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4 octobre 2015 7 04 /10 /octobre /2015 21:22

L’électricité sur « Miles » est une découverte à laquelle les jazzmen ne cessent de se référer depuis la révolution Bitches Brew et la rencontre du trompettiste avec les claviers de Joe Zawinul. Au point que régulièrement sortent dans les bacs des albums résolument inspirés de cette esthétique post 68 où les nuées électriques s’évaporaient dans une sorte d’espace interstellaire.

Cette année, presque coup sur coup deux albums sont venus nous rappeler cette époque finalement pas si révolue que cela, avec plus ou moins d’acuité et surtout une approche radicalement différente.

ANIMATION MACHINE LANGUAGE

RareNoise records 2015

Bob Belden (fl, sax), Peter Clagett (tp), Roberto Verastegui (cl), Bill Laswell (b), Matt Young (dms), Kurt Elling (spoken words)

ELECTRIQUES ET LUNAIRES

Mort d’une crise cardiaque près de 6 mois après l’enregistrement de cet album, le saxophoniste Bob Belden a signé avec « Animation machine language » un album qui possède ce charme désuet d’une musique faite de tramages et de tuilages électriques sans pour autant chercher à renouveler le genre. Le fil conducteur de cet album est l’ensemble des textes (un peu indigents tout de même) que Bob Belden a écrit sur la relation entre la machine et l’humain. On passera vite sur la voix chaude d’un Kurt Elling narrant des formules pseudo philosophiques du genre : « does a machine can dream ? The pure machine begins to dominate the perfect machine etc… » pour rester sur la musique fusionnelle, psychédélique et lunaire où les espaces sont flottants et l’ambiance fascinante. Il y a une réelle fusion entre des musiciens concentrés sur leur sujet, prompt à glisser leurs improvisations sur les nappes sonores avec un trompettiste, Peter Clagett particulièrement inspiré dans son rôle Milesien, trompettiste au son ample. Dans ces tuilages sur lesquels l’immense Bill Laswell donne, à la basse toute l’élasticité en apesanteur, il y a une dimension onirique qui enveloppe son auditeur dans une sorte de rêve sous substance. Une sorte de lenteur en mouvement. Comme un ralenti dans l’espace. Avec en fond de cour, un énorme travail d’assemblage et de composition.

Pas très neuf mais carrément réussi.

LES AMANTS DE JULIETTE s’electrolysent

Quoi de neuf docteur 2015

Serge Adam (tp), Benoît Delbecq (cl, samplers, basss station), Philippe Foch ( tablas, laptop)

ELECTRIQUES ET LUNAIRES

C’est dans un même esprit d’ambiance électrique que le trio des Amants de Juliette s’ouvre aux musiques du monde. L’électricité n’y est plus urbaine mais va puiser à des sources intemporelles. En ce sens c’est un peu comme s’il y avait fusion entre l’esprit de Miles Davis et celui de Don Cherry mais avec une approche fondamentalement moderne. Comme dans le cas de Bob Belden, le trio cherche ici les espaces, les grands espaces. Cherche les juxtapositions des nappes dans une sorte de voyage sonore auquel contribue l’apport évident des tablas de Philippe Foch. Il y a une forme de complémentarité évidente entre les trois musiciens animés chacun par une réelle personnalité musicale différente et pourtant symbiotique. Ça joue à très haut niveau dans tout ce que le trio permet de combinaison différente. Là où Belden puise dans un jazz électrique, le trio porte ce même jazz aux confins du monde porté par des mélismes orientaux, des incises, des mélange acoustiques et électroniques. Les trois s’en donnent à cœur joie, un peu comme de géniaux chercheurs pour s’affranchir de toutes barrières stylistiques et tenter tout ce qui leur passe par la tête comme sur ce morceau où Delbecq que l’on attend électrique mais qui pourtant s’empare du piano pour jouer sur un contraste fascinant.

Musique en éveil, musique en mouvement perpétuel, musique de l’inattendu et de l’impromptu.

Superbe.

Jean-marc Gelin

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