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14 septembre 2018 5 14 /09 /septembre /2018 20:24

Avec Stéphane Lerouge. Editions Fayard.366 pages. 24,50 euros.

 

 

Prodige prolixe, protéiforme. Tel est Michel Legrand. A 86 ans, il n’a perdu ni sa vivacité ni son âme juvénile. « J’espère ne jamais devenir ce que l’on appelle froidement un grand professionnel », confie le compositeur aux 160 musiques de films dans un récit de sa vie (J’ai le regret de vous dire oui). Cet automne le verra à la « une » de l’actualité avec deux événements, la sortie du film posthume d’Orson Welles, tourné entre 1970 et 1976, et enfin monté « The Other side of the wind » (le 2 novembre sur Netflix et en salle aux Etats-Unis) et une adaptation scénique de Peau d’Ane pour la réouverture (le 14 novembre) du Théâtre Marigny. Sa méthode de travail ? « Il faut créer en se laissant porter de façon un peu naïve, sans trop se poser de questions d’adulte ». Il oublie les milliers d’heures passées par l’adolescent sous la férule de Nadia Boulanger, cinq années durant au Conservatoire de Paris. Le succès arrivera vite pour le jeune compositeur : des chansons (à commencer par  La valse des lilas), des orchestrations, des arrangements qui lui ouvrent la voie du marché américain. Il a seulement 26 ans quand Columbia, qui a fait recette aux USA avec son album I Love Paris, lui donne carte blanche pour un enregistrement de jazz : ce sera Legrand Jazz  avec Miles Davis, John Coltrane, Ben Webster, Phil Woods… Suivront des albums avec Sarah Vaughan, Stéphane Grappelli, Stan Getz . Hélas, une maladie fatale empêchera  Bill Evans de concrétiser ses projets avec celui qui est devenu « Big Mike  mais il retrouvera Miles pour le film Dingo, sorti en 1992 après la disparition du Prince des ténèbres.  Tout au long de près de sept décennies de carrière, le jazz aura toujours été au cœur des créations de Michel Legrand, ne serait-ce que dans ses  deux chef d’œuvre réalisés véritablement à quatre mains avec Jacques Demy (les Parapluies de Cherbourg et les Demoiselles de Rochefort). La personnalité même du compositeur aux mille talents est jazz. Tout en fougue, artiste de risques, généreux en notes, peu avare de compliments, prompt à la critique. Cette autobiographie lui permet de tresser des louanges (Nadia Boulanger, Barbra Streisand, Jacques Canetti, Shelly Manne, Boris Vian, Françoise Sagan…) et de dire ses quatre vérités (Godard, Boulez, Douste-Blazy, Melville, Drucker…) Mais au-delà des anecdotes, « J’ai le regret de vous dire oui » donne au lecteur l’occasion de parcourir allègrement une carrière musicale rare menée au grand galop.


Jean-Louis Lemarchand
 PS : Stéphane Lerouge qui réalise chez Universal Music France la collection Ecoutez le cinéma travaille depuis 25 ans avec Michel Legrand sur ses rééditions phonographiques.

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