Deux nouveaux CD, deux rencontres de leaders, et deux albums marquants. Pour OGJB Quartet, c'est le deuxième disque, après « Bamako », enregistré trois ans plus tôt. Et pour l'autre CD, c'est la réunion de trois musiciens qui, à des moments différents, ont été les partenaires de Cecil Taylor
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The OGJB QUARTET «Ode to O»
Oliver Lake (saxophones alto & soprano), Graham Haynes (cornet, electronique), Joe Fonda (contrebasse), Barry Altschul (batterie, percussion)
New York, 7 & 8 juin 2019
TUM Records TUM CD 058 / Orkhêstra
Chaque membre apporte des compositions, que complètent des titres conçus collectivement. La première plage, qui est le thème-titre de l'album, est signée Barry Altschul. C'est un hommage à Ornette Coleman, dont le souvenir nourrit une partie de cette musique. Au fil des plages tend en effet à prévaloir une conception tendue de la musique, sur le plan mélodique comme dans les harmonies. Et ce goût d'aller loin, jusqu'au bord du point d'équilibre, à la limite entre la continuité du rythme et l'explosion en vol. On trouve aussi, comme chez Ornette, des thèmes lents et mélancoliques, dont les phrases déchirées marquent la fin d'un monde musical et sa mutation. Le tout respirant un esprit de profonde liberté, qui s'épanouit encore dans les deux plages totalement improvisées. C'est à la fois un manifeste pour une histoire assumée (celle du free jazz) et pour son prolongement dans le présent ; et, à ce double titre, précieux.
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ANDREW CYRILLE, WILLIAM PARKER & ENRICO RAVA «2 Blues for Cecil»
Enrico Rava (bugle), William Parker (contrebasse), Andrew Cyrille (batterie)
Paris, 1er et 2 février 2020
TUM Records TUM CD 059 / Orkhêstra
Enregistré à Paris (studio Ferber), au lendemain d'un concert au festival Sons d'Hiver, ce disque restitue les traces d'une aventure doublement commune : celle que fut, pour chacun d'eux, le fait de jouer avec Cecil Taylor, et celle aussi qui consiste à se rassembler dans le souvenir de ces expériences pour donner naissance à de nouvelles musiques.
©Luciano Rossetti
Quatre improvisations, dont deux blues (hétérodoxes et pourtant reliés à l'esprit de cette musique, et au sens de l'évocation de Cecil Taylor), et deux digressions très libres, chargées de l'esprit du jazz. Et aussi des compositions de chacun d'eux, où l'individualité se fond dans le projet collectif. Pour conclure, ce sera un standard, My Funny Valentine, peuplé par le souvenirs des fantômes (Miles, Chet) et pourtant doté d'une singularité neuve. Le grand art du standard en somme : pétrir le passé pour un horizon encore inédit. Bref ce trio est vraiment une belle rencontre, pour un grand moment de musique.
Xavier Prévost