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5 juin 2007 2 05 /06 /juin /2007 07:14

DUPONT T : « Spider’s dance »

Ultrabolic 2007


cover-spiders90.jpg


JJJ
Le contrebassiste Hubert Dupont a une énorme envie de jouer et cela s’entend. Celui qui s’occupe de la grand-mère avec le groupe Thôt ou Kartet développe une toute autre approche de l’instrument dès lors qu’il s’exprime sous son nom. Un rôle de soliste pleinement revendiqué. Cela avait d’ailleurs donné lieu à un album solo à haut risque paru il y a deux ans (Ultraboles) et cela s’entend évidemment dans ce quartet de haut vol où la contrebasse est constamment mise en avant au profit de multiples solos ou d’une prise de son avantageuse. Un peu à la manière d’un Avishai Cohen, Hubert Dupont revendique pour l’instrument une place déterminante, voire prédominante. On n’est effectivement jamais mieux servi que pour soi même.

Et l’exercice est d’autant plus difficile que la musique proposée par ce quartet est ici particulièrement exigeante. Derrière la poésie du propos, cette musique là, superbe, se faufile sinueusement entre la polyrythmie, l’atonalité, les pattern tirés de la musique indienne ( Irid, Orientable comme de très légers prétextes) avec une                approche quasi mathématique de l’harmonie, la digression improvisée et l’énergie du propos toujours. L’occasion est belle de découvrir ici, aux côtés de Hubert Dupont le nouveau talent de la scène New Yorkaise, le jeune saxophoniste Rudresh Mahanttappa régulièrement encensé par la presse américaine et dont on avait aimé les album très originaux qu’il avait signé en 2004 et 2007, Mother Tongue ou Codebook sur lequel il jouait avec la notion de language. Et à l’entendre ici on ne peut qu’être impressionnés par la force qui se dégage de son jeu, une sorte de puissance à la fois sauvage et animale (sur 1010 ou sur Irid par exemple), un son ravageur qu’il aborde à l’alto comme on soufflerait dans un ténor. Le prolongement ailleurs de la puissance de son d’un Steve Coleman. Une sensibilité faite de lyrisme puissant et donc rare. Yvan Robillard n’est pas en reste qui impressionne lui aussi par le mordant de son jeu. Quand à  Chander Sardjoe lui aussi apporte à la batterie l’aisance polyrythmique de ses racines indiennes.

La difficulté pour ce groupe réside alors pour ces quatre là à trouver un vrai « son » homogène qui ne soit pas le résultat de la performance individuelle de chacun. Trouver la voie qui va de la puissance du jeu à l’expression d’un son de groupe. Parce que tous restent toujours dans la même intensité de jeu, tout se passe comme si chacun des acteurs avait un peu à cœur d’être leader de l’ensemble. Cela créée alors une belle émulation et tire tout le monde vers le haut. Il faudrait juste alors un peu de nuance en plus pour que l’émotion rare ici, s’installe enfin.

Jean-Marc Gelin

 

JJJJ Après avoir tissé sa toile, elle nous tient, le fil à la patte, cette araignée dont la danse enchante tout le disque du nouveau groupe du contrebassiste Hubert Dupont.

Pour le situer, il faudrait replacer ce musicien singulier au cœur de la nébuleuse de groupes dans lesquels il a su se forger une identité, de Kartet dont il est le contrebassiste depuis 1990, à Thôt où il s’électrise au contact de Stéphane Payen sans oublier Hask créé en 1993, ou encore Aka Moon.

 La liste de ses collaborations en tant que sideman est impressionnante mais c’est l’aventure d’un nouveau groupe que l’on salue ici avec ce Spider’s danse, premier album de la formation Dupont T, en compagnie du pianiste Yvan Robillard, de Chandler Sardjoe, batteur de Kartet, et donc vieux complice, et du saxophoniste alto new yorkais d’origine indienne Rudresh.K. Mahanthappa. La rencontre ne pouvait être que propice à l’imagination coloriste du compositeur qui aime les polyrythmiques un peu complexes et subtiles (« Douj », « Possib », « Orientable »).

Sans se risquer à vouloir comprendre la « fabrique » de la musique, on se laisse très vite prendre au jeu, envoûté mais non paralysé par le jeu de l’araignée qui ne s’agite pas qu’au plafond. L’altiste subtil et exaltant  mène la danse avec une extrême mobilité, souple et  infatigable, créateur de volutes entêtantes : son phrasé s’insinue jusque dans les replis de la musique, sans jamais vouloir en finir de nous hynotiser.  

Chacun prend sa place avec sensibilité, finesse, souvent lyrisme  (phrasé délicat et insidieux dans « Ladies on board » d’un pianiste singulier et pluriel). Batteur et contrebassiste semblent avoir toujours le même plaisir à se retrouver et à partager. Sardjoe joue à l’envie des timbres et des rythmes qu’il alterne, superpose, redistribue. Toujours dans le registre du chant, le contrebassiste exalte sa partition, orchestrée avec des textures, des alliages inusités qui confèrent à cet ensemble un style particulier.

Un disque que l’on aime pour ce qu’il éveille dans notre imaginaire, un exotisme  authentiquement raffiné. 

Sophie Chambon

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5 juin 2007 2 05 /06 /juin /2007 07:12

JJJJ(J)SOPHIA DOMANCICH Pentacle : « Triana moods »

Cristal 2007

 pentacle.jpg

 

 Immédiatement ce Triana inspiré par un voyage à Séville nous ramène à d’autres contrées. Des contrées tout autant hispanisantes que les plaines mexicaines et les villages des gringos en lutte qu’évoquaient en leur temps le premier Libération Music Orchestra de Charlie Haden. Même esprit décalé des fanfares cuivrées.  Mais le Triana de ce pentacle évoque aussi le grain de folie déstructurée de Mingus et l’on ne s’étonnera pas des clins d’œil comme ce Triana Moods qui nous renvoie bien sûr au fameux Tijuana Moods du contrebassiste. C’est qu’il y a présent tout au long de l’album un vrai esprit des Brass band, des bandas des pays du soleil, une spontanéité et une liberté  qui évoque l’émergence de la création directe ou des happening façon Ornette Coleman.  A ce titre, la version sublime de ce qui est aujourd’hui le tube planétaire du jazz, Lonely Woman nous a rarement autant bouleversé avec ses phrases décalées, son atonalité flirtant avec le jeu faux mais spontané qui dit le thème avec une rare intensité. A la bordure de la folie. De la genèse aussi. Comme si tout se terminait et naissait dans le chaos. Si l’on ne connaissait pas le titre du morceau, on l’aurait deviné. Car cet album possède une rare puissance évocatrice. Funerals par exemple que l’on suit comme la fanfare d’un très triste cortège nous semble traverser on ne sait quel barrio de Tijuana. Sophia Domancich jette tout dans la bataille avec une décomplexion totale dans le fond et la forme qui lui permet de proposer tout ce dont elle a envie avec une solide connaissance de son histoire du jazz. Pourquoi pas jouer avec un thème post bop aussi joyeux que fantasque (Monkey Business un nouveau clin d’œil à Don’t be afraid the clown is afraid too) ou encore conclure l’album avec un thème magnifique de Ellington ( Creole Blues). Mais au-delà des compositions qu’elle signe avec Simon Goubert, Jean Luc Capozzo ou Claude Tchamitchian Sophia Domancich continue de s’affirmer comme une pianiste rare se jouant des sonorités graves et des silences. Car voilà, Domancich nous montre qu’il y a autant de déstructuration dans la musique désorganisée que dans le silence spontané. Dans ce morceau au si beau titre , Démons et mères veillent se jouent des moments de suspension comme dans un sommeil paradoxal. Un entre deux à l’évanescence onirique. Triana Moods dit la vie. La vie éclatante, la vie inquiétante, la non vie qui n’est pas vraiment la mort et dans laquelle Sophia Domancich y met autant de joie que d’espièglerie. Y met une âme forte. Une vitale passion.

Jean-Marc Gelin

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5 juin 2007 2 05 /06 /juin /2007 07:09

JJJJ Christian BRAZIER : « Sazanami » 

Couvsaza.jpg

 

 

La tentation est grande pour un musicien-compositeur de se lancer dans l’aventure du solo, cette traversée périlleuse  de certaines limites. Si  nombre de pianistes de jazz s’y sont essayé dernièrement  avec plus ou moins de bonheur, ce n’est pas encore un passage obligé pour d’autres musiciens dont l’instrument peut s’avérer moins « complet ». Christian Brazier, lui, en rêvait depuis longtemps. Pour ce contrebassiste sudiste, il s’agit effectivement d’un pari, d’une tentative issue d’une tentation avouée.

Grand admirateur de Barre Philips, installé en France dès 1968 avec les improvisateurs libres (écoutez « Journal Violone 9 » chez Emouvance, autre label du Sud), il ne voulait pas pour autant se lancer dans une œuvre expérimentale, ni donner une leçon de contrebasse  avec ou sans archet, en 25 séquences.  Il avait plutôt envie de faire partager ce qui a traversé son horizon musical,  de s’arrêter un instant sur ce qui passe, cet éphémère qui demeure trace : ainsi est né  « Sazanami »  (rides à la surface de l’eau, en japonais), recueil de petites pièces pas si faciles, qui coulent pourtant avec bonheur sur une durée idéale de 45 minutes.  On le voit, on est loin de l’achèvement,  du définitif. Le choix de la composition de ce livret d’éclats,  de ce florilège de haikus,  tient à un rien qui est tout : le temps. Temps de la musique, de l’écriture, temps suspendu, temps anachronique.  Architecture sonore de  XXV Haïku /Miniature  à prendre comme un geste, un affleurement, qui, même répété, éclaire le lieu de la cristallisation,  du « mémorable ». Ces compos et impros que l’on ne différencie que par le numéro, conduisent sans violence  dans un univers singulier et impressionniste qui s’accorde aux cordes frottées, pincées, aux pizzicati nets et droits.  Christian Brazier a sculpté le temps, autorisé des respirations qui font entendre la musique dans tous ses états,  dans tous ses éclats : la pulsation, qui bat avec une mystérieuse simplicité est enfin perceptible. Rien de sévère ni de docte dans ces petites pièces  qui s’enchaînent avec une ferme douceur, coupées de superbes interludes  cuivrés, reflet de sensibilités bienveillantes, de l’ouverture au final (Christophe Leloil, grand trompettiste, que l’on peut entendre chez Sylvia Versini  avec le tout jeune tromboniste Bastien Ballaz ,  et  Philippe Renaud, le tromboniste ami, complice des  trois derniers  albums du contrebassiste) .  Variant les nuances de l’instrument, Christian Brazier joue  sur deux basses choisies avec soin pour leurs qualités de résonance, leur boisé, ou leur puissance. Il explore les possibilités de l’instrument, toujours avec une grande fluidité  mélodique,  alternant des pièces vibrantes avec d’autres aux cadences moins rapides.  Si les basses pouvaient parler, elles nous diraient que l’on entend s’exprimer  un artiste qui raconte une histoire très personnelle, avec une grande maîtrise de son instrument, intégrant audacieusement le temps du  silence, d’un certain vide, qui demeure musique. *Rendons hommage encore au label sudiste CELP produit par  Robert Bonaccorsi (directeur artistique de ce festival formidable de la Seyne sur mer ) et André Jaume, clarinettiste et saxophoniste immense, figure incontournable du jazz . Avec  une belle couleur d’azur méditerranéen et des œuvres picturales en couverture (ici,  « Le clochard et la geisha » du peintre Alain Paparone, Celp a  su se créer une identité, même si la distribution est  horriblement difficile (actuellement, seuls  Les ALLUMES DU JAZZ s’en chargent). 

 Sophie Chambon

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5 juin 2007 2 05 /06 /juin /2007 07:07

JJ Ludovic BEIER Quartet : « Chilltimes » 

Le Chant du Monde 2007


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Que les choses soient parfaitement claires : nous avons un respect absolu et une immense affection pour Ludovic Beier que, dans d’autres colonnes nous avions encensé pour son sens du swing et la qualité de ses compositions. Un très grand accordéoniste assurément. Nous l’avions alors entendu et découvert aux côtés du guitariste Angelo Debarre dans un registre où il se tirait à merveille d’un petit écart pas toujours facile entre jazz manouche et jazz musette. Et l’on a encore en tête certaines de ses compositions où il faisait alors preuve d’un magnifique syncrétisme. Car il y a chez lui autant de Gus Visseur que de Marcel Azzola. Mais l’on sentait bien que l’envie démangeait le garçon d’aller tâter de l’autre côté du jazz et de montrer qu’étant un gars de swing terrible il pouvait s’affranchir de toutes limites invisibles. Qu’importe pourvu que cela swing ! Et pourtant à l’écoute de cet album on voit bien, ou plutôt on entend très clairement que cela ne se passe pas tout à fait comme ça. Soutenu par une rythmique de jazzmen de la pure tradition comme Diego Imbert ou Franck Agulhon on sent que Ludovic n’y est pas tout à fait à son aise. Comme si derrière le swing il lui manquait cette part d’inexplicable, de ce qui se passe devant les roulottes et dans l’odeur de frites du bal à Jo. Et tant pis si ça fait cliché mais c’est comme ça. Et d’ailleurs lorsqu’en deuxième moitié de l’album il revient au camp manouche et à l’esprit de la valse jazz c’est là, en étant lui-même qu’il convainc à 3000%. Mais ce sont alors ses compagnons de jeu qui semblent alors décrocher à leur tour. Un peu à la peine. Il n’empêche Ludovic Beier avec toute la générosité qu’on lui connaît et l’immense talent qui est le sien confirme ce que l’on pressentait déjà dans un autre contexte, à savoir sa dimension de compositeur rare.

Jean-Marc Gelin

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5 juin 2007 2 05 /06 /juin /2007 07:05

JJJ Aronas – « Culture Tunnels »


aronas.jpg

Ces quatre musiciens néo-zélandais déjantés sont à l’origine d’un jazz décomplexé, libéré de toutes convenances. Aronas est emmené par un jeune prodige : Aron Ottignon. Dans ce disque intitulé « Culture Tunnels » se retrouvent associés Grooves, ballades cinématiques, boucles dansantes, percussives et autres improvisations magistrales. Aujourd’hui installé à Londres, c’est après de longues tournées en Océanie que ce groupe de scène arrive en Europe. Leur Musique est teintée aussi bien de vieille Pop que d’electro futuriste. Une alliance avec E.S.T serait presque probable. Seulement voilà, il y a là une fois de plus un mélange des codes, des principes fondamentaux du Jazz. Des clichés, des clins d’œil d’un goût démesuré, vous laissant seul juge. Au-delà de cette première écoute, on est contraint d’apprécier le majestueux Groove de ce disque. Tout en chaleur. Oui, Madame, le Groove, c’est chaud. Et pas seulement parce qu’en Afrique il fait chaud, vous l’aurez compris. L’instrumentation de ce projet est tout ce qu’il y a de plus classique avec pour centre un trio Jazz. Avec cependant deux touches en plus. La première est la présence du percussionniste Josh Green. Ce type d’instrumentation nous rappelle ce merveilleux opus d’Herbie Hancock, « Inventions and Dimensions », où notre pianiste adoré s’adonnait aux polyrythmie caribéenne. Heureusement, sur ce disque, Herbie jouait sur un vrai piano, lui. Peut être que le goût néo-zélandais pour la facture de piano n’est pas encore très établi. La jeunesse et les nouvelles choses paraissent détruire les anciennes, mais pour être plus juste il faudrait dire qu’elle les magnifie, les fait évoluer, et donc révolutionner. C’est un coté Grunge que l’on retrouve dans la Musique de Aronas. Avec en prime, cette fantaisie swing néo-orléanaise transfigurée par l’electro-rock et les machines. Encore un signe de mélanges hâtifs, si toutefois les créateurs y mettent la « manière ». Hier encore, des grands comme Truffaz montrait le chemin. Les raccourcis n’ont pas pu être évités, mais le souci d’originalité demeure. On notera surtout de lumineuses compositions, comme par exemple « You Little Beauty ». L’énergie et le virtuose de ces musiciens sont frappants et curieusement, leur descendance est assez difficile à retranscrire. Ceci est d’habitude une preuve de grande sagesse, lorsque la personnalité est aussi définie. Ces compositeurs-acteurs usent parfois d’effets divers, résultat d’un travail sur la matière sonore. La superposition de Musiques en est un. Le jeu sur sampler et effets bizarres en est un autre. Tout est bon pour surprendre, surtout sans paroles, sans mots, pour que vous puissiez avoir le champ libre sur vos images. Dans cette culture des Tunnels que Aronas nous offre, la transe rythmique trouve enfin une sensibilité poétiquement rassurante, et toujours en mouvement.

Tristan Loriaut

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4 juin 2007 1 04 /06 /juin /2007 22:26

JJJ Daniel Humair, la batterie jazz

#1DVD

Nocturne NT 103

 

danielhumairdvd4557.jpgSans évoquer la batterie jazz comme le batteur- écrivain Georges Paczynski dans son histoire en trois tom(e)s, Daniel Humair fait œuvre de pédagogie dans ce DvD et donne son propre « discours de la méthode », appuyant ses analyses et commentaires toujours simples et précis, sur sa propre expérience musicale. Sa carrière de sideman  est des plus impressionnantes ( depuis ses débuts il  y a une cinquantaine d’années, il a  joué avec les plus grands musiciens européens et américains). Enseignant au CNSM, il  a aussi assumé le rôle de leader, invitant de jeunes instrumentistes dans ses nouveaux groupes.

Gaucher naturel mais  ambidextre par ailleurs, son style et sa technique sont uniques et il entend prodiguer généreusement  quelques-unes de ses  recettes : comment distribuer de façon complexe et asymétrique les accents tout en conservant une grande continuité rythmique,  travailler à l’égal des percussionnistes les timbres les plus variés.   

Si ses conseils ne manqueront pas d’intéresser les débutants ou les amateurs non pratiquants,

Humair va plus loin et  présente sa conception de la batterie ternaire, jazz.

Pour les batteurs de jazz qui commencent le métier, les questions sont  « qu’est ce qu’un batteur de jazz ? Comment improviser  et  pourquoi ne peuvent ils pas utiliser ce qu’ils connaissent du tambour pour le faire ?»

Si la mise en place reste essentielle, Daniel Humair renvoie, sans se poser en historien pour autant, à l’écoute indispensable des enregistrements les plus marquants qui témoignent des diverses façons d’interpréter le jazz :  Ben Webster et Sonny Rollins participent en effet d’une même lignée même si leur jeu est très différent.  

Le DVD présente trois parties : la première intitulée « Découvertes et Connaissances » détaille tout de l’instrument :  les choix de réglages, la position et tenue des baguettes, le rôle dans l’orchestre et le langage jazz . S’édifient devant nous les différentes composantes de la batterie jazz que Daniel Humair présente sobrement, en expliquant ses choix.  Ainsi considère-t-il la grosse caisse comme un tom supplémentaire au son très grave, il aime choisir des cymbales variées, une gamme adéquate et …légère de préférence. 

Il préfère jouer avec les talons posés sur les pédales de grosse caisse et de charleston, recherchant une véritable élasticité dans les mouvements,  avec pour résultat un claquement de charleston sec et coupant. Il saisit ses baguettes d’une certaine façon, à plat toujours (donc évitant le réglage incliné des fûts).

Avec logique, il explique qu’il faut savoir se ménager, que parfois un effort plus grand donne un résultat moindre : l’olive de la baguette doit avoir le circuit le plus long, suivre un mouvement gracieux qui vient de très haut et le batteur ne doit jamais perdre de vue que l’attaque doit revenir immédiatement.

Démonstration à l’appui, il explique que des « papa maman » ou des « moulins » exécutés dans le vide, auront l’avantage,  sans déranger les voisins, de donner l’aisance et la sûreté du geste. Enfin, seul le tempo travaillé le plus lentement et le plus régulièrement possible permet d’obtenir une maîtrise parfaite. 

La deuxième partie intitulée « Pédagogie » est constituée d’exemples nombreux et de démonstrations éloquentes soulignant le travail d’indépendance totale, les écueils du phrasé ternaire, le travail spécifique du jeu de balais, sans oublier des exercices qui sont proposés aux apprentis batteurs.

Le DVD propose en bonus un court métrage sur le travail en studio, avec Louis Sclavis et Jean Paul Celéa, d’un des titres de l’album Air Libre du guitariste JP Muvien et ensuite le même morceau « Couscous Purée », joué en concert au Triton, en novembre 2005.

 

Daniel Humair témoigne ainsi avec bon sens et efficacité de sa formidable expérience de la batterie. Il a su donner ses lettres de noblesse à l’instrument, le « démilitarisant » du tambour de base.

Son credo implique donc  la « prise de pouvoir du soliste, qui a un  rôle d’initiateur, d’arrondisseur d’angles et de soutien du tempo ». Il souligne aussi l’importance de la chanson des fûts, conseillant de travailler plus encore que la figure rythmique, sa petite chanson,  à la façon des percussionnistes indiens qui chantent les phrases, avant de les jouer.

Enfin, chez ce musicien exceptionnel est resté intact le désir de garder toujours main mise sur sa propre distribution de sons, en club ou dans une salle de concerts. Il est, décidément,  encore à l’heure actuelle, l’une des meilleures illustrations de la fonction  créative de l’instrumentiste-batteur de jazz.

Sophie Chambon

 

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24 mai 2007 4 24 /05 /mai /2007 23:10

CAMJ7793-2b2.jpgJJJ SCOTT COLLEY : « Architect of the Silent moment »

cAM jAZZ 2007

 

A 44 ans, Scott Colley est aujourd’hui l’un des contrebassistes les plus demandé de la scène d’Outre atlantique. Ceux qui ont suivi son parcours ont pu l’entendre avec Chris Potter, Dave Biney, Goeffrey Keezer, Fred Hersh, Greg Osby ou Adam Rogers parmi tant d’autres qui sont l’incarnation d’une nouvelle génération dorée du jazz américain que l’on retrouve en partie ici pour un casting de rêve qui, sans faire de name dropping regroupe une base solide avec Ralph Alessi à la trompette ( qui fait un peu figure de vétéran), Craig Tanborn au piano et Antonio Sanchez à la batterie ( ce dernier, un sacré client !). Et pour autant alors qu’un tel all-stars pourrait faire craindre un certain endormissement sur de si jeunes lauriers, tous les acteurs de cet album démontrent à l’envie qu’ils ont bien d’autre chose  faire qu’à s’assoupir. Au premier chef, Scott Colley lui même dont on a eu l’occasion d’apprécier maintes fois le jeu si discret et solide et qui s’est attaqué ici à l’écriture de thèmes à la construction remarquable dont la maître mot, l’architecture, n’est point savante mais ici redoutablement efficace. Car s’il est des contrebassistes qui lorsqu’ils font des albums sous leur nom n’ont de cesse que de vouloir toujours passer devant pour devenir un peu soliste, Scott Colley affiche une toute autre conception. La sienne repose tout entière sur l’assise rythmique qu’il partage avec Antonio Sanchez dans des formes au cerescendi irrésistibles, toujours en assise de soliste qui atteignent avec eux une rare mise en lumière. Une sorte de rythmique éclairante ! Et à ce jeu la prestation de Antonio Sanchez à la batterie (le batteur de Metheny que les français ont pu récemment entendre avec Manuel Rocheman)  est proprement ébouriffante. Véritable batteur caméléon capable de se mouvoir du percussionniste au coloriste fin.

De cet album on retiendra quelques beaux moments. Comme les envolées de Grégoire Marret à l’harmonica

Qui rappelle ses chorus inspirés lorsqu’il joue avec Metheny. De même que l’on a eu un coup de cœur absolu pour ce merveilleux trompettiste qu’est Ralph Alessi dont les incises démontrent toujours une rare chaleur de l’instrument et une énergie fougueuse. Tous forment corps dans cette musique qui puise autant dans l’esprit de la musique de Weather report, de Metheny ou encore du Miles de l’époque Wayne Shorter mais en donnant à cette musique toujours acoustique un sérieux coup de booster comme en témoigne l’admirable From Within qui donne l’occasion à David Binney de délivrer un incroyable solo de Soprano ou à un Window of time, véritable pièce maîtresse de l’album de faire tourner des pattern irrésistible et de terminer sur le son trop rare dans l’album du guitariste Adam Rogers toutefois un peu timoré. Et c’est peut être le seul regret  l’écoute de ce vivifiant album. A entendre l’inhabituelle réserve de Jason Moran on aurait peut être attendu des solistes invités qu’ils mordent un peu plus dans leur instrument, se lâchent et suivent d’une même voix celle tracée par Ralph Alessi et par cette belle rythmique. On aurait alors atteint des sommets que l’on a pourtant avec bonheur, approchés ici de très près.

Jean-Marc Gelin

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24 mai 2007 4 24 /05 /mai /2007 22:28

jean-pierre-fourment.jpgJJJ JEAN-PIERRE FOURMENT : « La danse du papillon »

Cristal 2007


Le propos poétique de l’album de Jean Pierre Fourment est évident. Un propos qui privilégie une couleur à la fois douce et tendre. Un parfum de nostalgie légère. Le contrebassiste Jean-Pierre Fourment privilégie en effet un jeu d’archet qui met la mélodie en avant. Chaque acteur de ces longues pièces improvise derrière Fourment qui, à tout seigneur, bénéficie d’une prise de son qui lui est très favorable. A l’exception d’un tromboniste pas toujours à son aise, rien à dire sur cet album. C’est très joliment exécuté et totalement maîtrisé. Everything under control pourrait on dire. On aime l’énergie de Jean-François Angles au ténor qui apporte à cet album sa couleur aux contours plus nets, à la chaleur toute méditerranéenne. Les 5 acteurs de cette pièce en 7 actes s’amusent beaucoup à jouer sur les variations de tempos et gardent sous jacent un swing pas débridé mais plutôt contrôlé. Car fil directeur de cet album, c’est une sorte de grande pudeur qui semble s’en dégager et qui les empêche peut être se livrer totalement. De mordre dedans un peu plus.

On aurait peut être aimé aussi un peu plus de concision pour ce premier album. A la fin du 3° morceau il s’est déjà passé plus de 20mn sur un mode assez linéaire. Mais il est vrai que cette lenteur si elle n’est pas extrêmement pesante est parfois inutile. Ainsi la conclusion de  Makiguchi (12’18) sur un solo de batterie rajoute certainement quelque chose dans l’esprit du compositeur sans que l’auditeur en comprenne réellement la logique compositionnelle ni même l’intention littéraire. Il n’empêche que cet album bien joliment exécuté et dans la forme et dans le fond est un album sans risque que vous aurez le plaisir à entendre. Le doux plaisir d’une rêverie innocente.

Jean-Marc Gelin

 

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23 mai 2007 3 23 /05 /mai /2007 22:31

wonderfu-world-006.jpg

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6 mai 2007 7 06 /05 /mai /2007 23:11

Quel silence !

 

 

 

 

C’est incroyable, dans tout ce vacarme on entend rien. Les candidats ont beau  se battre et se débattre, donner même le coup de poing sur les retraites, sur l’Europe, sur la violence à l’école, sur le chômage, sur les 35 heures, pas un mot sur la culture. Le sujet est définitivement clos comme si l’on avait décrété une fois pour toutes que la culture n’intéressait pas les Français et qu’il ne s’agissait en aucune façon d’un enjeu de société.
Et le pire c’est que ce silence est consensuellement partagé. Prenez par exemple les instances représentatives du jazz. Elles ont eu le grand mérite de se distinguer durant toute cette campagne par une absence assourdissante publiant (après le 1er tour !) et confidentiellement une lettre ouverte mise en ligne on ne sait où.

 

 

Quel Silence !

 

 

 

 

Ces mêmes instances à  qui nous avons proposé d’ouvrir nos colonnes pour qu’elles s’expriment auprès de vous, n’ont pas souhaité utiliser cette possibilité. Ils en assumeront la responsabilité auprès de vous.
Quel silence assourdissant, vraiment ! Nous avons publié sur le site des DNJ le tableau comparatif des propositions des  deux candidats « finalistes» en matière de culture. Nous sommes carrément estomaqués par tant d’audace, de courage politique des candidats sur le sujet : gratuité des musées nationaux pour l’un, renforcement de l’enseignement artistique à  l’université pour l’autre, création d’une haute Autorité pour le pluralisme pour l’une, augmentation des obligations de diffusion culturelle…sur les chaînes publiques pour l’autre. On sent bien que la révolution culturelle du XXIème siècle est en marche ! Tant d’audace culturelle nous laisse sans voix. Le silence de la consternation.

 

 

Et pourtant à  y regarder de plus près c’est au travers de la culture bien plus qu’un  vrai choix de société qui s’offre à  vous. Car enfin, vous qui allez bientôt voter et qui par définition êtes intéressés par la Culture mais qui ne savez pas trop vous déterminer, posez vous simplement ces quelques questions : êtes vous plutôt culture de masse ou culture savante ? Etes vous RTL ou France Inter ? Etes vous Star Ac’ ou Spectacle vivant ? Etes vous Universal ou Harmonia Mundi ? Etes vous Jack Lang ou Donnedieu de Vabre ? Etes vous Verdi à  Bercy ou Martha Argerich à  Pleyel ? Etes vous Théâtre de l’Odeon ou Théâtre de Marigny ? Et finalement puisque c’est bien de cela dont il s’agit, lorsque vous aurez répondu à  ces questions demandez vous juste si la culture s’accommode du libéralisme ?

 

 

Nous ne répondrons pas ici à  votre place. Ce n’est pas le lieu et si le jazz n’est pas que binaire ce n’est pas pour être bipolaire, fort heureusement. Mais si l’on pense à  ceux qui répondent à  propos de cette question sur l’éducation : «Si je veux faire de la littérature ancienne, devrais-je financer mes études ? Vous avez le droit de faire littérature ancienne, mais le contribuable n’a pas forcément à  payer vos études de littérature ancienne si au bout il y a 1000 étudiants pour deux places. Les universités auront davantage d’argent pour créer des filières dans l’informatique, dans les mathématiques, dans les sciences économiques. Le plaisir de la connaissance est formidable mais l’État doit se préoccuper d’abord de la réussite professionnelle des jeunes ». S’impose alors avec évidence pour tous ceux qui comme nous veulent défendre le savoir, l’intelligence et partant l’art comme rempart aux assauts de l’homo economicus sacrifié volontaire sur l’autel de la sacro sainte règle de la rentabilité, l’idée que l’enjeu culturel n’est pas un débat anodin.  Mais une véritable question de civilisation.

 

 


Une question suffisamment grave en tous cas pour éclairer en ce qui me concerne mon choix devant l’urne,
 et rompre à ma manière, dans l’isoloir un peu de cet assourdissant silence

 

 

 

 

 

 

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