C’est en faisant une brocante l’autre jour que je suis tombé sur un petit bijou de la musique funk. Un Vynil de James Brown des années 70, « Sho is Funky down here » entièrement instrumental. Un bijou je vous dis ! Si vous le trouvez quelque part, n’hésitez pas.
Quelques semaines plus tard nous finissions l’année tristement en apprenant la disparition de James Brown. Et comme si ce n’était pas suffisant nous avions appris un peu avant la perte de Amhet Ertegun, figure légendaire du label Atlantic. Amhet vous savez le petit bonhomme rondouillard à lunettes qui un jour a découvert et propulsé Ray Charles.
Si je vous parle de cela ce n’est pas pour donner dans la nécro. C’est juste qu’il s’agit dans les deux cas d’un même symbole qui disparaît en ce triste mois de décembre. Celui d’une certaine musique populaire noire américaine. Celle qui ose. Avec Amhtet Ertegun le label Atlantic prend le risque de la révolution « Free jazz » d’Ornette Coleman après avoir lancé la bombe Ray Charles. Celle aussi qui du côté de James Brown bouscule l’Amérique bien pensante et loin des luttes du Black Power affiche avec une énergie délirante sa liberté sauvage, sa fougue libératrice. Avec la disparition de tels symboles on est simplement en droit de se demander qui aujourd’hui, de l’autre côté de l’Atlantique réveillera ce petit monde bien assoupi.
Mais tout arrive, regardez Ornette ! Auriez vous pu imaginer dans vos rêves les plus fous qu’il serait un jour récompensé d’un double Grammy Award pour l’ensemble de son œuvre d’une part et pour son « Grammar Sound » sorti l’an dernier ! Vous y croyez ! Lui, l’exemple même de l’artiste maudit, honni, haï sur presque toutes les scènes du monde en cette fin de 20 siècle, gravissant les marches pour qu’enfin son génie soit officiellement reconnu par les officiels officiants prendra alors une belle revanche sur une histoire qu’il ne doit qu’à son génie et à son admirable persévérance sans laquelle il n’est point de liberté.
Car les génies sont souvent nés de leur époque en choquant, en bouleversant, en surprenant au sens très fort du terme, en élevant contre eux les herses d’un conservatisme frileux, en déclenchant les foudres hostiles des gardiens de quelques temples endormis. Que nos vœux en ce début d’année aillent donc aux musiciens, chanteurs et artistes pour qu’à leur tour ils nous bouleversent, nous choquent, nous surprennent, suscitent de nouvelles batailles d’Hernani et qu’enfin ils abattent eux aussi les murs de nos chapelles tristement assoupies.