Voilà un trio curieux et délicat qui entraîne dans une musique surréaliste (avec nos amis belges, rien d’étonnant), une sorte d’happening poétique, du aux effets des keyboards et Fender dont Jozef Dumoulin use en maître. Nous sommes invités à entrer, un peu à notre insu, dans une boîte à musique, rythmée par la pulse invariable, métronomique d’Eric Thielmans (« Fuga X »). Il n’est pas pour rien dans le sentiment d’inquiétante étrangeté de ce « Mei » que suit le bruitiste « Shinji» où le bassiste Trevor Dunn ferraille vaillamment avant d’enchaîner sur l’enjoué et lyrique «The Dragon Warrior». Tendues et atmosphériques, les compositions du claviériste-compositeur découpent des tranches d’une électro pop sombre mais toujours intrigante, comme dans « Sosuke ». Ce Rainbow Body aux titres qui concassent les rythmes, aventure un pied dans le lunaire tout en squattant notre salon, avec ce « Volkan » presque mystique, comme si Dumoulin s’était mis à l’orgue. Une musique enfantine « For The Monsters Under Our Bed » et spectrale, une électro sinueuse qui suit le son d’un clavier, fragmenté dans l’acier des machines. Si on avoue ne pas comprendre grand chose à l’écriture des titres, ni à l’inspiration « exotique » venue d’un est lointain , on se laisse faire (comme dans certains films) sans trop savoir pourquoi ni comment par ce spleen électro rock. Ce n’est pas toujours une partie de plaisir pour nos oreilles formatées plus classiquement ( ?) mais on sent néanmoins que les musiciens s’en sont donnés à cœur joie, mixés et supervisés par le grand Dré Pallemaert ! C’est souvent du hors piste, sautillant et triste, frémissant et léger, protéiforme : la musique du trio respire, chante toujours et domine le tempo avec aisance. On s’approche des nuages dans une langueur enveloppante avant de redescendre brusquement... entre envolée réjouissante, electro « ambient » et même new age…Décidément ce Rainbow body (douce allitération ) a quelque chose de dérangeant et de diablement envoûtant !
Sophie CHAMBON