez forts pour déclencher, fertiliser son inspiration.

Plénitude des cordes de la guitare qui s’autorise des incursions en terres “trad”, embardées libres, volontiers dissonnantes du violon, chant sombre, instinctif de la basse qui pose les fondations, mélodieux contrechants de la clarinette qui peuvent enfler en crescendo.

On se laisse guider (presqu’aveuglément, comme en apesanteur) sur le chemin de la narration, du drame même, suivant l’argument évoqué dans chaque histoire, souligné habilement par le sens des nuances, ruptures douces, presqu’imperceptibles, murmures méditatifs qui se brisent en silences, soupirs délicats, ou soudaines irruptions de vifs éclats, plus tranchants.

Les influences se bousculent sous les arrangements précis, nerveux du guitariste qui joue aussi de la clarinette : ce n’est pas seulement pour créer de nouvelles atmosphères en usant de divers timbres, mariant cordes et bois, mais pour construire et déconstruire, souffler et apaiser.

Ainsi joue-t-il, virevoltant dans la rigueur, tiraillé entre diverses polarités,mû par l’élan rythmique du jazz, la fraîcheur mélodique du folk, les écarts du contemporain, au delà de la sensibilité et du lyrisme, contrôlant des dérèglements qui ne vont pas jusqu’au free. Chacun se cale dans l’interplay, à l’écoute bienveillante des trois autres, stimulé par les audacieuses trouvailles des copains.

Un album spontané et fraternel qui exalte la rencontre, loin des commencements qui sous-entendaient des promesses, accomplies à présent, continuant infatigablement l’aventure, justifiant le titre de ce groupe soudé. Des personnalités affirmées qui se soumettent volontiers à une écriture qui révèle une structure rigoureuse et dense, tout en donnant l’impression d’une création aussi continue qu’imprévisible.

 

Sophie Chambon

 

 

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