Sunnyside Records 2011
Adam cruz (dm), Steve Cardenas (g), Edward Simon (p) ; Chris Potter (ts), Miguel Zenon (as), Steve Wilson (ss), Ben Street (cb)
Étonnant microcosme New-Yorkais qui n’en finit pas de voir émerger en son sein des jeunes talents du jazz que nous découvrons de ce côté-ci de l’Atlantique avec un certain retard.
Adam Cruz n’est pourtant pas un nouveau venu. Après 20 ans de carrière, le batteur a tourné avec les plus grands qu’il s’agisse de Chick Corea, de Patricia Barber,de Tom Harrell ou de Danilo Perez ou Daniel Sanchez. C’est sous le label Sunnyside que le batteur signe aujourd’hui son premier album en leader, autour de ses propres compositions et avec un casting de luxe.
Dans une mouvance post-Shorterienne en un poil plus funky, « Milestone » offre une image assez fidèle de ce jazz raffiné qui se joue aujourd’hui dans les clubs de big apple. Et le moins que l’on puisse dire c’est que « ça joue » ! Et à très haute altitude. Une rythmique ultra efficace et raffinée donne une sorte d’écrin plutôt classe à des solistes, tous remarquables. Au premier rang desquels, fidèles parmi les fidèles Steve Cardenas (à la guitare) et Edward Simon (au piano), peut être moins en lumière que les soufflants contribent à ancrer ce sextet dans un vraie cohérence de groupe.
Un groove sous-jacent et délicat, jamais lourd mais omniprésent comme une véritable rampe de lancement qu’Adam Cruz, avec Ben Street à la contrebasse offrent à leurs camarades.
Chis Potter toujours au sommet y apporte ici un son plus inhabituel, plus sauvage. Une sorte de « wild tone » dès l’ouverture de l’album où il déchaîne une foudre coltranienne presque trash ( Secret life). Miguel Zenon, autre soufflant à l’alto fait lui aussi parler sa verve et le fow irrépressiblement Parkerien aux accents latins (Emjé). Plus rare à entendre dans notre pays, Steve Wilson quant à lui culmine et y apparaît selon moi comme l’un des héros de cette session (Outer reaches). Et derrière ce fameux groove surgissent parfois des moments très épurés qui surgissent parfois dans l’album ( Resonnance ou Crepuscular), moments de flottement des harmonies dans une sorte d’entre-deux captivant.
Si l’on peut regretter que parfois, certaines des compositions d’Adam Cruz tournent un peu en rond et doivent leur salut à la grande musicalité de ses interprètes ( comme si elles ne se suffisaient pas toujours à elle mêmes, ex Ce Bird of Paradise un peu mollasson), il n’en reste pas mois qu’Adam Cruz nous offre le témoignage de ce qui se fait de vraiment bien dans le jazz aujourd’hui lorsqu’un groupe cohérent et solide s’attache à une esthétique assumée et offre un beau terrain de jeux à des solistes inspirés.
Jean-Marc Gelin