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3 juillet 2016 7 03 /07 /juillet /2016 19:28
SYLVIE COURVOISIER / MARK FELDMAN / IKUE MORI / EVAN PARKER « Miller's Tale »

SYLVIE COURVOISIER/MARK FELDMAN/IKUE MORI/EVAN PARKER « Miller's Tale »

Sylvie Courvoisier (piano), Mark Feldman (violon), Evan Parker (saxophones ténor & soprano), Ikue Mori (électronique)

Yonkers, New York, 21 septembre 2015

Intakt CD 270 / Orkhêstra

En 2014, ces musiciens s'étaient rencontrés pour une résidence au Stone de New York en une série de duos, et un set en quartette. Un an plus tard, la veille d'un concert au Roulette de Brooklyn, les voici en studio à Yonkers, en quartette, et aussi pour une série de duos. Comme c'est dans cette ville que le personnage principal de Mort d'un commis voyageur , la pièce d'Arthur Miller, provoque volontairement l'accident qui lui sera fatal, les musiciens ont divisé leurs improvisations en autant de séquences dont les titres renvoient à cette pièce. Et le titre de l'album évoque ce « Conte de Miller ». Quatre plages en quartette précèdent sur le CD cinq duos. Les instruments entrent en scène les uns après les autres, dans la vigueur de l'échange, et la liberté de l'improvisation. L'attention mutuelle est palpable, l'engagement collectif total, et l'on se laisse porter de bout en bout par ce jeu parfois dangereux, toujours empathique (mais pas emphatique!). Dans les improvisations en quartette comme dans les duos la forme s'élabore, comme par magie, et l'on se prend en fin de plage à la percevoir par rétrospection, comme si tout cela s'était composé par un dessein collectif. Pour avoir beaucoup écouté, et depuis des lustres, de la musique (totalement) improvisée, idiomatique ou non, je me suis souvent fait la réflexion suivante : certaines de ces improvisations sont plus lisibles, plus accessibles, quand on les goûte au concert (ou en captation vidéo, quoique je ne sois pas friand des vidéos musicales). Mais ici on est dans l'un de ces cas, somme toute assez rares, où l'évidence musicale est telle qu'elle s'impose par la seule médiation de l'enregistrement sonore. Et je dois dire qu'avec ce disque, j'ai été embarqué dès l'abord, et transporté jusqu'à la fin de la plage conclusive. Je ne vois rien d'autre à dire que vous suggérer, vous aussi, de faire ce voyage, qui vaut vraiment d'être entrepris.

Xavier Prévost

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30 juin 2016 4 30 /06 /juin /2016 15:14
Pat Metheny : «  The unity sessions »

Nonesuch 2016
Pat Metheny ( g, g-synth, elec) , Chris Potter (ts, bs, clb, fl, g), Antonio Sanchez (dms, cajon), Ben Williams (b), Giulio Carmassi (p, flgh, vc),

Lorsque Pat Metheny s’est décidé à jouer avec Chris Potter en 2013, c’était la première fois qu’il rejouait avec un saxophoniste depuis Michael Brecker et Dewey Redman sur l’album 80/81.
C’est dire le chemin qu’il lui a fallu parcourir pour trouver celui qui pourrait enfin redevenir son âme soeur. Et lorsque l’on écoute ces sessions qui nous sont proposées par le label Nonesuch, on comprend que s’il a fallu du temps au guitariste c’est qu’il lui fallait trouver celui avec qui il pourrait être en parfaite osmose.
Et de fait Metheny/Potter est un affaire qui marche.
Qu’il soit au ténor, au soprano ou à la clarinette basse (et même, tiens, à la guitare), le saxophoniste de Chicago apporte une énergie incroyable au jeu de Metheny.
Les deux géants savent d’où ils viennent et ce qu’ils doivent au jazz des racines et c’est avec un grand plaisir qu’on les écoute improviser sur Cherokee, le standard de Ray Noble.
Si l’ensemble de l’album a parfois des airs un peu convenu, un peu académique au sens Methenien du terme, ronronnant parfois son jazz-rock, il faut bien avouer que lorsque le saxophoniste prend les choses en mains il en explose littéralement les lignes à l’image de ce One Day rendu incandescent par le souffle brûlant que Potter jette sur la marmite.
Metheny à l’électrique ou en acoustique ( guitare à laquelle il semble revenir de plus en plus) est une sorte de magicien de l’harmonie, science qui lui colle à peau et lui fait comme une autre respiration naturelle. Ainsi ce Meddley joué en solo et qui devrait être enseigné à toutes les écoles de jazz.
Derrière il faut absolument entendre le jeu littéralement époustouflant d’Antonio Sanchez, selon moi l’un des plus grands ( que dis-je, immense) batteur à l’heure actuelle. Dans sa revue, Downbeat le compare à Jack De Johnette. Exactement ce qui me vient à l’esprit en l’entendant. Mais je penche plus vers Elvin Jones dans le genre maître des forces, roi des artificiers.

Où l’on assiste à un moment d’anthologie sur Two folk songs totalement exacerbé par Potter et Sanchez au point que Metheny en est presque relégué au second plan. Mais plus loin, le génie de la six cordes reprend la main avec un lyrisme à couper le souffle sur Kin où les envolées de Metheny montent très très haut dans le ciel.
Et pour conclure l’album, les gaillards se lancent dans un rock échevelé et déjanté ( qui lequel Sanchez a dû se désintégrer tant il se transcende).

Double album, il fallait au moins cela tant Mettent et Potter ont des choses à se dire.
Quand ces deux-là mettent leur génie au service du partage et de la fusion des énergies, cela vole très très haut.
Unity Sessions fly high.

Jean-Marc Gelin

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26 juin 2016 7 26 /06 /juin /2016 20:34
UMLAUT BIG BAND : «  Euro swing vol. 2 » Americans in Europe 1925-1940

UMLAUT BIG BAND : « Euro swing vol. 2 » Americans in Europe 1925-1940
Umlaut records 2016
Pierr-Antoine Badaroux (dir. as, ss), Antonin Tri-Hoang (as, cl), Jean Dousteyssier (ts, cl), Geoffroy Gesser (cl, ts, ss), Benjamin Dousteyssier (bs, as), Brice Pichard, Louis Laurain, Emil Stranberg (tp), Fidel Fourneyron, Michaël Ballue, Nicolas Grymonprez (tb), Romain Vuillemin (g), Bruno Ruder (p), Sébastien Beliah (cb), Antonin Gerbal (dms)- Enr. fev. 2015


Et revoilà la bande des jeunes gars du CNSM de Riccardo Del Fra sous la houlette de Pierre Antoine Badaroux qui se lancent à l’assaut de la swing Era, cet âge d’or du jazz, celle des américains que l’Europe découvrait entre 1925 et 1940. Sur la base de ce matériau que l’on retrouve sur disque et parfois sur partition, Pierre Antoine Badaroux s’est jeté corps et âme dans dans un énorme travail érudit de relevé minutieux. On y trouve des thèmes et des arrangements des grands jazzmen venus de ce côté-ci de l’atlantique faire entendre cette nouvelle musique venue tout droit de l’Amérique. Duke Ellington, de Benny Carter, Sam Wooding, Freddy Johnson, Lud Gluskin (ou encore moins connu une composition du clarinettiste américain Fud Livingston) sont à la base de ce matériau remis au goût du jour par Pierre-Antoine Badaroux.
Les arrangements sont ainsi exactement restitués dans leur configuration d’origine jusqu’au son qui semble particulièrement travaillé pour restituer au plus près les enregistrements de l’époque.
Ça swingue grave et surtout ça joue vraiment terrible. Tous les solistes sont plus inspirés les uns que les autres s’appropriant sans une once d’hésitation la tradition du jazz dont ils endossent avec brio les habits de lumière.

On se croirait au Boeuf sur Le Toit en train d’écouter la formation de Benny Carter.
Jouissif et instructif !
Jean-Marc Gelin


Ps : en prime, enfin un livret passionnant. celui, signé de Badaroux témoigne d’une réelle érudition et d’une vraie documentation sur le jazz ou à cette époque en Europe.

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26 juin 2016 7 26 /06 /juin /2016 15:57
BRANFORD MARSALIS QUARTET Special Guest Kurt Elling « Upward Spiral »

Branford Marsalis (saxophones ténor & soprano) ; Kurt Elling (voix), Joey Calderazzo (piano), Eric Revis (contrebasse), Justin Faulkner (batterie)

Okeh 889853068821 / Sony Music

La Nouvelle Orléans, 16-19 décembre 2015

Ils se sont rencontrés au Thelonious Monk Institute de Washington voici près de trois ans : Branford Marsalis participait au jury du concours 2013, consacrée au saxophone, et Kurt Elling, familier de la compétition pour avoir siégé plusieurs fois au jury des éditions vocales, était venu en habitué : c'est lors d'une conversation, au bar, que le projet est né. En fait il avait germé dans les discussions entre les membres du quartette pour élaborer le projet d'un futur disque, et la préférence du saxophoniste allait à ce chanteur qui a, selon ses mots, « la voix la plus flexible, la plus juste, et qui est un vrai musicien de jazz ». Les voici partis pour explorer un répertoire très ouvert, où Porgy and Bess côtoie une chanson de Sting (dont Branford a été souvent l'accompagnateur), de Tom Jobim, mais aussi les univers de Sinatra ou King Cole. Cela commence avec le grand air de Sporting Life à l'acte de III de Porgy and Bess, There's a Boat Dat's Leavin' Soon for New York : swing impeccable et belle expressivité du chanteur, contrechant puis chorus intense de sax soprano ; cavalcade du piano : on est tout de suite dans le vif du sujet ! Au fil des plages, côté instrumental, les citations émaillent les impros, et rebondissent d'un musicien à l'autre. Vient ensuite un arrangement très personnel sur le langoureux Blue Gardenia, sans singer Nat King Cole, mais en y apportant cette densité qui peut faire d'un succès populaire une œuvre d'art. Kurt Elling reprend aussi From One Island to Another , une chanson de l'inclassable et regretté Chris Whitley, pop-rocker texan et francophile, dont il surligne la mélancolie tout en construisant un beau tremplin pour les improvisations de ses partenaires. Puis c'est une chanson de Sting, mélancolie encore, avant un jazzissime Doxy, de Sonny Rollins, sur des paroles de Mark Murphy, dont Kurt Elling est certainement l'héritier le plus légitime. Et tout à l'avenant (reprise distanciée de Sinatra – un beau duo voix-sax sur I'm a Fool to Want You ; un thème peu connu de Jobim, Só Tinha de Ser Com Você ; un poème de Calvin Forbes, Momma Said, accompagné par une impro collective....), avec aussi des compositions originales, et une très belle version chantée d'un thème que Fred Hersch avait dédié aux mères (dont sa mère et sa grand mère) : West Virginia Rose. Beau CD, vraiment, qui est bien plus que l'occasion de faire un disque de plus dans une formule inédite.

Xavier Prévost

Le groupe, au complet, est en tournée en Europe jusqu'à la fin de juillet, et pour deux jours à Paris au New Morning, les 27 & 28 juin.

Des extraits sur Youtube :

https://www.youtube.com/watch?v=lBJeYZrovk8

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25 juin 2016 6 25 /06 /juin /2016 10:36
Christophe Panzani : «  Les âmes perdues - Piano duets»


Jazz & People 2016
Duos de piano avec Leonardo Montana, Guillaume Poncelet, Dan Tepfer, Edouard Ferlet, Yonathan Avishai, Laïa Genc, Tony Paeleman


Jamais pris en défaut depuis son lancement, quant à son exigence de qualité, le label de Vincent Bessieres, Jazz and People frappe à nouveau un coup superbe dans le paysage jazzistique avec la parution de cette nouvelle petite pépite, « Les âmes Perdues ».
Le saxophoniste Christophe Panzani membre à part entière de la formation de Carla Bley (excusez du peu !) s’était notamment fait remarquer en France avec la publication de « The Drop » une formation en trio qui l’associait à Frederico Casagrande (g) et Gauthier Garrigue (dms).
Aujourd’hui c’est un album tourné autour de 7 duos avec autant de pianistes qu’il nous propose. 7 thèmes pour 7 jeunes maîtres du piano jazz aux influences diverses. 7 duos pour 7 pièces où l’intimité du dialogue le dispute à la complicité subtile émergeant entre les claviers et les envolées du ténor. 7 pièces qui laissent l’empreinte d’une musique incroyablement inspiré. Jazz de chambre où l’écoute et le partage entre les musiciens forme le liant entre l’écriture et l’improvisation.
Panzani côtoie 7 pianistes qui chacun sont porteurs d'une identité propre et s'expriment dans un style différent d’accompagnement. Et pourtant, alors que l’on aurait pu craindre un patchwork sans fil conducteur, l’album s’entend comme un tout. On pourrait même croire, si l’on ne le savait pas, qu’il s’agit du même pianiste à chaque plage.
C’est qu’en fait s’il est des albums « habités », celui-là en fait assurément partie et cela tient en grande partie à ce supplément d’âme que le Saxophoniste parvient à insuffler tout au long de ces 7 pièces. Son expressivité est portée par une rare poétique et son sens de l’improvisation tout en maîtrise de la phrase et du son est prodigieuse. Chaque morceau succède à un autre avec une réelle exigence dans le propos.
C’est un dé fil de moments de grâce absolue. On pourrait bien sûr tous les citer comme ce duo avec la pianiste allemande Laïa Genc ( Die Grünen Bohnen), en clair-obscur et sur lequel Christophe Panzai apporte une intensité que seule les très grands saxophonistes savent
maîtriser. Aussitôt surgissent en mémoire quelques grands duos piano/sax qui ont marqué l’histoire du jazz. On remarquera aussi la magnifique entente avec Guillaume Poncelet sur cette belle composition « Traduire Eschyle";, composition poignante où Panzani insuffle une dimension prenante ou encore ce thème partagé avec le pianiste brésilien Leonardo Montana (Endless war) d’une très rare intensité, à la progression est aussi admirable que subtile.

Il est effectivement des albums qui se perdent et se trouvent à la fois. Se perdent dans de magnifiques méandres poétiques. Divaguent. Déambulent. Rêvent.
Et se trouvent. Trouvent l’alchimie. Trouvent la pierre philosophale. L’alliance sacrée, celle qui permet aux musiciens qui se sont trouvés, de voler au delà des sommets. Cette musique qui leur donnent des ailes. Et nous embarque avec.
Jean-Marc Gelin

Ps : une mention spéciale pour cette très belle pochette signée Ludovic Debeurne

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25 juin 2016 6 25 /06 /juin /2016 09:42
Ma playlist de l’été (I)...par Sophie Chambon

Ma playlist de l’été (I)
Avant de partir en vacances, préparez-vous musicalement : voici une petite liste de Cds que vous pouvez emporter.


COOL JAZZ
Verve/ Universal
Une compil pas dégoûtante du tout, à petit prix, pour vous détendre, en deux Cds du label Verve, 30 titres soit le plus délicieux des cocktails pour ceux qui ne connaissent pas le jazz ou ceux qui aimeraient suivre une playlist de rêve sans avoir à la concocter. Donc une cool mood en quelque sorte pour commencer l’été avec des voix comme Bobby McFerrin ( Don’t Worry Be Happy »), Nat King Cole, Madeleine Peyroux, Norah Jones (« Sunrise »), Shirley Horn, James Brown « Sunny », Nina Simone « Feeling Good », Gregory Porter, des tubes Dave Brubeck « Take five », Charlie Mingus « Goodbye Pork Pie Hat », Ray Charles ( « What’d I Say » ). La liste est longue mais non fastidieuse, que des pépites, des « incontournables ». Un choix non exhaustif mais qui dresse un portrait assez précis d’un jazz cool ce qui ne veut pas dire « mollasson ».

Ma playlist de l’été (I)...par Sophie Chambon

Jazz Violin Legends
OSD Cristal records

Autre compilation assez habituelle sur le site des DNJ, dans la collection OSD de Cristalrecords, un numéro thématique passionnant sur Jazz Violin Legends, toujours très instructif, puisque sélectionné par Claude Carrière que l’on ne présente plus : des pépites rarissimes enregistres entre 1927 et 1960, des liner notes impeccables, que du bonheur... le plus ancien étant « la première star du violon » Joe Venuti avec Eddie Lang (g), sur « Goin’ Places », l’électrisant Stuff Smith « the mad genius of the violon », Michel Warlop, Ray Nance, le plus « neuf » avec Joe Kennedy Jr avec Ahmad Jamal et son trio Israel Crosby (b) et Vernell Fournier (dms) dans « Tempo for two ». Rien à voir avec la famille des présidents, ce violoniste était un cousin de Benny Carter.
Le violon n’étant pas l’instrument le plus employé en jazz de par sa faible puissance sonore, cette sélection impeccable vous fera découvrir des choses rares comme ce « Cavernism » de Darnell Howard sur une composition et avec l’orchestre d’ Earl Hines en 1933...
www.cristalrecords.com Distribution Harmonia mundi
Trois souvenirs de ma jeunesse
Cristal records collection BO
Rien à voir mais il n’y a pas que le jazz....pour ceux qui s’intéressent à la musique de films, cristal records a aussi une superbe collection de BO et mon conseil sera d’emporter la BOF de Trois Souvenirs de ma jeunesse, le film d’Arnaud Desplechin ( 1er Prix à la quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes cette année) le « prequel » de Comment je me suis disputé... ma vie sexuelle qui lança la carrière d’un des réalisateurs français majeurs actuels. Musique de Grégoire Hetzel avec le London Chamber Orchestra, enregistré et mixé aux studios Abbey Road !
Sortie 20 mai 2016 distribution Sony www.cristalrecords.com
Séance de rattrapage :

Ma playlist de l’été (I)...par Sophie Chambon
Ma playlist de l’été (I)...par Sophie Chambon

OLIVIER ROBIN
JUNGLE BOX
Fresh Sound New Records
Julien Alour (tp, bugle), David Prez (ts), Vincent Bourgeyx (p), Damien Varaillon (cb), Olivier Robin (dms)


Voilà un album que j’ai laissé passer dans la précipitation des derniers mois et je tenais à revenir sur ce Jungle Box tout à fait réussi du batteur Olivier Robin, enregistré en mars 2014 et sorti sur le label FRESH SOUND NEW RECORDS. L’attaque précise et affirmée du batteur leader, dès le premier titre « The next one », nous plonge dans une musique aimée, celle du hard bop. Ce nouveau quintet, Jungle box, composé de musiciens confirmés a une connaissance certaine des styles et du jazz, joue en totale interaction,avec énergie, passion et fraîcheur ; à tel point que l’on met du temps à réaliser qu’il s’agit de 9 compositions originales du batteur. Preuve s’il en était de cette appropriation de la grammaire jazzistique. Formes et couleurs, chacun a sa place, formidables solistes, inspirés et toujours précis.... Julien Alour, le frère de Sophie, à la trompette, Vincent Bourgeyx au piano, le saxophoniste David Prez du collectif PJU entre autre, et Damien Varaillon, autre support rythmique d’envergure, entourent remarquablement Olivier Robin dans cette histoire d’une page de jazz, toujours renouvellée. Jubilatoire !

A suivre....
Sophie Chambon

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21 juin 2016 2 21 /06 /juin /2016 17:46
QÜNTÊT feat. Desdamona « Crosswords - Mots Croisés »

Jean Louis Pommier (trombone, slam), Desdamona (slam), Alban Darche (saxophones), Rémi Sciuto (saxophones, clarinette, flûte), Alain Vankenhove (trompette), François Thuillier (tuba), Christophe Lavergne (batterie)

Guidel (Morbihan), mai-juin 2015

Yolk Music J 2066 : http://www.yolkrecords.com

Dix-huit ans déjà Qüntêt (prononcer « Qu'une tête »), imaginé par le tromboniste Jean-Louis Pommier, promène sa singularité dans le paysage du jazz hexagonal. Ce musicien sarthois, dont la réputation s'étend même au-delà de nos frontières, conserve le goût des proximités anciennes : toujours associé au saxophoniste Alban Darche, pilier du label nantais Yolk, il explore sans relâche de nouveaux univers. L'Europa Jazz du Mans, et L'Estran à Guidel (où a été enregistré le CD), avaient accueilli en 2015 sa rencontre avec la slameuse états-unienne Desdamona, déjà repérée ici pour sa collaboration avec le groupe Ursus Minor ( « I Will Not Take "But" for an Answer », Nato). La vocaliste partage sa prosodie syncopée, et la rédaction des textes, avec le tromboniste, lequel signe les musiques (sauf celle d'une plage, Corps à corps, co-signée par les deux saxophonistes). La musique est un subtil dosage d'expressivité afro-américaine, de mélodies jazzeuropéennes, et de rythmes secoués par le temps présent. Ruptures, surprises, saillies impromptues et lyrisme assumé font que l'on s'accroche au flux musical sans le quitter. Les textes de Desdamona sont percutants, mais le flow respire aussi le goût de l'articulation poétique. La musique est finement composée, selon une dramaturgie qui intègre parfaitement les mots parlés (en franglais, spoken words). Les textes de Jean-Louis Pommier respirent l'humour du quotidien, et une fantaisie sans entraves, où s'insèrent parfois des répliques en anglais de Desdamona. Les musiciens, qui font chœur parfois aussi, débordent de fine énergie, et les improvisations, souvent concises, décoiffent furieusement. Bref c'est un vrai moment de plaisir, musical et textuel : là où l'on aurait pu craindre une concession à l'air du temps, c'est une vraie aventure artistique.

Xavier Prévost

Le CD sortira le 24 juin. Et le samedi 25 juin, quelques-uns de ces musiciens se retrouveront dans le concert intitulé Le Tombeau de Poulenc, sur des musiques signées Jean-Christophe Cholet, Alban Darche & Mathias Rüegg. C'est à 17h30 à Paris, Maison de la Radio, dernier concert de la saison « Jazz sur le vif » produite et programmée par Arnaud Merlin, avec en première partie le quartette de Matteo Bortone.

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14 juin 2016 2 14 /06 /juin /2016 10:55
JEREMY BRUGER TRIO « Reflections »

Jeremy Bruger (piano), Raphaël Dever (contrebasse), Mourad Benhammou (batterie)

Le Pré-Saint-Gervais, 12 mai 2015

Black & Blue BB 810.2 / Socadisc

Trois ans après « Jubilation », le pianiste normand récidive, avec ce nouveau disque, toujours empreint de la tradition pianistique des années 50-60, et avec toujours cet impeccable sens de l'idiome qui lui avait valu l'adoubement du pianiste Alain Jean-Marie pour son premier disque. Cette fois, c'est l'ami Claude Carrière qui signe le texte du livret, et il relève à juste titre le culot de ce jeune musicien qui ouvre l'album par un grand standard ellingtonien, Prelude to a Kiss, dans un arrangement personnel et décoiffant, à la façon de Ahmad Jamal, en le prenant sur un tempo plus vif, avec une dramaturgie où les partenaires (contrebasse et batterie) ont une place de choix. Dans tout le disque d'ailleurs, la réactivité triangulaire des musiciens est exemplaire. Le disque déroule un programme où d'autres standards de Broadway (Gershwin) côtoient des standards du jazz (George Shearing, Cedar Walton, Thelonious Monk), et des compositions originales. You Make Me Feel So Young, immortalisé par Sinatra, mais balisé côté piano par Oscar Peterson, est repris avec une hardiesse souple et une tranquille assurance, dans un swing détendu. Pour une valse de son cru ( Waltz #1 ), Jeremy Bruger regarde plus vers Hank Jones que du côté de Bill Evans, preuve d'indépendance d'esprit, d'autant que le résultat est d'une pertinence exemplaire. Plus loin le choix de The Mood Is Mellow n'est pas innocent : George Shearing l'avait composé, et il en grava une version au début des années 60 avec la rythmique historique d'Ahmad Jamal : Israel Crosby et Vernell Fournier. Là l'interprétation est très en phase avec l'original, jusque dans la recherche du perlé. Le pianiste a aussi pensé à écrire des thèmes pour permettre à ses deux complices de s'exprimer. Plus loin un chant de Noël du 18ème siècle, revu par un autre adepte de Jamal, le pianiste Eric Reed, s'inscrit également au programme du CD. Lequel se conclura par une interprétation de Reflections de Monk, très recueillie mais pas du tout servile, jouant sur la rondeur du son et le velouté de la résonance là où Monk privilégiait l'anguleux et l'abrupt : bel hommage de celui qui ne se veut pas épigone, mais un admirateur fervent.

Xavier Prévost

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12 juin 2016 7 12 /06 /juin /2016 21:29
Fabrice Martinez, Cuong Vu… ou la revanche des cuivres flamboyants

CUONG VU trio meets Pat METHENY
WEA - Nonesuch 2016
Cuong Vu (tp), Pat Metheny (g), Stomu Takeishi (b), Ted Poor (dms)


Cuong VU est un trompettiste de talent qui fait partie du groupe du guitariste mythique du Missouri.
Le trompettiste New-yorkais né à Saïgon a été en effet repéré en 2002 ( il avait 33 ans) par Pat Mettent qui l’a alors invité sur l’album « Speaking of now « et ne l’a plus guère quitté depuis. Au point, paraît-il qu’ils sont dans la vraie vie devenus très amis.
Alors forcément lorsqu’on a le privilège de jouer avec l’un des plus grands guitariste de l’histoire du jazz, cela pose son homme, et ça la pose assez haut d’ailleurs.
Dans ce nouvel album, le trompettiste confirme tout le bien que l’on pense de son talent. Il apporte dans sa petite mallette une sorte de feu jaillissant d’une étincelle électrique à coup de très longues tenues suraiguës ou de growl un peu à la manière des trombonistes ou encore de trilles boppiennes qui ne sont pas sans évoquer la puissance d’un Freddie Hubbard. Impressionnant ! Nourri au biberon de la scène New-Yorkaise Cuong Vu se nourrit d’une certaine forme classique du jazz, puisant à la fois dans des racines blues auxquelles il ajoute une bonne pincée de jazz rock et de néo-free. On l’entend ainsi sur des riffs presque boppiens sur Not Crazy. presque dans le free. Cuong Vu se montre toujours exceptionnel, littéralement étincelant. Le garçon maîtrise à peu près tous les registres et toutes les tonalités avec une énergie communicative. Pat Metheny lui apporte une réponse toujours débordante d’inspiration et de reverbes moelleuses à souhait. Ces deux-là se comprennent intuitivement. Le son smooth de Mettent et le tranchant de Cong Vu : une admirable recette douce amère.
Jean-Marc Gelin

Fabrice Martinez, Cuong Vu… ou la revanche des cuivres flamboyants

FABRICE MARTINEZ Chut ! : « Rebirth »
ONJ Records - L’autre Distribution 2016

Fabrice Martinez (tp, fchn), Fred Escoffier (cl), Bruno Chevillon (b), Eric Echampard (dms) + Stéphane Bartlet g)


J’étais de ceux qui étaient à la soirée inaugurale du nouvelONJ d’Olivier Benoit. Tout le petit groupe se mettait en place, jouait les rounds d’observation nous laissant alors plus ou moins médusés. Lorsque tout à coup, une zébrure vive déchira l’assistance. C’était Fabrice Marinez qui venait de prendre un chorus d’anthologie. Et ceux qui étaient là ce soir-là n’eurent aucun mal à se convaincre qu’ils étaient en présence de l’un des plus grands trompettistes de sa génération. Il faut dire qu’il y a chez Martinez un sens de la puissance maitrisée et surtout pas, surtout pas canalisée. Un sens de l’incandescence qui saurait réveiller un choeur de nones à l’heure vespérale. Entouré ici de ses fidèles followers, Fabrice Marinez signe un troisième album empreint d’électricité et de nappes sonores très rocks. Dans le dossier de presse il est évoqué l’influence de la Motown que j’avoue ne pas avoir bien compris tant j’ai plutôt le sentiment que le trompettiste allait puiser plutôt du côté du rock progressif.
Avec une technique éblouissante, Fabrice Martinez dont le cursus va autant de soliste à l’Opera de Paris, aux folles improvisations chez Andy Emler ou aux hallucinations du Supersonic de Thomas de Pourquery, Fabrice Marinez dis-je explose dans une sorte de flamboyance baroque au sein d’une pièce dont il est le personnage central, le héros.
Et pour tout dire, derrière ça joue grave. Fred Escoffier, son copain d’enfance tient les claviers et balance entre jungle et électro. De son côté Bruno Chevillons (énorme à la basse !) livre une partition assez exceptionnelle et bombarde une scène de guerre de riffs hallucinants. Quand à Eric Echampard, c’est simple il pose les bâtons de dynamite et allume les mèches.
Particulièrement bien écrit, cet album s’impose dans le paysage d’un jazz moderne qui groove rock et s’étend sur des brumes électriques étirées et planantes. Il y a des nappes plus où moins psychédéliques qui se déploient sous les ouvertures tranchantes au scalpel de Fabrice Martinez alors que Fred Escoffier prend des airs de King Crimson avec des montées paroxystiques irrésistibles (Prune) qui envoie la sauce avec une rythmique déployant son énergie portée par l'ultra puissance décoiffante du trompettiste . Âmes sensibles et tympans délicats s'abstenir.
L’influence crimsonienne et celle de Miles Davis se bousculent dans un Transe particulièrement inspiré et lunaire et avec un Éric Echampard survolté.

Comme dans le cas de Cuong Vu le mariage des sonorités moelleuses (ici de Fred Escoffier) avec le tranchant acéré de Martinez créé un son contrasté. Pas question de sourdine ici, au contraire le trompettiste lâche le son de manière assez ébouriffante.
Et c’est au final la révélation d’un trompettiste hors norme, de très très haute volée.

Jean-Marc Gelin

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12 juin 2016 7 12 /06 /juin /2016 20:02
Whispers

Label La Buissonne/ Harmonia mundi
Jean Christophe Cholet (p), Matthieu Michel( flh), Ramon Lopez (dms), Didier Irthusarry (acc)
www.labuissonne.com
www.jeanchristophecholet.com

Le titre est à lui seul un programme,, en totale adéquation avec la musique de cet album enregistré sur le label de La Buissonne. Sur les quarante et quelques minutes bien dosées du Cd, on reste dans la même tonalité, plongé dans un climat délicatement intense, qui s’insinuera en vous, que vous le vouliez ou non. L’instrumentation y est sans doute pour quelque chose, un dialogue piano/bugle d’une inquiétante douceur, surréel, dès l’introduction : 3 ‘ de ce « Fair » qui porte lui aussi joliment son nom, entre le pianiste, compositeur et chef d’orchestre Jean Christophe Cholet et l’un de ses vieux et fidèles complices de Diagonal, entre autre, le bugliste suisse Matthieu Michel.
Des petites pièces pas si faciles, du fait du pianiste, à l’exception de « He’s gone now » du saxophoniste flûtiste Charlie Mariano et de « Zemer » du chef d’orchestre Marc Lavry. Recherches faites, il s’agit d’une chanson du folklore israélien très prisée, connue aussi sous le nom de « Night over Mount Gilboa». Un signe de plus qui confirme l’intérêt de JC. Cholet, explorateur inlassable des musiques populaires, souvent européennes, dans son tentet.
Chuchotements sur cet album, impressionnisme des couleurs, choix respectueux et attentif des notes, silences, soupirs bienvenus pour une vision poétique, un rêve éveillé de musique qui se poursuit jusque sur la dernière plage, fantôme. Au son doux, moelleux du bugle qui ne s’interdit pas des variations subtiles, au toucher finement ourlé du piano (solo de 2’11 « Noctambule »), dès le troisième titre, ce « Rêve », tout à fait justifié, interviennent deux invités superbes, le percussionniste Ramon Lopez que l’on connaît dans des registres nettement plus énergiques et le délicieux accordéoniste, tout en retenue, Didier Irthusarry, qui s’y connait aussi en matière de « folklore» et de musiques populaires. Le groupe devient alors quartet, la palette sonore y gagne avec ce soutien rythmique et ces effets originaux du « piano à bretelles » : à écouter « Diss » ou encore ce « Junction Point », qui souligne la lumineuse et évidente simplicité de la direction artistique. Un album fluide, sensible, qu’il faudra écouter jusqu’au bout et plusieurs fois, pour en mesurer toute la fragile beauté. Une méditation tendre et bienvenue aujourd’hui.
Sophie Chambon

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