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21 avril 2010 3 21 /04 /avril /2010 05:26

226751.jpgCollection BD JAZZ ( 2 CD et une bande dessinée)

 

Directeur de la collection Bruno Théol
Sélection des textes Christian Bonnet et Claude Carrière

 


Anita  O’ Day ? Un petit bout de femme, sapée avec élégance dans des fourreaux  serrés (son apparition dans le célèbre film « Jazz on a Summer ‘s Day » en 1958 à Newport avec ses longs gants à la Gilda et cette incroyable capeline), une gouaille faubourienne dirait-on, et même plus que cela: un réel abattage sans aucune vulgarité mais  avec un sens incroyable du swing.
Voilà l’une des grandes chanteuses de jazz , à l’égal de la triade capitoline, mais tellement moins célèbre qu’ELLA, BILLIE OU SARAH. Comme l’écrit justement François Billard, « une chanteuse pour musiciens », une véritable musicienne qui n’était pas noire. Cela lui fut même reproché un temps, elle  se fit siffler par un public blanc confondant en 1970 jazz et couleur de peau. IMPENSABLE !
Et pourtant sa voix chaude et sensuelle, son sens du rythme, son phrasé impeccable, en font une des très, très  grandes, incontournables, pour peu que l’on aime le JAZZ .
Découverte  très jeune dans les orchestres de la grande époque, elle tourna avec le batteur Gene Krupa où elle fit merveille avec Roy Eldridge (une sorte de couple Louis/Ella dans « Let me Off Uptown ») : ça swingue merveilleusement , on ne peut qu’avoir envie de taper du pied et de danser en entendant « Stop ! The red light ‘s on ». Comme dit un ami, si vous n’aimez pas, consultez !
La collection BD Jazz  illustre le parcours de la chanteuse en deux périodes fortes : un premier Cd nous la fait découvrir en « Big Band Canari » avec les grands orchestres de Gene Krupa et ensuite de Stan Kenton  de 1941 à 1945. Son passage chez Kenton assit sa réputation de « grande technicienne, capable de chanter en quarts de ton ». Elle connut de véritables succès populaires comme « Bolero at The Savoy » en 1941. Elle fut même élue « New Star » au référendum de la célèbre revue «Down Beat».
Le deuxième Cd s’attarde sur la deuxième partie de sa carrière, the Free lance singer (1945-1952) : il est passionnant de comparer sa propre version de certains tubes comme « The Lady is a tramp » immortalisé par Frank « The Voice » Sinatra ou dans des standards chantés par Billie Holiday ( l’une de ses influences avec Mildred Bailey) « Memories of you », « You took advantage of me » .

La Bd est plus surprenante, elle ne repose pas sur la vérité historique, des détails concrets, des anecdotes vécues : c’est plutôt une vision personnelle de la naissance d’un talent : l’histoire qui tient sur quelques pages seulement (format oblige) avec très peu de texte,  raconte le premier engagement de la chanteuse, qui passant une audition  dans un théâtre à Chicago est retenue par le patron qui a entendu sa voix à la radio . La jeune femme force sa chance, apprend une nouvelle chanson qu’elle chante à sa façon ; contre toute attente,  elle emballe le public alors que les producteurs, pas du tout convaincus, car elle scate, cherchent à la virer. Jolie silhouette sur fond clair en noir et blanc d’un jeune tandem breton KERSCOET qui a imaginé une Anita O’ Day pimpante et très fraîche.

 On laisse filer le Cd : même sur un titre plus « kitsch » comme « Amor », l’orchestre sauve la mise et fait entendre l’ incroyable vitalité du jazz de l’époque. Dans « Malaguena » en 1947, elle ose un scat très réussi et s’essaie même au genre latino, à ces chansons exotiques et sucrées « Jamaica Mon »  et « Vaya Con Dios ».  Contemporaine de l’ère swing (elle était née en octobre 1919), elle chante sans jamais sacrifier les paroles, elle a une diction impeccable. Tous les mots sont clairs, même dans les arrangements les plus délicats.
Sans jamais forcer la voix, ni dans l’aigu ni le grave mais jouant de diverses nuances  comme dans « Skylark » de  Hoagy Carmichael ou dans le « Drum boogie »(incantations sauvages ). Anita O’ Day avait vraiment du chien, quelque chose de plus . Si elle rencontra de très gros succès d’audience,  ce ne fut jamais la gloire, peut-être parce qu’elle ne se prenait pas pour une star, préférait se considérer comme une simple musicienne. Heureux temps où les chansons étaient formatées, où il fallait être incisif, rapide et accrocheur, déployer son talent sans fioritures ni longueurs.
Ce long box est en tous cas l’une des belles réussites de la collection BD Jazz. A avoir absolument dans toute discothèque digne de ce nom !

Sophie Chambon

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