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Une passionnante exposition en hommage à Miles Davis (1926-1991)


Jusqu’au 17 janvier 2010 se tient au Musée de la musique de la Villette « We want Miles – Miles Davis, le jazz face à sa légende», une exposition exceptionnelle où le jazz se donne à comprendre, à voir et à entendre. Une déambulation à travers la vie et l’œuvre de Miles Davis, magnifiquement imaginée par Vincent Bessières, le commissaire de l’exposition.  Curieux, amateurs éclairés ou spécialistes érudits de Miles Davis s’y retrouveront avec bonheur car toute l’exposition est organisée de manière intelligente et pédagogique avec de très nombreux passionnants documents et dans un bain de musique permanent. Le parcours propose de suivre la chronologie de l’artiste de son enfance bourgeoise à Saint-Louis au concert de La Villette en 1991, en passant par les rencontres marquantes et les collaborations fructueuses avec Charlie Parker, Dizzie Gillepsie, Gil Evans, Wayne Shorter, Teo Macero ou Marcus Miller, ainsi que ses dialogues avec le blues, le bebop, le rock, l’afro-funk ou le hip hop.

L’atout principal de cette exposition est le temps laissé à l’auditeur-visiteur pour s’immerger dans la musique. L’exposition se déroule dans un bain sonore permanent grâce à différents îlots circulaires, appelés « sourdines », qui offrent à un public d’une dizaine de personnes une écoute de grande qualité de quelques œuvres majeures du trompettiste. Des bornes d’écoute permettent également au visiteur équipé de son propre casque ou d’un casque d’emprunt de s’isoler quelques minutes de la foule pour une interview au long cours (ne manquez pas l’extrait de la troublante interview de Miles dans Les enfants du rock en 1986) ou une séquence musicale (quel bonheur cette suite harmonique de Miles sur l’errance de Florence – Jeanne Moreau dans Ascenseur pour l’échafaud, on ne s’en lasse pas !). A noter cette porte dérobée au sous-sol de l’expo qui conduit au fameux concert Davis and Friends de 1991 à La Villette, quelques semaines seulement avant la mort du trompettiste. Pour chaque période présentée, l’exposition offre à l’amateur, profusion de photos (à voir absolument les magnifiques clichés d’Irving Penn pour le lancement à grand renfort de pub de "Tutu" en 1986), de dessins (les incontournables de Corky McCoy pour la pochette de On the Corner), de partitions manuscrites, d’instruments,  d’objets divers, de documents. Les pochettes mythiques au sublime graphisme de chez Columbia côtoient la trompette des années 1950 de Miles, les épreuves annotées de son autobiographie et le «  To be white » griffonné par Davis en réponse à la demande de la baronne Pannonica de Koenigswarter sur ses trois vœux. Le tout est scénographié avec classe dans un univers sombre pour la période acoustique et une débauche de couleurs dans un environnement foutraque pour les années électriques. On passe de surprise en surprise et tout est passionnant.

Contrairement à l’exposition du Quai Branly du printemps dernier qui faisait la part belle au dialogue du jazz avec les arts plastiques, tel n’est pas le propos ici. On peut toutefois y voir deux toiles de Jean-Michel Basquiat et découvrir les peintures de Miles Davis himself.

Très loin de la célébration de l’icône Miles, cette exposition aborde l’œuvre et la vie de Miles comme un paradigme de l’histoire du jazz en mouvement, démontrant à quel point cette musique est en dialogue  et en relation permanente avec toutes les autres formes musicales, baignée dans un espace-temps qui la métamorphose et l’enrichit.  Bien sûr, Miles plus que tout autre a favorisé ce dialogue, que ce soit avec le rock, le funk ou le hip hop. Il avait même pris contact avec Jimi Hendrix pour un projet commun qui n’a pas pu voir le jour du fait de la mort prématurée de Hendrix. Pour prolonger la découverte et fidèle à son  souci permanent de pédagogie, la médiathèque de la cité de la musique propose une analyse commentée des œuvres sonores présentées dans l’expo. Courez vite voir cette exposition!

Regine Coqueran

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