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14 novembre 2024 4 14 /11 /novembre /2024 09:43

     Un des maîtres de la batterie, Roy Haynes, qui joua avec les plus grands (Charlie Parker, Louis Armstrong, Lester Young, Miles Davis, Eric Dolphy, John Coltrane…) et dont le style tout en finesse suscite une admiration unanime chez les musiciens et amateurs de jazz, est décédé le 12 novembre dans l’État de New-York, à l’âge de 99 ans.
 


     « Le père de la batterie moderne », selon le guitariste Pat Metheny, excellant dans l’expression minimale, aux balais ou à la cymbale charleston, dernier acteur de la grande épopée du be-bop, Roy Haynes n’aura eu qu’un seul regret dans sa vie, ne pas avoir intégré l’orchestre de Duke Ellington. « Duke voulait que je rejoigne son orchestre, nous confia-t-il en 2009. L’ambiance qui régnait dans le groupe ne me convenait pas. Mais l’idée que Duke Ellington souhaitait m’engager, voyez-vous, c’était la plus grande marque de respect au monde qui m’était adressée ».
 


     Le batteur Jack DeJohnette définit ainsi le style de Roy Haynes : « une alliance rare de l’école de la rue, d’une haute sophistication et de soul ».   Lui remettant les insignes de commandeur des Arts et Lettres en mars 2009 à Paris, la ministre de la culture Christine Albanel relevait « le swing inimitable, le jeu crépitant, sophistiqué et élégant ». Elégant derrière ses futs comme à la ville : ne fut-il pas classé par le magazine Esquire en 1960 parmi les hommes les mieux habillés des Etats-Unis aux côtés de Miles Davis ?

     Pendant plus de 80 ans (le natif de Roxbury, Massachusetts le 13 mars 1925, fils d’un organiste, donna ses premiers concerts à 17 ans), Roy Haynes n’aura cessé d’innover, influençant des générations de batteurs et donna le goût de la batterie à ses descendants (son fils Craig et son petit-fils Marcus Gilmore). Et dans le même temps, il aura toujours donné sa chance à de jeunes talents au sein de son propre groupe. Une double contribution à l’histoire du jazz qui lui valut en 2011 de recevoir un « Grammy Award Life Achievement ».
 


     Laissons le dernier mot au saxophoniste Stan Getz son contemporain (1927-1991) : « Roy atteint les sommets de la finesse, du goût et du toucher. Il a l’oreille la plus développée de ce côté-ci du paradis ».

 


Jean-Louis Lemarchand.

 


N.B. : La carrière de Roy Haynes est passée en revue dans un coffret de trois cd et un DVD publiés en 2008 par Dreyfus Jazz «  A life in Time : The Roy Haynes story ».

Il propose des enregistrements avec Miles Davis, Charlie Parker, Stan Getz, John Coltrane, Chick Corea entre autres et sous son propre nom en tant que leader.

Il comprend un livret signé par Ashley Kahn, historien du jazz et un DVD de 40 minutes avec interviews de Roy Haynes et concerts exclusifs.

 

On pourra lire avec intérêt dans l’histoire du Be-Bop d’Alain Gerber (Frémeaux & Associés. 2024) le chapitre consacré à Roy Haynes « l’homme de la parole heureuse ».


©photo Jb Millot, J.-L. Lemarchand et X. (D.R.)

 

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4 novembre 2024 1 04 /11 /novembre /2024 16:28


     Précoce, prolifique, protéiforme. Tel était Quincy Jones, compositeur - arrangeur - producteur - interprète, disparu le 3 novembre à Los Angeles à 91 ans.
      Son nom restera associé à des œuvres marquantes de l’histoire de la musique afro-américaine sans frontières, signées Ray Charles, Franck Sinatra, Michael Jackson, Miles Davis.

 


     Dès l’âge de 16 ans, Quincy Delight Jr Jones, né à Chicago le 14 mars 1932, livre ses premières compositions. Rejoignant en 1951, le grand orchestre de Lionel Hampton, le jeune trompettiste va découvrir l’Europe et spécialement la France où il revient en 1957 pour suivre l’enseignement de Nadia Boulanger, qui comptera également parmi ses élèves un autre polyvalent des notes, Michel Legrand. « J’ai toujours ressenti une connivence presque cosmique avec la France », confiait-il en 1990 à Télérama, peu après avoir reçu des mains de Jacques Chirac la cravate de commandeur de la Légion d’honneur.


     Directeur artistique du label Barclay dans les années 60, il allait œuvrer dans les studios parisiens avec notamment Jacques Brel ou Henri Salvador. A Paris, le musicien put mesurer sa popularité lors d’un concert-hommage organisé le 27 juin 2019 à l’Accor-Arena où Quincy (Mr Q pour les gens du spectacle) assis sur un canapé sur scène vit-et entendit-son œuvre titanesque interprétée par un grand orchestre dirigé par Jules Buckley et quelques stars (Selah Sue, Richard Bona, Marcus Miller…).

 

     Entre les cours de composition de Nadia Boulanger et l’hommage du public parisien, plus de 60 ans d’une carrière foisonnante. A ses débuts, « This is how I feel about jazz* » (ABC Paramount) enregistré en 1957 en big band (Art Farmer, Phil Woods, Clark Terry…), “The genius of Ray Charles**” (Atlantic) en 1959, toujours avec grand orchestre (y compris une section de cordes).

 

*https://www.youtube.com/watch?v=W9wiizRzyLk&list=PLBJenJIJrq0zehq8tKd8teZiOSjk2bBG2


**https://www.youtube.com/watch?v=wraJLUuaHG8


     Arrive alors sa période hollywoodienne, où Quincy va travailler pour les studios, et imprimer sa patte aux musiques pour la télévision et le cinéma (plus de 30 films dont « In The Heat of the Night » de Norman Jewison en 1967).

     Opéré du cerveau après une rupture d’anévrisme en août 1974, il ralentit à peine le rythme. Création de sa maison de disques, Qwest Records en 1975, et –ce qui allait lui donner une renommée planétaire- découverte d’un jeune chanteur-danseur Michael Jackson qui se traduira par trois albums, Off the Wall, Thriller (1982, 8 Grammy Awards) et Bad.

 

     Producteur à succès, chef d’entreprise -il accéda en 1964 à la vice-présidence du label Mercury, premier noir à détenir un poste à si haute responsabilité dans l’industrie du disque- Quincy Jones n’aura jamais oublié le jazz. En 1991, il devait réaliser un vieux rêve, rejouer la musique de Gil Evans avec Miles Davis (4 albums gravés à la fin des années 50, Miles Ahead, Porgy & Bess, Sketches of Spain, Quiet Nights). L’évènement se déroule sur la scène à Montreux le 8 juillet. Miles n’a plus que quelques semaines à vivre (il décède le 28 septembre à Los Angeles) mais, se souvenait Quincy Jones, « Miles fit le plus large sourire que j’ai jamais vu de ma vie ». Tel était aussi Quincy Jones, un virtuose au grand cœur.

 

Jean-Louis Lemarchand.
 

©Damon Winter /The New York Times & X. (R.D).

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26 octobre 2024 6 26 /10 /octobre /2024 10:41

   Le photographe Guy Le Querrec, bien connu pour son travail sur le jazz (et pas seulement), membre de la prestigieuse agence Magnum depuis 1977, a reçu le 24 octobre à Redon (Ille et Vilaine) où il réside la croix d’Officier des Arts et des Lettres « pour la constance et la qualité de sa contribution au rayonnement de la création artistique française ».  

 

     François Lacharme, président honoraire de l’Académie du Jazz, qui lui a remis les insignes de l’ordre, a salué l’étonnante capacité de Guy Le Querrec à pratiquer « la culture de l’effacement » dans la pratique de son art, pour se trouver dans les meilleures conditions afin de « saisir l’instant solennel » chez les musicien(ne)s de jazz, par nature « rétifs et difficiles à capturer ». En réponse, le photographe a simplement indiqué qu’il souhaitait « se mettre au rythme » des autres et que dans son travail avec son fidèle Leica, il cherchait à « s’escamoter » pour « ajuster le déclic » au bon moment.  


     Présent à la cérémonie, le maire de Redon, Pascal Duchêne, professeur de philosophie, est resté dans le même registre en évoquant le concept grec du Kairos, l’art de « réaliser le bon acte au bon instant ».

    

      La vingtaine d’amis venus à Redon à cette occasion, représentant les mondes de la photographie, du jazz, de l’édition, a pu constater que le « héros du jour », parisien aux racines bretonnes, n’avait rien perdu de sa faconde ni de sa truculence.

 

     Lauréat du Grand prix de la ville de Paris (1998), Guy Le Querrec a traité au cours de sa carrière de différents sujets de société (la famille, les vacances…), couvert l’actualité politique (la Révolution des œillets au Portugal en 1974, la Chine, les Etats-Unis), illustré la vie quotidienne en Afrique, sans oublier la Bretagne de ses ancêtres et, ce qui lui apporta la notoriété, le monde du jazz. Son tout dernier ouvrage, paru en 2023, (« Michel Portal, au fur et à mesures ». Textes de Jean Rochard. Editions de Juillet) retrace un demi-siècle de compagnonnage avec le poly-instrumentiste. Un saxophoniste de ses proches a ainsi défini Guy Le Querrec : « il n’est pas un photographe de jazz, il est un photographe jazz ».

 

 

Jean-Louis Lemarchand, à Redon.

 

©photo Sergine Laloux et J.-L. Lemarchand

 

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30 septembre 2024 1 30 /09 /septembre /2024 22:38

     ©photo jacques Sassier/Gallimard/Opale

 

     Poète et écrivain-chroniqueur de jazz, Jacques Réda nous a quittés le 30 septembre à l’âge de 94 ans à Hyères. Lorrain né à à Lunéville (24 janvier 1929), il laisse une œuvre considérable de plus de 80 ouvrages, le dernier publié en 2023, ''Leçons de l'arbre et du vent'', et consacré à l’un de ses thèmes préférés, la vie et la nature à Paris où il aimait se promener, à pied ou à vélosolex.

     Lauréat de distinctions prestigieuses (Grand Prix de la poésie de l'Académie française en 1997 et Goncourt de la poésie pour La Course en 1999), Jacques Réda entra dans le milieu littéraire parisien au début des années 50 : éditeur chez Gallimard à partir de 1975, il fut également rédacteur en chef de La Nouvelle Revue française de septembre 1987 à décembre 1995.

     Avec la poésie, la musique fut sa seconde passion, et plus spécialement le jazz. Collaborateur de Jazz Magazine à compter de 1963, Jacques Réda confia ses analyses au mensuel pendant un bon demi-siècle, et publia de nombreux ouvrages qui marquèrent les esprits : Anthologie des musiciens de jazz  (Stock), ‘’L’improviste, une lecture du jazz’’, ‘’Jouer le jeu’’, ‘’Le grand orchestre’’, consacré à Duke Ellington (tous trois chez Gallimard), ‘’Autobiographie du jazz’’ (Climats), ‘’Une civilisation du rythme'' (Buchet-Chastel) et dernier en date ‘’Le chant du possible, écrire le jazz'' (Fario, 2021).
« Grand amoureux des mots, son œuvre poétique a rendu hommage au jazz ou encore à Paris, dont il fut un insatiable arpenteur », a salué la ministre de la Culture Rachida Dati.

     Jacques Réda avait ainsi résumé son style :« Peut-être doit-on écrire à la fois comme tout le monde et comme personne, si l’on en croit beaucoup d’exemples fameux. »
A ses yeux, le jazz ne pouvait se séparer de deux éléments indispensables, le blues et le rythme, et dépassait sa seule fonction musicale : « de quelque façon dont on l’analyse (la sociologie, la politique et même l’économie), il semble que le jazz ait toujours voulu être plus ou autre chose que lui-même ».

    

Jean-Louis Lemarchand.

 

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23 septembre 2024 1 23 /09 /septembre /2024 20:43

     Saxophoniste ténor à la large sonorité, Benny Golson, qui vient de disparaître à New York le 21 septembre à l’âge de 95 ans, restera dans l’histoire du jazz comme une des figures Emblématiques du hard-bop.

 

     Natif de Philadelphie (25 janvier 1929), la ville qui donna au jazz John Coltrane et tant d’autres, il doit sa notoriété à la composition de quelques titres devenus des standards tels que ‘’Along Came Betty’’, ‘’Park Avenue Petit’’, "Stablemates’’, "I Remember Clifford", "Whisper Not", ‘’Killer Joe’’ - qu’il interprète dans la scène finale du film de Steven Spielberg "Le Terminal"- ou encore "Blues March", qui fut l’indicatif de l'émission d'Europe 1 "Pour ceux qui aiment le jazz" de Frank Ténot et Daniel Filipacchi dans les années 1960. Benny Golson, souligne l’ancien rédacteur en chef de Jazz Magazine, Franck Bergerot, « savait donner du corps à une mélodie qu’il s’agisse d’un quintette ou d’un big band ».

     Ayant appris le métier dans des formations de rhythm’n blues et au sein du grand orchestre de Dizzy Gillespie, Benny Golson prend la direction musicale des Jazz Messengers d’Art Blakey en 1958, poste qu’il occupe quelques mois avant de fonder son propre groupe, le Jazztet en 1959 (le 17 novembre au Five Spot) avec le trompettiste Art Farmer, formation qui va marquer l’histoire au cours de ses deux années d’existence.

     Arrangeur très demandé dans le milieu du jazz (Ella Fitzgerald, Count Basie, Shirley Horn …), Benny Golson a également prêté ses talents de compositeur au cinéma ou à des shows télévisés tels que Mission Impossible ou le Cosby Show. Signe de sa renommée, il figure dans la célébrissime photo prise par Art Kane en 1958, A Great Day in Harlem ; il ne reste plus désormais qu’un seul survivant des 57 musiciens présentés sur ce cliché légendaire réalisé à New-York : Sonny Rollins

 

     Jean-Louis Lemarchand.
 

 

 

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19 septembre 2024 4 19 /09 /septembre /2024 11:04


     Nous apprenons le décès le 14 septembre à Perpignan, à l’âge de 73 ans, de Joël Mettay, éditeur, qui avait obtenu le Prix du Livre de Jazz de l’Académie du Jazz deux années consécutives, en 2011 pour « KO-KO » d’Alain Pailler (consacré à l’enregistrement de ce sommet du style jungle par Duke Ellington le 6 mars 1940,) et en 2012 pour « Petit Dictionnaire Incomplet des Incompris » d’Alain Gerber (ouvrage dédié aux héros de l’ombre de l’histoire du jazz de Lorez Alexandria à Attila Zoller).

 

     Après une carrière de journaliste au quotidien « L’INDEPENDANT » de Perpignan, Joël Mettay avait  créé en 2002 à CÉRET, Pyrénées Orientales (« La Mecque du cubisme ») une maison d’édition, « ALTER EGO » dédiée aux arts modernes et contemporains et qui avait lancé en 2010 une collection « Jazz Impressions » ; à ce titre ont été publiés des ouvrages d’Alain Gerber (« Bu,Bud, Bird, Mingus, Martial et autres fauteurs de trouble »), Michel Arcens Instants de jazz » avec des photos de Jean-Jacques Pussiau, « John Coltrane, la musique sans raison »…), Jean-Pierre Moussaron (« Les blessures du désir, pulsions et puissance en jazz »), Jean-Louis Lemarchand (« Ce jour-là sur la planète jazz », « Paroles de jazz » avec une préface de Jean Delmas), ou encore Jacques B. Hess (« Hess-O-Hess, chroniques 1966-1971 » avec une préface de Lucien Malson).

     Joël Mettay présidait l’Association des Amis du Musée d’Art Moderne de Céret et s’impliquait également dans l’activité du Mémorial de Rivesaltes. Journaliste « indomptable », selon l'un de ses confrères à « l’Indépendant », il avait en 1997 dénoncé la destruction du fichier juif du camp de Rivesaltes découvert à la décharge publique, un article qui lui coûta son poste mais qui contribua à raviver la mémoire de ce lieu dans la conscience collective.

     Il était l’auteur de « L’archipel du mépris, une histoire du camp de Rivesaltes de 1939 à nos jours ». Il participait à l’Association Prix Walter Benjamin (intellectuel allemand qui décida de se suicider en septembre 1940 à Port-Bou à la frontière espagnole pour échapper au nazisme et à ses complices français et espagnols), qui salue aujourd’hui son engagement en évoquant un homme. « ... qui eut de l’honneur sans la gloire. De la grandeur sans l’éclat. De la dignité sans la solde ».

    

     Ses amis lui rendront un dernier adieu aujourd’hui, jeudi 19 septembre, à Céret.

 

Jean-Louis Lemarchand.

 

Témoignage de ses amis du Festival Jazz en Tech

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14 mai 2024 2 14 /05 /mai /2024 10:03

     « J’envisage toujours la musique comme quelque chose en progrès, une façon de progresser soi-même ». Cette confidence de Christian Escoudé, figurant dans le livret de son dernier (et ultime) album « ANCRAGE » (Label Ouest/L’autre distribution) sorti dans les bacs en avril prend une résonance particulière ce 13 mai, à l’annonce du décès ce jour même du guitariste, à 76 ans.
 

 

     Affaibli, le jazzman n’avait pu honorer les deux concerts prévus les 3 et 4 mai au club parisien Le Sunside. Ecouter ce disque permet de mesurer l’ouverture d’esprit d’un guitariste qui tout en respectant l’héritage de son frère de la communauté manouche, Django Reinhardt, revendiquait un attachement aussi bien à la chanson française (Bécaud, Aznavour ici et dans des temps anciens Brassens) qu’au jazz West Coast, par un hommage à Paul Desmond, tout en délicatesse. (Il me revient l’hommage qu’il rendit en 2014 lors d’une cérémonie de remise des prix de l’Académie du Jazz au théâtre du Chatelet à un prince de la guitare, Jim Hall).
 

     « Champion du phrasé souple et du lyrisme », selon le chroniqueur Xavier Prévost, Christian Escoudé a emprunté tous les chemins de la musique du XXème siècle : la guitare tzigane avec son père dans sa Charente natale (né à Angoulême le 23 septembre 1947), les airs populaires dans les bals où il apprend « le métier », le jazz sous toutes ses déclinaisons (be-bop, fusion…) avant de « monter » à St Germain des Prés et à ses caves (Le chat qui pêche) où il rencontre Eddy Louiss, Aldo Romano, Steve Potts...
 


     Son abondante discographie (une cinquantaine d’albums en cinquante ans) en témoigne : le « trio gitan », initiative du producteur Jean-Marie Salhani, avec deux collègues guitaristes (Boulou Ferré et Babik Reinhardt), un autre trio à cordes avec Didier Lockwood et Philip Catherine, le big band de Martial Solal, un enregistrement en direct avec le pianiste Hank Jones au mythique Village Vanguard de New-York, une tournée mondiale avec un « guitar hero », John McLaughlin… L’interprète était aussi compositeur et signa notamment « A suite for Gypsies » (Emarcy-Polygram 1998), rencontre d’un quartet de jazz et d’un quatuor à cordes, « dédiée à la mémoire des milliers d’enfants tsiganes morts dans les camps de concentration nazis ».
 


     Au vu de ses « états de service », on ne s’étonnera pas que Christian Escoudé ait décroché la plus prestigieuse récompense de l’Académie du Jazz, le Prix Django Reinhardt, succédant en 1976 à un autre guitariste, au destin tragique, Joseph Dejean. Le lauréat 1975 trouva la mort le 9 juin 1976 dans un accident de voiture au retour d’un concert dans les Charentes. Région où Christian Escoudé s’était retiré voici quelques années, « retournant à la vie rurale » (dixit Boulou Ferré) et élevant des chevaux.

 

Jean-Louis Lemarchand.

 

Crédit photo Bérengère Desmettre


    

 

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6 mai 2024 1 06 /05 /mai /2024 15:24

     Le jury du Prix René URTREGER de l’ECUJE (Espace culturel et universitaire juif d’Europe) destiné aux jeunes talents du jazz (moins de 30 ans) a tranché le 2 mai pour l’édition 2024 en distinguant parmi les cinq groupes en compétition NINANDA, formation vocale et instrumentale animée par deux jeunes musiciennes Nina GAT (piano, chant) et Ananda BRANDÃO (batterie, chant) et constituée également de Maxime BOYER (guitare) et  Mathieu SCALA (contrebasse).

 

Nina Gat et Ananda Brandão composent, chantent, arrangent, en explorant de nouveaux métissages et exposent leurs compositions originales, en portugais, hébreu, français et anglais. Ninanda que l’on a entendu au SUNSET en mars se produira dans un autre club parisien, le BAISER SALÉ, le 29 juin et sur la scène du Festival Jazz à Vienne le 1er juillet.

Ninanda - Savlanout Hama

    

     Le jury a décerné un Prix Spécial au Jeremie LUCCHESE Groupe, formation du saxophoniste ténor qui comprend Oliver Van Niekerk (guitare), Levi Harvey (piano), Gabriel Sauzay (contrebasse) et Paul Lefèvre (batterie). Le saxophoniste méridional ancien élève du CNSM a sorti en octobre 2023 son premier album "Essais pour l'imaginaire".

Vélioge

 

     Les récompenses ont été remises aux lauréats lors d’une soirée à l’ECUJE* le 2 mai par René URTREGER, notre légende du piano, Olivier HUTMAN, pianiste et programmateur des saisons Jazz à l'Ecuje, et Gad IBGUI, directeur de l'Ecuje.


     Le jury était composé cette année de Frédéric Charbaut (Festival Jazz à Saint-Germain des Prés, FIP), Alex Dutilh ( France Musique ), Jean-Charles Doukhan (TSF JAZZ),  Olivier Hutman (pianiste, programmateur des saisons Jazz à l’Ecuje),  Alice Leclercq (Jazz News) et  Daniel Yvinec (ancien directeur de l’ONJ, directeur artistique).

 

      Lors de sa première édition en 2023, le prix René Urtreger avait été attribué au groupe CONGE SPATIAL formé de Pierre LAPPRAND, saxophones et effets, et Etienne MANCHON, piano, Fender Rhodes et effets, (programmé le 11 mai au Festival Jazz sous les Pommiers à Coutances) quand un prix spécial du jury était allé au trio du pianiste Mark PRIORE (qui depuis a décroché le Prix Evidence 2023 décerné par l’Académie du Jazz).

 

Jean-Louis LEMARCHAND.

 

*119, rue La Fayette. 75009.
L’Ecuje propose deux concerts pour clore sa saison 2023-2024, le 30 mai avec Minino Garay et le 20 juin Tierney Sutton).

 

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14 mars 2024 4 14 /03 /mars /2024 17:01


     Surdoué de la guitare, n’ayant qu’une seule ligne de conduite, la liberté, Sylvain Luc est décédé brutalement le 13 mars à l’âge de 58 ans, des suites d’un malaise cardiaque, témoigne son épouse, la guitariste classique Marylise Florid.

 

     Adepte de la « guitare plurielle », pratiquant toutes les formes de l'instrument -acoustique, électrique, cordes en acier, en nylon ...- et tous les styles -jazz, classique, brésilien, rock, chansons françaises...- Sylvain Luc se montrait intransigeant avec le son qu’il voulait, nous avait-il confié en 2011, « pur, neutre, bio ». Cette année-là, l’artiste né à Bayonne le 7 avril 1965, avait reçu le Prix Django Reinhardt 2010 de l’Académie du Jazz des mains de Michel Legrand qui avait alors vanté ses qualités « rares ».

 

     Pratiquant la guitare dès l’âge de 4 ans, Sylvain Luc enregistra son premier album, consacré au folklore basque, avec ses frères Gérard et Serge. Après avoir joué dans les bals de la région –la meilleure école- il « monte » à Paris où il se révèle en 1993, avec un album en guitare solo, « PIAIA ».

 

     Il « fait le métier » en accompagnant Catherine Lara, Michel Jonasz puis s’engage délibérément dans le jazz : avec Richard Galliano (son collègue au sein du label Dreyfus), le trio Sud formé avec André Ceccarelli et Jean-Marc Jafet, Michel Portal (son voisin du pays basque), Stéphane Belmondo, mais aussi un autre grand de la guitare Biréli Lagrene (dans deux albums en duos).

 

     Lui qui confiait se situer aussi proche de Michel Portal que de Marcel Azzola, aimait aussi le répertoire de la chanson, les Beatles par exemple, mais surtout les classiques du patrimoine français, Edith Piaf (Richard Galliano & Sylvain Luc -La vie en rose-, rencontres avec Edith Piaf et Gus Viseur. Milan/Universal. Janvier 2015) ou Charles Trenet et Serge Gainsbourg (Standards » chez Dreyfus Jazz. 2009).

 

     Avec son épouse Marylise Florid, concertiste classique et professeur au conservatoire Pierre Barbizet de Marseille Sylvain Luc formait un duo qui avait sorti en 2019 un album (« D’une rive à l’autre » chez Jade) considéré par Richard Galliano comme « un opus d’une grande pureté, d’une musicalité rare, d’une osmose réciproque et profonde. ». Les deux guitaristes qui devaient animer un stage de guitare en Haute Provence du 21 au 28 avril préparaient un nouvel album ce printemps.

 

     Toujours enthousiaste, Sylvain Luc se montrait toujours prêt à découvrir de nouveaux espaces : « Ce qui est génial dans ce métier, c’est que ce n’est jamais gagné ».  Et d’ajouter :« C’était déjà un rêve quand j’ai réussi à vivre de ma musique ».

 

 

Jean-Louis Lemarchand.
 

 

©photos Alexandre Lacombe et Francis Capeau.

 

 

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5 mars 2024 2 05 /03 /mars /2024 17:42

     Le pianiste martiniquais Grégory PRIVAT a reçu le 4 mars le Prix DJANGO REINHARDT 2023 de l’Académie du Jazz, décerné au musicien de l’année lors de la cérémonie de présentation du palmarès annuel de l’association indépendante, organisée au Théâtre du Beffroi de Montrouge (Hauts de Seine). Un prix bénéficiant d’une dotation de la Fondation BNP-Paribas (mille euros).

 

     Lors du vote final de l’Académie intervenu à la fin novembre, Grégory Privat a devancé un autre pianiste, Laurent Coulondre et le batteur Arnaud Dolmen. Fils du pianiste et compositeur José Privat (groupe Malavoi), Grégory Privat (39 ans) s’est consacré entièrement au piano à 27 ans délaissant alors son métier d’ingénieur. En 2019, il a créé son propre label Buddham Jazz sur lequel il vient de sortir en février 2024 un album en trio, « Phoenix », avec le bassiste Chris Jennings et le batteur Tilo Bertholo. L’an dernier, le pianiste s’était aussi fait remarquer par un disque en solo, « Nuit & Jour » sur le label Paradis Improvisé.

     Grégory Privat devient ainsi le 26 ème pianiste récompensé par le Prix Django Reinhardt depuis sa création en 1954, succédant au palmarès à une autre pianiste Leila OLIVESI (2022)… et à un certain Martial SOLAL (lauréat en 1955), président d’honneur de l’Académie du Jazz qui a adressé un message ce lundi soir sur le thème de l’improvisation ( à grands traits, la condition nécessaire mais pas suffisante est de disposer d’un gros bagage) lu en scène par Jean-Michel Proust, président de l’Académie qui a succédé à François Lacharme (2005-2023).

 

 

     Au cours de cette soirée marquée par des prestations musicales en direct des principaux lauréats, l’Académie du Jazz (81 membres), a également distingué le disque en trio (« INITIO », Jazz Eleven) du jeune pianiste Mark PRIORE, avec le contrebassiste Juan Villarroel et le batteur Elie Martin-Charrière, par l’attribution du Prix EVIDENCE, consacrant la révélation française de l’année.

 


     Le palmarès 2023 met aussi à l’honneur des artistes habitués aux couronnes de l’Académie du Jazz. Pierrick PEDRON, saxophoniste et prix Django Reinhardt 2006, se voit attribuer le Grand Prix de l’Académie du Jazz (meilleur disque de l’année) pour un album en duo avec le pianiste cubain Gonzalo RUBALCABA (titré simplement « Pedron-Rubalcaba », sous le label français Gazebo).

    

 

     Quant à Laurent CUGNY, prix Django Reinhardt 1989 et Grand Prix de l’Académie 2010 pour « La tectonique des nuages » (Signature-Harmonia Mundi), il décroche le Prix du Disque Français avec un album en grande formation, Laurent Cugny Tentet Zeitgeist, chez Frémeaux & Associés, où il présente sa vision du jazz universel, des grands standards (Duke Ellington, Joe Zawinul, Miles Davis, les Beatles…) à ses propres compositions.

 


     Figurent également au palmarès de l’Académie du Jazz 2023, ramené cette année à sept prix :

 

 Le vétéran chanteur américain Billy VALENTINE qui a reçu le Prix Blues, Soul, Gospel pour « Billy Valentine & The Universal Truth » (Flying Dutchman Acid Jazz).

    

     Le vocaliste suisse Andreas SCHAERER qui a reçu le Prix du Musicien Européen, rejoignant ainsi ses compatriotes Samuel Blaser (tromboniste) et Matthieu Michel (bugliste), lauréats en 2018 et 2021.

    

     Enfin la série documentaire ZERO GRAVITY ; WAYNE SHORTER réalisée par Dorsay Alavi consacrée au saxophoniste disparu le 2 mars 2023, produite par Brad Pitt et disponible sur Amazon Prime s’est vue attribuer le Prix du Patrimoine.

 

     Le palmarès complet avec les noms des trois finalistes dans chacune des sept catégories est présenté sur le site de l’Académie du jazz. www.academiedujazz.com

 

 

Jean-Louis Lemarchand.   

©photo Jll & X.(D.R.)

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