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19 novembre 2015 4 19 /11 /novembre /2015 18:03
BENOÎT DELBECQ 3 « Ink »

Benoît Delbecq (piano), Miles Perkin (contrebasse), Emile Biayenda (batterie, percussion)

Meudon, 2-3 juillet 2014

Clean Feed CF 340 CD / Orkhêstra

Le précédent CD en trio de Benoît Delbecq (« The Sixth Jump », Songlines, publié en 2010), était en compagnie de Jean-Jacques Avenel. Jean-Jacques nous a quittés en août 2014 et, au moment où ce disque s'enregistrait au studio de Meudon, il était au plus mal, et depuis quelque temps déjà, malgré les rémissions, le courage de rejouer qu'il avait manifesté au fil des ans. Le premier titre de l'album, Le Ruisseau, lui est dédié. Et d'une certaine manière il lui ressemble : Jean-Jacques se serait senti à l'aise dans les « boucles étranges » qui conduisent cette composition. Le contrebassiste Miles Perkin, Canadien de Berlin, est à sa place dans ce trio renaissant : force de la pulsation, sonorité ample, liberté d'accent et de commentaire.... Quand au batteur Emile Biayenda, à la polyrythmie profuse et inattendue, il coïncide exactement avec l'univers de Benoît Delbecq, qui ambitionne, légitimement, de réinventer chaque fois la musique. Comme toujours Benoît mêle sur son piano des sons inouïs (issus d'une préparation méticuleuse, avec toute sorte de petits objets glissés dans les cordes pour faire naître des sonorités venues de l'étrange) et le son clair de l'instrument (quels pianos que ceux de Meudon !), travaillé avec la vraie virtuosité, celle du timbre. Dans les lignes de pochette, Fred Hersch écrit ceci : « Sa musique est en apparence un recueil de contradictions : structure / liberté d'improvisation ; jazz / non jazz ; composition à structure mathématique / musique avec un profond feeling ». Plus que de contradictions je serais tenté de parler de tension permanente. La phrase, dans sa progression par intervalles distendus et inattendus ; le rythme, dans son cheminement de labeur et d'évidence tout à la fois ; la structure, qui se dévoile pour mieux se dissimuler l'instant d'après : tout ici paraît suivre les voies du désir qui se déplace à mesure qu'il naît, de la tension sans résolution : la résolution viendra peut-être, mais elle sera différée, comme le mouvement perpétuel d'une « machine désirante », d'une progression organique qui serait indissociable d'une sorte de pensée incarnée. Si l'on était dans l'univers des arts plastiques, où le discours d'escorte prend souvent le pas sur la réalité de l'objet, on parlerait d'une forme de matérialisme abstrait. Mais ici, pas besoin de discours d'accompagnement, le musique parle d'elle-même, la pensée est dans la vibration même du son....

Xavier Prévost

Présentation du CD par Benoît Delbecq

https://vimeo.com/139599481

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