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8 mars 2021 1 08 /03 /mars /2021 21:43

Lionel Belmondo, saxophoniste, et Stéphane, son cadet, trompettiste, reconstituent leur quintet pour un album (Brotherhood*) qui maintes fois reporté sort dans les bacs ces jours-ci. Ils se partagent les compositions (6 pour l’aîné et 2 pour son frère) dans cet hommage à leur père, saxophoniste et enseignant disparu en décembre 2019, qui constitue aussi un coup de chapeau à des musiciens qui les ont inspirés (Yusef Lateef, Wayne Shorter, Bill Evans, Woody Shaw). Avec les DNJ, Lionel Belmondo va plus loin sur ce disque aux accents hard-bop où l’esprit de John Coltrane n’est jamais bien loin.

DNJ : Cet album marque des retrouvailles familiales ?
Lionel Belmondo : Exactement. Avec mon frère, en quintet, nous n’avions pas enregistré depuis 2009 et ‘Infinity Live’ (B-Flat). On est super-contents. C’est une équipe avec des copains. Il existe une grande complicité entre nous. Et puis (rires), les choses se font quand elles doivent se faire.

 

DNJ : C’est aussi un hommage à votre père Yvan, saxophoniste baryton qui vous avait incité à jouer de la musique, forcé peut-être ?
LB : Forcés ? Jamais. Quand nous avons décidé d’arrêter l’école à 16 ans, notre père nous a dit : vous voulez faire de la musique, il n’y a pas de problème mais vous vous levez le matin et vous travaillez autant d’heures que si vous étiez à l’école. Si vous faites quelque chose vous le faites sérieusement. Mon père nous a bien aidés. A Solliès-Toucas (près de Toulon), où il est arrivé en 1971, il avait, à la demande de l’institutrice, commencé par donner quelques cours aux enfants du village. Et en fait, il a monté une école de vie plus qu’une école de musique (l’École Cantonale de Musique qu’il dirigea une dizaine d’années). « Il faut s’amuser sérieusement, disait-il, et transmettre de génération en génération ». C’est ce que j’ai essayé de faire toute ma vie.

DNJ : Dans cet album, vous dédiez un morceau à Yusef Lateef qui avait intégré votre groupe en 2005 (Influence. B-Flat) ?
LB : Yusef, c’était un sage, et bien au-delà de la musique. Quand un journaliste lui avait demandé : « Pourquoi êtes-vous venu jouer avec les frères Belmondo , il avait répondu, je suis venu apprendre ».  A cette époque, il avait 85 ans !. On a eu la chance de jouer avec lui pendant trois ans, en tournant dans le monde entier. C’était une grande leçon de musique parce qu’on jouait pratiquement les mêmes morceaux à chaque concert et à chaque fois, il nous emmenait vers une autre voie.

 

DNJ : Wayne Shorter est aussi à l’honneur ?
LB : C’est chouette (sic) de rendre hommage à quelqu’un qui est vivant. C’est un grand maître qui continue à faire avancer l’histoire. Wayne Shorter est un moteur pour moi. Il n’a jamais un projet qui se ressemble et pourtant on constate une diversité cohérente entre tous ses projets.

 

DNJ :  Le saxophoniste que vous êtes évoque aussi un trompettiste, Woody Shaw, et un pianiste, Bill Evans ?
LB : Woody Shaw avait un système harmonique à lui -tout comme Booker Little- et qu’on a encore du mal à comprendre aujourd’hui. Nous l’avions rencontré : un grand monsieur.  Quant au titre dédié à Bill Evans, il sonne un peu comme Erik Satie… et d’ailleurs le pianiste admirait Satie. Vous connaissez bien ma passion pour la musique française de la fin du 19 ème et du début du 20 ème siècle. (Les frères Belmondo ont consacré à cette période deux albums Hymne au soleil -2003- et Clair Obscur -2011- où figurent des compositions de Lili Boulanger, Satie, Fauré et Lionel a arrangé en 2019 des compositions de Ravel pour formation de jazz et orchestre symphonique pour une commande de l’orchestre symphonique d’Aquitaine et données uniquement en concert ).

DNJ : Cet album enregistré avant la crise du Covid-19 sort seulement aujourd’hui. Quand sera-t-il présenté sur scène ?
LB : Cette musique doit s’écouter en direct. On est impatient de remonter sur scène. Nous allons jouer le 3 avril au Sunset dans le cadre de l’émission Jazz Club mais ce sera sans public ! Dans le même temps, je n’ai pas de commande pour des festivals mais je me suis « auto-commandé » trois projets. Mon père me disait toujours qu’il fallait avoir des projets en tête pour faire évoluer sa musique. Alors, je me mets à ma table chaque matin et je compose. Bien sûr, je me demande si je vais pouvoir apporter quelque chose de neuf. Yusef m’a dit un jour : « la musique ne nous appartient pas, elle n’appartient à personne, elle appartient à tout le monde ». Aussi je me lance (rires).

 

 

*Belmondo Quintet, ‘Brotherhood’, avec Lionel Belmondo  (saxophones ténor et soprano, flûte), Stéphane Belmondo  (trompette et bugle), Eric Legnini (piano), Sylvain Romano (contrebasse) et Tony Rabeson (batterie).
B-Flat, Jazz & People / PIAS..
Studio Gil Evans, Amiens, 20-22 janvier 2020.  
Sortie le 12 mars.

 

A écouter également : Belmondo Family Sextet,  ‘Mediterranean Sound’ (B-Flat/PIAS. 2013) comprenant notamment Lionel, Stéphane et Yvan.

 

Concert de présentation en direct du Sunside (75001) le 3 avril à 19 h dans l’émission d’Yvan Amar, Jazz Club, sur France Musique.

 

 Jean-Louis Lemarchand.

 

Brotherhood

 

©photo  Géraldine Aresteanu.

 

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