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1 avril 2011 5 01 /04 /avril /2011 08:13

Just Looking 2011

Frank Woeste - piano , fender rhodes, Jerome Regard - bass, Matthieu Chazarenc - batterie, avec la participation de Malik Mezzadri (Magic Malik), Sylvain Rifflet & de François Bonhomme.

 woeste.jpg

Grand disque du pianiste Franck Woeste ! De ces disques rares dont on se dit, à force de suivre le parcours du pianiste allemand qu'il allait arriver.

Si l'on vous dit que cet album dégage une très grande force intérieure, c'est  forcément que l’évoque son supplément d'âme.Et ce disque croyez-- moi en a plus d’une.Des âmes qui passent, qui rôdent autour, des flottaisons d’âmes, des âmes inspirées et émouvantes, passionnées et exaltées, des âmes qui errent et des âmes qui cognent. Disque fascinant, pénétrant, intense que celui du pianiste  Franck Woeste dont on connaît le talent depuis qu'il côtoie Mederic Collignon dans Jus de Bocse.  Celui dont on avait apprécié les précédentes productions sous son nom ( " Mind at play" ou "untold stories" disques plus personnels et intimes) semble ici se débarrasser de l’image du pianiste brillant mais un peu policé de classicisme.

Ici, une étape où Woeste embrasse large. Il y a du jazz, de la pop (très moderne), du jazz à la Mc Coy Tyner ou à la Dollar Brand, du rock et un très gros travail de post-prod. Les références actuelles très présentes dans le jazz moderne ( King Crimson, Radiohead, Bjork) s’entendent ici. Mais il ne s’agit pas de la tarte à la crème du moment. Aucune reprise dans cet album mais juste parfois des évocations, des inspirations que l’auteur de ces lignes croit deviner sans en être tout à fait sûr. Mais surtout et avant tout, il y a des idées de musique. Un fourmillement d'idées rythmiques et harmoniques qui en fait presque une sorte de symphonie dans laquelle on déambule comme sur le chemin d'un texte à la Edgar Poe. On en perd  l’équilibre parfois et les repères nous lâchent. Tournoiements des harmonies et des polyrythmies, magie de la voix de Magic Malik dans quelques vestales envolées.  Warmer Regen ouvre ainsi cet album comme un long prélude qui nous plonge dans l'univers du pianiste sous la forme d'un choc au plexus. Entrée frontale. Puis, Franck Woeste intègre tout, tous les sons, les plus acoustiques et les plus électroniques, parvient  à les distordre avec maestria ( God put a smile upon your face). Et dans le même temps où il s'engouffre dans une musique jazz du XXIeme siècle, confluente de tout, il parvient dans le même temps à rester aussi dans l'épure traditionnelle, fondamentalement amoureux de Bach et de l'école classique (Timeless). Parfois dans le rock noisy (liquor notes), Franck Woeste que certains assimilaient à un pianiste dans la lignée des gentils sait se transformer en bad boy, se plonger parfois dans la fange de la musique des mauvais quartiers, mais sans jamais se départir de cette élégance de dandy raffiné. Où l'on entend aussi chez lui le suiveur d’un Bud Powell sur des thèmes comme Hysteria Junkie sur lesquels la dynamique insufflée par la formidable paire rythmique permet de voir clairement un power trio de grande qualité. Les formats s’ouvrent parfois avec l’ajout délicat Sylvain Rifflet, de Malik Mazzadri ( Magic Malik) ou de François Bonhomme tous orchestrés avec une grande science de l’arrangement.

 

Lorsque l'on entend distinctement la part d'eux-mêmes que les artistes laissent dans leur oeuvre, lorsqu'elle devient consubstantielle à eux-mêmes, on sait alors que cette musique cesse d'être de la musique pour devenir de l'art avant tout. Cette faculté de créer et de sortir du néant ce qui n'existait pas avant. C’est exactement ce que l’on retrouve ici.

Jean-marc Gelin 

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