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15 mai 2021 6 15 /05 /mai /2021 21:36

Franck Assemat (saxophone baryton), Christiane Bopp (trombone, saqueboute), Xavier Bornens (trompette & bugle), Morgane Carnet (saxophone ténor), Sophia Domancich (pianos, piano électrique), Michel Edelin (flûtes), Jean-Marc Foussat (synthétiseur, voix), Dominique Lemerle (contrebasse), Christian Lété (batterie), Rasul Siddik (trompette, percussions, voix), Sylvain Kassap (clarinettes), Jean-François Pauvros (guitare, voix) & Gérard Terronès (présence)

Paris, sans date

Le Générateur LG451 / l'autre distribution

 

Ce disque est le témoignage et l'aboutissement d'une folle aventure qui vit le jour voici une dizaine d'années, par la grâce d'une conversation entre Jean-François Pauvros et Gérard Terronès. Ainsi naquit l'idée d'un grand orchestre rassemblant des improvisateurs et improvisatrices des générations qui se sont succédées depuis le début des années 70 jusqu'aux années 2000. Gérard Terronès, activiste de la scène et du disque (avec notamment les labels Futura, Marge, puis Futura Marge) fut un acteur majeur des années free. Et Jean-François Pauvros fut l'un des musiciens les plus engagés dans les musiques de l'extrême. C'est dire que, de ce projet commun, ne pouvait surgir que des musiques fécondes et des émois d'une belle intensité. J'ai le souvenir d'avoir assisté à plusieurs des concerts du cycle 'Jazz à La Java', rue du Faubourg du Temple, entre 2012 et 2016. Et sous l'œil bienveillant et l'oreille attentive de Gérard Terronès, c'est un 'Jazz en liberté' qui pouvait chaque fois éclore, comme un écho au titre de l'émission qu'il a longtemps proposée sur Radio Libertaire. Au fil des rencontres, entre les débuts de l'orchestre et ce disque, Futura Expérience a vu passer, en plus des personnes citées plus haut, Leïla Martial, Pierrick Pédron, Claude Barthélémy, Ramón López, Bobby Few, Alexandra Grimal, et beaucoup d'autres qu'il serait vain de vouloir citer de manière exhaustive (d'ailleurs, j'en suis bien incapable....).

Puis est venu le temps d'enregistrer pour aboutir au disque. Gérard Terronès n'a pas vu la fin de cette aventure, mais la liste des membres du groupe se termine ainsi : Gérard Terronès, présence. Plus qu'un symbole, un manifeste.

Mais parlons du disque. Il commence par une étonnante version de Lonely Woman avec, sur une rythmique binaire appuyée, un exposé du thème, lent et majestueux comme une prière, ou un chant rituel, dans un tutti d'où émergent les singularités instrumentales. C'est fort et beau, le décor est dressé. Puis c'est une composition de Jean-François Pauvros, Opale, ressurgie du passé («Hamster Attack», Londres,1988), évocation mélancolique du rivage pas-de-calaisien de la Mer du Nord, rivage cher à son cœur. Retour à Ornette ensuite, avec Sadness. Éclats de liberté sur un canevas qui, décidément, reste sombre. Puis Retrospect de Sun Râ commence par une digression très libre, et très intense, de Sophia Domancich, digression attisée par Sylvain Kassap, Xavier Bornens, Michel Edelin et les autres, sur fond de tambours éloquents. Et le thème s'épanouit, prend ses aises, et s'ouvre aux multiples improvisations ; c'est la plus longue plage du disque, et l'on est embarqué. Fables of Faubus commence sur un monologue rythmé par un piano manifestement choisi pour son désaccord profond. Puis le lancinement historique de ce célèbre thème de combat emporte tout sur son passage. Maintenant c'est Machine Gun (pas celui de Peter Brötzmann, celui de Jimi Hendrix), et ça barde, mais avec une verve lyrique. Puis c'est Totem, signé Michel Edelin, emprunté au répertoire du groupe 'Flûtes rencontre', mais aussi pour nous tous (eux les artistes, nous les amateurs), le souvenir d'un club du treizième arrondissement de Paris, le Totem, où Gérard Terronès fit entendre de très belles musiques, dont certaines immortalisées au disque (Archie Shepp avec Siggy Kessler, Raymond Boni / Gérard Marais Duo, le groupe Perception autour de Didier Levallet.....). Et pour conclure retour à un thème (et à la voix) de Jean-François Pauvros pour Memorias del Olvido, issu du disque «Buenaventura Durruti» (nato, 1996). Un disque fort comme l'amitié et le goût de l'aventure. Bravo les gars et les filles, Gérard aurait aimé ce disque. Je crois même qu'il aurait aimé le produire.

Xavier Prévost

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Un extrait sur le site du Festival Sons d'Hiver 

La bande annonce du documentaire Futura Expérience de Rémi Vinet 

Concert au Théâtre Berthelot de Montreuil-sous-Bois le 20 octobre 2017, 7 mois après la disparition de Gérard Terronès 

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